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L'enseignement de la grammaire à l'école primaire : comment susciter l'intérêt des élèves du cycle moyen ?

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Master

Reference

L'enseignement de la grammaire à l'école primaire : comment susciter l'intérêt des élèves du cycle moyen ?

GREMION, Sarah

Abstract

Ma recherche s'inscrit dans une nécessité, en tant qu'enseignante, de rendre la grammaire plus attractive aux yeux des élèves et des enseignants. En effet, il est primordial que les élèves y reprennent goût, car il s'agit d'une composante essentielle de la communication.

Mais encore faut-il que les enseignants en aient une image positive ... Mon premier objectif est de soumettre l'image négative dépeinte au secondaire par la littérature, aux discours d'enseignants primaires. Dans un second temps, je cherche à faire le point sur les manières de motiver les élèves face à la grammaire. J'ai donc réalisé une séquence didactique dans une classe de 7PH, sur la notion d'attribut du sujet. Ceci m'a alors permis de mettre à l'épreuve certains aspects tirés des méthodes inductives, jugées propices à la motivation. A travers cette expérimentation, j'ai pu dégager quelques pistes quant aux supports, types de tâches et méthodes d'enseignement à privilégier pour motiver les élèves en grammaire.

GREMION, Sarah. L'enseignement de la grammaire à l'école primaire : comment susciter l'intérêt des élèves du cycle moyen ?. Master : Univ. Genève, 2018

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:102797

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L’enseignement de la grammaire à l’école primaire : comment susciter l’intérêt des élèves du cycle moyen ?

Etude de cas concernant l’attribut du sujet en 7PH

MÉMOIRE RÉALISÉ EN VUE DE L'OBTENTION DE LA MAÎTRISE UNIVERSITAIRE EN ENSEIGNEMENT PRIMAIRE (MAEP)

PAR

SARAH GREMION

Directrice du mémoire Ecaterina Bulea Bronckart – FAPSE, Université de Genève Membres du jury Martine Panchout-Dubois – Haute Ecole Pédagogique Vaud

Alexia Forget – FAPSE, Université de Genève

Genève, Janvier 2018

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Résumé

Ma recherche s’inscrit dans une nécessité, en tant qu’enseignante, de rendre la grammaire plus attractive aux yeux des élèves et des enseignants. En effet, il est primordial que les élèves y reprennent goût, car il s’agit d’une composante essentielle de la communication. Mais encore faut-il que les enseignants en aient une image positive ... Mon premier objectif est de soumettre l’image négative dépeinte au secondaire par la littérature, aux discours d’enseignants primaires. Dans un second temps, je cherche à faire le point sur les manières de motiver les élèves face à la grammaire. J’ai donc réalisé une séquence didactique dans une classe de 7PH, sur la notion d’attribut du sujet. Ceci m’a alors permis de mettre à l’épreuve certains aspects tirés des méthodes inductives, jugées propices à la motivation. A travers cette expérimentation, j’ai pu dégager quelques pistes quant aux supports, types de tâches et méthodes d’enseignement à privilégier pour motiver les élèves en grammaire.

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Remerciements

Je tenais à remercier les personnes sans qui je n’aurais probablement pas pu réaliser ce mémoire.

Un grand merci tout d’abord à ma directrice de Mémoire ; Mme Ecatarina Bulea Bronckart qui a parfaitement su m’accompagner durant toute la réalisation de ce mémoire. Je vous remercie pour vos relectures, vos conseils, votre écoute attentive, votre compréhension, votre capacité à me rassurer lors des moments de doute, ainsi que pour toutes les discussions qui ont étayé ma réflexion sur le sujet.

Je remercie également Mme Martine Panchout-Dubois et Mme Alexia Forget d’avoir accepté d’être les membres de mon jury.

Merci à mon Directeur, Mr Augustin Perez, de m’avoir donné l’autorisation de réaliser cette recherche au sein de son établissement.

Merci à mes collègues enseignants de m’avoir permis de recueillir leurs propos durant les entretiens. Merci également à ma duettiste ; Mme Nathalie Perreira Lapaire, ainsi qu’à tous mes collègues de m’avoir soutenue durant cette première année d’enseignement.

Merci aux parents d’élèves concernés d’avoir donné leur autorisation pour utliser le discours de leurs enfants dans le cadre de ma recherche.

Merci à Mme Isabelle Cervo, Mr François Cervo, Mme Tatiana Leroux, Mme Prisca Tschakala et Mr Julien Cervo pour vos précieuses relectures.

Je souhaiterais également remercier mes parents, ma petite sœur, ma grand- mère, mon compagnon ainsi que ses parents, de m’avoir soutenue face aux obstacles de cette période difficile, de m’avoir encouragée, permis de prendre du recul, et de reprendre confiance en moi.

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A mon grand-père, avec qui j’aurais aimé partager ce travail.

Merci de veiller sur moi, même depuis les étoiles.

A mes parents qui, malgré leurs propres obstacles à surmonter, sont toujours présents dans les moments importants de ma vie.

Merci de m’avoir transmis votre persévérance.

A mon compagnon, qui sait toujours m’apaiser dans les moments difficiles.

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Table des matières

Introduction ... 10

Première partie : éléments théoriques et conceptuels ... 12

1. L’enseignement rénové de la grammaire ... 12 1.1 De l’enseignement traditionnel à l'enseignement rénové de la

grammaire ... 12 1.1.1 Les origines de la grammaire traditionnelle ... 12 1.1.2 Des caractéristiques aux critiques de la grammaire traditionnelle : les raisons de la création d’une nouvelle grammaire ... 15 1.2. La nécessité d’une nouvelle grammaire : des objectifs visés à la mise en place de l’enseignement rénové de la grammaire ... 18 1.2.1 Objectifs actuels de l’enseignement rénové ... 21 1.2.2 Des caractéristiques aux critiques de la grammaire traditionnelle : les raisons de la création d’une nouvelle grammaire ... 24 1.3 Comment enseigner la grammaire rénovée et à partir de quelles

ressources ? ... 25 1.3.1 Trois caractéristiques fondamentales de l’enseignement de la

grammaire rénovée ... 26 1.3. 2 Principes pédagogiques de la grammaire rénovée ... 27 1.3. 3 La démarche de type inductif au service de l’enseignement de la

grammaire ... 29 1.4. Liens avec les prescriptions officielles de l’Institution scolaire et les

moyens d’enseignement ... 36 1.4. 1 Dans le Plan d’Etudes Romand ... 36 1.4.2 Document d’orientation à l’intention des enseignants de l’école

obligatoire de la Suisse romande ... 39 1.4. 3 Dans les moyens d’enseignement ... 42 1.5. Problème ouvert concernant l’enseignement de la grammaire

rénovée ... 49

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1.5. 1 Projet trop ambitieux ? ... 50

1.5. 2 Décalage entre intentions et pratiques ... 51

1.5. 3 Problème de transposition didactique ... 52

1.5. 4 Manque de clarté ? ... 53

1.5. 5 Limites des démarches préconisées ... 53

2. L’image de la grammaire au coeur des représentations des enseignants et des élèves ... 54

2 .1 Les représentations des élèves ... 55

2 .2 Les représentations des enseignants ... 56

3. Pourquoi est-il nécessaire de motiver les élèves pour apprendre ? . 58 3.1 La motivation scolaire ... 58

3. 1. 1 Le rôle de la motivation dans les apprentissages ... 59

3. 1. 2 La dynamique motivationnelle de l’élève (Viau) ... 59

3. 1. 3 La motivation selon Vianin ... 64

3. 1. 4 L’usage des TIC ... 70

3.2 Motivation et grammaire ... 72

3. 2. 1 Constats sur la motivation en grammaire ... 72

3. 2. 2 Pistes avancées par Leeman (1996) pour motiver les élèves en grammaire. ... 73

Deuxième partie : éléments méthodologiques ... 77

1. Problématique ... 77

2. Questions de recherche et hypothèses ... 78

2. 1 Première question de recherche ... 78

2. 2 Deuxième question de recherche ... 79

2. 3 Troisième question de recherche ... 80

3. Méthodologie ... 81

3. 1. Contexte ... 81

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3. 2 Types de données ... 83

3. 2. 1 Entretiens avec les enseignants ... 83

3. 2. 2 Expérimentation de la séquence d’enseignement ... 84

3. 2. 3 Entretiens avec les élèves ... 84

3. 3 La notion étudiée : l’attribut du sujet ... 85

3. 3. 1 Justification du choix de la notion ... 85

3. 3. 2 Définition ... 86

3. 3. 3 Difficultés de la notion ... 88

3. 3. 4 L’attribut du sujet dans le PER (2010) ... 88

3. 3. 5 L’attribut du sujet dans les moyens d’enseignement ... 89

3. 4 Ingénierie didactique de la séquence proposée ... 93

3. 5 Synthèse ... 101

Troisième partie : Analyse des résultats ... 102

1. Discours des enseignants ... 103

1. 1 Analyse du discours des enseignants ... 103

1. 2 Conclusion en lien avec la première question de recherche ... 113

2. Les tâches réalisées ... 115

2. 1 Réalisation de l’activité 1 : tâche de manipulation (a) ... 115

2. 2 Analyse de l’activité 1 (tâche a) ... 122

2. 3 Réalisation de l’activité 2 : tâche de manipulation (b) et tâches de discrimination (a, b, c) ... 126

2. 4 Analyse de l’activité 2 ... 133

2. 5 Réalisation de l’activité 3 : tâche de discrimination (d) et tâche de production ... 136

2. 6 Analyse de l’activité 3 ... 141

2. 7 Conclusion en lien avec la question de recherche ... 144

3. Les supports utilisés ... 148

3. 1 Compte rendu sur les supports utilisés ... 148

3. 2 Analyse des supports utilisés ... 152

(10)

3. 3 Conclusion en lien avec la question de recherche ... 154

Conclusion ... 156

1. Les impacts des types de tâches et des supports sur la motivation des élèves ... 156

2. Les enseignants et la grammaire déductive ... 159

3. Quelques principes généraux ... 160

3. 1 L’utilisation d’un processus inductif par moments …. ... 160

3. 2 … et le recours à une démarche plus traditionnelle à d’autres moments. ... 161

3. 3 Quels principes retirer de ces conclusions ? ... 162

BIBLIOGRAPHIE ... 167

ANNEXES ... 171

Annexe 1 : canevas des entretiens avec les enseignants ... 171

Annexe 2 : canevas des entretiens avec les élèves ... 172

Annexe 3 : précisions cantonales du PER ... 173

Annexe 4 : guide pédagogique de Ile aux mots page 74 ... 174

Annexe 5 : livre de l’élève pages 139-140 ... 175

Annexe 6 : cahier d’exercice Ile aux mots page 46 ... 177

Annexe 7 : fiches d’exercices COROME ... 178

Annexe 8 : mémento COROME ... 182

Annexe 9 : affichages et fiche de suivi de tournus (activité 3 – ateliers) .... 185

Annexe 10 : règles des jeux de cartes (activité 3 – ateliers) ... 188

Annexe 11 : retranscription de l’entretien avec l’enseignant E1. ... 189 Annexe 12 : retranscription de l’entretien avec l’enseignant E2. ... Erreur ! Signet non défini.

Annexe 13 : retranscription de l’entretien avec l’enseignant E3. ... Erreur ! Signet non défini.

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Annexe 14 : retranscription des entretiens avec les élèves – activité 1 . Erreur ! Signet non défini.

Annexe 15 : retranscription des entretiens avec les élèves – activité 2 Erreur ! Signet non défini.

Annexe 16 : retranscription des entretiens avec les élèves – activité 3 . Erreur ! Signet non défini.

Annexe 17 : retranscription des entretiens avec les élèves – question finale Erreur ! Signet non défini.

Annexe 18 : tableau réccapitulatif des données recueillies durant les

entretiens avec les élèves ... 189

Note : les annexes 11 à 17 ont été enlevées dans la version

électronique publique pour des raisons de confidentialité.

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Introduction

Durant les stages et remplacements effectués au cycle moyen, j’ai remarqué que la grammaire était généralement considérée comme un fardeau par les élèves mais aussi parfois même, par les enseignants. Pour certains, il semble s’agir d’un objet d’enseignement certes obligatoire mais dont ils remettent en question l’utilité dans la pratique effective et face au public d’élèves qu’ils ont aujourd’hui. La grammaire comme étant problématique semble être une image souvent véhiculée par la société actuelle. Selon Bronckart (2003, p. 5), l’enseignement des langues a toujours été objet de débats et on émet souvent un « diagnostic de crise » le concernant. Les interprétations des études PISA sont souvent à l’origine de ces inquiétudes, et rendent la situation toujours plus alarmante (Burger, 2010). A cela, s’ajoute un constat d’une maîtrise « médiocre » des termes de grammaire chez les élèves (Bronckart, 2016, p. 16). Ainsi, la complexité de la grammaire vraisemblablement combinée au peu d’attrait qu’elle suscite, serait telle que les élèves n'arrivent pas à la maîtriser suffisamment bien.

A partir de ces “impressions”, je souhaitais, dans un premier temps connaître les réelles représentations des enseignants sur l’enseignement de la grammaire : que pensent-ils de cet objet d’enseignement ? Est-il si “barbant”

qu’on le laisse entendre ? Comment font-ils pour l’enseigner et le rendre plus

“vivant” ? Par la suite, ces questions m’ont finalement poussée à me demander si le “problème“ de l’enseignement de la grammaire ne relevait non pas du contenu, mais davantage de la manière de l’aborder. Le souvenir des fiches de grammaire redondantes me revenait alors en mémoire : pourrait-on envisager d’enseigner la grammaire d’une manière plus ludique, qui permettrait de motiver davantage élèves et enseignants ? C’est à partir de cette interrogation que s’est construite ma problématique. En effet, à travers ce mémoire, mon objectif est déjà de définir précisément les représentations des enseignants à l’école primaire, vis-à-vis de ce qu’en dit la littérature. Il s’agit également et surtout de tenter de trouver des pistes concrètes et réalisables afin de susciter l’intérêt des élèves pour la grammaire, facilitant, de cette manière, leurs apprentissages. Il me semble effectivement important que les élèves reprennent goût à ce domaine de la discipline du français car, bien qu’ils ne s’en rendent pas encore compte, il est essentiel pour communiquer de manière adéquate. Bronckart (2005, p. 9) affirme d’ailleurs qu’il s’agit d’ « un facteur décisif de réussite aussi bien scolaire que sociale ». Afin de répondre à ces préoccupations, j’ai décidé d’interroger des enseignants de 7PH sur leurs représentations de la grammaire et de son attrait ainsi que de mettre en place une séquence didactique

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motivante pour les élèves, au sein de ma classe de 7PH, en me focalisant sur la notion de l’attribut du sujet, dans le but de répondre à ma problématique : Comment susciter l’intérêt des élèves au cycle moyen pour la grammaire ? Les éléments recueillis devraient pouvoir me donner des indications permettant de réguler mon enseignement actuel de la grammaire. Dans la mesure où celui-ci a subit beaucoup de changements, il peut être difficile, en tant qu’enseignant de s’y retrouver. En tenant compte de la grammaire rénovée ainsi que des nouveaux dispositifs d’apprentissage qui émergent, cette recherche pourrait permettre de "faire le point" sur les supports, les modalités sociales de travail, les types de tâches (identification, manipulation, production), les gestes professionnels, les mises en œuvre de l’enseignant, qui donnent le plus envie aux élèves de rentrer dans l’apprentissage des notions grammaticales. Tout en restant modeste, ce recueil de pratiques "ludiques"

d’enseignement de la grammaire, pourrait alors être utilisé par les enseignants dans leur pratique effective. En effet, ce travail fait écho a un réel besoin, pour ma part, de constituer un tel recueil car il me permettrait d’une part d’être plus à l’aise dans l’enseignement de la grammaire et d’autre part de tenter d’amener les élèves à être eux aussi plus "preneurs" de ce domaine du français II.

Je traiterai cette problématique en m’appuyant tout d’abord sur plusieurs éléments théoriques et conceptuels de l’enseignement de la grammaire : le passage de l’enseignement de la grammaire traditionnelle à la grammaire rénovée, les caractéristiques de cette nouvelle grammaire et les démarches en lien, ainsi que les nouveaux problèmes qui ont pu en découler. Les représentations des enseignants et des élèves de la grammaire seront également décrites en prenant appui sur les recherches réalisées sur ce sujet, au secondaire. J’aborderai ensuite les facteurs motivationnels qui entrent en jeu dans l’enseignement de la grammaire.

Dans la seconde partie de ce travail, la problématique ainsi que les questions de recherche et hypothèses seront détaillées. La méthodologie utilisée sera présentée à travers la description du contexte et du type de données récoltées. Je définirai ensuite la notion grammaticale choisie : l’attribut du sujet. Après avoir présenté et justifié la séquence didactique prévue, je ferai le point sur les difficultés anticipées.

Au fil de la troisième partie, les résultats recueillis seront décrits et analysés.

Cette analyse permettra de mettre en lumière les éléments probants ou non et de mettre en avant quelques principes généraux dans la conclusion finale.

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Première partie : éléments théoriques et conceptuels

1. L’enseignement rénové de la grammaire

Afin de permettre au lecteur de comprendre davantage les enjeux sous- jacents aux questionnements qui seront présentés ultérieurement, il semble pertinent de retracer l’évolution de la grammaire afin d’aboutir à une définition ainsi qu’aux objectifs visés par la grammaire dite rénovée. Une présentation des directives de l’Institution scolaire permettra ensuite de mettre en lumière certains “décalages” au sein de cette approche.

1.1 De l’enseignement traditionnel à l'enseignement rénové de la grammaire

Le passage de l’un à l’autre s’inscrit dans un plan de rénovation de l’enseignement de la discipline français dans son ensemble, dont la plupart des travaux concernent l’enseignement de la grammaire.

1.1.1 Les origines de la grammaire traditionnelle

Dans leur ouvrage Repenser l’enseignement des langues : comment identifier et exploiter les compétences, Bronckart, Bulea & Pouillot (2005) mettent en évidence deux anciennes configurations didactiques opposées, qui seraient d’ailleurs à l’origine des problématiques actuelles de l’enseignement de la grammaire, selon eux.

D’après la première configuration décrite par les auteurs (p. 11);

(...) les structures d’une langue constituent des manifestations directes et fidèles de la “Logique” censée organiser le monde; elle soutenait en conséquence que la maîtrise de la grammaire codifiant ces structures constitue une condition du développement des connaissances en même temps que des capacités langagières.

A partir de cette idée, le latin fut donc considéré comme langue unique jusqu’à la Renaissance. C’est à cette époque, que la Grammaire de Port- Royal 1 , selon laquelle il s’agissait de développer simultanément les

« capacités de pensée » et « les capacités langagières » est apparue. Cette nouvelle approche produit alors les grammaires scolaires traditionnelles. Selon certains auteurs, ces grammaires ne permettent pas de « (...) rendre compte

1 Arnauld & Lancelot, 1660 / 1973 cité par Bronckart, Bulea & Pouillot, 2005, p. 11.

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de l’organisation effective du français tel qu’il se pratique. » (p.11). Dans la mesure où l’approche de la Grammaire de Port-Royal ne serait pas adéquate à une utilisation en classe, les grammaires scolaires vont “se mélanger” à des grammaires dites « normatives » (p. 11). Ce type de grammaire donne à voir une langue “idéale” utilisée par les grands auteurs.

Dès lors, va se construire l’idée selon laquelle cette langue doit indéniablement s’appuyer sur « (...) une solide maîtrise de grammaire traditionnelle. » (p. 12). Le schéma résultant de cette grammaire est alors le suivant : il est nécessaire de s’entraîner en réalisant des exercices de grammaire et diverses lectures, dans le but de maîtriser les « règles grammaticales et normatives » (p. 12), pour ensuite atteindre l’objectif final;

accéder aux “bons” auteurs. Cette conception laissait alors de côté l’étude des situations de communications “réelles”. Le maître, quant à lui, avait pour fonction d’assurer le caractère indiscutable des règles grammaticales face aux élèves en adoptant un enseignement déductif, que Bronckart, Bulea &

Pouillot (2005, p. 12) qualifient même de « frontal ». Les auteurs soulignent également les répercussions de cette grammaire scolaire quant à l’accès aux savoirs. En effet, les écarts entre les différents niveaux socio-économiques se sont alors creusés au profit des classes sociales les plus aisées : les plus défavorisées n’avaient donc pas accès au savoir grammatical, et a fortiori à la culture, à travers la lecture d’ouvrages de grands auteurs.

La seconde configuration était soutenue par moins d’auteurs que la première et ces derniers étaient qualifiés d’ « utopistes » (p. 12). Contrairement à la première configuration, les disciples de la deuxième considéraient les variations et la diversité de la langue et réfutait l’idée d’une langue unique et unifiée. Pour certains, face à un seul monde, un lien entre les structures langagières et celles de description de ce dernier ne pouvait donc pas exister. Plus tard, Saussure permettra de crédibiliser cette idée, à travers l’émergence de ce que Bronckart, Bulea & Pouillot (2005, p.13) nomment

« une véritable linguistique » et qui sera encore développée au cours du 17ème siècle. Mais au départ, c’est notamment à travers le discours de Comenius (1657) que cette approche s’est imposée. Cet auteur a proposé la création d’écoles publiques afin de lutter contre l’élitisme, permettre l’accès au savoir à une plus large partie de la population et ainsi donner à l’école une mission de socialisation égalitaire des individus. Comenius se positionnait contre les démarches déductives de la première approche en postulant que l’enfant avait en lui toutes les capacités nécessaires pour apprendre. D’après lui, il était nécessaire d’appuyer la progression de l’enseignement sur ces dernières, tout en prenant en considération les centres d’intérêt des élèves.

Cela permettait alors selon lui de “faire parler” les élèves et ainsi mobiliser le

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langage en situation de communication réelle. Il s’agit finalement des prémices des démarches de types inductives dans la mesure où l’on suivait le processus suivant : « observer d’abord, conceptualiser ensuite les observations, les généraliser enfin sous forme de règles lorsque c’est possible et utile. » (p. 14).

Bronckart, Bulea & Pouillot (2005, p. 15) expliquent qu’à partir de ce mouvement, on parle par la suite de grammaire « moderne ». De nombreux changements au niveau des objectifs et des démarches de l’enseignement des langues vont alors s’opérer. Ces nouveautés sont décrites par les auteurs de la manière suivante (p. 15) :

Au plan des objectifs [...] il s’agit de développer sa maîtrise des formes textuelles, orales et écrites, qu’il [l’enfant-élève] a ou aura à mettre en oeuvre dans sa vie sociale. Une fois cette maîtrise acquise, et sur la base de cette dernière, pourra alors être envisagé l’objectif second d’accès à la littérature, cette dernière ne se limitant évidemment plus à certains auteurs élus par les normes ambiantes, mais étant conçue dans une perspective diversifiée et contemporaine. Au plan des méthodes, il s’agit en conséquence de se centrer d’abord sur les variantes de la langue d’usage (et notamment celle de l’élève lui- même), d’inciter ce dernier à les produire, à les observer, puis à en dégager certaines régularités, et à se constituer ainsi, par induction, un savoir d’ordre grammatical qui lui servira d’appui et d’aide-mémoire dans son développement langagier ultérieur.

Les auteurs précisent, à juste titre, qu’il existait déjà à l’époque, un important décalage entre les intentions de cette nouvelle approche de l’enseignement de la grammaire et sa mise en place. Ainsi, pour répondre aux exigences du secondaire - qui s’inscrivaient dans une approche de l'enseignement de la grammaire du type de la première conception - l’école primaire publique va revenir à un enseignement traditionnel voire scolastique : « la décomposition analytique du programme-cible, et la construction d’une progression fondée sur des degrés de complexité des savoirs, tels que les adultes les conçoivent. » (p. 16).

Suite à ce que l’on pourrait qualifier de “retour en arrière”, le principe de démocratisation va lui aussi tendre à disparaître comme nous l’explique Bronckart (2016). C’est notamment de ce problème que naîtra, dans les années 1950-1960, la volonté de revoir l’enseignement de la grammaire, accentuée par la mise en évidence de nombreuses autres limites.

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1.1.2 Des caractéristiques aux critiques de la grammaire traditionnelle : les raisons de la création d’une nouvelle grammaire

Bien que la partie précédente ait permis de mettre en lumière certaines caractéristiques de la grammaire traditionnelle, les propos de Bronckart (2001), Béguelin (2000) et Genevay (1994) se rejoignent et apportent une description très précise des éléments constitutifs de cette grammaire. Cela nous permettra de mieux comprendre ses limites, puis les raisons du refus de persévérer dans cette direction à l’école primaire.

Selon Bronckart (2001) la grammaire dite traditionnelle s’inscrit dans une

« logique de déduction » (p. 3) et s’appuie sur quatre principes. On retrouve des principes similaires dans la description réalisée par Béguelin (2000), mais dans un ordre différent pour les premières étapes. Selon cet auteur la première étape consiste à observer un corpus d’exemples « soigneusement choisis » (p. 71). A partir de là, les élèves, avec le guidage de l’enseignant, peuvent déduire les notions grammaticales en jeu. Une définition de la notion observée est ensuite apportée et devra être mémorisée. D’après Bronckart (2001), il s’agit d’abord d’enseigner des règles grammaticales ainsi que des définitions que les élèves doivent mémoriser. L’observation d’exemples mettant en exergue les règles apprises est ensuite proposée aux élèves. Bien que l’ordre des étapes diffère, le principe reste le même : « recevoir des connaissances et les appliquer » (Genevay, 1994, p. 55). A titre d’illustration, Genevay (1994) s’appuie sur un exemple tiré du manuel 4e/3e de Mauffrey, Cohen et Lilti (1988, p. 181) sur l’expansion du nom. Il remarque que la théorie apparaît effectivement en amont des activités, ces dernières faisant ensuite office d’application des règles présentées. Dans ce sens, Bronckart (2001) et Béguelin (2000) décrivent la suite de la démarche de la même façon. Les élèves continuent leur “apprentissage” en s’entraînant à travers des exercices répétitifs pour arriver à une maîtrise des règles. Finalement, l’enseignant évalue les élèves sur leur connaissance des règles, et non pas sur la capacité à remobiliser la règle dans la construction des phrases. Enfin, et d’après les propos de Bronckart (2001), « l’objectif culturel traditionnel » de la grammaire est le suivant : « (...) analyser la langue pour analyser le monde et ainsi développer les capacités de “pensée” de l’élève » (p. 15-16). Autrement dit, analyser le fonctionnement de la langue devrait permettre d’acquérir des compétences langagières réflexives et descriptives de l’environnement qui nous entoure.

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A travers ce descriptif succinct, nous voyons déjà se dessiner les limites de l’enseignement traditionnel de la grammaire, au regard des démarches d’enseignement actuelles qui prônent des pédagogies actives où l’enfant- élève est “maître” de ses apprentissages et découvre les savoirs au fil de ses questionnements. Nous nous centrerons ici sur les principales critiques, qui ont poussé les didacticiens à proposer une nouvelle grammaire. Pour ce faire, je m'appuierai sur les propos de Bronckart (2001), Bulea Bronckart (2015), Paret (1992), Béguelin (2000) et Genevay (1996).

Bronckart (2001) émet quatre critiques à l’intention de la grammaire traditionnelle. La première concerne l’absence de distinction entre les différents critères au sein des définitions : « les considérations logiques, morpho syntaxiques et sémantiques » sont mélangées » (p. 2). Autrement dit, les définitions ne distinguent pas la nature, la fonction, ou encore le sens d’une notion grammaticale. Cet aspect conduit, selon Bulea Bronckart (2015) à un manque de précision problématique pour les élèves. Dans la mesure où l’on ne distingue pas les « critères syntaxiques, sémantiques, et logiques » (p.

17), il en résulterait forcément des définitions incomplètes et insuffisamment précises, qui risqueraient de plonger les élèves dans la confusion. Cette limite est également dénoncée par Béguelin (2000, p. 70) qui considère elle aussi les notions « mal définies et parfois contradictoires ».

En lien avec le manque de précision dépeint ci-dessus, la grammaire traditionnelle ne semble pas suffisamment bien organisée et ne donne alors pas l’image de la langue, comme le système qu’elle est réellement. En effet, Bronckart (2001), tout comme Béguelin (2000), relève un problème d’organisation de la structure de cette grammaire dans la mesure où elle ne présente pas « différents niveaux d’organisation de la langue (mots, catégories, groupes, fonctions, etc.) » (p. 2). Bulea Bronckart (2015) souligne les conséquences d’une telle organisation sur l’apprentissage des élèves.

Nous savons que les notions grammaticales ne sont pas indépendantes, ou isolées les unes des autres et qu’il existe des liens ainsi que des rapports entre elles. Or, dans le cas de grammaire traditionnelle, les élèves n’ont pas la possibilité de considérer la grammaire comme un système hiérarchisé, alors que cette conception pourrait les aider dans leur compréhension du fonctionnement de la langue.

En outre, les auteurs (Bronckart, Béguelin, Bulea Bronckart, Pellat) ont souvent jugé que cette grammaire était trop focalisée sur les irrégularités et les exceptions de la langue. D’après Bronckart (2001, p. 2), elle n’attache pas assez d’importance à « l’analyse des règles syntaxiques » : en cherchant à

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étudier les irrégularités, la grammaire traditionnelle tend alors à délaisser la description des régularités dans la composition des phrases. Cette idée de centration sur les exceptions du fonctionnement de la langue se retrouve également chez Bulea Bronckart (2015) et nous semble aujourd’hui présenter trop de difficultés pour être efficace et probante. La grammaire française étant déjà relativement complexe, il paraît surprenant de s’atteler à décrire toutes les exceptions qu’elle contient : si l’on veut l’enseigner à des enfants, il serait davantage pertinent d’opter pour une méthode inverse en décrivant des règles grammaticales dans leur globalité, pour commencer.

La problématique du sens accordé à l’apprentissage de la grammaire a également été considérée comme une limite de cette grammaire par les auteurs, à plusieurs niveaux. D’une manière générale et en lien avec l’objectif de la grammaire traditionnelle énoncée plus haut, on vise, avec cette approche une maîtrise abstraite de la grammaire, qui devrait ensuite être utilisée dans la production et la lecture/compréhension. De ce fait, grammaire et expression sont deux objets distincts qu’il ne convient de

« mélanger » (Bulea Bronckart, 2015). Cet aspect semble ainsi rendre l’enseignement dénué de sens car aucun lien n’est fait entre les savoirs grammaticaux appris et leur utilisation dans le discours. Bronckart (2001, p. 2) ajoute d’ailleurs que les « (...) notions acquises (...) paraissent inutiles » et non remobilisables dans les tâches d’expression ou de compréhension de texte.

Quel sens peut-on alors donner aux règles et notions grammaticales si l’on ne permet pas aux élèves de percevoir leur utilité dans nos discours ? Toujours dans la même idée, Bronckart (2001) et Béguelin (2000) montrent que les exemples utilisés par les enseignants sont eux aussi dénués de sens car il ne s’agit pas d’écrits « usuels », utilisés dans la vie quotidienne (Bronckart, 2001, p.

2). On donne plutôt à voir aux élèves des corpus de textes provenant d’oeuvres littéraires, qui ne correspondent finalement pas à la réalité des discours auxquels l’école devrait préparer les élèves, à travers le développement de leurs compétences langagières et de leur compréhension du fonctionnement de la langue. En ne laissant pas la place aux productions spontanées ou provenant des élèves eux-mêmes, ces grammaires deviennent alors trop normatives, empêchant les élèves de réinvestir les notions dans les activités d’expression ou de compréhension de texte (Béguelin, 2000).

Etant donné que la grammaire traditionnelle se base sur une démarche déductive, la dernière limite présente un aspect problématique concernant la méthode d’enseignement elle-même. D’après Paret (1992) et Genevay (1996), la grammaire traditionnelle ne se concentrait que sur la

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reconnaissance des mots, ce qu’ils nomment "l’étiquetage”. Cette idée de

« simples étiquettes verbales apposées aux choses » est d’ailleurs souvent reprise dans les discours sur la grammaire traditionnelle (Bronckart, 2016, p.

19). Paret (1992, p. 32) précise que ce procédé n’est absolument pas suffisant, dans la mesure où « nommer n’est pas maîtriser ». Effectivement, reconnaître une notion grammaticale ne signifie pas que l’on est capable de l’utiliser de manière adéquate ou que l’on a compris son fonctionnement.

Enfin, Genevay (1996) met en lumière un aspect pertinent à travers l’analyse de l’exemple énoncé2 plus haut. En effet, les auteurs du manuel semblent être conscients du côté insatisfaisant de la démarche adoptée puisque dans leur avant propos, ils déclarent que « Le professeur garde la liberté du choix de sa démarche : utiliser ou non le texte d'introduction, partir des exercices pour tirer des conclusions etc. » (p. 57). Genevay (1996) pose la question :

« pourquoi alors, dans le manuel lui-même, n’avoir pas opté pour une présentation favorisant cette autre démarche ? » Comme cet auteur l’avance, il semble peu probable que les maîtres fassent usage de la "liberté"

accordée !

Au regard des limites mises en avant ici, les propos de Ferdinand Brunot relevés par Bronckart (2016, p. 8) illustrent bien le besoin de modifier la manière dont on enseigne la grammaire. En effet, il s’agit de revoir les démarches pédagogiques d’enseignement dans leur globalité : « (...) ce n’est pas qu’on enseigne trop peu la grammaire, c’est qu’on l’enseigne mal ».

1.2. La nécessité d’une nouvelle grammaire : des objectifs visés à la mise en place de l’enseignement rénové de la grammaire

1.2.1 Un nouvelle approche de la grammaire : quelles intentions ?

Dans l’ouvrage dirigé par Chartrand (2016), Bronckart apporte plusieurs informations sur les nouveautés en termes d’enseignement de la grammaire.

Au regard des “défauts” de la grammaire traditionnelle observés, un projet considéré comme fondateur de la rénovation de l’enseignement de la grammaire va voir le jour en 1970 : « le Plan de rénovation de l’enseignement

2 Concernant le manuel 4e/3e de Mauffrey, Cohen et Lilti (1988, p. 181) sur l’expansion du nom.

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du français à l’école élémentaire, plus connu sous l’appellation de Plan Rouchette » (Bronckart, 2016, p. 8).

En plus d’une volonté de démocratisation de l’enseignement, le plan Rouchette avait deux principales intentions. Il s’agissait, d’une part, de mettre en place une démarche pédagogique qui pourrait articuler la « libération de la parole et la structuration des connaissances de la langue » (Bronckart, 2016, p. 9), c’est-à-dire les activités grammaticales et celles relatives à l’expression / production de l’écrit et de l’oral. D’autre part, cette rénovation souhaitait s’appuyer sur la psychologie développementale - afin d’exploiter l’idée de « capacités réflexives des enfants-élèves » - ainsi que sur l’approche linguistique structurale et générative, que nous verrons plus en détail ultérieurement (Bronckart, 2016, p. 9). Dans le Plan Rouchette (1970), les auteurs avaient pris soin de déterminer deux principes méthodologiques fondamentaux qu’il était nécessaire d’intégrer dans les activités de grammaire. Bronckart (2016, p. 9) explique qu’il s’agissait de passer, dans un premier temps, par « une phase de grammaire implicite » à travers des exercices dits « structuraux » par lesquels les élèves devaient corriger et améliorer leurs propres énoncés, sans parler de “grammaire” à proprement parler à ce stade. Ensuite, venait la phase de « grammaire explicite » : « (...) manipulation organisée » d’énoncés sur la base de laquelle les élèves devaient progressivement « découvrir puis codifier les règles de base de la syntaxe » (p. 9). La progression des savoirs a elle aussi été revue. Ainsi, au lieu de partir de la plus petite unité pour aller vers les plus grandes (plus complexes), il s’agissait ici de démarrer par les plus grandes unités langagières pour aller vers les plus petites (phrase → syntagmes (groupes) → natures → fonctions grammaticales)

En Suisse romande, les idées de la rénovation coïncident avec une volonté d’uniformiser les programmes différents d’un canton à l’autre. L’ouvrage Maîtrise du français – une concrétisation du Plan Rouchette – qui est apparu en 1979, permettait ainsi d’avoir une référence unique pour l’enseignement de la langue. Dans l’introduction de cet ouvrage, Besson, Genoud, Lipp, & Nussbaum (1979, p. 1) présentent trois idées déterminantes de la rénovation de l’enseignement du français, à cette époque :

La langue est le moyen de communication par excellence. Apprendre une langue c’est apprendre à communiquer.

Lorsqu’il entre à l’école, l’enfant a déjà entrepris cet apprentissage. Il s’agit dès lors d’en favoriser la poursuite, en tenant compte de l’acquis.

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Cet apprentissage n’est possible que si l’enfant éprouve le besoin d’entrer en communication avec autrui, le besoin de s’exprimer, le besoin de comprendre. A la faveur de cet apprentissage, il structure peu à peu sa pensée.

Nous sommes alors déjà loin des idées de la grammaire traditionnelle.

Cependant, durant les années 1970, on a observé un sentiment de confusion chez les enseignants – ainsi que chez leurs élèves – qui étaient tiraillés entre les anciennes démarches traditionnelles d’enseignement de la grammaire et les nouvelles méthodes et terminologies. Ce climat « faisait obstacle au traitement effectif de questions plus fondamentales ayant trait au statut même de la grammaire, à la méthodologie de son enseignement et à la place que celui-ci devait prendre dans le cadre général de l’enseignement de la langue » (Bronckart, 2016, p. 13). Ainsi, on “tombait” à nouveau dans un manque de précision qui faisait tort à l’image de la grammaire. En Suisse romande, l’IRDP3 a pointé la difficulté que présentait la rénovation du français à travers l'utilisation de Maîtrise du Français par les enseignants et Bronckart (2016, p. 14) le verbalise de la manière suivante :

(...) si la rénovation était justifiée dans son principe, le projet émanant de l’ouvrage de référence était trop ambitieux ou prématuré en ce qu’il requérait de la part des enseignants un ensemble de capacités pratiques et théoriques bien supérieures à ce à quoi leur formation les avait préparés et de la part des instances de la politique éducative de chaque canton, l’adoption de Plan d’études plus précis.

A partir de ce constat, les didacticiens ont alors décidé de modifier les textes de référence et de créer des moyens d’enseignement adaptés aux enseignants. De plus, dans un souci de légitimation de cette rénovation que beaucoup de ses détracteurs critiquaient, le Groupe Bally (Bronckart, 1989;

2014) a rédigé un rapport afin d’expliciter la démarche tout en proposant des

« solutions pour les divers problèmes théoriques, méthodologiques et techniques qui avaient été identifiés. » (Bronckart, 2016, p. 14). Bronckart (2016, p. 14) retient quatre éléments notoires de ce rapport. Tout d’abord, les auteurs conservent l’idée selon laquelle les tâches de structuration de la langue sont utiles au développement de trois aspects : « l’enrichissement des capacités d’expression en générale, la maîtrise des principales règles d’orthographe grammaticale et l'acquisition des langues secondes ou étrangères ». Il précise également la présence d’un « corpus de notions de la grammaire de la phrase avec des recommandations d’ajustement » (Bronckart, 2016, p. 14), permettant ainsi d’obtenir une terminologie plus

3Institut romand de recherche et de documentation pédagogique.

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claire et cohérente vis-à-vis des intentions de la rénovation. Concernant les démarches, on préconise de réaliser les activités de structuration et celles de production / expression de manière dissociée, durant deux temps didactiques séparés. Enfin, les auteurs souhaitent s’atteler aux représentations des enseignants quant à la grammaire et leur permettre de maîtriser et comprendre davantage le fonctionnement de la grammaire.

Par la suite, à la fin des années 1980, la nécessité de diversifier les genres de textes à enseigner et les réformes qui ont suivi, ont empiété sur la rénovation grammaticale en cours, laissant de côté, en Suisse romande, les propositions du Groupe Bally. Les travaux de ce groupe avaient néanmoins abouti à la création d’ouvrages en accord avec les objectifs pré-cités, pour les élèves du secondaire. Malheureusement, les autorités scolaires leur ont préféré des manuels scolaires français, créant ainsi une nouvelle source de confusion que ce soit dans les terminologies ou au niveau des démarches. Ce processus – le recours aux manuels conçus pour être utilisés en France – est encore très fréquent aujourd’hui, malgré des tentatives de retrouver une certaine cohérence entre objectifs et manuels.

Bronckart (2016, p. 19) propose trois pistes afin de relancer la rénovation :

« Diffuser une plus juste image de la grammaire et de son rôle », « Conforter la place et le rôle de la grammaire dans l’enseignement de la langue » et enfin

« Poursuivre l’homogénéisation des notions et règles de grammaire ». Ces propositions ne seront pas détaillées ici, mais elles permettent de mettre en avant le sentiment d’inachevé qui peut se dégager de la rénovation de la grammaire. Il revient donc aux enseignants de tenter de mettre en oeuvre, en les adaptant si nécessaire, les principes de la grammaire moderne afin d’atteindre les objectifs que ce beau projet s’était fixé, sans entacher davantage l’image déjà trop négative de la grammaire.

1.2.1 Objectifs actuels de l’enseignement rénové

Au début de la rénovation, on défendait surtout un objectif utilitariste de la grammaire : le but était d’abord de permettre aux élèves de pouvoir communiquer, puis de développer leur maîtrise de la grammaire (Bronckart, 2016). En effet, il s’agissait de « (...) mettre en place un enseignement visant d’abord le développement des capacités d'expression orale et écrite des élèves, et ensuite la maîtrise d’une démarche d’analyse et de notions grammaticales (...) » (Bronckart, 2001, p. 1). L’apprentissage de la grammaire était donc au service du développement des compétences d’expression orale et écrite.

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Aujourd’hui, Bronckart (2016, p. 20) explique que l’on semble s’accorder sur l’objectif suivant :

(...) la grammaire scolaire constitue un appareil notionnel ayant pour fonction de compléter et de (ré-)organiser les connaissances dont disposent déjà les apprenants et de tendre ce faisant à rendre ces connaissances plus conformes aux savoirs scientifiques à propos du langage et des langues.

Sur la base de cet objectif, Bronckart (2016), formule différentes visées de la grammaire. Il s’agit déjà de développer des compétences afin de pouvoir analyser la langue, compétences qui seront mobilisées afin de maîtriser les capacités d’expression. Bronckart (2016, p. 21) distingue trois « finalités » des capacités grammaticales :

(...) la maîtrise de formes d’organisation textuelles, en tant que gage du développement des capacités d’expression orale et écrite ainsi que des capacités de réception-interprétation; la maîtrise des règles de l’orthographe grammaticale de la langue en usage; l’élaboration de processus transversaux facilitant l’acquisition de langues secondes ou étrangères.

Concernant la première finalité, Bronckart (2001, p. 3) explique que « les objectifs et démarches dits de Libération », correspondent au fait de développer la maîtrise de la communication en français oral et écrit des élèves. Pour ce faire, il est important que les enseignants présentent des situations de communication suffisamment variées afin que les élèves puissent maîtriser des « différentes variétés de français oral et écrit » (p. 3). L’idée sous- jacente est de permettre aux élèves « de communiquer efficacement dans diverses situations pratiques d’interaction » (Bulea Bronckart, 2015, p. 21).

D’après Béguelin (2000, p. 72), cela implique alors de laisser de côté les

« exercices déconnectés de la sensibilité et de l'affectivité de l’enfant où le langage fonctionne en quelque sorte à vide ». Autrement dit, l’objectif n’est plus de pouvoir lire et comprendre de grands auteurs comme dans le cadre de la grammaire traditionnelle mais bien de pouvoir utiliser les savoirs langagiers, en situation, dans la vie quotidienne, la visée de l’école retrouvant alors tout son sens dans la formation de futurs citoyens capables de communiquer et d’exprimer leurs pensées.

Le deuxième objectif de l’enseignement de la grammaire est en lien avec

« les objectifs et démarches dits de structuration », pour lesquels il s’agit de développer chez les élèves une compétence d’analyse réflexive de la langue (Bronckart, 2001, p.3). On remarque ici que contrairement à la grammaire traditionnelle la maîtrise des notions grammaticale est visée dans

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un second temps. Dans ce sens, on estime qu’elle vient outiller « la mise en oeuvre des quatre types de savoirs (...) : savoir parler, savoir écrire, savoir écouter, savoir lire » (Bulea Bronckart, 2015, p. 21). Ainsi, comme l’avance Béguelin (2000, p. 72), la grammaire « s’articule à l’activité de communication ». Chartrand (2009, p. 14) précise également : « (...) il faut donc plus d’une approche utilitaire et instrumentale de la langue [...]. Il faut permettre à l'élève de comprendre l’essentiel des mécanismes syntaxiques en jeu, ce qui requiert aussi une approche réflexive de la langue ». L’auteure insiste alors sur le fait que la langue est alors plus qu’un simple outil de communication, et qu’il doit faire l’objet d’un enseignement à part entière.

Bien que traités ici de manière séparée, dans le but de faciliter leur compréhension, il est important de préciser qu’il n’y a aujourd’hui pour la plupart des auteurs, plus de hiérarchie entre ces objectifs. En effet, Bulea Bronckart (2015, p. 14) parle d’un « enseignement intégré » des deux versants de la grammaire. Il s’agirait alors de « (...) coordonner deux objectifs apparemment opposés dits de libération de la parole et de structuration de la langue » (Bronckart, 2001, p. 42). Cependant, bien que cela puisse sembler contradictoire, Bronckart (2016), explique que pour pouvoir articuler les deux objectifs de la grammaire, il est important de les traiter séparément dans un premier temps, mais de finalement garder à l’esprit qu’ils devraient être considérés comme interdépendants. C’est donc dans ce sens que nous pourrions interpréter les propos de Bronckart (2001) : l’enseignement de la grammaire est second et devrait s’intégrer à la première étape de visée communicative. Cette volonté d’entretenir une relation d’interdépendance entre structuration et expression fait cependant débat par son manque de clarté et de consensus. Certains auteurs mettent ainsi en lumière quelques éléments problématiques qui seront traités par la suite (cf. supra première partie, 1.5).

Finalement, et comme le souligne Bulea Bronckart (2015), il n’y a plus aujourd’hui cette volonté d’enseigner dans une approche abstraite de l’enseignement de la langue mais il s’agit, au contraire, de contextualiser les savoirs grammaticaux et langagiers en situation de communication “réelle”, afin de ré-attribuer du sens à ces savoirs fondamentaux. Cette idée apparaît d’ailleurs nettement dans l’article de Chartrand (2009, p. 13) lorsqu’elle définit les finalités de l’enseignement grammatical : « (...) la maîtrise des règles de construction des phrases et des textes ainsi que des règles et des normes orthographiques et typographiques [...] dans la perspective de développer des compétences en lecture, en écriture, et en communication orale des élèves ».

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1.2.2 Des caractéristiques aux critiques de la grammaire traditionnelle : les raisons de la création d’une nouvelle grammaire

La grammaire moderne s’est inspirée des deux théories linguistiques suivantes : le structuralisme américain ainsi que la grammaire générative et transformationnelle. Elle a également emprunté quelques éléments de la théorie des actes de langage et des théories de l’énonciation (Bronckart, 2001). Bien que différentes, ces deux grammaires comportent deux points communs : elles décrivent toutes les deux les différentes unités linguistiques ainsi que les règles de leur organisation – contrairement à la grammaire traditionnelle – et elles font “abstraction du sens”, se centrant principalement sur la syntaxe4. En prenant appui sur les propos de Bronckart (2001), Besson, Genoud, Lipp & Nussbaum (1979) et Béguelin (2000), il s’agira donc de décrire succintement les apports de ces théories linguistiques afin de davantage comprendre les choix linguistiques effectués dans le cadre de la grammaire rénovée.

Le structuralisme s’appuie sur la théorie de Ferdinand de Saussure pour qui la langue est un système de signes, eux-mêmes composés d’un signifié (le sens apporté à une chose, ce qu’elle est) et d’un signifiant (le mot - constitué de différents phonèmes; unités sonores, qui traduit la chose) qui lui correspond (Bronckart 2001). La langue étant un système, les groupes de mots s’organisent entre eux pour former des phrases, respectant certaines caractéristiques propres à chaque groupe (Béguelin, 2000). La méthodologie en lien préconise de réaliser des manipulations sur ces segments de phrases (découpage, suppression, déplacement, remplacement, …) dans le but de mettre en avant leurs « propriétés structurales et fonctionnelles » (Bronckart, 2001, p. 7). D’après Besson, Genoud, Lipp & Nussbaum (1979), la rénovation va surtout prendre appui sur le structuralisme américain de Bloomfield (1970), en utilisant la méthode d’analyse distributionnelle. Sous cet angle d’analyse, l’élément central est le corpus : des énoncés dits réels qui devraient permettre de tester la validité des règles découvertes à partir de l’étude de ce corpus. L’analyse distributionnelle comporte un intérêt notable car elle permet la « classification des catégories d’unités sur des bases méthodologiques précises » (Besson, Genoud, Lipp & Nussbaum, 1979, 334). A contrario, la répartition traditionnelle regroupait des unités qui ne se

4 Bronckart (2001)précise que l’aspect sémantique est indispensable mais qu’il est possible de le “laisser de côté” dans la mesure où ce type d’analyse ne permet pas de comprendre le fonctionnement des unités linguistiques dans la phrase.

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comportaient pas de la même manière syntaxiquement parlant, ce qui était d’ailleurs à l’origine de son manque de clarté.

Selon Besson, Genoud, Lipp & Nussbaum (1979, p. 335), la grammaire générative et transformationnelle a pour objectif de « rendre compte des règles de fonctionnement du système ». Ainsi, à la différence du structuralisme, il s’agit davantage de comprendre l’organisation du système dans son ensemble. Ceci implique également des transformations du système, telles que les procédés de substitution, déplacement, addition, effacement. C’est sur la base des travaux de Chomsky, (1957 et 1965) que la rénovation s’est principalement appuyée, mais en Suisse Romande, nous avons retenu les principes de la grammaire générative ainsi qu’une partie de l’analyse distributionnelle de Harris (Canelas-Trevisi, 2009, p. 37). Plusieurs éléments seront utilisés dans le cadre de la grammaire rénovée, notamment cette idée d’ « identification et de classement des unités et des structures » à partir de laquelle la grammaire moderne va préciser les différences entre les niveaux de ce nouveau classement ; classes grammaticales, groupes, fonctions, valeurs sémantiques et fonctions textuelles (Bulea Bronckart, 2015, p.20).

Enfin, Besson, Genoud, Lipp & Nussbaum (1979) formulent une remarque très pertinente concernant les théories décrites ici. Selon eux, il revient à l’enseignant de choisir, pour telle ou telle activité, ce qu’il juge nécessaire d’emprunter à l’une ou à l’autre des grammaires. Il ne s’agit donc pas

« d’appliquer en classe l’une ou l’autre de ces théories, mais de choisir dans chacune d’elles des instruments d’analyse pouvant servir au mieux ses objectifs pédagogiques » (p. 335).

1.3. Comment enseigner la grammaire rénovée et à partir de quelles ressources ?

Au regard des bases de la grammaire rénovée mises en évidence ci-dessus, on comprend que l’objectif est de faire table rase de la méthodologie traditionnelle jugée moyenâgeuse mais également de revenir sur l’organisation de la langue (Bronckart, 2016). Plusieurs auteurs ont d’ailleurs défini des caractéristiques concernant ces deux aspects. Nous débuterons par le second, en nous appuyant sur divers auteurs afin d’obtenir une représentation de cette grammaire la plus complète et objective possible.

Nous ferons de même pour la démarche employée, en nous centrant notamment sur la démarche de type inductif.

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1.3.1 Trois caractéristiques fondamentales de l’enseignement de la grammaire rénovée

Les auteurs ont défini trois caractéristiques de la grammaire que l’on pourrait nommer dans les termes suivants : recours à une analyse sémantique et structurelle de la langue, création de règles et de normes, organisation de la langue.

Concernant la première caractéristique, Bronckart (2001) distingue « différents critères d’analyse de la structure et du fonctionnement de la langue ». En effet, Bronckart (2016, p. 17) affirme qu’il ne s’agit pas de traiter uniquement la « dimension sémantique » dans l’analyse des constituants de la phrase, mais qu’il faut aussi s’intéresser aux « propriétés syntaxiques observables ». Il faudrait alors commencer par une « approche de l’organisation des signifiants »; autrement dit le niveau morphologique et syntaxique de la langue. Puis, de manière indépendante, traiter l’organisation des « signifiés »;

au niveau sémantique et logique. Selon Bronckart (2001), cela permettrait d’établir une synthèse des unités linguistiques du français cohérente.

Dans la mesure où il est important de distinguer les « caractéristiques syntaxiques, morphologiques et sémantiques des unités de la langue, la deuxième caractéristique apparaît très en lien avec la première » (Bulea Bronckart, 2015, p. 19). En effet, il s’agit ici d’organiser ces différents niveaux d’analyse (préalablement différenciés) ainsi que leurs interactions les uns avec les autres afin de pouvoir « aboutir à une conception clarifiée, voire simplifiée de l’organisation de la langue » (Bronckart, 2016, p. 20). Autrement dit, en délimitant plus précisément les différents niveaux que l’élève peut utiliser pour analyser une phrase (à partir du sens, de l’origine des mots, et de l’aspect grammatical), ce dernier sera moins perdu dans l’observation de la langue.

La dernière caractéristique de la grammaire rénovée se situe à l’opposé de la grammaire traditionnelle car elle appelle, non plus à se centrer sur les irrégularités de la langue, mais au contraire à identifier et analyser ce que Bronckart (2001, p. 4) nomme les « régularités d’organisation de ces unités dans le cadre de la phrase ». A partir de là, nous pourrions alors outiller les élèves pour qu’ils puissent fabriquer eux-mêmes des phrases grammaticales en mobilisant les règles établies. D’après Bronckart (2016), ces règles devraient être déduites à travers une analyse de la langue pertinente que nous aborderons plus en détails plus tard.

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Ces éléments caractéristiques donnent une orientation plus stable, régulière et organisée de la grammaire. Pour résumer, il s’agit d’ « (...) observer les caractéristiques de la langue, induire les régularités, puis codifier cette connaissance acquise en termes grammaticaux » (Bronckart, 2001, p. 3).

1.3. 2 Principes pédagogiques de la grammaire rénovée

Chartrand, Lord et Lépine (2016), donnent à voir trois orientations à prendre en compte pour « atteindre les finalités assignées à l’enseignement grammatical » : « Tenir compte des conceptions des élèves », « Rendre l’élève conscient de ses savoirs pour qu’il puisse les redéployer dans d’autres situations de communication » et « Réaliser des démarches pour appréhender la langue comme un système » (p. 41-42).

Pour respecter le premier aspect, Chartrand, Lord et Lépine (2016) proposent une démarche contenant huit points importants. Tout d’abord, il s’agit de donner à l’élève une situation problème à résoudre, comme nous pourrions le faire en mathématiques, mais cette fois pour la langue. Dans un deuxième temps, les tâches proposées pour résoudre le problème doivent permettre à l’élève de manipuler la langue. Pour ce faire, Besson, Genoud, Lipp et Nussbaum, (1979, p. 3) précisent dans Maîtrise du français, qu’il faut amener

« (…) l’enfant à faire fonctionner la langue. Les activités d’expression, les manipulations lui feront découvrir progressivement de façon tout d’abord intuitive, puis réflexive, les principes de ce fonctionnement. ». L’objectif de ces manipulations est donc de « démontrer les principaux mécanismes de la langue et inventorier les possibilités » (Besson, Genoud, Lipp et Nussbaum, 1979, p. 337). Pour Bronckart (2001, p. 43), la démarche de manipulation est un « aspect central de la rénovation de l’enseignement de la langue » qu’il définit très précisément :

Elle permet d’abord de mettre en application le principe de la pédagogie active, en dotant l’élève de techniques lui permettant d’agir sur sa langue. (...) elle permet ensuite de “faire voir” les régularités effectives du système de la langue avant de procéder à l’étiquetage des notions et des règles dans le cadre d’une terminologie grammaticale.

Ainsi, à partir des manipulations réalisées et des observations qui en sont ressorties, les élèves pourront émettre des hypothèses, les conduisant peu à peu à l’identification de la notion en jeu. Cet élément fait d’ailleurs partie d’un point essentiel de la démarche proposée par Chartrand, Lord et Lépine

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(2016, p. 41), qui considèrent qu’il faut que les élèves puissent prendre le temps d’observer et de poser des questions (hypothèses, comparaison avec l’ouvrage de référence consulté, etc), car « ce qui compte ce n’est pas tant la réponse que le raisonnement suivi pour arriver une réponse ».

Dans ce sens, ces auteurs proposent aussi de demander aux élèves d’expliquer leurs hypothèses et observations en utilisant des exemples et des contre-exemples ainsi que de fournir des explications et des justifications écrites de celles-ci, dans le but de comprendre davantage l’importance de

« l’écriture pour penser » (Chartrand, Lord et Lépine, 2016, p. 41). La confrontation des points de vue des élèves entre pairs est également une dimension essentielle de la démarche, au même titre que le statut de l’erreur.

Ce dernier est discuté en collectif, car il s’agit d’une source importante d’apprentissage. Enfin, pour être en cohérence avec ce qui vient d’être énoncé, il faudrait tenir compte, dans les évaluations autant de la démarche que de la réponse.

Le deuxième point soulevé dans l’ouvrage dirigé par Chartrand (2016) concerne la prise de conscience des élèves quant aux savoirs acquis et leur capacité de remobilisation de ces acquis. D’après les auteurs, faire verbaliser n’est alors pas suffisant, il faut pouvoir leur permettre de transférer leurs connaissances dans la pratique. Il faudrait alors inviter les élèves à se poser des questions sur ce qu’ils ont appris et énumérer les situations dans lesquelles ils pourront remobiliser ce nouveau savoir. En lien avec cette finalité, Besson, Genoud, Lipp et Nussbaum (1979, p. 3), proposent dans Maîtrise du français de partir des productions de l’élève, dans l’optique de « (...) faire vivre la langue française comme moyen d’échange (...) lui permettant ainsi d’adapter sa langue aux diverses situations dans lesquelles il se trouve placé ». Autrement dit, il s’agirait de partir de ce que connaissent les élèves en termes de production de la langue et d’y adapter son enseignement afin que la remobilisation des nouveaux savoirs prennent davantage de sens.

Enfin, Chartrand, Lord et Lépine (2016) précisent qu’il ne s’agit pas de laisser les élèves complètement en charge de leurs apprentissages. Il est effectivement nécessaire de bien structurer l’enseignement de la grammaire en s’assurant d’une bonne clarification des contenus. De plus, il est important de conserver l’exercisation afin « d’automatiser les raisonnements et les procédures » (Chartrand, Lord et Lépine, 2016, p. 42).

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