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DOCTORAT EN MEDECINE

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Texte intégral

(1)

UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE

(PARIS 6)

FACULTE DE MEDECINE PIERRE ET MARIE CURIE

ANNEE 2008 THESE N° 2008PA06G035

DOCTORAT EN MEDECINE

DISCIPLINE : MEDECINE GENERALE

PAR

Mélanie HOROKS

Née le 29/12/1978 à Paris

PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT LE 24 DECEMBRE 2008

MUTILATIONS SEXUELLES FEMININES : VECU DES FEMMES MUTILEES

ET PRISE EN CHARGE MEDICALE

DIRECTRICE DE THESE : Docteur Emmanuelle PIET PRESIDENT DU JURY : Professeur Jean CABANE MEMBRES DU JURY : Professeur Jacques MILLIEZ

Professeur Pierre-Marie GIRARD

(2)
(3)

REMERCIEMENTS

Je tiens tout d’abord à remercier le Dr Emmanuelle Piet, pour m’avoir dirigée dans ce travail. Je suis heureuse de l’avoir rencontrée : à ses côtés j’ai retrouvé le “goût” de mon métier.

Merci au Pr Cabane d’avoir accepté de présider mon jury, et aux Prs Milliez et Girard d’avoir bien voulu en faire partie également.

Merci à toutes les femmes mutilées qui ont accepté de participer à ce travail, j’ai beaucoup appris grâce à elles.

Merci à tous les médecins de planification familiale qui ont collaboré à la réalisation de ce travail.

Merci à ceux qui m’ont aidée dans les différentes étapes de cette thèse : Christelle Cirbeau, Lucile Rivera, Julie, Antoine, Constance, Marine, Sharmily, Stan, Marion, Caroline, et mon cher Maxence.

Et un immense merci à mes parents bien sûr, pour tout.

(4)
(5)

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ...7


I.
 LES
MUTILATIONS
SEXUELLES
FEMININES...9


1. G

ENERALITES

...9

1.1.

Terminologie

...9

1.2. Définition ...9

1.3.

Typologie

...9

1.4. Origines
de
la
pratique...10

1.5. Fonctions
attribuées
aux
mutilations...11

1.6. Prévalence
et
distribution ...12

1.7. Déroulement
de
l’excision...14

1.8. Complications
des
MSF ...15

1.9. Luttes
contre
la
pratique
des
MSF
dans
le
monde ...17

2. M

OYENS
EMPLOYES
POUR
LUTTER
CONTRE
LES
MSF
EN
FRANCE

... 19

2.1. Dispositions
législatives...19

2.2. Actions
de
prévention ...21

2.3. Résultats
des
actions
de
prévention
et
de
répression ...22

2.4. Prise
en
charge
des
séquelles
des
MSF
et
reconstruction
chirurgicale...24

II.
 NOTRE
ETUDE... 26


1. J

USTIFICATIONS
ET
OBJECTIFS

... 26

2. M

ATERIEL
ET
METHODES

... 27

2.1. L’étude
principale
:
les
femmes
mutilées...27

2.2. L’enquête
secondaire
:
les
médecins...28

III.
 RESULTATS...30


A. ENQUETE

PRINCIPALE
:

LES

FEMMES

MUTILEES... 30

1. C

ARACTERISTIQUES
DES
FEMMES

... 30

1.1. Nombre
de
participantes ...30

1.2. Age
des
participantes ...30

1.3. Origine
géographique...31

1.4. Durée
de
séjour
en
France...32

1.5. Catégorie
socio­professionnelle ...32

1.6. Niveau
d’études ...33

1.7. Situation
familiale...33

2. H

ISTOIRE
DE
L

EXCISION

... 34

2.1. Age
au
moment
de
l’excision ...34

2.2. Lieu
de
l’excision ...35

2.3. Souvenir
de
l’excision...35

2.4. Préparation
à
l’excision...36

2.5. Complications
immédiates ...36

2.6. Découverte
de
l’excision ...37

2.7. Pourquoi
cette
pratique
? ...38

3. C

OMPLICATIONS
OBSTETRICALES
ET
TROUBLES
GENITO

URINAIRES

... 39

3.1. Complications
obstétricales...39

3.2. Troubles
génito­urinaires...39

4.

VIE
SEXUELLE

... 39

4.1. Age
lors
du
premier
rapport
sexuel...39

4.2. Circonstances
et
déroulement
du
premier
rapport...40

4.3. Vie
sexuelle
en
général...41

5.

PRISE
EN
CHARGE
DES
MSF

... 44

(6)

5.1. Douleurs
en
dehors
des
rapports...44

5.2. Difficultés
sexuelles...44

6. P

OSITIONNEMENT
FACE
A
LA
PRATIQUE
DES
MSF

... 48

6.1. Pour
elles­mêmes...48

6.2. Pour
leurs
filles...49

B. ENQUETE

SECONDAIRE
:

LES

MEDECINS... 50

1. D

IFFICULTES
POUR
ABORDER
LES
MSF
AVEC
LES
FEMMES

... 50

2.

RETICENCES
DE
LA
PART
DES
FEMMES

... 50

3.

APPORTS
ET
UTILITE
DU
QUESTIONNAIRE

... 50

IV.
 DISCUSSION ... 52


1. C

RITIQUES
DE
NOTRE
ETUDE

... 52

1.1. Mode
de
sélection
des
participantes ...52

1.2. Représentativité
des
participantes...52

1.3. Taux
de
participation...52

1.4. La
barrière
de
la
langue...52

1.5. Données
manquantes ...53

1.6. Le
type
d’étude...53

2. C

E
QUE
L

ON
APPREND
SUR
LA
PRATIQUE
DES
MSF

... 54

2.1. Perte
du
caractère
rituel...54

2.2. Le
fait
d’être
née
en
France
et
le
niveau
d’étude
ne
protègent
pas
contre
les
MSF.54 2.3. Des
conséquences
immédiates
difficiles
à
évaluer ...54

3. C

E
QUE
L

ON
APPREND
SUR
LES
FEMMES
MUTILEES

... 55

3.1. Pas
de
réticence
à
en
parler,
pour
peu
qu’on
les
y
invite ...55

3.2. Des
femmes
qui
manquent
d’information...55

3.3. Des
femmes
le
plus
souvent
opposées
à
la
pratique
des
MSF...57

3.4. Des
femmes
exposées
aux
violences
conjugales ...57

4. D

ES
PLAINTES
MULTIPLES

... 57

4.1. Des
conséquences
obstétricales
difficiles
à
évaluer...57

4.2. Des
troubles
génito­urinaires
fréquents...58

4.3. De
nombreuses
difficultés
sur
le
plan
sexuel ...58

5. C

E
QUE
NOUS
APPREND
L

ENQUETE

MEDECINS

... 59

5.1. Pas
de
difficulté
à
aborder
le
sujet...59

5.2. Une
utilité
certaine
des
entretiens
systématiques ...59

6. Q

UELLE
PRISE
EN
CHARGE
POUR
CES
FEMMES


?... 60

6.1. Il
faut
en
parler ...60

6.2. Ce
que
l’on
peut
proposer ...60

CONCLUSION...62


BIBLIOGRAPHIE ...64


(7)

INTRODUCTION

La pratique des mutilations sexuelles féminines (MSF) remonte à plus de 2000 ans. On compte aujourd’hui dans le monde entre 100 et 140 millions de femmes, jeunes filles et fillettes qui en ont été victimes, et chaque année, trois millions de filles sont susceptibles de subir le même sort (1).

Les mutilations sexuelles féminines n’ont aucun avantage pour la santé. Au contraire, on sait qu’elles sont préjudiciables à bien des égards aux filles et aux femmes. En premier lieu et avant tout, elles sont douloureuses et traumatisantes. L’ablation de tissus génitaux normaux et sains entrave le fonctionnement naturel de l’organisme et a diverses conséquences immédiates ou plus durables sur la santé. Les communautés qui pratiquent les mutilations sexuelles féminines invoquent un ensemble de raisons sociales et religieuses pour justifier la poursuite de la pratique. Du point de vue des droits de l’homme, cette pratique est le reflet d’une inégalité entre les sexes profondément enracinée, et constitue une forme extrême de discrimination à l’encontre des femmes.

La pratique des mutilations sexuelles féminines est surtout présente dans les régions occidentales, orientales et nord orientales de l’Afrique, dans certains pays d’Asie et du Moyen-Orient, et parmi certaines communautés immigrantes d’Amérique du Nord et d’Europe. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime que 5% des victimes des mutilations vivent dans des pays du Nord (1). Pour lutter contre ces pratiques, les états européens concernés, et notamment la France, ont à la fois apporté une réponse juridique et mis en place des campagnes d’information et de prévention. Si ces actions ont permis de faire reculer la pratique de l’excision, de nombreuses femmes excisées endurent aujourd’hui les conséquences physiques et psychologiques consécutives à leur mutilation. En France, on estime qu’environ 53000 femmes vivent avec cette blessure (2).

Les professionnels de santé ont une place privilégiée pour venir en aide à ces femmes.

C’est particulièrement vrai pour les médecins généralistes, les gynécologues et obstétriciens ainsi que les pédiatres, et ce d’autant plus lorsqu’ils exercent dans des régions fortement concernées en raison de la présence d’une grande concentration de femmes originaires de pays où l’on pratique les mutilations, comme c’est le cas de l’Ile de France. Or, deux études réalisées, l’une en 2006 auprès de médecins exerçant dans les maternités de Seine-Saint- Denis, et l’autre en 2007 auprès de médecins généralistes exerçant dans quatre arrondissements du Nord-Est parisien, ont montré l’insuffisance de connaissances qu’ont les médecins sur le sujet des mutilations sexuelles féminines (3,4). Ils savent mal les diagnostiquer, évaluer leurs conséquences médicales, psychologiques et sexuelles, et orienter les femmes désireuses d’une prise en charge spécifique.

L’Académie nationale de médecine a émis des recommandations en juin 2004, visant à

l’éradication des mutilations sexuelles féminines (annexe 1). Elles portaient notamment sur

l’amélioration des connaissances sur l’ampleur et les caractéristiques des MSF constatées en

France. Pour cela, l’Académie a proposé l’inscription des conséquences des MSF au

programme des études médicales, de la formation médicale continue, et plus généralement, de

l’enseignement de tout le personnel de santé. De plus, l’Académie recommandait le

renforcement et l’amélioration des pratiques médicales en matière de MSF. Elle indiquait que

tout médecin devait penser à la possibilité d’une MSF lors d’une consultation pour troubles

urinaires ou gynécologiques lorsque la patiente était originaire d’un pays à risque, et que lors

de toute consultation avec une patiente mutilée, le médecin devait fournir à la patiente des

informations sur les mutilations sexuelles, leurs conséquences médicales et les possibilités de

réparation chirurgicale.

(8)

Il aura fallu attendre une circulaire interministérielle du 8 mars 2007 pour que le thème des mutilations sexuelles féminines soit inscrit dans le programme de formation initiale des médecins au cours du deuxième cycle, et du troisième cycle pour les internes des spécialités les plus concernées, c'est-à-dire médecine générale, gynécologie obstétrique et médicale, pédiatrie et santé publique (annexe 2).

On peut espérer que de meilleures connaissances sur la pratique et les conséquences des MSF amèneront les médecins à prendre conscience de l’étendue du problème, et à mieux prendre en charge les patientes concernées.

Afin d’évaluer ce besoin de prise en charge, nous avons réalisé une enquête sur le vécu

des patientes mutilées. Nous avons voulu savoir si les femmes mutilées s’exprimaient

facilement sur ce sujet, quelles étaient leurs connaissances sur les MSF, leurs plaintes

éventuellement en rapport avec leur mutilation, et leur positionnement vis-à-vis de la pratique.

(9)

I. LES MUTILATIONS SEXUELLES FEMININES

1. G ENERALITES

1.1. Terminologie

« Mutilations génitales féminines » est un terme adopté à la conférence régionale du Comité Inter-Africain en novembre 1990, pour dénommer les pratiques rituelles et traditionnelles qui consistent à enlever de façon partielle ou totale certaines parties des organes génitaux externes féminins et à mutiler ces derniers de façon permanente.

En juin 2004, l'Académie nationale de médecine a choisi d'adopter le terme de

« mutilations sexuelles féminines », afin de bien marquer le retentissement de ces mutilations sur la sexualité féminine (5).

Le terme « excision », désignant au sens strict les clitoridectomies, est le terme le plus couramment employé dans la langue française pour parler des mutilations au sens large.

En aucun cas le terme de « circoncision féminine » ne peut être substitué à celui d'excision, car ce terme assimile l'excision à la section du prépuce qui recouvre le gland de la verge, ce qui constitue certes une blessure, mais pas un retranchement de l'organe avec perte de la fonction.

1.2. Définition

L'OMS définit les mutilations sexuelles féminines de la manière suivante : « toutes les interventions aboutissant à une ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme ou toute autre mutilation des organes génitaux féminins qui sont pratiquées pour des raisons culturelles ou autres et non à des fins thérapeutiques » (1).

1.3. Typologie

Les mutilations sexuelles féminines revêtent plusieurs formes : il peut s'agir de la section partielle ou totale du clitoris, associée ou non à celle des petites lèvres, on parle alors d'excision. Les grandes lèvres peuvent également être sectionnées et leurs moignons cousus ensemble, on parle alors d'infibulation.

L’OMS a établi en 1995 une classification des mutilations sexuelles féminines en quatre types, en fonction de l'extension des mutilations (1). Cette classification a été modifiée en 2007, et des subdivisions ont été ajoutées afin de cerner plus précisément la variété des mutilations. La classification modifiée complète de 2007 ainsi que la classification de 1995 sont présentées en annexe 3.

Type I : Ablation partielle ou totale du clitoris et/ou du prépuce (clitoridectomie).

L'acte étant pratiqué le plus souvent sur un bébé ou une fillette impubère et surtout dans

des conditions précaires, la petitesse des organes génitaux fait que le gland du clitoris est

presque toujours sectionné, rendant quasiment inexistant ce qui pourrait correspondre à la

circoncision féminine (ablation du seul prépuce du clitoris).

(10)

Type II : Ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, avec ou sans excision des grandes lèvres (excision).

C'est la forme la plus répandue dans le monde, elle représente 80% des MSF.

Type III : Rétrécissement de l’orifice vaginal avec recouvrement par l’ablation et l’accolement des petites lèvres et/ou des grandes lèvres, avec ou sans excision du clitoris (infibulation).

Il s'agit de l'infibulation, encore appelée « circoncision pharaonique ». C'est la forme la plus extrême des mutilations sexuelles féminines. Le plus souvent, après la section du clitoris et des petites lèvres, les grandes lèvres sont réséquées ou mises à vif, puis cousues entre elles (parfois avec des épines d'acacia), ou accolées en liant solidement les membres inférieurs juxtaposés pendant trois à quatre semaines, jusqu'à cicatrisation de la plaie. Ceci entraîne une fermeture quasi-totale de la fente vulvaire. Seul un petit pertuis à l'extrémité postérieure de la vulve, obtenu par l'insertion d'un bout de bois dans la plaie, est préservé pour permettre l'écoulement des urines et du sang menstruel. Les rapports sexuels sont impossibles. Avant le premier rapport sexuel, la cicatrice doit être ré-ouverte. Dans les cas les plus heureux, l'incision est faite en milieu hospitalier : c'est la « désinfibulation ». Dans les moins heureux, c'est le mari qui déchire progressivement sa femme à l’ongle ou au couteau, et un rapport complet n'est possible qu'après des semaines ou des mois de tentatives extrêmement douloureuses. Après un accouchement, le mari demandera parfois que la femme soit

« recousue à ses dimensions ».

L'infibulation représente 15% des mutilations sexuelles féminines.

Type IV : Non classées : toutes les autres interventions nocives pratiquées sur les organes génitaux féminins à des fins non thérapeutiques, telles que la ponction, le percement, l’incision, la scarification et la cautérisation.

1.4. Origines de la pratique

L’origine exacte de la pratique des mutilations sexuelles est inconnue, mais selon certains, elles dateraient de l'ancienne Egypte au Ve siècle avant Jésus Christ. La première mention écrite de l’excision date de cette époque, dans un texte de l’historien Hérodote intitulé l’Enquête. Il y évoque le fait qu’Egyptiens, Ethiopiens, Colchidiens et Phéniciens effectuaient des infibulations (6).

L’origine géographique des mutilations serait la région du haut Nil, à partir de laquelle ces pratiques se seraient ensuite étendues en Afrique, en Asie et au Moyen Orient.

Il faut noter qu’en Europe, et particulièrement en France et en Angleterre, la clitoridectomie, les cautérisations génitales et l’infibulation étaient pratiquées au XIXe siècle et au XXe siècle jusque dans les années 1920 par certains médecins comme les Français Thésée Pouillet (1849-1923) ou Paul Broca (1824-1880), pour lutter contre l’hystérie, la masturbation, et divers troubles psychiques. Aux Etats-Unis, la pratique de l’excision du prépuce clitoridien comme traitement de la frigidité et des problèmes psychologiques qui en résultent est proposée depuis les années 1940. En 1959, un médecin américain nommé Rathmann a inventé une pince spéciale pour circoncire les femmes (7,8).

Les mutilations sont pratiquées par des populations de toutes religions : animistes,

catholiques, juifs et musulmans, et ne sont préconisées par aucun texte religieux.

(11)

1.5. Fonctions attribuées aux mutilations

Selon la psychanalyste Françoise Couchard, « derrière la multiplicité des raisons ou des rationalisations pour justifier les mutilations sexuelles, prévaut le fantasme que la femme est un être dangereux pour l’homme et pour l’ordre masculin. Elle est dangereuse par la force de ses pulsions qui risquent d’entraîner l’homme à sa perte, et par son absence de contrôle.

Ainsi, Platon indique dans le Timée comment les anciens grecs se représentent la femme : elle est un être double, car dans son intérieur siège l’utérus perçu comme un être vivant, autonome et mû par le désir de faire des enfants ; il faut lui donner sa pitance par les relations sexuelles, sinon (…) il se révoltera et dominera la femme, la rendant folle comme les Bacchantes » (6).

Quoi qu’il en soit, l’objectif de la mutilation du sexe de la femme est toujours le contrôle de sa sexualité, une tentative d'asservissement par une action directe de destruction de sa sexualité.

Mais les justifications invoquées en pratique sont variées : (9)

− l'identité culturelle : la coutume et les traditions sont les raisons les plus souvent avancées pour justifier les MSF. Ces mutilations contribuent à définir l'appartenance au groupe. Cela est encore plus évident lorsque les MSF font partie de rites d'initiation et de passage à l'âge adulte.

− l'identité sexuelle : les MSF peuvent être jugées nécessaires pour qu'une jeune fille accède au statut de femme à part entière. Au Mali, l'ablation des parties « masculines » du corps de la femme, à savoir le clitoris et les petites lèvres, contribuerait à rendre sa personnalité plus féminine, de même que la circoncision des hommes viserait à leur retirer leur part de féminité pour les rendre pleinement hommes.

− le contrôle de la sexualité féminine et des fonctions reproductrices : dans de nombreuses sociétés, on justifie les MSF par la nécessité de diminuer le désir sexuel de la femme, afin de réduire le risque de relations extra-conjugales. Dans le cas de l'infibulation, la femme est

« cousue » pour n'être « ouverte » que par son mari, qui est ainsi assuré de la virginité de sa femme au moment du mariage.

− les croyances relatives à la santé, l'hygiène et aux effets esthétiques : les termes populaires pour désigner les mutilations sont synonymes de purification (tahara en Egypte, tahur au Soudan) ou d'ablution (sili-ji chez les Bambaras du Mali). Dans certaines sociétés pratiquant les MSF, les femmes non mutilées sont considérées comme impures et n'ont pas le droit de s'occuper de la nourriture ni de l'eau. On affirme aussi dans certaines sociétés que si les organes génitaux ne sont pas excisés, ils vont se développer et pendre entre les jambes.

D'autres groupes considèrent le clitoris comme un organe dangereux : il risquerait de rendre l’homme impuissant s’il entrait en contact avec son pénis lors des rapports sexuels, ou de faire mourir l’enfant s’il entrait en contact avec sa tête lors de l’accouchement. On dit parfois aussi que les MSF accroissent la fécondité.

− l'alibi religieux : bien que les MSF soient antérieures à l'Islam et que la majorité des

musulmans ne les pratiquent pas, elles ont acquis une dimension religieuse au point que la

religion est souvent invoquée à titre de justification dans des pays où des musulmans

observent cette coutume. En réalité, les MSF sont pratiquées par des musulmans, des

(12)

chrétiens (catholiques, protestants, coptes), des animistes, des juifs et des non-croyants dans toutes sortes de communautés, et aucun texte religieux ne les préconisent.

1.6. Prévalence et distribution (1)

L'OMS estime à 100 à 140 millions le nombre de filles et de femmes mutilées dans le monde, et chaque année, trois millions de filles sont susceptibles de subir le même sort.

La plupart des mutilations sont pratiquées dans 28 pays d'Afrique. Il faut noter qu'au sein d'un même pays, toutes les ethnies ne pratiquent pas les mutilations, et qu'au sein d'une même ethnie, il peut y avoir des variations de pratiques.

Figure 1 : Proportion de femmes de 15 à 49 ans ayant subi des MSF en Afrique

On trouvera ci-après la liste des pays dans lesquels des mutilations sexuelles féminines

ont été constatées en tant que pratique traditionnelle. L’estimation de la prévalence découle

des données issues des Enquêtes Nationales sur la Démographie et la Santé réalisées par le

Programme Demographic and Health Surveys (DHS), ou des enquêtes publiées par l’UNICEF

(1°).

(13)

Pays Année

Prévalence estimée des MSF chez les filles et les femmes âgées de 15 à 49

ans (%)

Bénin 2001 16.8

Burkina Faso 2005 72.5

Cameroun 2004 1.4

Côte d’Ivoire 2005 41.7

Djibouti 2006 93.1

Egypte 2005 95.8

Erythrée 2002 88.7

Ethiopie 2005 74.3

Gambie 2005 78.3

Ghana 2005 3.8

Guinée 2005 95.6

Guinée-Bissau 2005 44.5

Kenya 2003 32.2

Libéria* 45

Mali 2001 91.6

Mauritanie 2001 71.3

Niger 2006 2.2

Nigeria 2003 19

Ouganda 2006 0.6

République centrafricaine 2005 25.7

République Unie de Tanzanie 2004 14.6

Sénégal 2005 28.2

Sierra Leone 2005 94

Somalie 2005 97.9

Soudan, nord ** 2000 90

Tchad 2004 44.9

Togo 2005 5.8

Yémen 1997 22.6

Tableau 1 : Prévalence des MSF dans les pays africains où elles sont pratiquées

* Les estimations découlent de diverses études menées au niveau local et au niveau sous-national

** Environ 80% de la population totale faisait l’objet de l’étude.

Dans d’autres pays, des études ont permis de faire état de mutilations sexuelles féminines, mais aucune estimation n’a été faite au niveau national. Ces pays sont l’Inde, l’Indonésie, l’Irak, l’Israël, la Malaisie et les Emirats arabes unis. Il existe aussi des données ponctuelles concernant des mutilations sexuelles féminines dans plusieurs autres pays, notamment la Colombie, Oman, le Pérou, la République démocratique du Congo et le Sri Lanka. Les pays dans lesquels les mutilations sexuelles féminines sont pratiquées uniquement par des populations migrantes ne figurent pas dans les listes ci-dessus.

L'immigration a répandu ces coutumes à travers le monde dans les pays d'accueil : Europe, Australie, Amérique du Nord.

En France, en 2004, selon une estimation réalisée par l’Institut National d’Etudes

Démographiques (INED), le nombre de femmes adultes mutilées était compris entre 42.000 et

(14)

61 .000 (2). Ces femmes sont en très grande majorité issues des pays du sud du Sahara, et plus particulièrement de quatre pays : le Sénégal, le Mali, la Côte d’Ivoire et la Mauritanie. Mais on rencontre aussi des femmes mutilées issues du Bénin, de Centrafrique, d’Egypte, d’Ethiopie, de Gambie, de Guinée, du Kenya, du Libéria, du Nigeria, de Sierra Leone, de Somalie, du Soudan, de Tanzanie, ou encore du Tchad. Les départements les plus concernés sont les huit départements d'Ile de France, ainsi que ceux des Bouches-du-Rhône, de l'Eure, du Nord, de l'Oise, du Rhône et de la Seine-Maritime. Selon une estimation du GAMS (Groupe de femmes pour l’Abolition des Mutilations Sexuelles) au premier janvier 2002, en Ile de France, 19.000 jeunes filles étaient excisées ou menacées de l’être (10).

1.7. Déroulement de l’excision (11)

Quand?

L'âge auquel sont pratiquées les mutilations sexuelles féminines est variable en fonction des ethnies et des facteurs extérieurs. Elles peuvent être pratiquées sur des nourrissons dans les premières semaines de vie, sur des petites filles, des adolescentes voire des adultes jeunes, juste avant le mariage. Traditionnellement les mutilations étaient plutôt pratiquées sur des filles prépubères ou adolescentes, dans le cadre d'un rituel initiatique d'apprentissage des moeurs sexuelles et du rôle de la femme dans la société. La tendance en Afrique est à un abaissement de l'âge de ces pratiques vers la première année de vie (pas de souvenir, moins de résistance pendant la mutilation).

Pour les personnes résidant en France originaires de pays où l'on pratique les mutilations, celles-ci sont le plus souvent réalisées à l'occasion des vacances scolaires lors d'un retour au pays, et donc à des âges variables. Actuellement, il semblerait que les mutilations soient pratiquées de plus en plus tard, probablement pour échapper à la surveillance réalisée par les services de Protection Maternelle et Infantile jusqu’à l’âge de 6 ans.

Par qui?

Les exciseuses sont le plus souvent des femmes de la caste des forgerons, elles n'ont d'autre savoir que celui transmis par leur mère. Leur action est lucrative : elles sont rémunérées par les parents avec de l'argent, de la nourriture ou des biens matériels. Elles bénéficient du respect et de la reconnaissance de leur communauté.

Comment?

La cérémonie proprement dite revêt un caractère secret, les hommes en sont tenus à l'écart, les fillettes sont souvent excisées en groupe, les unes à la suite des autres. Le matériel utilisé, souvent le même pour toutes les fillettes, peut être un couteau, un rasoir, une pierre coupante, un morceau de verre. Il n'y a pas d'asepsie, pas d'anesthésie.

La fillette à exciser est fermement maintenue les jambes écartées par des femmes adultes,

pendant que l'exciseuse officie. Le clitoris puis les petites lèvres de la fillette sont tenus entre

le pouce et l’index de l’exciseuse, qui exerce une traction dessus pour les sectionner. Pour

favoriser la cicatrisation, l'exciseuse applique sur la plaie des compositions à base d'herbe, de

boue, de cendre, de bouse de vache. En cas d’infibulation, pour obtenir la coalescence des

grandes lèvres si celles-ci n’ont pas été cousues, les jambes de l'enfant sont ficelées de façon à

empêcher tout mouvement. Miction et défécation se font ainsi in situ pendant la durée de

l'immobilisation, soit trois à quatre semaines.

(15)

Dans les catégories socio-professionnelles les plus aisées et dans certains pays (Egypte, Soudan, Guinée, Nigeria, Kenya), les mutilations sexuelles sont souvent pratiquées dans des établissements de santé par des personnels médicaux et paramédicaux (12). Il faut rappeler que l'OMS condamne clairement la médicalisation des mutilations sexuelles féminines, car ces pratiques sont contraires à l'éthique fondamentale des soins de santé, et leur médicalisation signifierait leur légitimation.

1.8. Complications des MSF (1)

Peu d'études rigoureuses sur le plan scientifique s'intéressent aux complications médicales et psycho-sexuelles des MSF. Voici une liste des complications immédiates et secondaires classiquement observées et reconnues par l'OMS concernant les MSF :

1.8.1. Complications immédiates et à court terme

− Décès : il peut être dû à un choc hémorragique ou septique.

− Douleur : suraiguë, elle est provoquée par la section de ces organes richement innervés ; la douleur peut entraîner une perte de connaissance par malaise vaso-vagal.

− Lésion des organes de voisinage : la douleur violente ressentie est à l'origine de mouvements de défense source de blessures supplémentaires des organes voisins : plaie de l'urètre, plaie du vagin, plaie du périnée postérieur, plaie du rectum avec parfois fistule recto-vaginale.

− Hémorragie : elle succède à la section des deux artères caverneuses et de l'artère dorsale du clitoris ; elle peut être très abondante et entraîner une anémie grave, ou un collapsus et la mort par déplétion sanguine. L’hémorragie peut également survenir secondairement à la fin de la première semaine, après la chute d’escarre.

− Infections aiguës : elles sont favorisées par l'absence d'asepsie, les pansements traditionnels et par l'immobilisation prolongée au cours de laquelle la fillette baigne dans ses urines et ses excréments. Ces infections peuvent être locales (abcès, phlegmons, adénite suppurée) ou générales (gangrène gazeuse, bactériémie, tétanos) et peuvent entraîner la mort. Il existe également un risque de transmission du VIH et des hépatites B et C.

− Troubles urinaires immédiats : le passage de l'urine sur la cicatrice étant très douloureux, une rétention urinaire réflexe par appréhension peut survenir ; celle-ci peut également être due à l'oedème, à l'inflammation, à l'hématome, ou à l'obstacle mécanique constitué par la membrane cicatricielle en cas d'infibulation.

1.8.2. Complications à moyen et à long terme

− Cicatrices chéloïdes : épaisses et fibreuses, elles peuvent interférer avec la miction et la fonction sexuelle.

− Kystes dermoïdes : ils sont secondaires à l'inclusion traumatique d'un fragment d'épiderme

ou à l'occlusion de glandes sébacées lors de la cicatrisation. C'est une affection bénigne mais

qui peut être invalidante en raison de la taille parfois importante du kyste, de son siège et

(16)

des douleurs générées. De plus, ces kystes peuvent s'inflammer, se surinfecter et être source de suppuration locale.

− Névrome du nerf dorsal du clitoris : provoqué par l’emprisonnement du nerf clitoridien dans le tissu cicatriciel, il peut rendre la zone clitoridienne hyper sensible et douloureuse interdisant tout attouchement local voire de croiser les jambes en position assise.

L'infibulation, en créant une barrière en avant du méat urinaire et de l'orifice vaginal gênant le libre écoulement du sang menstruel et des urines, expose aux risques suivants :

− Rétention chronique d'urine avec les complications qui en découlent : cystites, pyélonéphrites aiguës puis chroniques pouvant aboutir à l'insuffisance rénale chronique.

− Hématocolpos : il est à l’origine de dysménorrhées et d'infections génitales basses dont l'extension au haut appareil génital peut entraîner des salpingites et des endométrites sources de synéchies et de stérilité.

Les complications obstétricales sont d'autant plus importantes que la mutilation est sévère (2) :

− Pendant la grossesse, le risque d'infections locales urinaires et génitales est accru, entraînant un risque aggravé de fausse couche spontanée, de rupture prématurée des membranes et de menace d'accouchement prématuré.

Lors de l'accouchement, on peut voir survenir les complications suivantes :

− Déchirures périnéales : elles surviennent en raison du manque d'élasticité des tissus cicatriciels.

− Travail prolongé : par obstacle à la progression du mobile foetal et à l'expulsion de l'enfant, surtout en cas d’infibulation. Une hypoxie foetale peut survenir avec risque de séquelles neurologiques ou de mort de l'enfant.

− Fistules vésico ou recto-vaginales : la rétention prolongée du foetus dans la filière génitale peut également être responsable d'ischémie et de nécrose des cloisons vésico-vaginale ou recto-vaginale, source de fistules vésico ou recto-vaginales s'exprimant par une incontinence urinaire ou fécale ultérieure, aux conséquences dramatiques sur le plan social.

Les troubles de la sexualité ainsi que les complications psychologiques sont incontestables mais sont difficiles à évaluer, faute d’études valables :

− Les dyspareunies sont fréquentes pour des raisons mécaniques évidentes, atténuant la libido et altérant la qualité des rapports sexuels.

− Anxiété, névrose, dépression, sentiment d'insécurité et manque de confiance en autrui sont

souvent rapportés, mais très peu évalués par des études.

(17)

1.9. Luttes contre la pratique des MSF dans le monde (25)

1.9.1. L’émergence des MSF en tant que question relevant des droits humains

Aujourd’hui, la pratique des MSF est considérée dans une large mesure comme une violation des droits humains, mais cette notion a évolué au cours du temps. Pendant de nombreuses années, la pratique des MSF a été perçue comme un acte privé exécuté par des individus plutôt que par des acteurs publics. On était réticent à imposer des valeurs universelles à un phénomène perçu comme une tradition culturelle qui contribuait à forger l’identité culturelle des communautés qui la pratiquaient.

Les premières initiatives de l’Organisation des Nations Unies (ONU) pour porter la pratique à l’ordre du jour international remontent au début des années 1950, lorsque la question fut abordée au sein de la Commission des Droits de l’Homme. En 1958, le Conseil économique et social des Nations Unies invita l’OMS à entreprendre une étude sur la persistance des coutumes soumettant les filles à des interventions rituelles. Ces initiatives furent certes importantes pour attirer l’attention internationale sur la question, mais leur impact resta limité.

Les années 1960 et 1970 furent marquées par une prise de conscience croissante des droits des femmes dans de nombreuses parties du monde, et les associations féminines commencèrent à organiser des campagnes de sensibilisation sur les dangers des MSF pour la santé des filles et des femmes. Le premier Séminaire Régional sur les Pratiques Traditionnelles Nuisibles affectant la santé des femmes, organisé en 1979 par l’OMS à Khartoum, au Soudan, lança un appel historique pour condamner la pratique sous toutes ses formes, y compris dans des conditions médicales et hygiéniques appropriées. En outre, il aboutit à une recommandation pour l’établissement d’un Comité Inter-Africain sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des enfants. Ce comité a été créé en 1984 à Dakar. Il joue un rôle majeur au niveau international pour garantir le fait que la question soit soulevée lors des conférences internationales et abordée au moyen d’instruments juridiques appropriés.

Les années 1980 et 1990 représentèrent une époque fondamentale pour la reconnaissance des MSF en tant que violation des droits humains des filles et des femmes. La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Convention on the Elimination of all forms of Discrimination Against Women, ou CEDAW), adoptée le 18 décembre 1979 par l’Assemblée générale des Nations Unies, marqua une étape importante en ce sens. La question des MSF dans la perspective des droits humains fut reprise par la suite dans le cadre de plusieurs conférences internationales, notamment lors de la Conférence Mondiale de l’ONU sur les Droits de l’Homme à Vienne, en Autriche (1993), lors de la Conférence Internationale sur la Population et le Développement au Caire, en Egypte (1994), et lors de la Quatrième Conférence Mondiale sur les Femmes à Pékin, en Chine (1995), ainsi que lors des rencontres qui suivirent en 2000 et 2005 à New York, aux Etats-Unis.

Le développement et l’adoption d’instruments juridiques internationaux sont importants pour créer un cadre favorable aux actions entreprises pour encourager l’abandon de la pratique. Le Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples de 1981, sur les droits des femmes en Afrique, désigné sous l’appellation de Protocole de Maputo, est un document juridique adopté par consensus en 2003 par les chefs d’Etat de l’Union africaine.

L’article 5 de ce protocole interdit et condamne explicitement la pratique des MSF. Il

demande aux états parties de prendre des mesures en vue de sensibiliser l’opinion publique à

la question, d’introduire une législation qui interdise et sanctionne la pratique des MSF, de

(18)

soutenir les filles et les femmes qui ont subi une mutilation et de protéger celles qui sont à risque. A ce jour, le Protocole de Maputo a été signé par 45 des 53 états membres de l’Union Africaine, et ratifié par 25 d’entre eux.

1.9.2. Législations nationales

L’introduction d’une législation nationale qui interdit et réprime la pratique des MSF est indispensable pour accélérer efficacement le changement quand un processus de revirement sociétal est déjà en cours et que les citoyens sont sensibilisés à la question. Mais la seule menace de sanctions risquerait de faire basculer la pratique dans la clandestinité sans changer les comportements. Il est donc important que la législation introduise ou comporte des dispositions de protection des enfants, des mécanismes généraux d’assistance sociale et des campagnes d’information et de sensibilisation.

En Afrique et au Moyen-Orient, de nombreux pays ont introduit une législation spécifique pour mettre fin à la pratique des MSF par ordonnance ou par décret, notamment le Bénin (2003), le Burkina Faso (1996), la République centrafricaine (19662), la Côte d’Ivoire (1998), Djibouti (1995), l’Egypte (1996), le Ghana (1994), la Guinée (1965, mise à jour en 2002), le Kenya (2001), le Niger (2003), le Sénégal (1999), la Tanzanie (1998) et le Togo (1998). Dans certains cas, la pratique est interdite en vertu de la constitution nationale. Par exemple, en Ethiopie, la constitution de 1994 interdit explicitement les pratiques traditionnelles néfastes, notamment celles qui oppriment les femmes et portent atteinte à leur santé physique et mentale. Les constitutions du Ghana, de la Guinée et de l’Ouganda contiennent des interdictions semblables. Dans d’autres pays, comme le Tchad, le Mali et le Niger, les MSF sont considérées comme des lésions relevant du droit pénal.

Reconnaître l’importance de la législation nationale n’empêche pas de constater ses limites. Dans certains cas, les partisans du maintien de la pratique des MSF ne manqueront pas d’exploiter les lacunes qui peuvent subsister. En Egypte, en 1996, le ministère de la Santé a émis un décret interdisant la pratique des MSF, excepté lorsqu’elle est nécessitée par des raisons médicales. En réalité, cette clause d’exception pour raisons médicales a créé une lacune qui, associée à une intense propagande sur les risques potentiels des MSF, a contribué à une médicalisation accélérée de la pratique. De plus, dans de nombreux pays, les lois existantes sont mal connues et trop rarement appliquées. En 2000, seuls quatre des 28 pays d’Afrique et du Moyen-Orient où sont pratiquées les MSF avaient intenté des poursuites à cet égard : le Burkina Faso, l’Egypte, le Ghana et le Sénégal. Le Comité Inter-Africain joue un rôle important pour la sensibilisation des autorités judiciaires à l’application des lois existantes.

Des lois interdisant la pratique des MSF ont également été promulguées par plusieurs

pays confrontés à cette pratique dans les communautés d’immigrés, notamment l’Australie

(de 1994 à 1996 selon les Etats), le Canada (1997), la Nouvelle-Zélande (1995), et les Etats-

Unis (1996). En Europe, les législateurs ont généralement privilégié une des trois attitudes

suivantes : l’introduction d’une nouvelle législation spécifique criminalisant la pratique

(Norvège, Suède et Royaume-Uni), la modification de la législation existante introduisant une

référence spécifique à la pratique (Belgique, Danemark, Italie et Espagne), ou l’interdiction

des MSF en vertu des lois pénales existantes relatives aux lésions corporelles et aux actes de

violence à l’égard des mineurs (Finlande, France, Allemagne, Grèce, Pays-Bas et Suisse). En

outre, plusieurs pays européens intègrent le principe d’extraterritorialité dans leur législation

pour éviter que l’interdiction juridique n’incite les familles à renvoyer les femmes et les filles

dans leur pays d’origine pour y subir des MSF.

(19)

Le nombre de poursuites intentées en vertu de ces lois est indicatif de la réaction des divers états européens face aux MSF. Par exemple, au Royaume-Uni, depuis l’introduction en 1985 d’une législation spécifique criminalisant la pratique, il n’y a eu aucune poursuite. En Suède, environ 18 ans après que le pays eut introduit une loi spécifique, un seul cas avait été porté devant le tribunal en 2000. A cette même date, on comptait déjà en France 25 poursuites pour participation à des MSF. L’existence d’une législation pénale générale n’entraîne pas forcément des poursuites. Par exemple, la situation législative des Pays-Bas est semblable à celle de la France, mais à ce jour on ne compte aucune poursuite pour MSF, et le gouvernement a explicitement prôné une politique orientée vers la prévention, l’autorité judiciaire ne devant intervenir qu’en dernier ressort. C’est également la position de l’Italie.

2. M OYENS EMPLOYES POUR LUTTER CONTRE LES MSF EN FRANCE En France, l’émergence de la question des mutilations sexuelles remonte à la fin des années 1970, période à laquelle les premières femmes d’étrangers travaillant en France sont arrivées dans le cadre du regroupement familial. Les professionnels de santé les premiers alertés ont été ceux intervenant dans le champ de la Protection Maternelle et Infantile (PMI) accueillant les populations concernées par les mutilations. Au cours des années 1980-1982, en Ile de France, plusieurs petites filles à peine âgées de quelques mois sont mortes après avoir été mutilées. Les pouvoirs publics et l'opinion ont alors été brutalement alertés sur la pratique des mutilations sexuelles féminines. Depuis cette prise de conscience, une série d'initiatives a permis une réelle évolution de la prise en compte de ces pratiques.

2.1. Dispositions législatives (13)

Les premiers procès concernant des faits de MSF on été jugés devant le Tribunal Correctionnel, à partir de 1979, sous divers chefs d'inculpation : homicide involontaire, non assistance à personne en danger, coups et blessures volontaires. C'est l'intervention d'associations constituées partie civiles dans un procès pénal qui a conduit à retenir en 1983 une qualification criminelle pour des actes d'excision car elles ont fait valoir que si l'excision n'est pas explicitement mentionnée dans le Code Pénal, les textes réprimant les actes de mutilation, quel qu'en soit le mobile, s'appliquent à cette pratique. Ces textes renvoient à une qualification criminelle, entraînant la seule compétence de la Cour d'Assises et non plus du Tribunal Correctionnel.

Il n'existe donc pas en France de qualification juridique spécifique pour les faits de mutilation sexuelle féminine. Ces pratiques peuvent actuellement être poursuivies et sanctionnées en matière criminelle au titre soit :

− de violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, infraction punie de 10 ans d'emprisonnement et de 150 000 euros d'amende (article 222-9 du Code Pénal), et de 15 ans de réclusion criminelle lorsque ces violences sont commises à l'encontre de mineurs de quinze ans (article 222-10 du Code Pénal).

− de violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner, infraction punie de 15 ans de réclusion criminelle (article 222-7 du Code Pénal), et réprimée à hauteur de 20 ans de réclusion criminelle (article 222-8 du Code Pénal) lorsqu'elle concerne les mineurs de quinze ans.

− de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours,

infraction punie de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende (article 222-

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11 du Code Pénal), et de 5 ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise sur un mineur de 15 ans (article 222-12 du Code Pénal).

Une série de mesures viennent renforcer la répression de la pratique des MSF:

− Obligation de signalement :

Les professionnels confrontés à un constat d'excision pratiquée sur une mineure sont tenus, sous peine de sanctions, d'en informer les autorités judiciaires ou administratives (article 434-3 du Code Pénal). Dans ce cas, le secret professionnel est levé selon l'article 226- 14 de Code Pénal. Cet article vise expressément les mutilations sexuelles depuis sa modification du 4 avril 2006, qui a remplacé « atteintes sexuelles » par « atteintes ou mutilations sexuelles », afin de lever toute ambiguïté possible quant à la définition des termes et de favoriser la dénonciation des cas de MSF. Le signalement d'une mutilation aux autorités compétentes ne peut faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire à l'encontre du professionnel à l'origine du signalement (loi du 2 janvier 2004).

− Obligation d'assistance à personne en danger :

Les professionnels informés d'un projet d'excision doivent saisir le Procureur chargé des mineurs ou le Juge des Enfants, selon l'article 223-6 du Code Pénal qui stipule que toute personne pouvant empêcher par son action la commission d'un crime est tenue de le faire sous peine de poursuites judiciaires pour non assistance à personne en péril (5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende).

− Répression des excisions pratiquées à l'étranger :

Les dispositions légales ont été renforcées afin de sanctionner également les MSF commises à l'étranger sur des fillettes françaises ou résidant habituellement en France. En effet, il est fréquent que des parents fassent exciser leurs filles à l'occasion d'un retour au pays lors des vacances scolaires, dans le but de se soustraire à l'interdiction légale existant en France.

L'article 113-7 du Code Pénal prévoit la sanction des faits délictueux commis à l'étranger sur une personne ayant la nationalité française. La loi du 4 avril 2006 permet désormais des poursuites lorsque des fillettes de nationalité étrangère mais résidant habituellement en France ont été mutilées à l'étranger.

− Délai de prescription :

La loi du 4 avril 2006 allonge le délai de prescription à 20 ans après la majorité de la victime, qui peut ainsi porter plainte jusqu'à l'âge de 38 ans.

Depuis 1979, date de la première affaire judiciaire d'excision répertoriée, une quarantaine

de procès ont eu lieu, deux exciseuses ont été condamnées respectivement à cinq ans et à huit

ans de prison ferme, les parents (jugés comme complices) ont pour la plupart bénéficié de

condamnations à des peines allant de un à cinq ans d'emprisonnement avec sursis, et quatre

mères et quatre pères ont eu des peines de prison ferme pouvant aller jusqu'à 2 ans. Depuis un

arrêt du 16 février 1999 qui a prononcé la première condamnation pécuniaire, les

condamnations à dommages et intérêts au profit des victimes sont passées de 12.000 à 25.000

euros par enfant en janvier 2004.

(21)

2.2. Actions de prévention 2.2.1. Les associations

Les principales associations luttant contre la pratique de MSF sont:

− Le GAMS (Groupe de femmes pour l'Abolition des Mutilations Sexuelles) : créé en 1982, c’est la section française du Comité Inter-Africain. Il est constitué de femmes françaises et de femmes africaines ayant des compétences dans les champs de la santé, du social et de l'éducation. Il mène des actions de prévention auprès des populations africaines immigrées en France, et de sensibilisation et d'information auprès des professionnels sociaux et médico-sociaux, éducateurs et enseignants. Il organise également des journées de réflexion, des séminaires, et met à disposition des personnes intéressées des ressources documentaires.

− La CAMS (Commission pour l'Abolition des Mutilations Sexuelles) : elle a été fondée en 1982 par Awa Thiam, universitaire sénégalaise qui a publié en 1978 « La parole aux Négresses » pour dénoncer la pratique des mutilations. La CAMS a notamment mené son combat sur le terrain judiciaire en se portant partie civile dans toutes les affaires de MSF.

Linda Weil-Curiel, avocate au Barreau de Paris et présidente de la CAMS, a largement contribué à l'évolution de l'approche judiciaire du problème de l’excision en France.

− Gynécologie Sans Frontières : cette association a été créée en 1995 par des gynécologues et des sages-femmes dans le but de promouvoir le développement, la santé et la dignité de la femme dans le monde. En 2006, la Direction Générale de la Santé a confié à Gynécologie Sans Frontières le soin d’organiser, en collaboration avec le GAMS et les Directions Régionales des Affaires Sanitaires et Sociales, neufs conférences régionales de sensibilisation sur les MSF, destinées à l’information et à la formation des professionnels de santé et des acteurs sociaux sur ce thème. L’association a édité un cédérom qui peut être utilisé comme support dans le cadre de formations sur les MSF.

− Le MFPF (Mouvement Français pour le Planning Familial) lutte également aux niveaux mondial, européen et national pour l'abolition des mutilations sexuelles.

2.2.2. Politiques publiques de lutte contre les mutilations (14)

Dans une première approche, les pouvoirs publics français ont soutenu et financé des actions éducatives d'associations et d'organismes agissant dans le domaine de l'éducation à la santé. Puis, en 1993, une affiche et une plaquette à destination du public et des professionnels intitulée « Nous protégeons nos petites filles » a été réalisée sous l'impulsion de la Délégation aux Droits des Femmes d'Ile de France, avec la collaboration de médecins de PMI experts et des associations (GAMS, CAMS, MFPF, Cimade).

Une campagne de prévention a été officiellement lancée en novembre 1993, initialement en Ile de France puis étendue à l'ensemble du territoire français en 1994. En 2003, une actualisation de la plaquette intitulée « Protégeons nos petites filles de l'excision » a été éditée (annexe 4).

Depuis 1994, une circulaire ministérielle inscrit la prévention des mutilations sexuelles

féminines dans les orientations d'action des départements accueillant les populations

concernées (circulaire DPM 92/94 du 19/12/94 relative à l'intégration des populations

immigrées).

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En application de directives nationales, dans chaque département, les préfets mettent en place et animent des commissions départementales d'action contre les violences faites aux femmes placées sous leur autorité. Leur mission vise à traiter, prendre en charge, réprimer et prévenir ces violences constitutives d'infractions délictuelles et criminelles. Dans le cadre de sous-commissions « Prévention des mutilations sexuelles féminines », elles suscitent la mise en place d'actions de formation des personnels et d'information des familles.

Les services déconcentrés des Ministères de la Santé et des Solidarités et de l’Emploi, de la Cohésion Sociale et du Logement, en collaboration avec Gynécologie Sans Frontières et le GAMS, organisent depuis 2007 des séminaires de sensibilisation sur les mutilations sexuelles féminines dans les régions de France les plus concernées.

2.2.3. Le rôle des professionnels de santé, le rôle particulier de la PMI

Les centres de Protection Maternelle et Infantile (PMI) sont des lieux privilégiés pour mener une action concertée en matière de mutilations. En effet, les centres de PMI sont accessibles dans tous les quartiers à forte densité d'immigrants et des interprètes peuvent assister aux consultations si nécessaire. De plus, les consultations sont gratuites et ne nécessitent pas de couverture sociale.

Les professionnels exerçant en centre de PMI ont pour rôle d'informer les familles sur ce que sont les mutilations sexuelles féminines, leurs conséquences sur la santé et la sexualité, l'interdiction légale de les pratiquer en France mais aussi à l'étranger sur les fillettes vivant en France. Un examen systématique et commenté des vulves des fillettes lors de chaque consultation est une manière efficace de convaincre et de dissuader les parents de faire exciser leurs filles. Le signalement de toute mutilation constatée lors d'un examen ou de tout projet d'excision révélé par les parents permet de protéger l’enfant concernée, ses petites sœurs éventuelles, ainsi que les autres enfants de la communauté.

De plus, lors des consultations de planification familiale, le médecin de PMI a pour rôle d'informer les patientes qui ne savent pas toujours qu'elles sont mutilées, de dépister les conséquences de ces mutilations sur leur santé et leur sexualité, et de les informer sur les possibilités de réparation et de traitement des séquelles éventuelles.

Enfin, des séances d'information collective peuvent avoir lieu dans les centres de PMI, lors des périodes de retour au pays pour les vacances par exemple, ou dans le cadre de cycles d'information.

En dehors des PMI, tous les professionnels de santé, et particulièrement les médecins généralistes, gynécologues et obstétriciens, pédiatres hospitaliers et de ville, les médecins de crèche, de santé scolaire, les sages femmes, les puéricultrices et auxiliaires de puériculture ont un rôle important à jouer dans la lutte contre les MSF.

2.3. Résultats des actions de prévention et de répression

Les actions conjuguées de prévention et de répression des MSF ont réussi à faire reculer

la pratique des mutilations en France. Il existe peu de données chiffrées sur le sujet, et

l'absence de registre national sur les victimes de maltraitance ne permet pas d'évaluation

précise, mais à titre d'exemple, dans une PMI de Mantes la Jolie dans les Yvelines, sur 135

fillettes d'origine africaine examinées en 1985, 38 fillettes, soit 24%, étaient excisées, alors

qu'elles n'étaient plus que 4.7% (7 fillettes) en 1992. De plus, en 2001, aucune nouvelle

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département, en 1983, sur 32 fillettes appartenant à une ethnie pratiquant l'excision, 13 étaient excisées et 6 devaient l'être. En 1994, sur les 21 fillettes potentiellement concernées suivies dans ce centre, aucune fillette n'était excisée (14).

Cependant, certaines difficultés persistent:

− Absence de formation des médecins

Jusqu’en 2007, il n'existait aucun enseignement concernant les MSF dans le cursus des études médicales, pas même au cours du troisième cycle dans les spécialités qui sont le plus fréquemment confrontées à cette pratique (pédiatrie, gynécologie-obstétrique, médecine générale).

Les médecins peuvent être formés secondairement à la prise en charge des MSF dans le cadre de journées de formation organisées ponctuellement par les PMI ou les associations, mais ces enseignements ne sont pas obligatoires et ne touchent pas suffisamment de professionnels.

Ainsi, dans une étude réalisée en 2006 dans les centres de PMI de Seine St Denis (15), 56% des médecins interrogés déclaraient n'avoir jamais suivi de formation sur les MSF ; les 44% ayant été formés l'ont été secondairement dans le cadre de leur activité professionnelle, et dans près de la moitié des cas il s'agissait d'une démarche personnelle. Il faut noter que 97%

de ces médecins suivaient régulièrement des fillettes excisées.

Une circulaire interministérielle du 8 mars 2007 demandait aux doyens et présidents d'université d'intégrer dans les programmes du deuxième cycle des études médicales et du troisième cycle des spécialités concernées une formation portant sur la prévention, le dépistage et la prise en charge des MSF (annexe 2). Pourtant, en septembre 2008, seules les facultés de Lille, Amiens et Nantes avaient intégré l’enseignement des MSF dans le programme du tronc commun des études médicales, et les facultés de Caen, Amiens et Rouen l’avaient intégré dans le programme du diplôme interuniversitaire de gynécologie-obstétrique.

La formation des infirmières, sages-femmes, puéricultrices et auxiliaires de puériculture devrait également désormais intégrer ces thématiques.

Un guide intitulé « Le praticien face aux mutilations sexuelles féminines », dont la réalisation est coordonnée par Gynécologie Sans Frontières, devrait être disponible dans les mois à venir.

− Réticences de médecins face au signalement

Un deuxième obstacle à la lutte contre les MSF est la réticence persistante d'un certain

nombre de médecins à prendre en compte les mutilations. Ainsi, dans l'étude réalisée en PMI

en Seine St Denis (15), 59% des médecins qui avaient constaté une excision sur une fillette

lors d'une consultation n'avaient pas jugé nécessaire de faire un signalement. Cette attitude

s'explique à la fois par la crainte des professionnels de trahir la confiance des familles, et par

l'idée que « le mal est fait », et qu'il est donc inutile de « faire entrer la police » dans ces

familles. Ces raisonnements sont erronés car d'une part l'expérience montre que la plupart des

familles continuent à fréquenter la PMI malgré les signalements, et d'autre part ne pas signaler

une MSF constatée c'est oublier les autres enfants à naître dans la même famille et dans

l'entourage. C'est probablement en grande partie la méconnaissance de ces pratiques qui est

responsable de la réticence des médecins à prendre en compte les MSF, et l'on peut espérer

qu'une formation systématique des médecins aboutira à supprimer ces raisonnements.

(24)

− Le difficile contrôle après l'âge de six ans

Comme on l'a vu, certaines familles attendent que leurs filles aient passé l'âge de six ans pour les faire exciser, afin d'échapper au contrôle réalisé en PMI. Il est donc indispensable que le relai soit pris au niveau scolaire, et que les enseignants soient formés afin de repérer dans leurs classes un changement de comportement chez les filles exposées au risque d'excision, notamment avant et au retour de vacances passées au pays d'origine. Un outil d'aide aux enseignants pour le repérage et l'orientation des jeunes filles à risque de MSF, élaboré en concertation avec les associations et les enseignants, aurait dû être disponible à la rentrée 2007, mais il n’était toujours pas disponible à la rentrée 2008 (16).

2.4. Prise en charge des séquelles des MSF et reconstruction chirurgicale

Pour les femmes qui ont été mutilées, la médecine peut maintenant apporter des réponses concrètes en terme de réparation.

2.4.1. Reconstruction du clitoris

Cette intervention est pratiquée par le Dr Foldès depuis vingt-cinq ans, mais la technique opératoire telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui a été mise au point il y a une dizaine d'années.

La reconstruction du clitoris peut être réalisée dans pratiquement tous les cas d'excision. Elle consiste en une chirurgie plastique reconstructrice de l'organe lui-même sans transposition d'autres tissus.

Les différents temps opératoires sont les suivants :

− reprise de la cicatrice de la mutilation pour retrouver en profondeur le moignon clitoridien.

− libération du moignon par libération des genoux clitoridiens.

− dissection de l'apex du moignon d'amputation et exérèse de la couche cicatricielle, porteuse de névromes

− reconstitution d'un néo gland à partir d'une tranche saine du corps érectile, normalement innervée et vascularisée, et réimplantation de ce néo gland en position anatomique.

− interposition dorsale des tissus graisseux ou caverneux pour prévenir une remontée du gland lors de la cicatrisation.

Cette intervention, réalisée sous anesthésie générale dure quarante-cinq à soixante minutes, nécessite vingt-quatre heures d'hospitalisation et est prise en charge par la sécurité sociale. Elle est pratiquée dans quelques centres en France (liste en annexe 10).

Selon une étude réalisée en 2006 par l’équipe du Dr Foldès à partir de 453 patientes opérées, le résultat anatomique serait positif dans 80% des cas, et le résultat fonctionnel, défini par une forte amélioration de la qualité de la vie sexuelle, serait positif dans 75% des cas. (24)

2.4.2. Prise en charge chirurgicale des séquelles des MSF

− La désinfibulation : elle consiste en une reprise de la suture labiale et une reconstitution plus

ou moins fidèle de la partie supérieure des nymphes. Une libération d'adhérences internes

des régions crurales est parfois nécessaire.

(25)

− La prise en charge des séquelles vulvaires : exérèse de kystes par inclusion au niveau des grandes lèvres, plastie de cicatrices chéloïdes.

− La prise en charge des complications obstétricales : les déchirures vulvo-périnéales graves

survenant lors de l'expulsion, sclérosées et rétractées faute de prise en charge initiale lorsque

l'accouchement a lieu dans un milieu non ou insuffisamment médicalisé, peuvent nécessiter

des plasties et des reconstructions vulvaires. Les fistules vésico-vaginales et recto-vaginales

peuvent également être réparées, mais elles sont volontiers récidivantes et nécessitent un

suivi rigoureux. Dans certains cas, des dérivations vésicales ou digestives peuvent être

nécessaires.

Références

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