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3. Pourquoi est-il nécessaire de motiver les élèves pour apprendre ? . 58

3.2 Motivation et grammaire

suffisamment bien l’outil et qu’ils pourront donc « en tirer tout le potentiel » (p.

180). Cet outil doit permettre à l’élève « d’interagir régulièrement et de faire des choix », « de faire des erreurs sans pour autant être critiqué », « de travailler en collaboration » (p. 180). Il est également important que l’enseignant encourage l’élève et le soutienne dans ses choix et sa démarche d’apprentissage. Enfin, il faut veiller à ce que « l’environnement technologique soit convivial et attrayant », sans néanmoins être similaire aux jeux vidéo (p. 180).

Pour conclure cette partie sur la motivation scolaire, les propos de Viau (2004) mettent en avant un aspect qu’il me semblait intéressant d’aborder. L’auteur fait l’hypothèse que certains enseignants sont démotivés parce qu’ils remarquent « le peu d’impact de leur enseignement sur leurs élèves », ce qui les pousse à accorder « de moins en moins de valeur à la matière qu’ils enseignent et aux méthodes qu’ils utilisent » (p. 15). Viau (2004, p. 16) remet alors en question la formation des enseignants :

Y a-t-il une place dans la formation des maîtres pour aider l’étudiant qui se destine à l’enseignement à non pas seulement devenir un expert de contenu, mais également un “maître à penser”; une personne qui, par ses comportements, suscite la motivation à apprendre de ses élèves ? Mon propre cursus me laisse penser que la réponse est pour le moment négative ...

3.2 Motivation et grammaire

Ces notions sont peu visibles côte à côte dans la littérature sur la grammaire même si certains auteurs ponctuent leurs discours de ces termes. Ils sont pourtant essentiels aujourd’hui, avec l’arrivée des démarches inductives ou de situations problème. Il s’agira ici de faire le point sur les discussions actuelles concernant la motivation en grammaire et de mettre en lumière les pistes proposées par les auteurs afin de motiver davantage dans l’apprentissage de ces savoirs.

3. 2. 1 Constats sur la motivation en grammaire

Falardeau et Simard (2009) expliquent que les enseignants ont bien conscience que les élèves n'apprécient pas et ne sont pas motivés par la grammaire, notamment à cause du « blocage affectif » explicité précédemment (cf. supra 2. 2). Les enseignants essayent donc d’apporter davantage de sens à ce domaine, en tentant d’engager « l’affectivité mais davantage du côté de la motivation que de l’aversion » (p. 253).

d’une grammaire “inutile” et les élèves ne trouvant pas de sens à ces savoirs, s’en trouvent dès lors démotivés. Les paroles d’un enseignant interrogé, viennent illustrer davantage ce constat : « Et avec la conviction du sens (...) viendra la motivation (...) », « Les élèves développent leur motivation face à la langue. Leur intérêt. La grammaire. Le soucis de bien écrire, [...] d’utiliser les connaissances grammaticales pour en arriver à écrire bien, sans fautes ou avec peu de fautes » (p. 248). On peut ajouter à cela les propos de Leeman (1996), qui cherche à intéresser davantage les élèves à la grammaire dans son article : « (…) la motivation est la première chose à déclencher chez les élèves, leur intérêt effectif étant la condition préalable à l'assimilation et à la maîtrise de ce qu’on leur enseigne ».

3. 2. 2 Pistes avancées par Leeman (1996) pour motiver les élèves en grammaire

Pistes concernant le contenu grammatical

Leeman (1996) présente une démarche détaillée qui permet d’intéresser les élèves à la grammaire, décomposée en quatre « angles d’attaque » et un travail écrit final, portant sur l’appropriation et la compréhension d’une notion (l’attribut du sujet dans son article) dans le cadre de l’enseignement secondaire. Il s’agira de présenter succinctement cette démarche, tout en ayant conscience que cette dernière demeure relativement complexe pour être transposable à l’école primaire.

Le premier angle d’attaque consiste à permettre aux élèves d’analyser les manuels et exercices qui leur sont proposés afin d’amener une première discussion collective autour de la notion : « Qu’en pensent-ils ? Sont-ils d’accord ? » (p. 235). A partir de là, les élèves vont entrer dans une première compréhension de la notion. La seconde étape va leur permettre de confronter les informations recueillies et discutées des manuels à un texte

“extérieur”. Les élèves pourront alors vérifier si ces informations sont cohérentes dans d’autres textes. Ce moment débute par une réflexion individuelle, se poursuit par une « confrontation des résultats entre pairs » et

aboutit à une discussion collective (p. 239). A cela s’ajoute une phase de bilan : à l’aide de l’enseignant, les élèves doivent être capables de repérer la notion en jeu. Leeman (1996) précise qu’il est normal qu’à ce stade les élèves ne sachent pas encore tout de la notion. Bien que cela puisse provoquer une certaine frustration chez les élèves, cette dernière « engendre le désir d’en savoir plus », et donc la motivation (p. 240). A travers le troisième angle d’attaque, les élèves vont se pencher sur les propriétés de la notion qu’ils ont pu dégager jusqu’à présent en formulant des hypothèses, toujours dans l’objectif de mieux pouvoir la repérer. Ensuite, les élèves vont tester leurs hypothèses en prenant appui sur le dictionnaire afin de diversifier les exemples. Enfin, la dernière étape consiste à remettre par écrit tout le chemin réflexif réalisé jusqu’ici qui permettra à l’élève d’obtenir une définition critique et exemplifiée de la notion.

Vous l’aurez remarqué, la méthode de Leeman (1996) semble très marquée par les méthodes de type inductif, mais elle présente un intérêt particulier dans la mesure où cette approche est exploitée différemment et est davantage axée sur un travail réflexif et linguistique que didactique.

Autres pistes didactiques pertinentes

En mettant en parallèle les éléments théoriques présentés sur les démarches inductives et ceux qui concernent la motivation, on remarque que certains éléments de la dynamique motivationnelle de Viau (2009), ainsi que différentes approches présentées par Vivaini (2006) se retrouvent dans les nouvelles démarches d’apprentissage permettant de susciter l’intérêt des élèves. Falardeau et Simard (2009) expliquent d’ailleurs qu’utiliser des démarches inductives permettrait de motiver davantage les élèves.

Chartrand, Lord et Lépine (2016) avancent trois grands principes pour motiver les élèves en grammaire, en lien avec les théories de Viau (2009) qui seront étayées avec l’apport d’autres auteurs.

D’après Chartrand, Lord et Lépine (2016, p. 39), le premier principe consiste à

« proposer des activités qui aient du sens, qui stimulent les élèves et qui leur permettent de s’engager cognitivement ». Ainsi, les tâches devraient permettre aux élèves d’atteindre leur zone proximale de développement (Vygotsky). Autrement dit, les activités doivent « permettre de mobiliser les capacités intellectuelles et affectives des élèves; elles ne doivent être ni trop faciles ni trop difficiles » (p. 39). Pour cela il faudrait d’éviter les tâches d’application “pures et dures” et privilégier des tâches d’observation,

manipulation et transformation des phrases et de formulation de constats.

Dans la même optique, Falardeau et Simard (2009) expliquent qu’il est important d’intégrer les activités grammaticales aux activités d’écriture ainsi que de partir des productions des élèves et de travailler les difficultés qui s’en sont dégagées, car cela motiverait davantage les élèves. Selon Paret (1992, p. 33), il est important de travailler sur l’aspect sémantique de la grammaire, pour chaque notion, en se demandant « pourquoi on l’utilise de cette façon et à ce moment donné dans le discours », car les élèves percevraient alors davantage l’intérêt de ce travail. Ils seraient alors plus motivés dans la mesure où l’élève « a sans cesse besoin de voir ses efforts justifiés par l’intérêt que présente l’acquisition de connaissances nouvelles » (p. 33). Ainsi, on remarque que le premier principe rejoint certaines conditions d’une activité motivante d’après Viau (2009, p. 33), à savoir « être signifiante aux yeux de l’élève », ce qui implique le critère ; « doit exiger un engagement cognitif de l’élève ».

Le second principe s’appuie sur les critères de diversité et d’authenticité avancés par Viau (2009) : « Une activité doit être diversifiée et s’intégrer aux autres activités » et « Une activité doit amener à la réalisation d’un produit authentique »). En effet, Chartrand, Lord et Lépine (2016) expliquent que la répétition du même type de tâche est démotivant et qu’il serait plus motivant pour les élèves de leur proposer des tâches en lien avec leur vie quotidienne.

Cela permettrait de leur montrer qu’ils peuvent remobiliser les savoirs en

« situation non scolaire » et ainsi leur « prouver » l’utilité de la grammaire, en leur faisant par exemple écrire une lettre (Chartrand, Lord et Lépine, 2016, p.

40).

Chartrand, Lord et Lépine (2016) soulignent dans le dernier principe qu’il est nécessaire de mettre en oeuvre des activités qui contiennent des interactions entre pairs. On retrouve à nouveau une composante de la motivation de Viau (2009); « Une activité doit permettre à l’élève d'interagir et de collaborer avec les autres ». Les auteurs précisent que cet aspect prend appui sur des démarches, telles que l’éducation nouvelle ou l’éducation active, dont l’origine remonte au 17ème siècle.

Au delà des principes présentés par Chartrand, Lord et Lépine (2016), plusieurs auteurs mettent en avant l’importance de l’interdisciplinarité – c comme le préconise Viau (2009) – pour motiver les élèves à étudier la grammaire. Viau (2009, p. 143) lui même précise qu’il serait judicieux d’intégrer d’autres matières à l’apprentissage du français : « L’intégration du français à d’autres disciplines aiderait l’élève à se rendre compte que de

bonnes connaissances langagières (....) sont profitables à tous ceux qui communiquent leurs idées verbalement et par écrit, et ce qu’ils soient des sportifs, des scientifiques, des juristes ou des mécaniciens ». Nous pouvons faire l’hypothèse que ce constat serait transposable à la grammaire.

Falardeau et Simard (2009) préconisent également de favoriser l’interdisciplinarité pour susciter davantage l’intérêt des élèves, ce que MMF a d’ailleurs choisi de faire dans ses manuels (cf. supra 1. 4. 3).

On remarque également que la composante « Une activité doit responsabiliser l’élève en lui permettant de faire des choix » (Viau, 2009) se retrouve dans le discours de Courtillon (2001, p. 164) :

Pour intéresser les étudiants en maintenant leur motivation grâce à des résultats rapides, il faut “dégraisser” les méthodes de leur encombrant appareil grammatical et orienter leurs contenus et leurs propositions méthodologiques vers l’acquisition rapide par les étudiants des capacités de leurs choix : lire et/ou comprendre l’oral, produire à l’oral et à l’écrit si c’est leur souhait, et non apprendre cette entité abstraite qu’est “la langue”.

Enfin, Chartrand, Lord et Lépine (2016) abordent la problématique de la motivation en grammaire sous l’angle de l’attitude de l’enseignant lui-même.

Ce dernier devrait posséder certaines qualités pour espérer motiver les élèves.

Ainsi, il devrait « être convaincu de la pertinence des contenus à enseigner » et veiller à bien respecter « les capacités des élèves ».

Pour conclure, et bien que plusieurs éléments de réflexion se dégagent de la motivation en grammaire, celle-ci reste traitée de manière générale. Certes, on évoque les caractéristiques des démarches et des activités, mais on parle finalement peu du type d’activité précis et des supports qui permettraient de motiver les élèves, dans la pratique. Il faut bien entendu donner davantage de sens à la grammaire en rendant l’élève actif de ses savoirs. Cependant, il serait nécessaire de déterminer, parmi les différentes types de tâches que l’on connaît (identification, observation, manipulation, production, tâche simple/complexe, tâche d’application, …), lesquelles seraient les plus motivantes pour les élèves ? Il serait effectivement intéressant de savoir quelles actions et opérations cognitives elles mobilisent chez les élèves, pour finalement connaître les tâches qu’il faudrait privilégier pour réussir à motiver les élèves en grammaire. Au regard des propos des auteurs, on se rend compte que l’enseignement de la grammaire n’est peut-être pas suffisamment analysée au niveau de l’ingénierie didactique en tant que telle (type d’activités, supports, etc).

Deuxième partie : éléments méthodologiques