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Article pp.396-398 du Vol.3 n°6 (2013)

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CAS CLINIQUE /CASE REPORT

Détresse respiratoire précoce chez un jeune enfant après exposition orale accidentelle à une dosette de lessive liquide

Early respiratory distress in a young child after accidental oral exposure to a liquid detergent capsule

F. Grossenbacher · J. Brice · J. Lemaire · Y. Plenier · L. Duliere · B. Digeon

Reçu le 3 juillet 2013 ; accepté le 30 septembre 2013

© SFMU et Springer-Verlag France 2013

Introduction

Les lessives pour le linge ménager sont une cause d’acci- dents domestiques chez les jeunes enfants (notamment ceux âgés de moins de 4 ans). Les dosettes de lessive liquide (DLL) (Fig. 1) sont apparues sur le marché français en 2001. Les cas d’intoxications après exposition orale étaient souvent bénins avec le plus souvent des irritations du tube digestif, avec quelques rares complications pulmo- naires (3 %). Depuis 2010, il est rapporté de nombreux cas d’intoxication dont certains graves. Nous rapportons un cas de détresse respiratoire aiguë chez un enfant de 19 mois après une exposition orale accidentelle à une DLL.

Observation

Un nourrisson de 19 mois, ne présentant ni allergie ni traite- ment habituel, a été surpris par sa mère en train de manipuler une DLL avec rupture de l’enveloppe et libération du liquide. L’enfant a ensuite mis son doigt en bouche (h0). Il a initialement grimacé puis présenté des vomissements pré- coces à trente minutes de l’exposition. Une heure après l’exposition (h+1), l’enfant est amené dans un service

d’urgences pédiatriques. L’examen clinique retrouvait alors une hypotonie, un encombrement pulmonaire avec sibilants diffus avec une saturation en oxygène (SpO2) à 94 % en air ambiant. Un examen ORL montrait des amygdales érythé- mateuses ; il y avait persistance de vomissements, avec une hétéroévaluation de la douleur à 6/10.

À h+3, l’enfant a présenté une détresse respiratoire aiguë avec une désaturation à 86 % en air ambiant, une polypnée à 40/min, une toux laryngée, une tachycardie à 160/min avec une pression artérielle de 113/67 mmHg, une température de 37,5 °C et une selle molle malodorante. Devant ce tableau respiratoire, il a été mis sous oxygénothérapie aux lunettes à 1,5 l/min avec remontée de la SpO2 à 95 %. La radiographie pulmonaire pratiquée ne montrait pas de foyer systématisé et une antibiothérapie probabiliste a été prescrite pour pneumo- pathie d’inhalation. En raison d’un encombrement bron- chique important, l’enfant a eu besoin d’une kinésithérapie respiratoire pluriquotidienne.

À h+24, il restait oxygénodépendant à 1 l/min avec SpO2 à 96 %, avec une toux grasse productive et des crépitants bilatéraux des sommets. La fréquence respiratoire était à 30/min, température à 37 °C. Le rythme cardiaque persistait autour de 140-150/min, sans hypotension associée. Une ali- mentation orale a été reprise sans particularité avec absence de troubles du transit. À h+36, la kinésithérapie respiratoire était moins productive. Un sevrage progressif (0,3 l/min oxygène) a été commencé avec arrêt à h+48 devant une SpO2 à 97 % et un retour à la normale des constantes cardio- vasculaires. L’enfant est sorti après trois jours d’hospitalisa- tion. Le score de sévérité (Poisoning Score Severity), atteinte pulmonaire avec mise en jeu du pronostic vital, était PSS 3.

L’enfant a été revu en consultation un an après et ne présente pas de séquelles respiratoires.

L’interrogatoire de la maman a permis de savoir que la boîte contenant les DLL était positionnée sur une étagère de meuble de la cuisine, couvercle rabattu ; ce qui n’a pas empêché l’accident.

F. Grossenbacher (*)

(Centre de toxicovigilance Reims),

Pôle Urgences Réanimation Anesthésie Douleur, CHU Reims, 45, rue Cognacq-Jay,

F-51092 Reims cedex, France e-mail : fgrossenbacher@chu-reims.fr

J. Brice · J. Lemaire · Y. Plenier · L. Duliere · B. Digeon Service des urgences médico-chirurgicales pédiatriques, CHU Reims, 45, rue Cognacq-Jay,

F-51092 Reims cedex, France

Ann. Fr. Med. Urgence (2013) 3:396-398 DOI 10.1007/s13341-013-0369-z

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Discussion

C’est à notre connaissance le premier cas de détresse respi- ratoire précoce grave suite à une exposition orale minime (doigt trempé dans le liquide) d’une DLL observé en 2012 en France ; survenu depuis, le changement, en 2010, de for- mulation des DLL déjà présentes sur la marché français des lessives pour le linge depuis 2001. Ce changement de formulation des DLL a consisté en une augmentation du pourcentage (25 % en 2010 versus 15 % en 2005) des agents potentiellement moussants et de la concentration en surfactants.

Suite à une exposition aux lessives pour linge ménager, les symptômes sont présents dans 25 % des cas avec les poudres contre 75 % des cas avec les produits liquides.

Les symptômes habituellement retrouvés sont digestifs avec vomissements, diarrhée, douleurs abdominales ; pulmonai- res avec toux, laryngospasme, encombrement bronchique par moussage ; oculaires avec conjonctivites-kératites ou atteintes cutanées. Les premières réflexions et alertes de dangerosité concernant ces dosettes avaient été réalisées en 2005 par des toxicologues français1.

Une récente publication du Centre antipoison de Milan (Italie) [1] lors du Congrès EAPCCT (European Poison Center and Clinical Toxicologists) 2012 London, a fait état des inquiétudes des toxicologues vis à vis de ces DLL avec une augmentation significative des cas d’intoxications (478 dont 445 symptomatiques) par voies orales, oculaires et cutanées ; les cas d’expositions par voie orale étant quanti-

tativement plus élevés en nombre et gravité (encombrement bronchique et détresse respiratoire).

Une mise à jour de ces données [2-4] publiées au congrès EAPCCT 2013 de Copenhague a objectivé les lésions ocu- laires, cutanées et digestives. Du 29 juillet 2010 au 31 octo- bre 2012, 1143 cas d’exposition aux DLL ont été recueillis, 94 % survenaient chez des enfants de moins de 5 ans. On retrouvait 156 cas oculaires (156/1143 soit 14 %) dont 72 % mineurs, 15 % modérés et 4 % graves). La très grande majo- rité concernait des enfants avec néanmoins un cas grave chez un adulte avec abrasion cornéenne,œdème periorbital, pho- tophobie nécessitant un traitement par antibiotique et corti- coïdes instillés pendant 15 jours et guérison un mois après l’accident. Il y avait 93 cas cutanés (93/1143 soit 8 %) dont 77 cas symptomatiques (83 %) parmi lesquels on retrouvait 61 % mineurs, 16 % modérés et 3 % sévères. Un cas adulte a concerné une femme de 28 ans qui malgré la décontamina- tion immédiate à l’eau froide, a présenté des lésions du bas ventre et de la région inguinale à type d’érythème, d’œdème et d’excoriations. La guérison est survenue après 34 jours de traitement antibiotique oral et corticoïdes locaux. Enfin, 1056 cas étaient digestifs (ingestion ou muqueuse buccale) soit 92,4 % (1056/1143) dont 76 % (802 cas) étaient symp- tomatiques avec un signe digestif ou plus. Un pour cent de ces cas d’exposition était sévère (PSS 2 et/ou PSS 3). Un enfant de 13 mois a présenté après un délai de 5 heures une toux et un wheezing. Une laryngoscopie révélait un œdème de l’hypopharynx, des aryténoïdes et de l’épiglotte avec à la gastroscopie une atteinte circonférentielle de l’œso- phage et du tiers supérieur de l’estomac. L’existence de lésions pulmonaires associées a nécessité une intubation- ventilation pendant 11 jours avec retour à une fonction pul- monaire normale.

Il est important d’informer les parents des risques poten- tiels graves de l’exposition aux DLL. Ces dosettes sont très

Fig. 2 Étiquette de packaging dune boîte de lessive Fig. 1 Dosettes de lessive liquide (DLL)

1Nisse P, Durak C, Peucelle D, Mathieu-Nolf M (2005) Nouvelle forme de risque d’intoxication : les dosettes de lessive liquides.

Poster 43eCongrès de la Société de toxicologie clinique (STC), Lille, 2005.

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attractives pour les enfants car elles sont colorées et peuvent ressembler à des bonbons. Une réflexion rétrospective et prospective internationale des Centres antipoison français et européens [5-7] est actuellement menée pour réévaluer la dangerosité de ces DLL en association avec les industriels lessiviers de l’Association internationale de la savonnerie, de la détergence et des produits d’entretien (AISE). Les DLL représentent 14 % du marché français des lessives à linge (d’après la base de données de la distribution LSA Expert du 14/02/2013). Nous pensons qu’une modification du packa- ging (rendre opaques les emballages contenant ces dosettes pour les rendre moins visibles et moins attractives) devrait être réalisée en collaboration avec les industriels lessiviers (Fig. 2).

En conclusion, ce premier cas français de détresse respi- ratoire observé en 2012 démontre que les DLL, du fait de leur composition, peuvent provoquer lors d’un cas d’exposi- tion (ressenti minime), un risque potentiel majeur chez un enfant, malgré un premier tableau clinique initialement ras- surant. Les Samu-centre 15 et les Centres antipoison nous apparaissent être les interlocuteurs privilégiés lors d’intoxi- cation accidentelle aux DLL, par contact téléphonique rapide, pour orienter la prise en charge en service d’urgences et ainsi recenser le nombre de cas et leur sévérité.

Conflit d’intérêt : les auteurs ne déclarent pas de conflit d’intérêt.

Références

1. Celentano A, Sesana F, Settimi L, et al (2012) Accidental exposure to liquid detergent capsules. Clin Toxicol 50:353 (Abstract) 2. Celentano A, Sesana F, Settimi L, et al (2013) Ocular toxicity of

unit dose liquid laundry detergent. Clin Toxicol 51:311 (Abstract) 3. Celentano A, Sesana F, Settimi L, et al (2013) Severe repiratory and oesophagel effects resulting from ingestion of unit dose liquid laundry detergents. Clin Toxicol 51:311 (Abstract)

4. Celentano A, Sesana F, Settimi L, et al (2013) Skin injuries resul- ting from accidental exposure to unit dose liquid laundry deter- gents. Clin Toxicol 51:311 (Abstract)

5. Fraser L, Wynne D, Clement WA, et al (2012) Liquid detergent capsuls ingestion in children: an increasing trend. Arch Dis Child 97:100

6. Williams H, Bateman DN, Thomas SH, et al (2012) Exposure to liquid detergent capsules: a study undertaken by the UK National Poisons Information Service. Clin Toxicol 50:776–80

7. Amin R, Kennedy CA, Madraswala R (2012) New-style liquid detergent packs present new danger to children. Clin Pediatr (Phila) 52:103

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