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permanents à base de terres rares

1.4 Une méthode de recyclage novatrice: l’utilisation de l’électrochimie pour

1.4.1 Le défi : l’électrodéposition des terres rares des APTR

1.4.2.3 Solvatation, diffusion et dissolution

Pour démarrer proprement la description des propriétés physico-chimiques des RTIL, il est nécessaire de s’intéresser à la structure de l’état liquide des RTIL purs. Afin de simplifier cette approche, le cas des liquides ioniques cristaux-liquides ne sera pas abordé.

Les RTIL, assimilables aux sels fondus par leur définition, ont effectivement une structure liquide parfois très proche de leur structure cristalline. Il a ainsi été montré que pour des RTIL basés sur les anions [PF6]- et [Cl]-, les interactions entre les deux ou trois premières sphères de coordination (premiers voisins) sont similaires sous formes cristallines et liquides30, c’est-à-dire que l’environnement

Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

ionique d’un cation ou d’un anion reste identique, seules les distances atomiques sont modifiées lors du passage à l’état liquide. Au contraire, les RTIL basés sur l’anion [Tf2N]- présentent des structures solides et liquides mal corrélées, principalement en raison de la densité de charge diffuse de cet anion, amenant à un ordre de charge plus faible30,31.

Les RTIL présentent un ordre structural à moyenne distance. Des simulations de dynamique moléculaire et des études spectroscopiques ont de plus montré l’apparition de domaines hétérogènes dans certains sels d’imidazolium32–34. Leur polarité modérée35,36 engendre des hétérogénéités qui organisent les RTIL en différents domaines polaires, reliant les centres cationiques et anioniques du RTIL. Les RTIL ont alors été décrits comme des fluides « nanostructurés »34.

Si l’organisation structurale des RTIL n’est pas exactement assimilable à celle des structures cristallines, son originalité amène forcément la question de la dissociation des ions composant les RTIL. En effet, la quantité d’ions disponibles pour le transfert de charge est une donnée essentielle pour l’électrochimie. Introduite par Tokuda et al.37 en 2005, l’ionicité d’un RTIL est assimilable au degré de dissociation des ions valable dans les solutions d’électrolytes diluées. Ainsi, l’ionicité est le rapport de la conductivité molaire mesurée par impédance (les ions dissociés) et celle obtenue à partir des coefficients de diffusion mesurés par RMN (tous les ions, dissociés ou associés). Pour les RTIL, l’ionicité a été évaluée entre 0,4 et 0,638. A tout instant, il y a donc entre 40 et 60% des ions d’un liquide ionique qui ne sont pas dissociés et constituent alors des paires anion-cation. La présence de paires d’ions a d’ailleurs été confirmée par de nombreux travaux concernant les RTIL de type imidazolium par RMN39–41, FTIR39,42 diffraction neutronique31,43 ou encore par simulations39.

Seuls les ions dissociés sont des porteurs de charges effectifs. Le calcul de leur coefficient de diffusion (D) se fait généralement en appliquant la loi de Stockes-Einstein (équation 1.1) avec kB la constante de Boltzmann, T la température absolue, η la viscosité, r le rayon hydrodynamique de l’espèce et p une constante égale à 4 ou 637,44.

Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

D = kB. T p. π. η. r

(1.1) Dans le cas des RTIL les valeurs obtenues, autant pour l’anion que pour le cation, sont de l’ordre de 10-7 cm2 s-1, soit environ deux ordres de grandeur inférieurs à celles mesurées dans des électrolytes organiques classiques44. Pour autant, l’application de cette relation est très controversée38,45 car elle nécessite l’utilisation d’hypothèses d’hydrodynamique classique - telle que celle considérant les ions comme sphériques - parfois non applicables pour les RTIL.

L’ajout d’un soluté provoque des perturbations dans cette organisation originale et modifie la structure du liquide en fonction des affinités respectives des anions et cations du RTIL pour le soluté. La nature des solutés peut être séparée en deux catégories : les espèces neutres et les ions. Dans cette section, seuls les cations métalliques de terres rares seront mentionnés.

L’introduction d’espèces neutres, telle que l’eau, influe sur les phénomènes de transport de charge. La diffusion des espèces ioniques des RTIL est modifiée et s’améliore, notamment grâce à une viscosité plus faible46. L’addition de molécules d’eau dans les RTIL crée de nouvelles interactions pouvant modifier leur structure. Pourtant, globalement, l’introduction de molécules d’eau dans un RTIL n’engendre pas de modification microscopique (structure et association ionique) jusqu’à la fraction molaire de 0,846. Il a été montré par spectroscopie infrarouge qu’aux faibles concentrations, les molécules d’eau restent isolées. Elles interagissent via deux liaisons hydrogène avec les anions du liquide ionique et ne sont pas reliées entre elles47,48. Dans le cas de plus grandes concentrations d’eau, les molécules d’eau interagissent entre elles pour former des amas49.

Comme décrit dans la section 1.4.1, les cations des terres rares des aimants permanents présentent généralement un état d’oxydation +3. La solvatation des ions TR(III) a été étudiée dans les RTIL50,51. Il a été montré que l’anion du RTIL solvate les cations des terres rares La, Eu et Yb50. Le nombre d’anions présents sur cette première sphère de solvatation dépend de leur nature chimique, 6 pour l’anion [PF6]-, huit pour l’anion [AlCl4]- et 5 pour l’anion [Tf2N]-. Une deuxième

Céline Bonnaud / Thèse / 2017 / Université de Grenoble Alpes

sphère de solvatation, composée des cations du RTIL est identifiée. Contrairement à la solvatation dans un solvant aqueux, généralement réalisée par des molécules d’eau, les phénomènes de solvatation dans les RTIL modifient la charge apparente des cations. Ces solvatations spécifiques peuvent expliquer la stabilisation d’espèces dans des états d’oxydation particuliers, comme Eu(II) pour lequel une durée de vie « infinie » dans un RTIL a été observée alors qu’il est très instable dans un solvant aqueux52.

La solubilité des cations métalliques est entièrement dépendante de ces phénomènes de solvatation, eux-mêmes découlant des affinités chimiques entre soluté et solvant. Ainsi, pour l’anion [Tf2N]-, les RTIL peuvent présenter de très faibles propriétés de solvatation qui cassent difficilement les interactions électrostatiques entre les ions des sels métalliques27. En conséquence, ces liquides ioniques sont attendus pour présenter de faibles propriétés de dissolution des sels métalliques. Pour tenter d’augmenter leur solubilité, il est important de renforcer les interactions entre les ions métalliques et le RTIL utilisé. L’utilisation d’un sel métallique présentant le même anion que le liquide ionique permet de s’affranchir des problèmes de dissolution. Dans un deuxième temps, des groupes de travail53 commencent à fonctionnaliser des liquides ioniques en ajoutant un groupe spécifique à l’anion ou au cation du liquide ionique. C’est ce que l’on appelle aujourd’hui des liquides ioniques fonctionnalisés (task-specific ionic liquid, TSIL) qui ont permis d’augmenter notablement les ratios de dissolution des sels métalliques ou métaux. L’utilisation d’extractant peut également permettre l’augmentation des ratios de dissolution mais nécessite l’introduction d’un nouveau composé chimique dans le liquide ionique.

1.4.2.4 Relation entre structure et données macroscopiques : conductivité