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La combinaison difficile des obligations alimentaires étatiques et du droit à un recours effectif

Section 2.- Les symptômes des conflits de normes sur les opérateurs

A.- La combinaison difficile des obligations alimentaires étatiques et du droit à un recours effectif

241. L’appréhension de l’asymétrie des droits des investisseurs et des droits des victimes d’insécurité alimentaire nécessite d’identifier les obligations alimentaires étatiques (1°) et de saisir

l’insuffisance de justiciabilité alimentaire (2°) constrastant avec celle connue en matière d’investissements internationaux.

1°) L’identification des obligations alimentaires des Etats

242. L’Etat se doit de répondre à ses obligations alimentaires en vertu des textes internationaux et régionaux par lesquels il est engagé et au nom des textes nationaux en fonction du niveau de protection qu’il a entendu mettre en œuvre. L’article 2 du PIDESC renseigne sur les obligations des Etats en matière de justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels :

« 1. Chacun des Etats parties au présent Pacte s'engage à agir, tant par son effort propre que par l'assistance et la coopération internationales, notamment sur les plans économique et technique, au maximum de ses ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le présent Pacte par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l'adoption de mesures législatives.

2. Les Etats parties au présent Pacte s'engagent à garantir que les droits qui y sont énoncés seront exercés sans discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l'opinion politique ou toute autre opinion, l'origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

3. Les pays en voie de développement, compte dûment tenu des droits de l'homme et de leur économie nationale, peuvent déterminer dans quelle mesure ils garantiront les droits économiques reconnus dans le présent Pacte à des non-ressortissants. Les Etats ont l’obligation de respecter, protéger et donner effet aux DESC » (nous soulignons).

Cet article révèle l’ensemble des obligations imposées aux Etats par le PIDESC. Il convient de déterminer la signification de ce contenu normatif.

243. L’obligation d’agir. Elle est indiquée par les termes suivants : « tant par son effort propre que par l'assistance et la coopération internationales » ; « au maximum de ses ressources disponibles » ; « en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le présent Pacte » ; « par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l'adoption de mesures législatives ». L’obligation d’agir signifie que les Etats signataires du Pacte s’engagent à prendre toutes les mesures nécessaires à l’application du droit à l’alimentation en coopérant au niveau international mais aussi en offrant un cadre juridique adéquat à la mise en œuvre de ce droit. L’Etat doit s’assurer que les dispositions légales permettent la réalisation des DESC. Les conditions de l’exercice des droits progressifs et des ressources maximales disponibles laissent penser que les Etats qui n’ont pas un niveau de développement suffisant peuvent déroger à leurs obligations. Dans son observation n°3, le Comité des DESC s’est prononcé sur le sens des dispositions. Il précise à cet égard le terme « progressif » ne doit pas s’interpréter « d'une manière qui priverait l'obligation en question de tout contenu effectif582 ». Dans cette logique, le Comité des DESC insiste sur la démarche dans le

582

Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, Observation générale 9. Application du Pacte au niveau national, 3 décembre 1998, Doc.N.U. E/C.12/1998/24, § 9.

temps, il s’agit d’être en phase avec les réalités, et d’apporter une flexibilité dans l’application des droits. En revanche, le Comité précise que la finalité des dispositions est d’assurer la mise en œuvre des DESC le plus rapidement et efficacement possible583. Il convient alors de s’assurer qu’aucune mesure régressive ne voit le jour, le Comité s’inscrit dans un processus progressiste. Ce dernier a d’ailleurs souligné que des ressources indisponibles ou insuffisantes ne font pas disparaître l’obligation d’agir pour les Etats584.

244. L’obligation de garantir « les droits qui y sont énoncés seront exercés sans discrimination ». L’obligation de garantir que les DESC ne feront l’objet d’aucune discrimination signifie que l’Etat ne doit prendre aucune mesure discriminatoire sur le fondement de « la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l'opinion politique ou toute autre opinion, l'origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ». L’Etat a l’obligation de mettre fin aux situations discriminatoires par l’adoption d’un cadre législatif adéquat. Dans l’affaire Khosa & Ors v Minister of Social Development, la Cour constitutionnelle d’Afrique du sud a estimé que la loi sur l’assistance sociale portait atteinte à l’obligation de non-discrimination par la mise en place d’une disposition d’exclusion des résidents permanents d’une autre nationalité585. L’application du principe de non-discrimination, est une preuve de la justiciabilité des DESC. L’Etat a l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour adapter sa législation en accord avec le PIDESC.

245. L’obligation de respecter. L’obligation de respecter le droit à l’alimentation signifie que l’Etat doit s’abstenir de prendre des mesures qui auraient pour effet de priver l’accès à une nourriture suffisante586. C’est une obligation d’abstention. Dans l’affaire Kenneth George, en Afrique du sud, la Haute Cour de la Province de Cape of Good Hope s’est prononcée sur l’obligation de respecter le droit à l’alimentation587. En l’espèce, une communauté de pêcheurs avait saisi la Haute Cour pour faire valoir la violation de l’obligation de respecter le droit à l’alimentation et de ne pas prendre de mesures régressives. Ces pêcheurs avaient perdu l’accès à la mer après l’adoption d’une loi sur les ressources marines. La Cour a considéré que la violation du droit à l’alimentation était avérée et ordonnée d’une part, l’accès immédiat des pêcheurs à la mer, et d’autre part, la révision de la loi sur les ressources marines. Cette affaire prouve la justiciabilité du droit à l’alimentation à l’échelle nationale et le contrôle des juridictions quant à la mise en œuvre de ce droit.

583 Ibid. 584 Ibid., § 11. 585

South Africa, Constitutionnel Court Khosa and Others v. Minister of Social development and Others, 2004, (6) BCLR 569 (CC), 4 march 2004, Cit in Ch. GOLAY, Droit à l’alimentation et accès à la justice, Bruyant, 2011, p.118.

586

Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, op. cit., §15.

587 High Court of South Africa (Cape of Good Hope Provincial division), Kenneth George and Others v. Minister of

246. L’obligation de protéger. Cette obligation impose aux Etats de s’assurer et de prendre des mesures pour qu’aucune entreprise ou particuliers ne privent des individus de l’accès à une nourriture suffisante588. Par exemple, dans l’affaire Aguas Argentinas c. Argentine589, l’État avait pris des mesures nécessaires pour garantir le droit à l’eau de sa population, ce qui avait eu pour effet des priver les investisseurs de certains de leurs droits protégés par le traité bilatéral d’investissement France-Argentine590. Cette affaire enseigne que la volonté étatique de protéger et d’appliquer le droit à l’alimentation ne suffit pas pour assurer la concrétisation de la sécurité alimentaire. Le droit à l’alimentation s’inscrit dans un corpus de règles internationales qui peuvent entrer en contradiction. La résolution des conflits de normes est donc essentielle et pourrait conduire à une amélioration du sort des victimes d’insécurité alimentaire.

247. L’obligation de donner effet. Dans son observation générale n°9, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels estimait que la principale obligation des Etats partie aux Pacte est de donner effet aux droits qui y sont consacrés591. Le Comité apporte des précisions sur cette obligation dans l’observation générale n°12 en soulignant que les Etats ont l'obligation de prêter assistance et celle de distribuer des vivres pour garantir la réalisation du droit à l’alimentation592. Par cette obligation, les Etats s’engagent à faciliter l’exercice du droit à l’alimentation593.

2°) L’insuffisance de la justiciabilité alimentaire

248. « L’idéal légaliste contredit, dans l’homme et dans la société, des tendances trop fondamentales; dans la réalité humaine et sociale qui s’exprime dans les systèmes juridiques modernes se rencontrent des instincts antagonistes : besoin d’ordre et de régularité, mais aussi de propension au compromis et à l’indulgence qui inclinent les règles de droit à une ineffectivité naturelle594 »

249. La notion de justiciabilité. Traditionnellement, la justiciabilité désigne « le caractère de ce qui est susceptible de relever des juges ou de leur juridiction595 ». Elle est « l’aptitude d’une norme à recevoir une application judiciaire596 ». Le cœur de la justiciabilité repose donc sur le droit d’accès au juge et aux juridictions. La justiciabilité détient des frontières poreuses avec l’accès

588

Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, op. cit., §15.

589

CIRDI, Aguas Argentinas c. Argentine, aff. n°ARB/03/19, Decision on liability, 30 juillet 2010.

590

Infra §274 et s.

591

Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, op. cit., §1.

592

Ibid., §15.

593

Ibid.

594

J. CARBONNIER, Flexible Droit, Paris, LGDJ., 5è éd., 1983, p. 125 à propos de l’effectivité et l’ineffectivité de la règle de droit.

595

J. SALMON (dir.), Dictionnaire de droit international public, p. 635.

596

J.-F. AKANDJI-KOMBE, « La justiciabilité des droits sociaux et de la charte sociale européenne n’est pas une utopie » in L'Homme dans la Société Internationale, Mélanges en l’honneur du Professeur Paul Tavernier, Bruylant, 2013, p. 4.

à la justice qui permet « à toute personne, qui y a un intérêt légitime et qui présente la qualité éventuellement requise, d'accéder à une juridiction pour que celle-ci statue sur sa prétention. L'accès à la justice est donc la condition antérieure au droit d'action et à la demande en justice597 » . La reconnaissance des droits par les Etats doit être mise en œuvre de telle façon que les justiciables puissent s’en prévaloir en justice. La mise en œuvre de la justiciabilité du droit à l’alimentation ne peut avoir lieu sans une protection et une reconnaissance substantielle. Toutefois, cette consécration du droit à l’alimentation en droit international ne permet pas une véritable protection des victimes de l’insécurité alimentaire dès lors que les aliments et l’eau peuvent être assimilés à des marchandises comme les autres598. Comment la justiciabilité peut-elle se réaliser si l’accès au juge est assuré mais que le droit à l’alimentation dans un Etat n’est pas porteur d’une protection à la hauteur des enjeux que soulève la sécurité alimentaire ?

250. La justiciabilité suppose au moins deux conditions : un texte juridique sur lequel s’appuyer et la possibilité d’obtenir un recours effectif sur le fondement de ces textes.

251. L’existence des fondements textuels. Les fondements de base de la sécurité alimentaire ont déjà été appréhendés599. Nous ne reviendrons donc pas sur l’ensemble de cet arsenal juridique. Pour autant, il convient de mentionner l’importance de cette condition en vue d’obtenir un recours effectif.

252. Le droit à un recours effectif. Il a été dit que « la justice est une dette de la société, et l’égalité exige que celui qui n’a rien puisse demander justice comme celui qui a600 ». Si l’on transpose ces termes aux droits des victimes d’insécurité alimentaire et aux droits des investisseurs, un déséquilibre net survient entre le droit de recours des victimes de violation de leur droit de propriété et le droit de recours des victimes d’insécurité alimentaire. Pourtant, en matière alimentaire, les textes existent. Le droit à un recours effectif est consacré dans plusieurs textes en droit international : les articles 8 et 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), énoncent respectivement que :

Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la constitution ou par la loi (art.8).

597

M.-A FRISON-ROCHE, « Le droit d'accès à la justice et au droit », in R. CABRILLAC, M.-A FRISON-ROCHE, T. REVET (dir.), Libertés et droits fondamentaux, 18ième éd, Dalloz, 2012, Paris, p. 525.

598

Infra. § 532 et s.

599

Supra § 58 et s.

600

Rapport par M. Bergasse sur l’organisation du pouvoir judiciaire lors de la séance du 17 août 1789, reproduit dans

Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (art.10)

Ensuite, dans ses obligations générales n°9 et 12, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels reconnaît respectivement que :

Toute personne ou groupe lésés doit disposer de moyens de réparation, ou de recours, appropriés » et les moyens nécessaires pour faire en sorte que les pouvoirs publics rendent compte de leurs actes doivent être mis en place (Obligation n°9)601.

Toute personne ou tout groupe qui est victime d’une violation du droit à une nourriture suffisante devrait avoir accès à des recours effectifs, judiciaires ou autres, aux échelons tant national qu’international. Toutes les victimes de telles violations ont droit à une réparation adéquate, indemnisation, gain de cause ou garantie de non-répétition. Les médiateurs nationaux et les commissions nationales des droits de l’homme devraient prêter attention aux violations du droit à l’alimentation (Obligation n°12)602.

Dans cette perspective, les Etats membres du PIDESC ont l’obligation d’assurer le droit à l’alimentation603 ce qui passe par le droit à un recours effectif à disposition des victimes604 et le respect des obligations alimentaires par les Etats.

253. La justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels (DESC) : Le droit à l’alimentation fait partie des droits économiques, sociaux et culturels605 au côté du droit au travail, à la santé, à l'éducation, au logement et à la sécurité sociale. D’emblée, on peut s’étonner de la place accordée à ce droit pourtant vital pour l’Homme qui n’apparaît pas être la priorité des droits alors qu’il est de toute évidence la priorité pour l’Homme avant toute autre activité. Le décor juridique révèle l’importance accordée à l’alimentation, si bien que dans ce domaine, le droit ne correspond pas au réel. Pour certains Etats, le droit à l’alimentation constitue un droit justiciable. Pour d’autres, cette justiciabilité n’est pas souhaitable. Les droits civils et politiques disposent d’un Protocole avec une procédure qui permet de déposer des plaintes et donc de rendre effectif ces droits. En revanche, rien de tel n’avait été prévu pour les droits économiques, sociaux et culturels dont le droit à l’alimentation est pourtant une composante. A cet égard, le sort des victimes du droit à l’alimentation demeurait posé. Aucune procédure en cas de violation à ce droit n’était envisagée à l’échelle internationale dévoilant une distinction de traitement regrettable et un droit à l’alimentation « relégué

601

Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies, Observation générale 9. Application du Pacte

au niveau national, 3 décembre 1998, Doc.N.U. E/C.12/1998/24, §2.

602

HRI/GEN/1/Rev.9 (Vol.I), 27 mai 2008, p. 73, sur l’Observation générale n°12 du 12 mai 1999, E/C.12/1999/5.

603

Voy. A. MAHIOU et F. SNYDER (dir.), La sécurité alimentaire - Food Security and Food Safety, Martinus Nijhoff, Leiden, Boston, 2006, p. 257.

604

Ibid.

605

Voy. O. De SCHUTTER, « Economic, Social and Cultural Rights as Human Rights : An Introduction », CRIDHO

au second rang »606. Pourtant, les droits de l’Homme sont dits indivisibles607, universels608, interdépendants609, complémentaires610, parfois concurrentiels611 et intangibles612. En 2008, le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a instauré une procédure permettant aux victimes du droit à l’alimentation de déposer plainte613. Si c’est un premier pas vers une justiciabilité des DESC, il n’en reste pas moins que cette démarche demeure insuffisante, comme son nom l’indique le Protocole reste dépourvu de contrainte.

606

H. ELVER, Accès à la justice et droit à l’alimentation: la marche à suivre, Rapport de la Rapporteuse spéciale sur le droit à l’alimentation, Conseil des droits de l’homme, A/HRC/28/65, Vingt-huitième session, Point 3 de l’ordre du jour, Promotion et protection de tous les droits de l’homme, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, y compris le droit au développement,12 janvier 2015, p. 4.

607

Le terme indivisible peut être traduit par « inséparable », il faut percevoir les droits de l’Homme comme un tout. Nuire à un droit de l’Homme revient à nuire à l’ensemble des droits de l’Homme, cela amène à penser que chaque droit de l’Homme à la même force. D’emblée, il apparaît difficile de croire que le droit à la vie aurait la même force que le droit au logement, qui est un droit reconnu en France et non pas à l’échelle européenne, il y a une diversité de force selon la géographie. Cela dévoile une faiblesse dans le principe d’indivisibilité. Si l’indivisibilité des droits de l’Homme est affirmée avec force, elle apparaît à bien d’égard affaiblie lorsque l’on étudie de près les droits les plus essentiels, une indivisibilité parfaite des droits de l’Homme est utopique.

608

Les droits de l’Homme devraient être universels puisqu’ils sont inhérents à l ’Homme. Les droits à l’eau et à l’alimentation semblent difficiles à réfuter, ces éléments sont vitaux pour l’ensemble des Hommes. Si leur caractère universel apparaît donc irréfutable en théorie, leur reconnaissance comme droit de l’Homme, notamment sur la base de leur universalité a fait l’objet d’un chemin épineux.

609

Les droits de l’Homme sont interdépendants, ils sont liés les uns aux autres. La promotion des droits civils et politiques devait être une promotion pour les droits économiques et sociaux. Aucune hiérarchie n’est établie, ce qui vient s’opposer à l’idée que les droits et libertés les plus importants sont ceux qui ont été proclamés en premier, les droits de l’Homme seraient bel et bien un ensemble, et dans ce tout, des droits seraient hiérarchisés laissant apparaître une dichotomie des droits. Pour d’autres, les droits sont nécessairement interdépendants, « la prise en compte de l’effectivité des droits montre que tous les droits sont fondamentalement de même nature, qu’ils sont à la fois complémentaires et interdépendants ». Voy. M-J REDOR-FICHOT « L’indivisibilité des Droits de l’homme », Centre de recherche sur les droits fondamentaux

et les évolutions du droit (CRDFED) n°7, 2009, p. 80. Si cette interdépendance a été consacrée par de nombreux auteurs, elle est à relativiser pour d’autres, « l'affirmation de principe de l'indivisibilité et de l'interdépendance des droits de l'homme ne doit pas masquer le fait que tous les droits de l'homme proclamés par les conventions internationales ne bénéficient pas du même régime juridique». Voy. F. SUDRE, « Droits de l’homme», Rep. de droit international, 2004, Section 2, Art 1.

610

Si les droits fondamentaux peuvent être opposés, et se concurrencés, il n’en reste pas moins complémentaire. Le droit à la vie ne peut pas se réaliser sans le droit à l’eau et à l’alimentation. Certaines fois, un droit est exercé au côté ou dans le prolongement d’un autre. Une distinction est faite entre les « libertés-droits » et « les libertés-moyens ». Les «libertés-

droits sont le socle des prérogatives reconnues aux individus, nécessaire à leur épanouissement » alors que «les libertés- moyens sont des droits secondaires destinés à protéger les droits précédents. Il les prolongent ». Voy. J. FIALAIRE, E.

MONDIELLI, Droits fondamentaux et libertés publiques, Université Droit, Ellipses, 2005, p 19. D’autres auteurs préfèrent la distinction entre les « libertés fondamentales liées à la personne » et « les libertés dérivés». Voy. J. MORANGE, Théorie générale des libertés publiques, thèse, 1940, in J. FIALAIRE, E. MONDIELLI, Droits

fondamentaux et libertés publiques, Université Droit, Ellipses, 2005, p. 19.

611

Les droits de l’Homme peuvent être en concurrence, ce qui s’oppose aux idées reçues sur l’indivisibilité qui en ferait leur nature. Dans certains cas, le juge doit choisir entre deux droits de l’Homme. La difficulté est de choisir la primauté d’un droit sur un autre, lorsque la liberté d’entreprendre s’oppose au droit à l’eau, le juge s’en remet au droit. Si l’un des droits est substantiellement mieux protégé qu’un autre, il sera choisi.

612

Les droits de l’Homme ne peuvent faire l’objet de restrictions et l’Etat doit assurer qu’on y porte pas atteinte. L’article 15§2 de la Convention européenne des droits de l’Homme prévoit cinq droits intangibles, le droit à l’alimentation n’y figure pas. Voy. F. SUDRE, « La dimension internationale et européenne des libertés et droits fondamentaux », in R. CABRILLAC, M.-A . FRISON-ROCHE, T. REVET, Liberté et droits fondamentaux, 2009, Dalloz, p. 44. Le Pacte international sur les droits civils et politiques ajoute d’autres droits intangibles, sans élever le droit à l’alimentation à ce

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