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Vers une méthode de recyclage et de valorisation des aimants permanents à base de terres rares par électrochimie en milieux liquides ioniques

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Celine Bonnaud

To cite this version:

Celine Bonnaud. Vers une méthode de recyclage et de valorisation des aimants permanents à base de terres rares par électrochimie en milieux liquides ioniques. Génie chimique. Université Grenoble Alpes, 2017. Français. �NNT : 2017GREAI039�. �tel-01734824�

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Pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE LA COMMUNAUTE UNIVERSITE

GRENOBLE ALPES

Spécialité : Matériaux, Mécanique, Génie Civil, Electrochimie Arrêté ministériel : 25 mai 2016

Présentée par

Céline BONNAUD

Thèse dirigée par Isabelle BILLARD et codirigée par Nicolas PAPAICONOMOU

préparée au sein du Laboratoire d’Electrochimie et de

Physicochimie des Matériaux et des Interfaces - LEPMI

dans l'École Doctorale I-MEP2

Vers une méthode de recyclage

et de valorisation des aimants

permanents à base de terres

rares par électrochimie en

milieux liquides ioniques

Thèse soutenue publiquement le 17 Octobre 2017, devant le jury composé de :

Mme Corinne LAGROST

Chargée de recherche, CNRS, Rennes (Rapporteure) M. Werner KUNZ

Professeur, Université de Regensburg (Rapporteur) M. Joao COUTINHO

Professeur, Université d’Aveiro (Président) Mme Isabelle BILLARD

Directrice de recherche, CNRS, Grenoble (Directrice de thèse) M. Nicolas PAPAICONOMOU

Maître de conférences, Université Savoie Mont-Blanc (Encadrant de thèse) M. Emmanuel BILLY

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

REMERCIEMENTS

Je vais tout d’abord commencer par les principaux acteurs de ce travail : mes directeurs de thèse. Nicolas, ces trois années ont été riches de discussions, de courses dans les couloirs, d’idées, d’expériences et d’apéros. Merci de m’avoir montré que l’on pouvait être un scientifique hors pair mais aussi un ami sincère. Isabelle, bien plus qu’une directrice de thèse, tu le sais bien, tu es devenue et tu resteras ma maman scientifique. Tu m’as accompagnée dans tout ce parcours d’apprentissage avec patiente et gentillesse. Du fond du cœur MERCI !

Je tiens ensuite à remercier tous les membres du jury pour l’honneur qu’ils me font de juger ce travail :

 Corinne Lagrost et Werner Kunz, pour avoir accepté d’être rapporteur.  Joao Coutinho pour avoir consenti à présider le jury.

 Emmanuel Billy sans qui je n’aurais jamais débuté ce sujet de thèse.

Mes remerciements vont aussi et surtout à toutes les personnes qui m’ont apporté leur précieuse aide scientifique ou technique tout au long de ce travail. Sarah Bureau de l’ISTERRE pour les analyses ICP. Rachel Martin, Joëlle Calabro et Francine Roussel du CMTC pour les formations et multiples analyses MEB-EDS. Un remerciement tout particulier à Fredéric Charlot, tu m’as fait confiance, as compris mes problématiques et le tout avec une rare gentillesse. Stéphane Coindeau et Thierry Encinas, également au CMTC, pour les analyses DRX. Merci à vous deux pour les nombreux essais acharnés mais aussi toutes les interprétations et discussions de cristallographie. Dans la même veine, Saïd Obbade pour nos discussions de mailles et d’atomes mais aussi pour ta gentillesse et ta considération. Vincent Martin pour les analyses ATG (mais aussi pour mes fonds d’écran sublimes !). Jean-Claude Leprête, Renaud Bouchet, Jonathan Desseure, Marian Chatenet et Fredéric Maillard pour avoir toujours pris le temps d’écouter mes questions existentielles, de trouver les réponses appropriées mais aussi pour tout le matériel que vous m’avez prêté ou donné. Eric Chaînet pour tout tout tout,

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

fonctionnait. Gilles, mon industriel discret. Merci d’avoir compris mes envies d’applicabilité et d’avoir été si généreux.

Et comment ne pas parler de tous ceux qui ont fait du laboratoire ma seconde maison ?

Tout d’abord merci à celle qui a partagé ma chambre scientifique, Lenka. J’ai vraiment apprécié ces années de collocation avec toi !

Et puis tous les copinous, loulous et ninettes (Marco, Pyo, Mathieu, Fabinou, Clémence, Anicet, Marionnette, Naïmette, Tokitok, Lazounet et Philou), vous avez été d’un soutien sans faille pendant ces années ! Merci pour les franches rigolades autour d’un thé, d’une bière ou d’un repas ! Une mention spéciale pour Matthieu, le loulou ++. Ton accent chantant et nos trois bises ont fait de toi mon soleil du laboratoire. Merci aussi de m’avoir reboosté tant de fois (parfois à l’aide de mojitos, de whisky ou pastaga). Evidemment les coquinettás: Fannifl’, Gwenninouflette et ninetás (Alice), à jamais dans mon cœur !

Un big up spécial à mes frères de thèse, Boubou, Vince, Fannifl’, Tristouille et Rémi. On l’aura fini cette thèse, ensemble du début à la fin !

Enfin le personnel administratif, Claire, Claire & Yasmine. Vous êtes au top les filles !

Quittons un peu le monde du laboratoire pour nous rapprocher des personnes à qui je dois tellement. Ma famille, mais aussi ma belle-famille, je vous remercie d’être toujours présents pour m’encourager et croire en moi (Tata & Tonton, Romanou & Nani, Irène…). Merci à Chloé et Jason, la belle sis et le bobof, pour avoir finalement fait de ces semaines de rédaction un plaisir. Et bien sûr, par-dessus tout, merci papa et maman. Je vous dois tout ça par votre éducation, vos encouragements et votre fierté. Vous êtes et serez toujours les fondations sur lesquelles tout repose. Merci aussi à ma mamé, mon bonheur, qui s’est éteinte cette année. Je te dédie ce travail, toi qui m’a un jour dit « enfin un médecin dans la famille ».

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

Il reste enfin le dernier, l’unique, le Boubou. Tu es ma référence, mon binôme et mon amour sans qui ni la maison ni le labo n’auraient de sens. Je te remercie sincèrement pour cet immense bonheur que tu m’apportes au quotidien…♥

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

« Le doute est dérangeant, mais la certitude ridicule » Dr. Isabelle Billard citant Voltaire

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

SOMMAIRE

Notations et abréviations 15

Introduction générale 19

CHAPITRE I. Les terres rares, les aimants permanents et leurs voies de recyclage :

mise en perspective et contexte 23

1.1 Les terres rares 24

1.1.1 Définition, histoire et gisements 24

1.1.2 Les applications stratégiques 26

1.1.3 La grande crise des terres rares en 2010 28

1.1.4 Les alternatives envisagées 29

1.1.5 Etude du marché des terres rares 32

1.2 Les aimants permanents à base de terres rares 34

1.2.1 Définitions et propriétés principales 34

1.2.2 Les applications techniques 35

1.2.3 Le « potentiel recyclage » 36

1.3 Le recyclage des aimants permanents à base de terres rares 39

1.3.1 L’hydrométallurgie 40

1.3.2 La pyrométallurgie 41

1.3.3 L’extraction en phase gazeuse 41

1.4 Une méthode de recyclage novatrice : l’utilisation de l’électrochimie pour

le recyclage des APTR 43

1.4.1 Le défi : l’électrodéposition des terres rares des APTR 43

1.4.2 L’électrolyte : les liquides ioniques 46

1.4.3 L’électrochimie et l’électrodéposition des éléments d’alliage des

APTR dans les RTIL 56

1.5 Conclusion 61

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

CHAPITRE II. Techniques expérimentales 71

2.1 Initiation aux principes et conventions électrochimiques 72

2.1.1 Systèmes électrochimique à l’équilibre 73

2.1.2 Système électrochimique hors équilibre 76

2.2 Montage (généralités) 80

2.2.1 La chaîne électrochimique 80

2.2.2 La chute ohmique 81

2.3 Protocoles de mesures électrochimiques 84

2.3.1 La voltampérométrie 84

2.3.2 Méthodes électrométriques : potentiométrie et ampérométrie 87

2.3.3 L’impédance électrochimique 88

2.4 Mesures physico-chimiques 91

2.4.1 Evaluation de la quantité d’eau résiduelle 91

2.4.2 Détermination de la concentration en soluté 91

2.4.3 Caractérisation des dépôts et poudres 92

2.5 Conclusion 97

2.6 Références bibliographiques 98

CHAPITRE III. L’électrochimie dans les liquides ioniques à température ambiante 99

3.1 Précisions expérimentales 100

3.1.1 Présentation des liquides et sels ioniques utilisés 100

3.1.2 L’environnement électrochimique 102

3.2 Les références électrochimiques 104

3.2.1 Le couple redox de référence ferrocénium/ferrocène 104

3.2.2 Compensation de la chute ohmique 105

3.2.3 L’électrode de référence 110

3.3 Caractérisation électrochimique des liquides ioniques 125

3.3.1 Les fenêtres électrochimiques des RTIL 125

3.3.2 Etude la stabilité cathodique du RTIL 134

3.4 Conclusions 145

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

CHAPITRE IV. L’électrodéposition des sels métallique dans les RTIL 157

4.1 Etat de l’art spécifique: l’électrodéposition dans les RTIL [Tf2N]- 158

4.1.1 Electrodéposition des terres rares Sm(III), Nd(III), Dy(III) et

Pr(III) dans un RTIL [Cation][Tf2N] 159

4.1.2 Electrodéposition de Co(II) dans un RTIL [Cation][Tf2N] 162

4.2 Recherche d’une méthodologie pour l’électrodéposition dans

[C1C4Pyrr][Tf2N] : l’étude de Sm(III)

163

4.2.1 L’électrodéposition par méthode ampérométrique 163

4.2.2 L’électrodéposition par potentiométrie 173

4.2.3 Influence des sauts de potentiel sur la morphologie du dépôt 176

4.3 L’électrodéposition des métaux contenus dans les APTR 183

4.3.1 Les terres rares Nd(III), Dy(III) et Pr(III) 184

4.3.2 Le Co(II) 187

4.3.3 Les mélanges stœchiométriques des sels de cations des APTR 190

4.4 Conclusions 194

4.5 Références bibliographiques 196

CHAPITRE V. Vers de nouveaux procédés de recyclage d’aimants permanents à base

de terres rares.

199

5.1 Caractérisation chimique des APTR 200

5.1.1 Les APTR modèles 200

5.1.2 Les APTR industriels 201

5.2 L’électrochimie comme seule méthode de recyclage 203

5.2.1 Etat de l’art : l’électrodissolution dans les liquides ioniques 203

5.2.2 Etude des phénomènes d’électrodissolution 204

5.2.3 Le recyclage électrochimique d’un aimant réel 207

5.3 Un procédé mixte liant une lixiviation acide et l’électrodéposition 212

5.3.1 Etat de l’art de la lixiviation acide 212

5.3.2 Précipitation sélective des terres rares d’aimant modèles dans H3PO4

213

5.3.3 Application au recyclage d’aimants réels 219

5.4 Conclusions 224

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

Conclusions générales & Perspectives 229

ANNEXES 237

1 Le potentiostat 237

2 Le Karl - Fischer 240

3 Procédure de nettoyage de la verrerie 242

4 Procédure de préparation des électrodes de travail 243

5 Spectres DRX des sels phosphatés 244

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

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NOTATIONS ET ABREVIATIONS

NOTATIONS D Coefficient de diffusion (m² s-1) kB Constante de Boltzmann (1,38 10-23 J K-1) T Température (K) η Viscosité (mPa s) r Rayon hydrodynamique σ Conductivité (mS cm-1 ou S m-1)

z Nombre d’électron échangé

Rũ Constante des gaz parfaits (8,31 J mol-1 K-1)

F Force s’exerçant sur les porteurs de charge

ΔEw Fenêtre électrochimique (V)

E Potentiel électrique (V vs. Ref)

E0 Potentiel électrique standard (V vs. Ref)

Epic Potentiel de pic (V vs. Ref)

ΔEpic Différence de potentiel entre le pic d’oxydation et le pic de

réduction

E1/2 Potentiel de demi-vague (V vs. Ref)

Ecorr Potentiel de corrosion (V vs. Ref)

Eocv Potentiel d’abandon (V vs. Ref)

Ecoup Potentiel de coupure (V vs. Ref)

 Surtension (V)

I Courant (A)

J Densité de courant (mA cm-2)

Jdc Densité de courant de double couche (mA cm-2)

Jpic Densité de courant de pic (mA cm-2)

Jcorr Densité de courant de corrosion (mA cm-2)

Jcoup Densité de courant de coupure (mA cm-2)

ΔrG Enthalpie libre de réaction (J)

Welectrique Travail électrique (J)

ℱ Constante de Faraday (96 485 C mol-1)

μ Potentiel chimique (J mol-1)

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

n Stœchiométrie (adimensionnel)

K Constante d’équilibre (adimensionnel)

Rint Résistance interne (Ω)

Rel Résistance d’électrolyte (Ω)

v Vitesse de balayage (V s-1)

[C∗] Concentration initiale (mol cm-3)

ω Vitesse de rotation, vitesse angulaire ou pulsation (rad s-1)

t Temps (s) Q Charge électrique (C) f Fréquence (Hz) ɸ Phase (rad) Z(ω) Impédance électrochimique (Ω) Z Numéro atomique L Distance (m) S Surface (m²) Mm+ Cation du métal M ABREVIATIONS

DEEE Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques

ADEME Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie

TR Terre(s) Rare(s)

NOx Oxyde d’azote

NiMH Nickel Métal Hydrure

APTR Aimant(s) Permanent(s) à base de Terre(s) Rare(s)

NdFeB Aimant(s) permanent(s) de type Néodyme - Fer - Bore

SmCo Aimant(s) permanent(s) de type Samarium – Cobalt

ENH Electrode Normale à Hydrogène

ESH Electrode Standard à Hydrogène

RTIL « Room Temperature Ionic Liquid » - Liquide(s) Ionique(s)

liquide(s) à Température ambiante

RMN Résonnance Magnétique Nucléaire

FTIR « Fourier Transform InfraRed spectroscopy » -

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

DFT « Density Functional Theory » - Théorie fonctionnelle de la

densité

MEB Microscope Electronique à Balayage

EDS « Energy Dispersive X-ray Spectrometry » - Analyse

dispersive en énergie

XPS « X-ray Photoelectron Spectrometry » - Spectrométrie

photoélectronique X

DRX Diffractométrie de rayons X

XRF « X-ray Fluorescence » - Spectrométrie de fluorescence des

rayons X

AES « Auger Electron Spectrometry » - Spectrométrie Auger

ICP-OES « Inductively Coupled Plasma – Optical Emission

Spectroscopy » - Spectroscopie d’émission optique

UV Mesure du rayonnement Ultraviolet

Ox Oxydant

Red Réducteur

RE, Ref Electrode de référence

QRE Quasi-électrode de référence

CE Contre électrode

WE « Working electrode » - Electrode de travail

GC « Glassy Carbon » - Carbone vitreux

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

INTRODUCTION GÉNÉRALE

Les nouvelles technologies sont au cœur de nos sociétés, que ce soit dans les pays industrialisés ou non, elles sont partout. La course au dernier objet technologique à la mode est un phénomène planétaire pour lequel les industriels ont rivalisé d’inventivité. Nos équipements sont de plus en plus performants, de plus en plus nombreux, de plus en plus complexes et de plus en plus considérés comme des produits de consommation. A la moindre panne ou défaillance, une télévision, un ordinateur ou un lave-linge sont jetés. Ils deviennent alors des déchets d’équipements électriques ou électroniques (DEEE). Une étude du programme des Nations Unis pour l’Environnement datant de 2005 estimait qu’entre 20 et 50 millions de tonnes de DEEE étaient produits chaque année. Mais que deviennent tous ces déchets ? Difficile de savoir. La traçabilité de ces objets n’est que très récente et encore mal déployée mais grâce à l’intervention d’organisations environnementales, telles que l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie), nous avons pu être mis au courant de la multiplication de décharges à ciel ouvert dans des pays comme la Chine, l’Inde, le Ghana ou encore le Nigéria (Figure 0.1). Autant pour l’environnement que pour les populations environnantes, cette accumulation sauvage doit cesser. C’est dans cette optique que les directives européennes 2002/96/CE et 2003/108/CE ont vu le jour. Elles imposent désormais aux entreprises européennes une gestion stricte et rigoureuse de leurs DEEE. Un fabriquant est depuis tenu d’assurer la collecte de ces objets puis de les diriger vers des centres de valorisation. De manière encourageante, une nette augmentation de +16,7 % des flux collectés de DEEE a été observée en France par l’ADEME entre l’année 2014 et 2015 grâce à l’efficacité d’éco-organismes tels que les entreprises Eco-système, Ecologic, Recylum, PV Cycle et Ocad3E (2016 Rapport Annuel du Registre des Déchets d’ Équipements Électriques et Électroniques – Données 2015).

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

Figure 0.1. Une décharge sauvage au Nigéria, photographie issue de gaetanpelletier.wordpress.com

Mais qui dit collecte, dit filière de recyclage. La Fédération des entreprises du recyclage (Federec) montre que 37% de l’activité du recyclage français est concentrée sur le recyclage de la ferraille (déchets d’acier broyé, extraits des véhicules mis à la casse, des appareils électroménagers ou des bâtiments). Pour que l’intégralité de nos déchets soit valorisée, des filières entières de recyclage restent à créer. C’est dans ce contexte que s’inscrit ce sujet de thèse. Il s’agit d’étudier la faisabilité d’un procédé de recyclage et de valorisation d’un objet technologique : l’aimant permanent à base de terre rare. A l’heure d’une prise de conscience relativement globale de la crise écologique que traversent l’humanité et la planète qui l’accueille, un procédé de recyclage « vert » réduisant au maximum la consommation énergétique et chimique est favorisé. L’électrochimie en milieu liquide ionique permet de répondre à ces exigences puisqu’elle permet la récupération d’éléments chimiques sous forme métallique dans un solvant qui n’est pas consommé.

Plus concrètement, cette thèse s’articule en cinq chapitres. Le Chapitre I permettra d’identifier le contexte global des terres rares, de leurs applications technologiques à leurs méthodes de recyclage actuelles. Il nous permettra également de définir les objectifs et défis de la thèse. Le Chapitre II débutera par un rappel des définitions

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

et relations électrochimiques puis sera consacré à la description des différentes techniques expérimentales utilisées au cours de ces trois ans de thèse. L’électrochimie en milieu liquide ionique étant une thématique récente, le Chapitre III sera entièrement dédié à la mise en place d’une base de compréhension technique des phénomènes électrochimiques apparaissant lorsque l’électrolyte est un liquide ionique. C’est grâce à cette base que nous analyserons dans le Chapitre IV la faisabilité d’une récupération électrochimique - par électrodéposition dans les liquides ioniques - des éléments contenus dans les aimants permanents à base de terres rares. Pour terminer, le Chapitre V proposera deux méthodes de recyclage et valorisation qui seront appliquées à des aimants permanents à base de terres rares industriels.

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

1

CHAPITRE I

Les terres rares, les aimants permanents et

leurs voies de recyclage : mise en

perspective et contexte

Photographie 1 Vue imprenable sur les usines de Baotou (Chine). Photographie issue du reportage

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

1.1 Les terres rares

1.1.1 Définition, histoire et gisements

Découvertes au XVIIIème siècle en Suède, les terres rares (TR) constituent une famille de 17 éléments chimiques, représentés en rouge sur la Figure 1.1. Il s’agit des lanthanides ainsi que du scandium et de l’yttrium. Une distinction est communément faite entre les terres rares « légères » (La-Gd) et les terres rares « lourdes » (Tb-Lu, Y et Sc) notamment en raison de leurs inégalités de présence dans la croûte terrestre. En effet, si les gisements de TR légères sont nombreux, les gisements de TR lourdes sont, au contraire, plus rares et petits. Contrairement à ce que laisse entendre leur dénomination, les terres rares ne sont donc pas « rares » au sens propre du terme. Certaines, les TR légères, jouissent au contraire d’une relative abondance dans la croûte terrestre. Par exemple, le cérium (Ce) est aussi abondant que le cuivre. L’origine du terme « terres rares » provient en réalité de la difficulté à isoler les éléments entre eux.

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

Les minerais contenant des TR sont présentés dans le Tableau 1.11. La teneur des minerais en TR légères est effectivement plus importante que celle des TR lourdes qui atteint au mieux 2% massique. De plus, sous la forme de remarques, ce tableau indique les inconvénients majeurs de ces minerais. La présence d’actinides dans de nombreux gisements ainsi que la difficulté technique d’extraction des TR est soulignée et sera développée dans la suite de ce chapitre.

Minerais Type de TR

Teneur en TR (%massique)

Remarques

Bastnaesite légères 1-8% TR sous forme de carbonate, forte

consommation de produits

chimiques pendant le traitement

Monazite légères 0,5-10% Présence de Th et U dans les

minerais

Loparite légères 2-3% Quantité significative de Th et U

Argiles d’absorption

ionique

lourdes <0.5% Techniques d’extraction minière

néfastes pour l’environnement

Eudialyte lourdes 0,5-1.5% Dépôts de roches dures nécessitant

de nombreuses étapes de traitement polluant

Xenotime lourdes 1-2% Minerais purs extrêmement rares, la

plupart contiennent de forts taux de Th et U

Tableau 1.1. Contenu des minerais de TR identifiés en 2014 et leur principaux inconvénients2.

Tous les gisements actuels sont constitués par l’un des six minerais présentés dans le Tableau 1.1. Ils sont majoritairement situés aux Etats-Unis et en Chine, mais aussi en Australie et en Afrique du Sud (Figure 1.2). L’observation attentive de la Figure 1.2 amène à la constatation suivante : en 2012, les gisements en production (représentés par des pentagones) sont concentrés en Chine. En effet, à la suite de la fermeture de l’historique mine de Mountain Pass aux Etats-Unis en 2002, la Chine est devenue le leader mondial de la production de TR, si bien qu’en 2010 elle exportait 95 % des oxydes de TR utilisés dans le monde.

(27)

Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes Figure 1.2. Les gisements de terres rares dans le monde3.

1.1.2 Les applications stratégiques

Découvertes assez récemment, les terres rares sont aujourd’hui utilisées dans de multiples applications et sont devenues essentielles au développement des sociétés actuelles. Elles sont d’ailleurs indispensables pour les deux secteurs à plus forte croissance de la planète : l’énergie et les hautes technologies.

La Figure 1.3 montre la répartition de ces applications selon leur demande en terres rares. Nous observons que les aimants permanents et le polissage sont les applications les plus gourmandes en TR.

Figure 1.3. Pourcentage de demande en terres rares par applications pour l’année 2007 pour les Etats-Unis,

la Chine et le Japon4.

28%

8%

11%

9%

9%

17%

11%

6%

0,3%

0,7%

Aimants Batteries Métallurgie

Pots catalytiques automobiles Catalyseurs pour industrie pétrolière

(28)

Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

L’utilisation et l’intérêt des TR sont résumés ci-dessous pour certaines de ces applications3:

- La catalyse : l’industrie du raffinage du pétrole dope les catalyseurs, utilisés dans la transformation du pétrole brut en gasoil, avec plus de 8 % massique de La et Ce afin de stabiliser la zéolite pendant les procédés de craquage. Les pots catalytiques des voitures actuelles contiennent 30% massique de CeO2, ce qui permet la conversion des NOx ou CO en des composés moins

nocifs.

- Le polissage : Le CeO2 est également utilisé dans le polissage des verres,

miroirs, écrans de téléphone et télévision ainsi que des plaques de silicium (wafers) utilisées dans la fabrication des puces électroniques.

- Le stockage d’énergie : les batteries NiMH utilisent, entre autres, du La, Ce, Nd et Pr dans leur procédé de fabrication afin d’absorber l’hydrogène des cellules et rendre plus facile la réversibilité des procédés électrochimiques.

- Les aimants permanents : Nd, Pr, Dy et Sm sont utilisés dans la fabrication d’aimants permanents possédant un très fort champ magnétique et une haute température de démagnétisation. Ces aimants ont révolutionné les moteurs électriques à forte puissance (voitures électriques, voitures hybrides et éoliennes) mais ont aussi permis la miniaturisation des moteurs, des hauts parleurs, des disques-durs, etc.

- Les poudres luminophores : elles contiennent fréquemment l’Eu, Tb et Y qui permettent une conversion de l’énergie électrique en énergie lumineuse bien plus importante et efficace que dans les technologies antérieures. Nécessitant beaucoup moins d’énergie qu’avant pour la même puissance, elles constituent ce que l’on appelle les ampoules à basse consommation d’énergie.

Toutes ces applications touchent des technologies de pointe que l’on retrouve dans le domaine de l’armement. Les terres rares sont par conséquent des matériaux dits « stratégiques ».

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

La Chine a très vite compris leur caractère indispensable et a développé en quelques années, en plus de l’extraction minière, une véritable filière des TR puisque qu’en 2010 elle réalisait 90 % des alliages techniques.

1.1.3 La grande crise des terres rares en 2010

Le monopole chinois sur l’intégralité du marché des TR n’a posé aucun problème aux pays consommateurs jusqu’en 2010. A cette date, et à la suite d’un conflit géopolitique entre la Chine et le Japon, le gouvernement chinois a durci ses quotas d’exportations des TR. Ces derniers ont été drastiquement réduits et sont passés de 66 kt en 2009 à 30 kt en 20105. Cette soudaine diminution des exportations eut une influence immédiate sur le prix des matières premières. Les prix des TR se sont envolés jusqu’à atteindre une augmentation record de 706% en 20115. C’est ce que les experts appellent aujourd’hui « la grande crise des terres rares ». Cette crise a néanmoins été rapidement résorbée puisqu’en 2014 les TR ont quasiment retrouvé leur prix d’origine. La Figure 1.4 montre l’évolution du cours du dysprosium entre 2008 et 2016. Si l’année 2011 a été marquée par un prix au kilo atteignant 2032 $US, le prix du dysprosium a ensuite diminué jusqu’à atteindre la valeur de 265 $US le kilo en 2016, qui est à peu près équivalente à celle de 2010 (295 $US/kg). Face à la volatilité du marché des TR, la plupart des pays industrialisés ont alors pris conscience de leur dépendance à ces éléments. Le Département de l’Energie des Etats-Unis6 et la Commission Européenne7 ont rapidement réagi et classé, en 2010 et 2011, les terres rares comme « métaux critiques et stratégiques». Le monde entier a alors commencé à chercher des solutions alternatives et sécuritaires au problème d’approvisionnement des TR.

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Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

Figure 1.4. Evolution du prix du dysprosium entre 2008 et 2016, source : www.mineralprices.com .

1.1.4 Les alternatives envisagées

Dès 2011, pour limiter leur dépendance face au monopole chinois, les pays industrialisés ont envisagé des alternatives aux importations massives de TR. Elles sont dans l’ensemble divisibles en trois axes :

- la constitution de réserves stratégiques

- la substitution dans les dispositifs technologiques - le recyclage

La constitution de réserves stratégiques impose forcément aux états consommateurs de choisir entre le stockage ou le développement d’exploitations minières sur leur territoire. Si de nombreux gisements ont brusquement été exploités entre 2010 et 2015, l’instabilité du marché a empêché la construction d’une économie solide, entrainant la fermeture de ces exploitations. L’exemple le plus frappant concerne la mine de Mountain Pass aux Etats Unis, qui suite à la grande crise rouvre en 2011 et ferme quatre ans plus tard. Nous allons voir que la constitution de réserves stratégiques, dans les conditions actuelles, ne permet en aucun cas de s’affranchir du monopole chinois sur le marché des TR, mais simplement de prévenir à court terme une autre crise.

Outre la fluctuation du marché, la fréquente présence d’actinides dans les minerais rend difficile l’exploitation des TR dans le respect des normes de sécurité et

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écologiques. Par exemple en Europe, une exploitation minière doit forcément tenir compte des normes imposées par le réseau Natura 2000 ainsi que des normes environnementales européennes, ce qui rend un projet d’exploitation difficilement réalisable1. Les conditions sanitaires et environnementales des exploitations chinoises, qui ne sont pas soumises au respect de ces normes, sont très discutables et de plus en plus contestées par l’intégralité des pays consommateurs. Baogan Group, le géant industriel chinois, qui exploite le plus grand gisement de minerai de TR de la planète à Bayan Obo, commence à être pointé du doigt par les journalistes du monde entier qui dénoncent ses conditions environnementales et sanitaires déplorables. La Figure 1.5 présente les procédés d’extraction et de séparation classiquement utilisés pour les TR issues de minerais. Les grandes quantités de solvants mises en jeux en entrées et sorties de procédés sont responsables d’une pollution empoisonnant la terre et les populations environnantes.

Un autre problème sérieux à l’importation de TR chinoises a été présenté à la Commission Européenne de 20141. La Chine exporte 90% des TR utilisées dans le monde dont la consommation annuelle s’élève à 50 kt par an, pourtant les chiffres d’exportations officielles du gouvernement chinois ne font état que de 15 kt. Plus de 30% des exportations de TR proviennent ainsi de mines illégales chinoises échappant totalement au contrôle du gouvernement, notamment sur la question du travail des enfants.

Enfin, une autre difficulté concernant les extractions minières de TR concerne directement les propriétés physico-chimiques de ces dernières. En effet, les terres rares, qui sont chimiquement très homogènes, sont très difficilement séparables les unes des autres. Les étapes de séparation (Figure 1.5) des TR entre elles posent des « problèmes d’équilibre ». Comme les teneurs varient d’une TR à l’autre dans les minerais, de larges inégalités de quantités extraites apparaissent. Par exemple, l’extraction sélective du néodyme, qui est bien moins concentré que le lanthane ou le cérium, engendre une extraction importante et non nécessaire de lanthane et cérium. La demande en ces deux éléments étant bien plus faible que celle du néodyme, leur stockage est inévitable8.

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Figure 1.5. Les procédés d’extraction et séparation des TR à partir de minerai

engendrent des dépenses énergétiques et chimiques. D’après Simoni et al.4

La substitution ne semble pas, elle non plus, être l’alternative idéale. La spécificité des TR réside précisément dans le remplissage partiel de leur couche électronique (4f), ce qui leur confère des propriétés magnétiques et optiques très particulières. Ces propriétés ont permis des innovations techniques majeures dans tous les secteurs où elles sont employées. Si les TR ont été classées métaux critiques et stratégiques c’est bien que leurs propriétés sont actuellement indispensables pour les très nombreuses applications dans lesquelles elles sont utilisées, et par conséquent, irremplaçables.

Le troisième axe concerne le recyclage en passant par l’exploitation des « mines urbaines ». Les mines urbaines représentent l’ensemble des déchets collectés en fin

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de vie. Ces gisements particuliers de TR contiendraient des teneurs de 40 à 50 fois supérieures à celles des gisements naturels. Le recyclage de métaux plus traditionnels, tels que l’acier ou l’aluminium, s’effectue d’ores et déjà par des filières existantes et matures. Il est donc logique de s’intéresser à la valorisation des terres rares susceptibles de se trouver dans ces déchets. La création d’une filière de recyclage des TR nécessite une meilleure compréhension du marché pour s’orienter stratégiquement vers des applications qui sont ou seront à plus fort potentiel de recyclage.

1.1.5 Etude du marché des terres rares

Comprendre le marché des terres rares est un vrai défi. Chacune des applications utilisant des terres rares possède son propre marché et sa propre évolution. La maturité de la plupart de ces filières n’étant pas encore atteinte, les estimations apparaissent très incertaines.

Néanmoins, un constat s’impose. Le marché des terres rares était largement dominé par les aimants permanents en 2013 (Figure 1.6). Sur les 4 milliards de dollars US que pèse ce marché, 50% étaient attribués aux aimants permanents. Selon les experts, cette hégémonie devrait perdurer dans le temps. L’un des scénarios envisagés pour l’évolution de la demande en TR est présenté sur la Figure 1.7 par Alonso et al.9. La demande globale en TR devrait afficher une croissance de 5,3% par an, dominée par l’augmentation des marchés du polissage et des aimants permanents de respectivement +7.9 et +6.1%9. Un autre scénario, proposé par Kingsnorth10, prévoit quant à lui une hausse du marché des aimants permanents de 12,5 % par an jusqu’en 2035.

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Figure 1.6. Relation le marché des terres rares et leurs applications en 201311.

Ajoutons que la transition énergétique, actuellement au cœur de nombreux programmes politiques, est dépendante d’une hausse de production de véhicules électriques et hybrides ainsi que des système exploitant les sources d’énergies vertes telles que l’éolien. Dans ce contexte, la croissance du marché des aimants permanents utilisés dans ces applications techniques est effectivement inévitable. Les aimants permanents possèdent ainsi un fort potentiel économique, actuel et futur, et seront notre objet d’étude pour le recyclage des terres rares.

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1.2 Les aimants permanents à base de

terres rares

1.2.1 Définitions et propriétés principales

Les aimants permanents à base de terres rares (APTR) sont divisés en deux catégories distinctes : les aimants néodyme-fer-bore (NdFeB) et les aimants samarium-cobalt (SmCo). 12,1314

La structure chimique des aimants NdFeB consiste en une phase matricielle de stœchiométrie Nd2Fe14B entourée de parties riches en néodyme et contenant des

adjuvants de terres rares - praséodyme, gadolinium, terbium et dysprosium - mais aussi d’autres éléments comme du cobalt, vanadium, titane, zirconium, molybdène ou encore du niobium15. La teneur en adjuvants varie d’un aimant à l’autre en fonction de l’application finale visée. Pour finir, notons que les aimants NdFeB sont très souvent recouverts d’une couche protectrice sous la forme de résine ou d’alliage métallique.

Pour les aimants de type SmCo, deux stœchiométries différentes sont possibles : SmCo5 et Sm2Co17. Contrairement aux aimants NdFeB, aucune autre terre rare

n’est insérée dans l’alliage comme adjuvant, mais des métaux de transition, tels que le fer, le zirconium ou le cuivre s’y retrouvent fréquemment.

Sans rentrer dans le détail des propriétés magnétiques, un aimant se caractérise par deux grandeurs importantes, sa capacité à engendrer un champ magnétique - représentée par son produit d’énergie volumique (BH)max - et sa température de

Curie. Le Tableau 1.2 présente les valeurs de ces deux grandeurs pour les aimants permanents à base de terres rares et les aimants permanents plus anciens. (BH)max

est la propriété magnétique la plus importante car elle représente l’énergie potentielle maximale de l’aimant par unité de volume. En effet, si un aimant ne crée pas d’énergie, il permet de la transférer et d’en modifier la nature si besoin.

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Le Tableau 1.2 montre bien que l’apport des terres rares dans les alliages d’aimants permanents a conduit à une multiplication d’un facteur compris entre 3 et 10 pour cette propriété. L’augmentation de (BH)max a ainsi permis la

miniaturisation des aimants mais aussi la conception d’aimants plus puissants. L’autre propriété importante des aimants permanents, présentée également dans le Tableau 1.2, est la température de Curie. Il s’agit de la température à laquelle l’aimant peut se désaimanter et donc de sa température maximale d’utilisation. Cette valeur est quasi-constante pour les différents aimants permanents à l’exception de l’aimant NdFeB qui possède une température de Curie de 320°C, bien inférieure à celle des autres aimants. L’addition d’une autre terre rare, le dysprosium, dans la matrice des aimants de NdFeB permet d’augmenter cette valeur. Pour des raisons évidentes, ce sont les aimants de types SmCo qui sont préférentiellement utilisés dans les applications nécessitant des hautes températures de travail.

Type d’aimant Phase principale (BH)max (kJ m-3) T° Curie (°C)

Ferrite SrFe12O19 28 770

AlNiCo Fe48Al16Ni13Co21Cu2 43 800

SmCo SmCo5 150 800

SmCo Sm2Co17 220 800

NdFeB Nd2Fe14B 300 320

Tableau 1.2. Valeurs du produit d’énergie volumique et de la température de Curie de quelques aimants, les

APTR étant grisés16.

1.2.2 Les applications techniques

Les propriétés présentées ci-dessus ont fait la renommée des aimants permanents. Si les aimants NdFeB ont été fabriqués pour la première fois en 198712,13, il faut attendre 2007 pour que leur marché se développe et représente actuellement 95% du marché des APTR14. Les 5% du marché appartenant aux aimants SmCo concernent principalement l’imagerie médicale et les systèmes de guidage de missiles14. Les applications globales de ces deux aimants sont détaillées dans le

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Tableau 1.3. Il est frappant de constater que 67% des parts de marché sont concentrées dans des applications liées aux moteurs (*).

Application % du marché

Moteurs* 24,0

Disques durs, CD, DVD 16,3

Vélos électriques 8,4

Transducteurs, hauts parleurs 8,1

Séparation magnétique 4,6

IRM 3,9

Couple d’entrainement moteur* 3,3

Capteurs* 3,1

Générateurs* 3,0

Embrayage* 2,8

Air conditionné et ventilateurs 2,4

Système de stockage d’énergie 2,3

Générateurs d’éoliennes* 1,9

Jauges 1,5

Freinage magnétique* 1,5

Relais et commutateurs* 1,3

Systèmes d’inspection des tuyaux 0,9

Système de traction des véhicules électriques et hybrides* 0,8

Reprographie 0,6

Onduleurs 0,3

Autres 9,0

Tableau 1.3. Détail des applications des aimants permanents NdFeB et leur part de marché en 201011.

1.2.3 Le « potentiel recyclage »

En raison de la quantité de TR présentes dans les APTR et de la pression de leur marché, le recyclage de ces métaux est totalement justifié. Parmi les nuées d’applications, seuls les aimants des turbines d’éoliennes, des véhicules électriques et hybrides ou des disques durs ont un réel potentiel de recyclabilité. En effet, la

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principale barrière du recyclage des aimants réside dans les étapes d’isolement de ces derniers. Le procédé le plus utilisé en industrie consiste en la récupération magnétique des aimants. Malheureusement, dans le cas des déchets broyés, l’aimantation des petites quantités d’aimants est faible et la plupart de ces derniers restent collés en position dans des structures complexes17. Le recyclage d’aimants entiers, faciles à isoler, est donc bien plus simple et intéressant industriellement parlant.

La Figure 1.8 illustre parfaitement une autre difficulté rencontrée dans le domaine du recyclage des terres rares. La quantité massique de néodyme et dysprosium disponible pour le recyclage de 2011 à 2030 y est présentée suivant les trois secteurs les plus intéressants mais récents que sont l’éolien, le transport et le stockage de données. La durée de vie moyenne des éoliennes ou véhicules électriques et hybrides varie entre 10 et 20 ans, seuls les disques durs, à durée de vie plus courte, sont d’ores et déjà présents dans les flux de déchets en fin de vie et donc potentiellement recyclables.

Ainsi, jusqu’en 2020, les déchets d’aimants permanents provenant de ces trois applications demeureront relativement faibles par rapport à la demande mondiale de TR dont la croissance est rapide. Il est donc clair qu’au cours de la prochaine décennie, le recyclage ne devrait pas contribuer de manière significative à la sécurité de l’approvisionnement en terres rares. Néanmoins, à moyen et long terme, les flux de déchets vont fortement augmenter et pourront couvrir une part

Figure 1.8. Potentiel de recyclage mondial du néodyme et dysprosium par source d’application (éoliennes,

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substantielle de la demande totale de ces métaux. D’ici 2030, 9% de la demande en néodyme pourrait être remplie par le recyclage. Selon les prévisions, ce n’est que vers 2100 que la ressource provenant du recyclage pourrait répondre à près de 50% de la demande19.

Puisqu’il faut entre cinq et dix ans pour mettre en place une filière de recyclage18, le développement d’infrastructures et de technologies, pour la valorisation des terres rares contenues dans les aimants permanents, est essentiel pour sécuriser au plus vite l’approvisionnement.

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1.3 Le recyclage des aimants

permanents à base de terres rares

Il existe une panoplie de procédés de recyclage, plus ou moins innovants, appliqués aux aimants permanents à base de terres rares. Un récapitulatif des principales voies existantes, détaillant leurs avantages et inconvénients, est proposé dans le Tableau 1.4. Notons qu’en 2011, moins de 1% des terres rares est recyclé15. La majorité de ces procédés sont uniquement appliqués à l’échelle du laboratoire, exceptée la décrépitation à l’hydrogène qui fait actuellement l’objet d’une tentative d’industrialisation.

Les méthodes de recyclage 1) et 2) du Tableau 1.4 sont, d’un point de vue environnemental, très prometteuses, car elles sont peu énergétiques et génèrent peu de déchets. Néanmoins, ces deux méthodes ne concernent pas la séparation des éléments, mais une réutilisation directe ou indirecte d’un alliage d’aimant pour une application similaire. Ce travail étant principalement focalisé sur la valorisation des terres rares, il est nécessaire de séparer les terres rares des métaux de transition. Les procédés 1) et 2) ne seront donc pas détaillés par la suite contrairement aux méthodes 3), 4) et 5) qui, elles, mettent en jeu la séparation des éléments.

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Méthode Avantages Inconvénients

1) Réutilisation directe

 économique

 pas de déchets générés, pas de produits chimiques

 seulement applicable aux aimants gros et facilement accessibles

 quantités faibles en décharge 2) Décrépitation à

l’hydrogène

 peu énergivore comparée aux voies 3) et 4)

 pas de déchets générés

 convient très bien aux aimants des disques durs (faible

évolution de composition)

 non applicable aux déchets broyés d’aimants (fortes variations de compositions)

 non applicable aux aimants oxydés

3) Procédés hydrométallurgiques

 applicables aux déchets broyés, aux variations de compositions et d’oxydations

 procédés similaires à ceux de l’extraction minière de TR

 séparation des TR entre elles

 nombreuses étapes nécessaires pour la recréation d’un aimant

 consommation d’énergie et de produits chimiques importante

 génération de déchets liquides 4) Procédés

pyrométallurgiques

 applicables à tous types d’aimants et de compositions

 pas de rejet de solvant

 moins d’étapes de procédés que pour la voie 3)

 obtention directe d’un alliage de TR sous forme métallique

 consommation intense d’énergie

 non applicables aux aimants oxydés

 grandes quantités de déchets solides en fin de procédés électrolytiques

5) Extraction en phase gazeuse

 applicable pour tous types d’aimants et de composition

 pas de rejet de solvant

 large consommation de gaz chlorés

 faible durée de vie des

installations (corrosion sévère)

 toxicité importante

Tableau 1.4. Résumé des méthodes de recyclage des aimants détaillant leurs avantages et inconvénients, d’après

Binnemans et al.15.

1.3.1 L’hydrométallurgie (méthode 3)

Il s’agit de la voie traditionnelle de récupération des aimants permanents. Les alliages magnétiques sont, en premier lieu, dissous dans des acides forts puis les terres rares sont sélectivement précipitées sous la forme de sulfates, d’oxalates ou de fluorures. Le choix de l’acide pour la lixiviation dépend du traitement ultérieur de la solution. Par exemple, les acides nitrique (HNO3) ou chlorhydrique (HCl)

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sont préférés pour un procédé d’extraction par solvants alors que l’acide sulfurique (H2SO4) est utilisé pour une précipitation sélective. Les sels de terres rares peuvent

alors être séparés de la solution par une simple filtration. Une fois les sels de TR récupérés, des oxydes de TR peuvent être obtenus par calcination. Les procédés d’extraction concernent généralement des extractions liquide-liquide réalisées à l’aide d’extractants tels que du phosphate de tri-n-butyle (TBP) ou avec de l'acide di-(2-éthylhexyl)phosphorique15. Les liquides ioniques, solvants dont nous parlerons en détail dans ce travail, commencent également à servir d’extractants pour la récupération des différents métaux. Bien que ces procédés soient efficaces, les étapes de lixiviation peuvent être longues et nécessitent de grandes quantité s de réactifs non recyclables (H2SO4, NaOH, HF…) ainsi que des solvants organiques

présentant des risques environnementaux non négligeables.

Ces procédés sont très proches des voies d’extraction et séparation des terres rares à partir des minerais, tels que décrits dans la Figure 1.5, et sont par conséquent également très polluants. Il faut néanmoins souligner qu’il s’agit de la seule méthode permettant d’isoler chacune des terres rares.

1.3.2 La pyrométallurgie (méthode 4)

La pyrométallurgie a été développée principalement comme une alternative à l’hydrométallurgie. Certains procédés de pyrométallurgie permettent la refusion des alliages de terres rares (fusion directe) ou l’extraction des TR à partir de la fusion des métaux de transition (extraction des métaux liquides)15. Néanmoins, malgré l’utilisation de mélanges eutectiques, une grande quantité d’énergie est nécessaire à la fusion des métaux et la séparation des TR entre elles n’est pas envisageable.

1.3.3 L’extraction en phase gazeuse (méthode 5)

Autre alternative à l’hydrométallurgie, l’extraction en phase gazeuse propose de transformer les métaux en chlorures volatils pour ensuite les séparer en fonction de leur différence de volatilité. Malheureusement, les chlorures de terres rares sont

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peu volatils et l’isolement des éléments chimiques d’un alliage de NdFeB, contenant plusieurs terres rares, est alors très difficile. L’extraction des terres rares par chloration nécessite alors des températures de travail très élevées et de longs temps de réaction. Les espèces en phase gazeuse sont acheminées par un gaz porteur dans un four tubulaire avec une température croissante. Les chlorures métalliques sont alors déposés à différents endroits dans le tube du réacteur. Les chlorures de terres rares anhydres sont déposés dans la zone de température supérieure (800-900°C) alors que les chlorures de métaux de transition sont récupérés dans la zone de température inférieure.

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1.4 Une méthode de recyclage novatrice:

l’utilisation de l’électrochimie pour

le recyclage des aimants permanents

à base de terres rares

Il est crucial de mettre en œuvre une technique permettant le recyclage et la séparation des éléments chimiques des alliages des APTR tout en évitant la consommation et le rejet de solvants ainsi qu’une surconsommation énergétique. L’utilisation de l’électrochimie pourrait répondre à ces critères.

1.4.1

Le défi : l’électrodéposition des terres rares des APTR

L’idée centrale de ce travail de thèse repose sur l’utilisation de l’électrochimie comme technique de recyclage des terres rares, issues des aimants permanents de type SmCo et NdFeB. Industriellement parlant, le zinc, le cuivre, le nickel ou encore le cobalt sont des métaux obtenus classiquement à l’aide de procédés électrochimiques, grâce une technique appelée électrodéposition.

L’électrodéposition consiste en la réduction de cations métalliques solubles dans l’électrolyte. Elle permet de récupérer sous forme métallique les métaux d’intérêt grâce à l’application d’une différence de potentiel entre deux électrodes. Le principe de fonctionnement de cette technique électrochimique est schématisé sur la Figure 1.9. Les électrons, issus du potentiostat, sont transmis au système par l’intermédiaire d’une électrode plongée en solution. Les ions métalliques, présents dans cette solution, captent alors les électrons et se réduisent sur l’électrode. La récupération de l’électrode permet celle du métal d’intérêt.

(45)

Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes Figure 1.9. L’électrodéposition, schéma simplifié.

La différence de potentiel à appliquer pour réduire les métaux est propre à chacun d’eux. En effet, nous verrons dans le Chapitre II que chaque espèce

électrochimiquement réactive possède un potentiel standard,

thermodynamiquement calculé, à partir duquel une réaction de réduction peut (sous certaines conditions) débuter. L’électrodéposition des terres rares est compliquée puisque leurs potentiels standards sont particulièrement bas, les différences de potentiel nécessaires à la réduction de ces éléments sont donc très importantes. Les diagrammes de potentiels, pour les terres rares des aimants permanents, calculés par Bard et al.20, sont présentés sur la Figure 1.10 (les potentiels sont exprimés par rapport à l’électrode de référence normale à hydrogène ENH). Ces éléments, i.e. Nd, Sm, Dy et Pr, se trouvent principalement dans la nature sous leur forme M(III). Nd(III), Sm(III) et Dy(III) affichent théoriquement deux chemins réductifs distincts pour atteindre leur état métallique. Cependant, les potentiels de réduction en M(II) du néodyme et dysprosium sont plus bas que les potentiels de réduction en M, la réduction de ces éléments se fait donc théoriquement en une seul étape, M(III) → M(0).

Les voies de réductions théoriquement réalisables sont tracées en bleu sur la Figure 1.10. M n+ + n e - → M

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Les potentiels affichés pour obtenir l’état métallique des terres rares des APTR sont tous inférieurs ou égaux à -2,29 V vs. ENH. La question de l’électrolyte est alors centrale. En effet, ces potentiels sont des valeurs théoriques, calculées à partir de données thermodynamiques, pour un électrolyte aqueux acide. Il est en pratique impossible de réaliser l’électrodéposition des terres rares dans un électrolyte aqueux car la réduction des protons (H+), présents en grande quantité, se réalise à 0 V vs. ENH, et que la réduction de l’eau a lieu au potentiel de -0,83 V

vs. ENH. La réduction de ces deux espèces empêche donc d’atteindre les valeurs

de réduction des terres rares. Les seuls travaux de recherches sur l’électrodéposition du samarium en solvant aqueux ont été conduits par Jundhale et al.21 en 1991 dans une solution d’acide tartrique. Cependant, les moyens technologiques de l’époque ne permettaient pas l’identification des éléments chimiques présents sur les électrodes et compte tenu des potentiels de réduction obtenus, rien n’écarte la piste d’une réduction de l’eau.

C’est pourquoi il est nécessaire de s’orienter vers un autre solvant.

Nd4+ Nd3+ Nd2+ Nd Sm3+ Sm2+ Sm Dy4+ Dy3+ Dy2+ Dy Pr4+ Pr3+ Pr 4,90 V -2,60 V -2,20 V -2,30 V -1,55 V -2,67 V -2,29 V -2,20 V -2,50 V 5,70 V 3,20 V -2,35 V -2,32 V

Figure 1.10. Diagramme de potentiel des terres rares utilisées dans les APTR, d’après Bard et al.20.

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1.4.2

L’électrolyte : les liquides ioniques

Les principales alternatives aux solvants aqueux résident dans l’utilisation de solvants organiques ou de sels fondus anhydres. Cependant, la majorité des solvants organiques conventionnels présente des inconvénients majeurs pour la réalisation d’un procédé de recyclage, telles qu’une volatilité et une toxicité élevées. Les sels fondus, eux, présentent une consommation énergétique très élevée due à l’utilisation de hautes températures et ne sont également pas idéaux pour la mise en place d’une voie de recyclage respectant les principes de l’éco-recyclage.

Un compromis peut être trouvé avec les liquides ioniques (LI). Ces solvants sont classiquement définis comme des sels dont la température de fusion est inférieure à 100 °C22. Un LI est donc entièrement composé d’ions basés sur un cation organique et un anion pouvant être organique ou inorganique, halogéné ou non. Les multiples combinaisons d’anions et cations possibles impliquent en théorie, l’existence d’au moins un million de LI binaires (pour comparaison, seulement 600 solvants moléculaires sont couramment utilisés)23. Cette diversité permet de concevoir et d’ajuster la structure du solvant pour optimiser au maximum ses propriétés en vue d’une application donnée.

Les LI sont peu volatils, peu inflammables et pour la plupart non explosifs, dans des conditions normales d’utilisation. Il a donc été naturel d’envisager les liquides ioniques comme une alternative respectueuse de l’environnement aux solvants organiques conventionnels. Cependant, il est important de garder à l’esprit que seul un nombre limité d’études toxicologiques ont été effectuées sur les LI, de sorte que l’on ne peut affirmer aujourd’hui qu’ils puissent être intrinsèquement considérés comme des « solvants verts »23,24.

L’électrochimie et les liquides ioniques commencent leur histoire en 197525 avec un mélange de chlorure d’aluminium et de bromure d’éthylpyridinium, malheureusement trop sensible à l’humidité et aux réactions d’hydrolyse. Il faudra attendre les années 1990 pour que les liquides ioniques trouvent réellement leur place dans les procédés électrochimiques grâce à l’association d’un cation de type

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imidazolium et d’anions tétrafluoroborate et hexafluorophosphate26. Cette nouvelle génération de liquides ioniques, liquide à température ambiante, permet de préparer, stocker et manipuler ces LI en dehors de la boite à gants. L’abréviation anglaise RTIL (Room Temperature Ionics Liquids) sera celle utilisée dans la suite de ce travail dans un souci de cohérence avec la littérature.

La sous-partie suivante s’articulera autour d’une brève description de la nomenclature complexe des RTIL puis de leurs propriétés. L’intégralité des étonnantes et multiples propriétés de ces liquides ioniques ne sera pas entièrement détaillée, mais seulement celles qui permettent d’illustrer leur « potentiel électrochimique ».

1.4.2.1

Nomenclature

Compte tenu du nombre quasi-infini de combinaisons réalisables27, seuls les cations et anions des liquides ioniques discutés ou utilisés sont détaillés dans le Tableau 1.5. L’absence de convention d’écriture engendre l’utilisation de différentes nomenclatures dans la littérature. Ainsi plusieurs noms peuvent

correspondre à un seul et même RTIL. Par exemple l’anion

bis(trifluorométhylsulfonyl)imide peut être trouvé sous les abréviations TFSI, TFSA, NTF, (CF3SO2)2N, NTf2 ou Tf2N.

Les abréviations présentées dans le Tableau 1.5 seront celles utilisés tout au long de cette thèse. Les indices dans le Tableau 1.5 représentent le nombre de carbones des chaînes alkyles correspondantes. Un liquide ionique sera toujours présenté sous la forme [cation][anion], les ions individuels du RTIL seront écrits [cation]+ ou [anion]- alors que les ions d’un sel métallique seront notés cation+ ou anion-.

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Cations organiques cycliques Anions organiques

Imidazolium1 [CR1(CR2)CR3IM]+ Bis(trifluorométhyl-sulfonyl)imide [Tf2N]- Pyrrolidinium [CR1CR2Pyrr]+ Bis(perfluoroéthyl-sulfonyl)imide [BETI]

-Cations organiques linéaires Anions inorganiques

Phosphonium [PR1,R2,R3,R4]+ Tétrafluoroborate [BF4] -Ammonium [N R1,R2,R3,R4]+ Hexafluorophosphate [PF6] -Chlorure [Cl]

-Tableau 1.5. Classement et présentation des noms, abréviations et structures développées des anions et cations discutés dans

ce travail.

1.4.2.2 Les impuretés

Les propriétés physico-chimiques des RTIL sont très sensibles aux impuretés. Ces impuretés sont nombreuses, de natures différentes, et parfois difficiles à identifier. L’eau et les chlorures sont deux exemples frappants. En effet, la présence d’eau dans un liquide ionique améliore la conductivité grâce à une diminution de la viscosité, mais diminue également les valeurs de fenêtres électrochimiques28. De plus, de nombreux sels métalliques, en particulier ceux de terres rares, sont également hygroscopiques. Leur dissolution dans un liquide ionique entraine ainsi inévitablement l’introduction d’eau résiduelle dans le milieu RTIL lorsqu’ils ne

1 La chaine alkyle R

2 des imidazoliums est régulièrement limitée à H. L’abréviation de ce cation

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sont pas conservés et/ou manipulés dans une atmosphère anhydre. Le caractère hygroscopique du RTIL utilisé pour les mesures électrochimiques est par conséquent extrêmement important.

Au contraire, les chlorures augmentent la viscosité. Comme de nombreux halogénures, ils sont malheureusement utilisés comme précurseurs de synthèse des RTIL et suivant leur réactivité, ils peuvent ainsi amener à de fausses interprétations électrochimiques.

La présence d’oxygène est également néfaste. L’oxygène se dissout très facilement dans les RTIL. Comme il s’agit d’une espèce électroactive, son élimination, par bullage d’argon, est requise avant toute mesure électrochimique29.

La pureté des RTIL utilisés, ainsi que la quantité d’eau et d’oxygène dissous sont donc des informations essentielles pour une juste interprétation des signaux électrochimiques mesurées.

Ce n’est que récemment que l’impact des impuretés sur les propriétés physico-chimiques de base a été mis en évidence. La majorité des valeurs proposées dans la littérature (viscosité, conductivité et coefficient de diffusion) sont extrêmement éparses et malheureusement pour la plupart aucune discussion autour de la présence d’impuretés n’est réalisée.

1.4.2.3 Solvatation, diffusion et dissolution

Pour démarrer proprement la description des propriétés physico-chimiques des RTIL, il est nécessaire de s’intéresser à la structure de l’état liquide des RTIL purs. Afin de simplifier cette approche, le cas des liquides ioniques cristaux-liquides ne sera pas abordé.

Les RTIL, assimilables aux sels fondus par leur définition, ont effectivement une structure liquide parfois très proche de leur structure cristalline. Il a ainsi été montré que pour des RTIL basés sur les anions [PF6]- et [Cl]-, les interactions entre

les deux ou trois premières sphères de coordination (premiers voisins) sont similaires sous formes cristallines et liquides30, c’est-à-dire que l’environnement

(51)

Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

ionique d’un cation ou d’un anion reste identique, seules les distances atomiques sont modifiées lors du passage à l’état liquide. Au contraire, les RTIL basés sur l’anion [Tf2N]- présentent des structures solides et liquides mal corrélées,

principalement en raison de la densité de charge diffuse de cet anion, amenant à un ordre de charge plus faible30,31.

Les RTIL présentent un ordre structural à moyenne distance. Des simulations de dynamique moléculaire et des études spectroscopiques ont de plus montré l’apparition de domaines hétérogènes dans certains sels d’imidazolium32–34. Leur polarité modérée35,36 engendre des hétérogénéités qui organisent les RTIL en

différents domaines polaires, reliant les centres cationiques et anioniques du RTIL. Les RTIL ont alors été décrits comme des fluides « nanostructurés »34.

Si l’organisation structurale des RTIL n’est pas exactement assimilable à celle des structures cristallines, son originalité amène forcément la question de la dissociation des ions composant les RTIL. En effet, la quantité d’ions disponibles pour le transfert de charge est une donnée essentielle pour l’électrochimie. Introduite par Tokuda et al.37 en 2005, l’ionicité d’un RTIL est assimilable au degré de dissociation des ions valable dans les solutions d’électrolytes diluées. Ainsi, l’ionicité est le rapport de la conductivité molaire mesurée par impédance (les ions dissociés) et celle obtenue à partir des coefficients de diffusion mesurés par RMN (tous les ions, dissociés ou associés). Pour les RTIL, l’ionicité a été évaluée entre 0,4 et 0,638. A tout instant, il y a donc entre 40 et 60% des ions d’un liquide ionique qui ne sont pas dissociés et constituent alors des paires anion-cation. La présence de paires d’ions a d’ailleurs été confirmée par de nombreux travaux concernant les RTIL de type imidazolium par RMN39–41, FTIR39,42 diffraction neutronique31,43 ou encore par simulations39.

Seuls les ions dissociés sont des porteurs de charges effectifs. Le calcul de leur coefficient de diffusion (D) se fait généralement en appliquant la loi de Stockes-Einstein (équation 1.1) avec kB la constante de Boltzmann, T la température absolue, η la viscosité, r le rayon hydrodynamique de l’espèce et p une constante égale à 4 ou 637,44.

Figure

Figure 0.1. Une décharge sauvage au Nigéria, photographie issue de gaetanpelletier.wordpress.com
Figure 1.1. Tableau périodique des éléments, les terres rares sont représentées par la couleur rouge
Figure 1.4. Evolution du prix du dysprosium entre 2008 et 2016, source : www.mineralprices.com
Figure 1.7. Evolution du marché de la demande en terres rares entre les années 2010 et 2035 9
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