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Entraînement grammatical auprès d’enfants avec un trouble du spectre autistique, un trouble développemental du langage ou un développement typique : quels effets sur la Théorie de l’Esprit ?

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Master

Reference

Entraînement grammatical auprès d'enfants avec un trouble du spectre autistique, un trouble développemental du langage ou un

développement typique : quels effets sur la Théorie de l'Esprit ?

MATHIEU, Laetitia

Abstract

Des études d'entraînement ont mis en évidence l'efficacité d'une intervention sur les phrases complétives (CO) dans le but d'améliorer les compétences en théorie de l'esprit (TdE) chez les enfants tout-venant. L'objectif de cette étude était d'évaluer les effets d'un entraînement grammatical ciblant les phrases complétives sur les compétences en TdE, plus particulièrement la fausse croyance (FC), auprès d'enfants avec un trouble du spectre autistique (TSA) ou un trouble développemental du langage (TDL). Dès lors, 49 enfants avec TSA âgés de 5;6 à 13;6 ans, 43 enfants présentant un TDL âgés de 4;8 à 9;7 ans, ainsi que 31 enfants à développement typique (DT) âgés de 2;9 à 6 ans ont été recrutés dans le cadre de cette étude. Ils ont tous participé à une phase de pré-tests afin d'évaluer leurs compétences en maîtrise des CO et en compréhension des FC. Ces enfants ont ensuite été répartis dans deux entraînements distincts : un entraînement grammatical ciblé sur le travail des CO et un entraînement lexical ciblé sur le vocabulaire général. Enfin, nous avons procédé à [...]

MATHIEU, Laetitia. Entraînement grammatical auprès d'enfants avec un trouble du spectre autistique, un trouble développemental du langage ou un développement typique : quels effets sur la Théorie de l'Esprit ?. Master : Univ. Genève, 2019

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:121662

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Section de psychologie

Entraînement grammatical auprès d’enfants avec un trouble du spectre autistique, un trouble développemental du langage ou un

développement typique :

quels effets sur la Théorie de l’Esprit ?

MÉMOIRE EFFECTUÉ EN VUE DE L’OBTENTION DE LA MAÎTRISE UNIVERSITAIRE EN LOGOPÉDIE

Par Laetitia MATHIEU

Juin 2019

DIRECTRICE DU MÉMOIRE Dr Stephanie DURRLEMAN

JURY

Dr Hélène DELAGE Prof. Pascal ZESIGER

19’764 mots

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Remerciements

En premier lieu, je tiens à remercier tout particulièrement le Docteur Stephanie Durrleman, directrice de mémoire, qui m’a permis de participer à sa recherche traitant d’un sujet passionnant. Je la remercie pour ses précieux conseils, sa disponibilité ainsi que pour sa supervision éclairée et de qualité tout au long de cette collaboration de deux ans.

Ensuite, je remercie le Docteur Hélène Delage de nous avoir guidées, mes collègues et moi-même, dans le traitement de nos données, tout en prenant le temps d’examiner avec soin nos analyses statistiques.

Merci également à Alessio d’avoir su nous rediriger, avec patience et bienveillance, lorsque nous rencontrions des difficultés avec les programmes informatiques ainsi que dans la création de nos nombreuses bases de données.

J’adresse mes sincères remerciements à tous les enfants enthousiastes qui ont participé aux entraînements ainsi qu’à leur famille, sans qui cette recherche n’aurait pas pu être menée à terme.

Je tiens à exprimer également toute ma gratitude à Autisme Suisse Romande qui n’a pas hésité à m’aider en transmettant mes coordonnées à de nombreux membres de leur association, ainsi qu’à l’École pour Enfants Atteints d’Autisme (EEAA) de m’avoir ouvert ses portes afin que je puisse mener à bien les interventions auprès d’enfants.

Ensuite, je souhaite spécialement remercier mes acolytes et presque jumelles, à un jour près, Philomène Fonjallaz et Tiffany Moreno, avec qui nous avons traversé cette aventure, certes laborieuse, mais avec qui nous avons pu nous serrer les coudes par nos encouragements et notre complémentarité infaillible.

Enfin, je remercie ceux qui font partie de ma vie depuis le début et qui sont restés à mes côtés en me soutenant de manière inconditionnelle : ma famille et mes amis. Je les remercie de n’avoir jamais douté de moi, de m’avoir soutenue et, pour ceux qui se reconnaitront, d’avoir pris le temps de relire attentivement certaines parties de mon mémoire.

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Résumé

Des études d’entraînement ont mis en évidence l’efficacité d’une intervention sur les phrases complétives (CO) dans le but d’améliorer les compétences en théorie de l’esprit (TdE) chez les enfants tout-venant. L’objectif de cette étude était d’évaluer les effets d’un entraînement grammatical ciblant les phrases complétives sur les compétences en TdE, plus particulièrement la fausse croyance (FC), auprès d’enfants avec un trouble du spectre autistique (TSA) ou un trouble développemental du langage (TDL). Dès lors, 49 enfants avec TSA âgés de 5;6 à 13;6 ans, 43 enfants présentant un TDL âgés de 4;8 à 9;7 ans, ainsi que 31 enfants à développement typique (DT) âgés de 2;9 à 6 ans ont été recrutés dans le cadre de cette étude.

Ils ont tous participé à une phase de pré-tests afin d’évaluer leurs compétences en maîtrise des CO et en compréhension des FC. Ces enfants ont ensuite été répartis dans deux entraînements distincts : un entraînement grammatical ciblé sur le travail des CO et un entraînement lexical ciblé sur le vocabulaire général. Enfin, nous avons procédé à l’administration du post-test afin de déterminer le bénéfice acquis en CO et en FC. Conformément à nos hypothèses, nos résultats montrent que les trois groupes d’enfants (TSA, TDL et DT) ayant participé à l’entraînement grammatical améliorent leur maîtrise des phrases CO ainsi que leur compréhension des FC.

Les enfants avec TDL et à DT maintiennent leurs nouvelles acquisitions quatre à six semaines après la fin des entraînements. Chez les enfants avec TSA, bien que leurs compétences en CO perdurent dans le temps, ils montrent une légère diminution en FC en post-test différé. En revanche, aucune amélioration en CO et en FC n’a été observée chez les enfants ayant participé à l’entraînement lexical, ce qui témoigne du lien spécifique entretenu entre les complétives et la fausse croyance. Ces résultats démontrent l’efficacité d’un entraînement intensif ciblant les structures de phrases complétives dans le but d’améliorer la compréhension de la fausse croyance auprès des populations cliniques ayant un déficit en TdE, même si le maintien de ces nouvelles acquisitions en TdE est partiel chez les enfants avec TSA. L’objectif de cette étude est de proposer cet entraînement à travers une application en la mettant à disposition des logopédistes intervenant auprès de populations cliniques ayant des difficultés en théorie de l’esprit.

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Liste des abréviations

CO : phrases complétives

CO F : items de phrase complétive avec valeur de vérité fausse CO V : items de phrase complétive avec valeur de vérité vraie DT : développement typique

DTLEX : enfants DT suivant l’entraînement lexical DTGRAM : enfants DT suivant l’entraînement grammatical

ET : écart-type

FC : fausse croyance

FC V : items de fausse croyance verbale FC NV : items de fausse croyance non verbale GRAM : entraînement grammatical (expérimental) LEX : entraînement lexical (contrôle)

m : moyenne

N : nombre

p : p-valeur

Pré : pré-test Post : post-test

Post-post : post-test différé rs : r de Spearman TdE : théorie de l’esprit TdE V : items de TdE verbale TdE NV : items de TdE non verbale

TDL : trouble développemental du langage

TDLLEX : enfants avec TDL suivant l’entraînement lexical TDLGRAM : enfants avec TDL suivant l’entraînement grammatical TSA : trouble du spectre autistique

TSALEX : enfants avec TSA suivant l’entraînement lexical TSASYNT : enfants avec TSA suivant l’entraînement grammatical VC : vraie croyance

VC V : items de vraie croyance verbale VC NV : items de vraie croyance non verbale

Z : score Z

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Table des matières

Remerciements ... 2

Résumé ... 3

Liste des abréviations ... 4

1. Introduction ... 8

2. Cadre théorique ... 9

2.1 Théorie de l’esprit ... 9

2.1.1 Définition ... 9

2.1.2 Développement de la théorie de l’esprit ... 9

2.1.3 Fausse croyance ... 10

2.2 Lien entre théorie de l’esprit et langage ... 10

2.2.1 Lexique ... 12

2.2.2 Syntaxe ... 13

2.2.3 Importance des phrases complétives ... 13

2.3 Populations d’intérêt ... 15

2.3.1 Enfants avec TSA ... 15

2.3.2 Enfants avec TDL ... 17

2.4 Entraînement langagier pour améliorer la théorie de l’esprit ... 20

2.5 Problématique et hypothèse théorique ... 22

3 Méthode ... 24

3.1 Participants ... 24

3.2 Matériel ... 24

3.3 Procédure ... 25

3.3.1 Pré-tests ... 25

3.3.2 Critères d’inclusion ... 31

3.3.3 Entraînements ... 32

3.3.4 Post-tests immédiats... 39

(7)

3.3.5 Post-test différé ... 39

3.4 Variables contrôlées ... 40

3.5 Hypothèses opérationnelles ... 40

4 Résultats ... 42

4.1 Comparaisons intergroupes ... 42

4.2 Hypothèses opérationnelles ... 42

4.2.1 Hypothèses A ... 42

4.2.2 Hypothèses B ... 46

4.2.3 Hypothèses C ... 50

4.3 Analyses exploratoires ... 53

4.3.1 Influence des compétences précédant la compréhension des FC ... 54

4.3.2 Influence de la sévérité de l’autisme (CARS) ... 54

4.3.3 Influence de la place du mot interrogatif dans la phrase ... 55

5 Discussion ... 57

5.1 Rappel des buts de l’étude ... 57

5.2 Hypothèses ... 58

5.2.1 Hypothèses A – Effet direct sur les complétives ... 58

5.2.2 Hypothèses B – Effet indirect sur les fausses croyances ... 59

5.2.3 Hypothèses C – Maintien des performances ... 61

5.3 Analyses exploratoires ... 62

5.3.1 Influence des compétences précédant la compréhension des FC ... 62

5.3.2 Influence de la sévérité de l’autisme (CARS) ... 63

5.3.3 Influence de la place du mot interrogatif dans la phrase ... 64

5.4 Limites ... 64

6 Conclusion ... 66

Références ... 67

Annexes ... 74

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Annexe I : Recrutement des participants... 74

Annexe II : Données cliniques ... 82

Annexe III : Protocole de passation des pré-tests ... 89

Annexe IV : Protocole d’entraînement lexical ... 100

Annexe V : Analyses statistiques ... 103

Annexe VI : Item problématique en TdE NV ... 104

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1. Introduction

La théorie de l’esprit (TdE) est une notion qui a fait l’objet de nombreuses études, avec un intérêt particulier pour les populations cliniques telles que les enfants présentant un trouble du spectre autistique (TSA) (Baron-Cohen, Leslie, & Frith, 1985) ou, plus récemment, un trouble développemental du langage (TDL) (Nilsson & de López, 2016).

Ces deux populations, qui présentent des difficultés en TdE à des niveaux de sévérité distincts, semblent partager certains processus de raisonnement similaires en comparaison aux enfants à développement typique (DT) (Farrar, Benigno, Tompkins, & Gage, 2017).

En effet, dans le cadre de résolution de tâches de fausses croyances, alors que les enfants tout-venant usent de leurs compétences linguistiques générales, les enfants avec TSA et TDL s’appuient davantage de leurs aptitudes syntaxiques spécifiques des complétives (De Villiers, 2005). La structure des phrases subordonnées de type complétif avec un verbe de communication (ex. Marie dit que les licornes existent) permet de se représenter les croyances d’autrui, que celles-ci soient vraies ou fausses. Ainsi, une relation entre la maîtrise de ce type de phrases et la TdE semble exister. Ce lien a été étudié auprès d’enfants à DT (De Villiers & Pyers, 2002), ainsi qu’auprès d’enfants avec TSA (Durrleman et al., 2016) ou avec TDL (Durrleman, Burnel, & Reboul, 2017). Plusieurs auteurs se sont intéressés à une possible facilitation de l’acquisition de la TdE, et plus particulièrement de la fausse croyance (FC), suite à un entraînement syntaxique des complétives (Lohmann &

Tomasello, 2003 ; Hale & Tager-Flusberg, 2003).

À notre connaissance, aucune étude ne s’est intéressée à l’effet d’un tel entraînement des complétives auprès des populations cliniques. L’objectif de cette présente étude est alors de déterminer si un entraînement grammatical des phrases complétives permet à des enfants présentant un TSA ou TDL d’améliorer leurs compétences en TdE, en particulier en FC.

La première partie de ce travail sera dévolue à la définition de la TdE puis à son lien avec le langage et plus particulièrement avec la syntaxe des complétives. Nous présenterons ensuite en détail nos populations d’intérêt ainsi que leurs difficultés associées avant de nous pencher sur les études d’entraînement visant les complétives pour améliorer la TdE chez les enfants à DT. Dans la deuxième partie, nous présenterons le protocole expérimental adopté au sein de cette étude. La troisième partie portera sur les résultats obtenus et, dans la quatrième et dernière partie, nous les interpréterons en fonction de nos hypothèses d’intérêt.

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2. Cadre théorique 2.1 Théorie de l’esprit

2.1.1 Définition

La théorie de l’esprit désigne une compétence cognitive permettant d’inférer, aux autres ainsi qu’à soi-même, des états mentaux tels que des croyances, des pensées, des désirs, des intentions ou des sentiments (Premack & Woodruff, 1978 ; Wellman, Cross, & Watson, 2001).

Celle-ci, nommée « théorie » car elle n’est pas directement observable, permet de comprendre et d’expliquer quels sont les états mentaux que nous ressentons en tant qu’êtres humains. La TdE renvoie également à la prise de conscience et à la compréhension que les autres peuvent avoir des croyances différentes des nôtres ou même de la réalité (Wellman et al., 2001). Nous développerons ultérieurement les différents enjeux de la TdE, à quel point cette compétence est essentielle au fonctionnement optimal des relations sociales ainsi que les impacts négatifs qui peuvent découler lorsque celle-ci est déficitaire.

2.1.2 Développement de la théorie de l’esprit

Après la naissance, les nouveau-nés développent des comportements qui s’inscrivent dans le domaine de la cognition sociale (Moore, 2010). Ils entrent en interaction avec le monde social qui les entoure par les regards, mais aussi à travers toute la communication non verbale.

Ce sont par ces échanges et ces interactions qu’ils développent la compréhension que leurs désirs et ceux des personnes qui les entourent peuvent être différents (Meltzoff, Gopnik, &

Repacholi, 1999, cité dans Astington & Edward, 2010). Puis, vers l’âge de 4 ans, l’enfant parvient progressivement à attribuer à autrui des croyances différentes des siennes ou même de la réalité (Wellman et al., 2001). En effet, en comprenant que certaines croyances ne reflètent pas la réalité, l’enfant parvient à attribuer ce que nous appelons communément la fausse croyance (Wellman et al., 2001 ; Callaghan et al., 2005). Cette compétence universelle, qui apparaît lors du développement de l’enfant et qui témoigne d’une TdE fonctionnelle, est au cœur de ce travail.

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2.1.3 Fausse croyance

La fausse croyance, sous-compétence de la TdE, implique la compréhension que les états mentaux sont propres à chaque individu et que les autres peuvent alors avoir des croyances erronées sur le monde. Afin de tester cette compétence, il est nécessaire que l’enfant ne puisse pas simplement se baser sur ses états mentaux ou sur ses connaissances sur le monde pour arriver à la bonne réponse. Les tâches de fausses croyances ont alors été conçues afin d’évaluer le niveau d’acquisition en TdE.

Tout d’abord, Dennett (1978) a proposé une tâche dans laquelle un personnage a une croyance erronée sur un élément de la scène. L’enfant, qui connait la réalité, doit alors comprendre que ce personnage agit en fonction de sa propre croyance et non en fonction de la réalité. Il doit alors dissocier la croyance du personnage et la réalité pour donner la réponse correcte.

Puis, sur la base des recherches de Wimmer et Perner (1983), Baron-Cohen et al. (1985) ont développé un paradigme, communément nommé Sally et Anne, permettant d’évaluer les compétences en fausses croyances. Celui-ci est constitué de différentes mises en scène contenant deux personnages : Sally et Anne. Sally a un panier et Anne une boîte. Sally place une bille dans son panier puis s’en va. Pendant son absence, Anne sort la bille du panier et la place dans la boîte. Finalement, Sally revient et souhaite jouer avec sa bille. On demande alors à l’enfant « Où Sally va-t-elle chercher sa bille ? ». Afin de réussir cette tâche, il est impératif que l’enfant soit capable de se mettre à la place du personnage afin d’identifier quelle est sa croyance, tout en se détachant de sa propre connaissance de l’emplacement correct. S’il répond correctement, c’est qu’il a compris que les pensées des autres peuvent se distinguer des nôtres ainsi que de la réalité. Il a donc acquis la FC. De nombreuses études se sont intéressées à l’acquisition de cette capacité à attribuer une FC. Une méta-analyse de ces recherches (Wellman et al., 2001) a montré que les enfants à DT parviennent à effectuer correctement ces tâches de TdE entre quatre et cinq ans.

2.2 Lien entre théorie de l’esprit et langage

Dans la littérature scientifique, il a été démontré que différents facteurs jouent un rôle dans le développement de la TdE. Les capacités langagières semblant être liées à son acquisition, il est indispensable de s’intéresser à cette relation afin de comprendre quelle est la nature de ce lien.

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Wellman et al. (2001) se sont penchés sur cette question et ont démontré que les premières compétences en TdE étaient corrélées avec le développement des acquisitions langagières. En outre, à travers une étude longitudinale, il a été mis en évidence que ce sont les enfants avec un niveau de langage plus élevé qui parviendront à de meilleures compétences en TdE (Astington & Jenkins, 1999). Les aptitudes langagières prédisent alors le niveau ultérieur en TdE. L’inverse n’est cependant pas vrai. En effet, les performances en TdE ne prédisent pas les futures capacités langagières des enfants. Le lien entre le langage et la TdE est alors unidirectionnel.

À la suite de cette idée que le langage est un pré-requis nécessaire au développement de la TdE, Lohmann et Tomasello (2003) ont développé une étude d’entraînement avec des interactions autour d’objets à l’apparence trompeuse1. Ils ont recruté 138 enfants, âgés de 3;3 à 3;10 ans (m = 42,5 mois), qu’ils ont répartis aléatoirement dans quatre groupes distincts. Dans un groupe contrôle, les enfants étaient confrontés aux situations trompeuses sans commentaires langagiers explicatifs. Dans les trois groupes expérimentaux, les participants, qui étaient exposés aux mêmes situations, interagissaient avec un expérimentateur qui usait de structures complétives contenant, soit des verbes d’états mentaux, soit des verbes de communication, soit, des verbes d’états mentaux, de communication et de perception. Contrairement aux groupes expérimentaux, au sein du groupe contrôle, les enfants ne montraient pas de progression significative en TdE. Shuliang, Yanjie, Sabbagh, et Jiaming (2014) ont répliqué cette étude auprès d’enfants chinois, âgés de 3;4 à 4;7 ans (N = 120, m = 3;10 ans), en l’adaptant légèrement afin qu’elle soit appropriée à la culture des enfants chinois. Ces chercheurs ont trouvé des résultats similaires à ceux obtenus par Lohmann et Tomasello (2003). Hale et Tager- Flusberg (2003) se sont également intéressés à un entraînement des phrases complétives. Leur étude d’entraînement, auprès d’enfants âgés de 3;0 à 4;10 ans (N = 72, m = 3;11 ans), n’incluait pas de phrases complétives contenant des verbes d’états mentaux. Ces chercheurs ont également montré que les enfants entraînés aux phrases complétives amélioraient non seulement leurs compétences langagières, mais augmentaient également leurs scores en tâches de TdE, notamment en FC. Le langage est alors nécessaire au développement de cette compétence, bien que celui-ci ne soit pas suffisant pour autant. En effet, De Villiers et Pyers (2002) rapportent qu’il existe d’autres compétences non langagières précédant la FC telles que le décodage de l’intention d’autrui à travers le regard, le pointage (Baldwin, 1991), la

1 Un exemple d’objet à l’apparence trompeuse pourrait être une bougie qui ressemble à une pomme. Il s’agit d’un objet d’apparence trompeuse, car, à première vue, il ne ressemble pas à ce qu’il est en réalité.

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compréhension des désirs d’autrui (Gopnik, 1993) ainsi que la distinction entre la fiction et la réalité (Leslie, 1987). Par ailleurs, ce sont également à travers les différentes situations communicationnelles et les échanges que les enfants sont exposés aux croyances ainsi qu’aux opinions d’autrui. C’est alors grâce à la multiplicité de ces expositions qu’ils développent la compréhension que les croyances des autres ne sont pas forcément identiques aux leurs (Dunn

& Brophy, 2005 ; Harris, 2005).

2.2.1 Lexique

Le lexique est un élément langagier majeur compte tenu de la nature des tâches proposées dans les différentes études sur la TdE. Tager-Flusberg et Sullivan (1994) ont par exemple montré que les scores en FC étaient corrélés avec les scores en vocabulaire réceptif chez des individus de 8 à 22 ans présentant un TSA. De plus, il est important de préciser que dans les tâches portant sur l’évaluation de la TdE, le vocabulaire utilisé est un élément fondamental. En effet, les enfants ayant des capacités langagières réduites éprouvent plus de difficultés à comprendre les verbes d’états mentaux. Ceux-ci reflétant des états non observables, ils sont principalement acquis par le biais de conversations (Bartsch & Wellman, 1995, cité dans Nilsson & de López, 2016). Il semble alors qu’un gain en vocabulaire permette de faciliter l’accès au sens lors de conversations avec différents interlocuteurs. Ce gain permettrait également une augmentation des possibilités d’interactions sociales. Happé (1995) montre notamment que les enfants présentant un TSA doivent avoir un niveau de vocabulaire suffisamment élevé pour réussir des tâches de FC en comparaison aux enfants à DT. Elle mentionne alors qu’il peut y avoir une relation causale entre les habiletés verbales et la capacité de se représenter les états mentaux, ce qui renforce cette idée de lien étroit entre ces deux notions.

Grazzani et Ornaghi (2014) se sont intéressés au lexique psychologique dans le cadre d’un entraînement du lexique lié aux émotions ainsi qu’aux verbes d’états mentaux afin de déterminer si ce lexique était lié à leur cognition sociale chez les enfants à DT. Dans un premier temps, tous les participants sont spectateurs d’une histoire lue contenant des mots à travailler.

Ensuite, les enfants du groupe expérimental prenaient part à des activités et des conversations en lien avec l’émotion cible, alors que les enfants du groupe contrôle faisaient un dessin de l’histoire qu’ils avaient entendue. Les résultats de cette étude soulignent un gain significatif de la TdE dans le groupe expérimental alors que cette amélioration n’est pas présente dans le

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groupe contrôle. Cela montre alors qu’une bonne compréhension des verbes de cognition permet de développer des représentations nécessaires à la compréhension de ses propres croyances ainsi que celles d’autrui. (Bartsch & Wellman, 1995 ; Grazzani & Ornaghi, 2014).

Ainsi, la compréhension des substantifs et verbes d’états mentaux est importante pour le développement de la TdE.

2.2.2 Syntaxe

La syntaxe est le domaine langagier qui a le plus été exploré concernant le lien avec la TdE (Milligan, Astington, & Dack, 2007). En effet, la syntaxe des complétives offre la possibilité d’ajouter un argument du verbe contenant les états mentaux d’autrui. Ainsi, les phrases complétives comportent alors une proposition subordonnée, comme le montrent les phrases (1) à (3) ci-dessous :

(1) Paul entend [que son voisin siffle].

(2) Pierre dit [que son fils lui a probablement préparé une surprise].

(3) Jean pense [que son livre préféré a dû tomber de son sac].

Dans ces phrases, il existe trois types de verbes qui impliquent l’utilisation d’une complétive comme argument : les verbes de perception (entendre, sentir…), les verbes de communication (dire, demande…) et les verbes d’états mentaux (penser, croire…).

2.2.3 Importance des phrases complétives

De Villiers et Pyers (2002) ont mis en lumière le lien étroit entre les fausses croyances et les phrases complétives chez les enfants à DT. Dans leur méta-analyse reprenant les données de 104 études, Milligan et al. (2007) ont démontré que parmi toutes les capacités langagières, les complétives sont celles qui expliquent le pourcentage le plus important de variance de la compréhension des fausses croyances.

Une proposition subordonnée complétive est une proposition qui dépend d’une proposition principale et qui a, le plus souvent, un rôle de complément d’objet direct. La proposition subordonnée complétive peut être conjonctive, infinitive ou interrogative (L’Obs la conjugaison, s. d.). Au sein de ce mémoire, le type de complétives choisi est la proposition subordonnée complétive conjonctive qui est introduite par la conjonction de subordination que.

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Celle-ci a lieu avec l’utilisation de verbes d’états mentaux afin d’exprimer les croyances d’une autre personne. C’est spécifiquement par ce type de phrases que l’élaboration de la TdE peut être mise en place chez les enfants (Tager-Flusberg & Joseph, 2005). En effet, la syntaxe liée aux verbes de communication ou aux verbes de croyance permet de rendre les enfants attentifs à des événements de fausses croyances. Une proposition enchâssée dans une phrase a une valeur de vérité indépendante de la phrase principale. Prenons les exemples suivants :

(4) L’arrosoir est sur la table.

(5) Jean dit [que l’arrosoir est sur la table].

(6) Jean pense [que l’arrosoir est sur la table].

Dans l’exemple (4), l’utilisation du présent implique une valeur de vérité de son contenu. Il est vrai que l’arrosoir est sur la table. Cependant, dans les phrases (5) et (6), il est possible que l’arrosoir ne se trouve pas sur la table. L’emploi d’une proposition subordonnée complétive conjonctive permet alors de différencier la valeur de vérité de la phrase principale de celle de la proposition enchâssée (entre crochets), qui peut être vraie ou fausse. En d’autres termes, la phrase complétive permet alors de se représenter la croyance d’autrui, que celle-ci corresponde à la réalité ou non (De Villiers, 2007). Avec la structure offerte par ce type de phrases complétives, l’enfant peut se créer une image mentale de la croyance d’une personne.

Le lien spécifique entre la maîtrise des phrases complétives et la TdE est plus robuste au sein des populations cliniques que chez les enfants à DT. En effet, selon une méta-analyse de Farrar et al. (2017), ces derniers possèdent d’autres moyens d’accéder aux pensées d’autrui.

Ils peuvent notamment recourir à leurs compétences sociales ainsi qu’à leur vocabulaire plus riche, aidant par exemple à mieux comprendre et accéder aux interactions sociales, alors que les enfants présentant un TSA ou un TDL recourront plus souvent à la maîtrise des phrases complétives pour avoir accès à la TdE ou, plus spécifiquement, aux fausses croyances. Ainsi, bien que pour tous les enfants, l’utilisation de la complétive peut être profitable grâce à sa spécificité, pour les populations cliniques, elle est indispensable à la compréhension des états mentaux d’autrui ainsi que celle de la fausse croyance (De Villiers, 2007).

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2.3 Populations d’intérêt

2.3.1 Enfants avec TSA 2.3.1.1 Définition

Le trouble du spectre de l’autisme est un trouble neurodéveloppemental qui affecte tant la communication que les interactions sociales. Le DSM-V (American Psychiatric Association, 2013) décrit les critères qui doivent être présents afin de diagnostiquer ce trouble. Le premier critère décrit le caractère persistant des déficits au niveau de la communication et des relations sociales. Ceux-ci peuvent se manifester par trois éléments : un déficit de réciprocité sociale ou émotionnelle (ne parvient pas à initier ou répondre aux interactions sociales de manière adéquate), un déficit de la communication non verbale dans les interactions sociales (difficultés lors d’échanges non verbaux par le regard, des gestes ou des expressions faciales), un déficit de compréhension des relations (peine à ajuster le comportement aux contextes sociaux). Le deuxième critère diagnostique rapporte la présence de comportements répétitifs et d’intérêts restreints, nécessitant la présence de deux symptômes parmi les quatre éléments suivants : des stéréotypies ou répétitions motrices et verbales, une rigidité face à des routines (difficultés lors de changements ou de transitions entre les activités), une présence d’intérêts restreints atypiques (intensité et but), une hyper ou hyposensibilité sensorielle (douleur, sons, textures).

Le troisième critère diagnostique précise que les symptômes doivent être présents dès les premières étapes du développement. Le quatrième critère explique que les symptômes entraînent un certain handicap dans la vie quotidienne et gênent l’enfant dans son fonctionnement. Le cinquième critère diagnostique présente le fait que les troubles ne peuvent pas être expliqués par une déficience intellectuelle ou un retard global du développement. Une possibilité de comorbidité entre ces troubles subsiste. Par ailleurs, la prévalence du trouble du spectre autistique s’élève à 1 % de la population, touchant quatre fois plus les garçons que les filles (American Psychiatric Association, 2013).

2.3.1.2 Difficultés en théorie de l’esprit

Comme décrit dans la section 2.3.1.1. de ce travail, la principale difficulté chez un enfant avec TSA se caractérise par des interactions sociales déficientes. De nombreux chercheurs ont tenté d’expliquer ce déficit. Une des hypothèses émanant de la recherche suggère que cette difficulté d’interaction sociale chez les enfants avec TSA dépend directement d’une altération dans la capacité à se représenter les états mentaux d’autrui et donc un déficit

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en TdE (Baron-Cohen et al., 1985 ; Frith, Morton, & Leslie, 1991 ; Happé, 1995). D’après la méta-analyse de Yirmiya, Erel Shaked et Solomonica-Levi (1998), les personnes atteintes d’un TSA ont des performances en TdE significativement inférieures à celles d’enfants ayant un développement typique (de même âge chronologique) ainsi qu’à des personnes présentant une déficience intellectuelle (de même âge mental). Le TSA implique alors un retard en TdE qui influence négativement les interactions sociales et la communication entre celui qui en est atteint et ses pairs (Tager-Flusberg, 2001 ; Nilsson & de López, 2016). La déficience dans la capacité à se représenter les croyances et les états mentaux d’autrui explique en partie la difficulté qu’éprouvent les enfants avec TSA à comprendre ainsi qu’à s’adapter au contexte.

Tager-Flusberg et Joseph (2005) distinguent une composante socio-perceptive d’une composante socio-cognitive dans la TdE. La première reflète la capacité à extraire des informations en lien avec les états mentaux grâce à des stimuli sensoriels tels que le visage, le corps ou la voix, et la seconde représente la capacité à se représenter les états mentaux d’autrui.

Ces chercheurs expliquent que le déficit qu’ont les enfants TSA en TdE est probablement dû à un déficit du premier niveau : la composante socio-perceptive. Ils l’illustrent par le fait que les nouveau-nés ont tendance à préférer les stimuli de nature humaine, en particulier les visages et les voix, ce qui permet de construire ce niveau socio-perceptif. Ce niveau de la TdE est alors le premier à apparaître dans le développement de l’enfant à DT. Les enfants avec TSA ont, en revanche, peu d’attention conjointe et d’avidité précoce à l’interaction sociale, ce qui mène à un déficit du niveau socio-perceptif de la TdE qui ne peut pas se construire dans des conditions optimales. En outre, la composante socio-cognitive se construit sur la base de celle socio- perceptive. Cette dernière étant déjà déficitaire chez les enfants avec TSA, cela se traduira par un déficit de la TdE.

À travers la tâche de Sally et Anne, décrite au point 2.1.3 de ce travail, Baron-Cohen et al. (1985) ont montré que 80 % des enfants avec TSA échouaient à une tâche de FC, bien qu’ils aient un âge mental non verbal similaire au groupe contrôle d’enfants à DT. Il apparaît que ces enfants présentent un déficit spécifique en TdE. Ils ne parviennent alors pas à dissocier leur connaissance de la réalité et la croyance erronée du personnage, ce qui entraîne une incapacité à répondre de manière correcte à la question posée. Cependant, tout comme le montre Tager- Flusberg (2007), le fait que 80 % d’entre eux échouent suggère alors qu’un sous-groupe d’enfants atteint de TSA parvient à réaliser correctement les épreuves de FC. Nous pouvons alors nous questionner sur ce paramètre, sur lequel nous nous pencherons ultérieurement. Cela

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permet cependant d’affirmer que malgré le déficit important en TdE chez les enfants avec TSA, certains n’en sont pas entièrement dépourvus.

2.3.1.3 Difficultés langagières

Les compétences langagières des enfants présentant un TSA se manifestent de manière diverse (Lord et al., 2006). Dans cette étude, les chercheurs rapportent que parmi la totalité des enfants TSA, 15 % sont non verbaux alors que 85 % sont capables d’utiliser le langage, à des niveaux de compétences variables. Ces différences illustrent la notion de spectre qui est présente lorsque l’on caractérise l’autisme. Depuis l’introduction de cette notion dans la définition du trouble autistique, une prise en charge précoce et plus intense a été mise en place, ce qui a permis de réduire le taux d’enfants TSA non verbaux (Gotham, Bishop, & Lord, 2010).

De nombreux chercheurs se sont intéressés aux difficultés langagières des individus présentant un TSA, particulièrement à la pragmatique. Tager-Flusberg (1994) décrit les troubles pragmatiques comme prédominants chez cette population et ayant un lien étroit avec les difficultés en TdE.

D’autres niveaux linguistiques peuvent faire l’objet de difficultés chez les enfants TSA verbaux. Eigsti, Bennetto et Dadlani (2007), qui se sont penchés sur différents domaines langagiers dans cette population, ont mis en évidence des déficits en syntaxe. En effet, les enfants présentant un TSA ont des performances en syntaxe inférieures à celles d’enfants à DT de même âge. Suite à cette étude, Durrleman et Zufferey (2009) ont démontré que dans leurs discours spontanés, les enfants avec TSA utilisent peu de phrases complexes de type relatives ou complétives. De plus, ils semblent avoir des difficultés à organiser correctement les phrases interrogatives. L’hypothèse formulée par les auteures est la suivante : étant donné que leur développement langagier est perturbé, la syntaxe complexe ne se consoliderait pas comme celle des individus tout-venant. Les personnes atteintes de TSA présentent alors des déficits persistants en syntaxe complexe.

2.3.2 Enfants avec TDL 2.3.2.1 Définition

Longtemps appelé dysphasie ou trouble spécifique du langage (TSL), la terminologie de ce trouble a été modifiée. Sa spécificité a été remise en question, notamment du fait de la

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présence de comorbidités chez les enfants ayant des troubles langagiers. À la suite de ces questionnements et afin de regrouper les difficultés langagières développementales sous une même entité, nous parlons désormais de trouble développemental du langage (Bishop, Snowling, Thompson, & Greenhalgh, 2017). La définition du TDL n’est pas une définition par critères d’exclusion, comme l’était celle du TSL. Le diagnostic de TDL peut alors apparaître en présence d’une comorbidité avec un ou plusieurs autres troubles : trouble cognitif, TDAH, dyslexie, dysorthographie, trouble de la parole ainsi que des difficultés comportementales, sensorimotrices ou émotionnelles. De plus, il n’est plus nécessaire pour un enfant diagnostiqué TDL de présenter un écart entre ses capacités verbales et non verbales. Ainsi, un enfant avec TDL peut avoir un quotient intellectuel non verbal faible, ce qui n’était pas possible avec la terminologie de TSL. De plus, l’enfant diagnostiqué TDL peut présenter une pathologie biomédicale connue. Les auteurs recommandent alors d’indiquer « trouble du langage associé à X », ce qui permet d’apporter un diagnostic différentiel.

La notion importante avec le TDL est celle du facteur de risque. Ainsi, on ne parle plus de critères d’exclusion, mais de facteurs de risque qui peuvent être de nature biologique ou environnementale : la présence de troubles langagiers au sein de l’histoire familiale, un niveau d’éducation des parents relativement bas ainsi qu’être un garçon ou être le cadet au sein d’une fratrie (Rudolph, 2017, cité dans Bishop et al., 2017).

Bien qu’il y ait eu un changement dans la terminologie du trouble, les symptômes observés restent les mêmes que ceux qui étaient présents avec la terminologie précédente. Au sein du DSM-V, ce trouble, appelé trouble du langage, est décrit comme un trouble neurodéveloppemental qui comporte quatre critères distincts. Le premier critère expose des difficultés persistantes dans l’acquisition du langage, sur le versant réceptif ou productif, qui doivent s’illustrer dans toutes les modalités (orale, écrite, gestuelle ou autre). Le deuxième critère consiste à dire que les compétences langagières d’un enfant avec TSL sont significativement inférieures à celles attendues pour son âge chronologique. De plus, le trouble doit représenter un handicap dans la vie de l’enfant, que ce soit dans le cadre de sa socialisation, sa réussite scolaire ou académique, sa communication ou toute activité qui sous-tend le langage. Le troisième critère présente le développement précoce des symptômes observés.

Enfin, le dernier critère précise que les difficultés ne peuvent pas être attribuées à un problème auditif, moteur, intellectuel, à une affection neurologique ou à un retard global de développement.

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La prévalence des troubles langagiers est de 7 % chez les enfants de 5 ans (Leonard, 2014 ; tirée de Tomblin et al., 1997). Bien que ces diagnostics permettent une prise en charge précoce, les difficultés langagières rencontrées par la majorité de ces enfants resteront présentes à l’âge adulte. En effet, certaines compétences liées au langage sont acquises précocement et ne peuvent plus être acquises à un âge avancé. Les déficits seront alors maintenus et présents au premier plan (Leonard, 2014).

2.3.2.2 Difficultés langagières

Les enfants avec TDL présentent des difficultés langagières très hétérogènes et touchant différents niveaux linguistiques (Tomblin, 2011). Les difficultés observées peuvent être de nature phonologique, articulatoire, syntaxique, sémantique, lexicale, discursive, liées à l’apprentissage ainsi qu’à la mémoire verbale (Bishop et al., 2017). Compte tenu de l’hétérogénéité des profils possibles, une chercheuse a développé des marqueurs aidant au diagnostic de ces troubles et permettant d’estimer le pronostic d’évolution de ceux-ci (Schelstraete, 2008, cité dans Leclercq & Maillard, 2014). Les enfants avec TDL peuvent présenter des troubles en réception touchant la discrimination de sons ou en compréhension de mots ou de phrases, d’importantes erreurs phonologiques, la présence d’un profil agrammatique ainsi qu’un retard dans le développement de la communication gestuelle. Les acquisitions chez ces enfants vont se développer plus lentement et des perturbations vont se maintenir dans le temps.

Les enfants avec TDL présentent, dans 30 à 40 % des cas, des troubles lexicaux. Ceux- ci vont impacter l’étendue du stock lexical (Trauner, Wulfeck, Tallal, & Hesselink, 1995) ainsi que la diversité lexicale (Leonard, Miller, & Gerber, 1999). Concernant la syntaxe, les erreurs les plus fréquemment commises par les enfants présentant un TDL seront similaires à celles d’enfants à DT plus jeunes. Certaines erreurs seront souvent présentes dans les productions des enfants avec TDL : l’utilisation incorrecte de morphèmes grammaticaux, de pronoms clitiques ou de la morphologie verbale (Parisse & Maillart, 2004). Tuller, Henry, Sizaret et Barthez (2012) démontrent que leurs difficultés syntaxiques seront toujours présentes à l’adolescence et toucheront alors les phrases complexes. Les phrases subordonnées comporteront alors plus d’erreurs que celles prononcées par les enfants à DT. Il est intéressant de mentionner également que les phrases complétives seront également souvent remplacées par du discours direct. Cela

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représente, d’après les auteurs, une stratégie souvent observée auprès des enfants présentant un TDL afin de ne pas recourir à l’utilisation de phrases subordonnées.

2.3.2.3 Difficultés en théorie de l’esprit

Les enfants avec TDL présentent des difficultés langagières au premier plan, notamment en sémantique, en pragmatique ainsi qu’en syntaxe (Bishop, Chan, Adams, Hartley, & Weir, 2000, cité dans Nilsson & de López, 2016). Bien que ces difficultés soient attestées et très représentées dans la littérature, différentes études plus récentes mettent également en évidence des difficultés en TdE. La méta-analyse de Nilsson et de López (2016), reprenant les données de 17 études, a été conduite afin de comparer les performances en TdE des enfants TDL, âgés de 4 à 12 ans, avec celles d’enfants à DT. Ces chercheurs ont démontré qu’en TdE, les enfants avec TDL ont des performances inférieures aux enfants DT de même âge chronologique.

D’après les auteurs, ces difficultés montrent un retard en TdE. En effet, les TDL ont des performances en TdE similaires à celles d’enfants plus jeunes ayant un DT. Pour expliquer cela, les auteurs mettent en avant l’hypothèse selon laquelle ce retard en TdE serait la conséquence d’un développement du langage réduit et déficitaire. Il est important de préciser que les difficultés observées ne peuvent pas être expliquées par la présence de langage dans la tâche à accomplir d’après Nilsson et de López (2016). En effet, ces auteurs ont mis en évidence la présence de différences entre les performances des enfants TDL et celles des DT dans les tâches évaluant la TdE, que celles-ci soient verbales ou non verbales. En outre, dans leur étude, Andrés-Roqueta, Adrian, Clemente et Katsos (2013) montrent que le retard dans le développement de la TdE chez les enfants avec TDL, plus léger que celui des enfants avec TSA, est corrélé plus fortement avec le niveau langagier général qu’avec l’âge de l’enfant. Il existe alors un lien étroit entre la TdE et le langage. Un déficit dans le domaine du langage entraînerait donc des difficultés en TdE.

2.4 Entraînement langagier pour améliorer la théorie de l’esprit

La théorie de l’esprit présente de nombreux enjeux. Tout d’abord, elle nous permet de faire des inférences sur les états mentaux tels que les émotions, les sentiments et les pensées des personnes qui nous entourent. Cette faculté semble nécessaire afin d’acquérir des comportements sociaux, permettant de gérer les interactions sociales, collaborer et être accepté par ses pairs (Caputi, Lecce, Pagnin, & Banerjee, 2012). De plus, concernant les apprentissages

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scolaires, Atkinson, Slade, Powell et Levy (2017, cité dans Derksen, Hunsche, Giroux, Connolly, & Bernstein, 2018) mettent en évidence que les performances en TdE de l’enfant de 4 ans sont prédictives des compétences en compréhension de lecture à 6 ans. Par ailleurs, la TdE permet une meilleure flexibilité mentale d’après Suddendorf et Fletcher-Flinn (1999, cité dans Derksen et al., 2018). Ainsi, elle semble indispensable dans la vie sociale de chaque individu, car elle permet de modifier nos prises de décisions ainsi que nos actions. Lorsque son développement est altéré, elle peut avoir des effets négatifs et handicaper la construction des relations sociales. Un déficit en TdE est notamment lié à une plus grande solitude ainsi qu’à un rejet social (Devine & Hughes, 2013). Il est alors nécessaire de développer un moyen d’entraîner cette compétence chez les enfants présentant un retard ou un déficit en TdE afin de minimiser ses différents impacts négatifs.

Des études d’entraînement ont mis en avant un lien entre la maîtrise des phrases complétives et l’acquisition de la FC. À notre connaissance, aucune étude ne s’est intéressée à l’effet d’un entraînement de ce type sur des populations cliniques. En revanche, il existe trois études qui ont été menées auprès d’enfants à DT (Hale & Tager-Flusberg, 2003 ; Lohmann &

Tomasello, 2003 ; Shuliang et al., 2014). Dans chacune de ces recherches, les auteurs ont mis en place un entraînement de la syntaxe des complétives afin d’observer quels étaient les effets sur l’acquisition de la FC au sein de participants à DT d’âge préscolaire. Chacune contribue à un enrichissement de la littérature scientifique avec un apport qui lui est propre. Dans l’étude de Lohmann et Tomasello (2003), les complétives ont été entraînées avec des verbes d’états mentaux, de communication et de perception. Cette méthodologie ne permet alors pas d’isoler l’apport de la structure des phrases complétives de celui contenu dans les verbes d’états mentaux. Toutefois, dans l’étude de Hale et Tager-Flusberg (2003), les complétives ont été uniquement entraînées avec des phrases contenant des verbes de communication. Cet entraînement permettant d’améliorer les compétences en TdE, les auteures ont ainsi pu montrer que la structure des complétives est un élément clé dans l’acquisition de la compréhension en TdE. Plus généralement, les résultats obtenus dans les trois études démontrent qu’il y a une amélioration des performances en TdE suite à un entraînement spécifique des phrases complétives. De plus, ils ont montré que l’inverse n’était pas vrai. En effet, un entraînement des fausses croyances ne permet pas de consolider la maîtrise des phrases complétives. Comme précisé précédemment, le lien entre les phrases complétives et la TdE, en particulier les fausses croyances, est alors unidirectionnel. Compte tenu de ces résultats, il serait intéressant et pertinent de tenter de les répliquer au sein des populations cliniques, au vu des difficultés

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observées en maîtrise des phrases complétives ainsi qu’en compréhension des fausses croyances, tant chez les enfants avec TDL (Steel, Rose, & Eadie, 2016 ; Nilsson & de López, 2016) qu’avec les enfants présentant un TSA (Eigsti et al., 2007 ; Durrleman et al., 2016). Il a été montré que les enfants avec TSA présentent davantage de difficultés à comprendre les verbes de cognition ou d’états mentaux, tels que penser ou croire, car ceux-ci demandent une abstraction plus importante que les verbes de communication tels que dire (Tager-Flusberg &

Joseph, 2005).

Nous avions mentionné précédemment que certains enfants présentant un TSA parvenaient à venir à bout des tâches de FC malgré un déficit en TdE. Une réponse proposée au sein de la littérature est que certains d’entre eux utilisent le langage pour compenser les difficultés en TdE. Ceux-ci se serviraient alors du langage comme d’un « tremplin » (Happé, 1995) et s’appuient alors notamment sur leurs compétences en complétives contenant des verbes de communication (de Villiers, 2005). Ces verbes étant moins abstraits que les verbes d’états mentaux, ils peuvent être compris sans nécessiter une attribution d’états mentaux. Ce sont grâce aux différents échanges lors desquels les personnes parlent de ce qu’elles disent (et pas de ce qu’elles pensent) que ces enfants parviennent à acquérir une compréhension des fausses croyances (De Villiers, 2005). Il est alors nécessaire d’adapter les entraînements proposés à leurs compétences, en utilisant des verbes plus concrets, afin de maximiser leurs bénéfices d’apprentissage. Par ailleurs, dans une autre étude ciblant la population d’enfants avec TSA, Paynter et Peterson (2013) ont démontré que l’utilisation de bulles de paroles pour représenter les croyances aidait ces enfants dans des tâches de fausses croyances. En effet, elles permettent de rendre visibles les pensées des personnages. Dans l’élaboration d’un entraînement des phrases complétives, il serait alors pertinent d’inclure ces bulles de parole, afin de visualiser ce qui est exprimé, ainsi que les verbes de communication, toujours dans un but d’adaptation aux populations cliniques (Durrleman, Gatignol & Delage, 2017).

2.5 Problématique et hypothèse théorique

À la lumière des différents éléments développés précédemment, cette étude a pour objectif de déterminer si un entraînement des phrases complétives permet d’améliorer les compétences en TdE ou, plus précisément, en compréhension des fausses croyances chez les enfants présentant un TSA ou un TDL. Plusieurs études (Hale & Tager-Flusberg, 2003 ; Lohmann & Tomasello, 2003) ont permis de montrer que chez les enfants à développement typique, une amélioration des performances en TdE, mesurée par des tâches de FC, était possible suite à un entraînement des phrases complétives. À notre connaissance, il n’existe

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aucune étude qui se soit intéressée à ce type d’entraînement auprès des enfants avec TSA ou TDL. Ainsi, notre étude, qui a débuté en 2017, a pour but d’étudier les bénéfices potentiels d’un entraînement de phrases complétives sur la TdE chez les populations cliniques qui peuvent présenter des difficultés dans ces deux domaines. Dans le cas où nos hypothèses sont confirmées et se révèlent concluantes, cela permettrait la mise à disposition de notre programme d’entraînement aux logopédistes qui prennent en charge ces populations cliniques.

La maîtrise des phrases complétives, qui aident à représenter des états mentaux d’autrui, a une influence spécifique et unidirectionnelle sur la TdE. Notre hypothèse théorique est alors la suivante : l’entraînement des phrases complétives améliorerait les performances en théorie de l’esprit et, plus précisément, en fausse croyance.

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3 Méthode 3.1 Participants

Dans le cadre de cette étude, 123 enfants (85 garçons et 38 filles) ont été recrutés en Suisse romande, en France voisine et à Paris. Notre échantillon est composé des trois populations présentées précédemment : TSA, TDL et DT. Nous avons pu inclure 31 enfants à DT, âgés de 2;9 à 6 ans, 43 enfants ayant un TDL, âgés de 4;8 à 9;7 ans et 49 enfants présentant un TSA, âgés de 5;6 à 13;6 ans (cf. Annexe II). Ces tranches d’âges ont été retenues, car elles correspondent à la période durant laquelle les enfants de ces différentes populations ne maîtrisent pas encore la compréhension des phrases complétives et de la théorie de l’esprit.

Concernant le recrutement des participants, nous avons utilisé divers moyens. D’abord, nous avons contacté des logopédistes par courriel ou par téléphone, des parents via internet et les réseaux sociaux, ou encore des associations spécialisées. De plus, nous avons confectionné et affiché des posters à l’Université ainsi que dans des cabinets thérapeutiques (cf. Annexe I).

Enfin, nous avons eu recours au bouche-à-oreille avec notre entourage.

La contribution personnelle de chaque étudiante de Maîtrise en logopédie a été de recruter cinq enfants ayant un diagnostic de TDL ou de TSA. Chacune a ensuite dû procéder aux pré-tests, aux entraînements, ainsi qu’aux post-tests immédiats et différés. Nous avons également rédigé, pour les parents qui le souhaitaient, des comptes-rendus personnalisés synthétisant les performances de leur enfant.

Enfin, un formulaire de consentement a été soumis aux parents afin de permettre à leur enfant de participer à l’étude et à l’équipe de recherche d’utiliser les données afférentes (cf. Annexe I).

3.2 Matériel

• Une tablette (iPad) sur laquelle sont installées les différentes applications nécessaires aux entraînements.

• Un ordinateur PC sur lequel sont installés les différents pré- et post-tests.

• Les Matrices Progressives de Raven (Raven, Court, & Raven, 1998).

• Le questionnaire CARS (« Childhood Autism Rating Scale », Schopler, Reichler, De Velus, & Daly, 1980).

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• Un dictaphone pour enregistrer les tâches des pré- et post-tests.

• Le formulaire de consentement.

Des cadeaux personnalisés pour les enfants ayant participé à l’entraînement.

3.3 Procédure

3.3.1 Pré-tests

Nous avons dû préalablement tester chaque participant afin d’exclure ceux pour qui l’entraînement n’aurait aucun bénéfice (résultats plafonnant avant même de débuter l’entraînement, compétences langagières et capacités attentionnelles insuffisantes pour compléter les pré-tests). Les critères d’inclusion et d’exclusion sont détaillés plus loin.

Dès lors, chaque participant a été soumis à un pré-test évaluant la TdE, la maîtrise des phrases complétives, le langage ainsi que le raisonnement non verbal ainsi que la sévérité des troubles autistiques (cf. Annexe III). Dans son entièreté, la passation du pré-test dure entre une heure trente et deux heures (répartie au besoin sur deux séances) et s’effectue au domicile de l’enfant.

3.3.1.1 Pré-test « cible »

Lors de ce pré-test « cible », l’enfant visionne de petites scènes animées suivies d’une question. Il doit alors répondre à partir d’un choix multiple comprenant trois possibilités de réponses : la réponse attendue (ce que le personnage dit/pense), le distracteur visible dans la scène (ce qui se passe en réalité) et un distracteur non relié.

Par ailleurs, les items sont répartis en deux catégories : celle mobilisant la TdE (verbale et non verbale) et celle impliquant la compréhension des phrases complétives. Si bien que le pré-test cible comporte un total de trente-six items, organisés en six conditions : six items non verbaux associés à une vraie croyance (NV VC), six items non verbaux associés à une fausse croyance (NV FC), six items verbaux associés à une vraie croyance (V VC), six items verbaux associés à une fausse croyance (V FC), six items « complétives vraies » (CO V) et six items

« complétives fausses » (CO F).

Dans le cadre des vraies croyances, ce que l’enfant entend correspond à ce qu’il voit réellement dans la scène. Celui-ci peut alors aisément répondre à l’item s’il est suffisamment attentif. En revanche, les fausses croyances impliquent une dissociation entre l’énoncé et la

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réalité observée. Ces dernières sont donc directement liées aux compétences complexes de TdE explicitées dans le cadre théorique.

3.3.1.1.1 Évaluation de la théorie de l’esprit

L’évaluation de la TdE rassemble un total de vingt-quatre items, répartis en deux sous- catégories : les tâches de « TdE verbale » impliquant le langage (tâches de type Sally-Anne, Baron-Cohen et al., 1985) et les tâches de « TdE non verbale », exigeant moins de compétences langagières, inspirées de Woolfe et al. (2002). En outre, les items d’évaluation de la TdE sont divisés entre vraies croyances et fausses croyances.

3.3.1.1.1.1 Évaluation de la théorie de l’esprit non verbale

Cette tâche est composée de douze items de TdE non verbale2 (TdE NV VC et TdE NV FC). La réussite de cette tâche est minimalement tributaire des compétences verbales de l’enfant, c’est-à-dire qu’elle mobilise le moins de langage possible. Elle permet donc d’évaluer la TdE en réduisant l’impact des difficultés langagières que peuvent rencontrer les enfants avec TDL et TSA.

Voici un exemple d’item de TdE non verbale avec VC, illustré par la Figure 1 : « Sarah a froid. Elle veut mettre une écharpe pour se réchauffer. Regarde, on cache les yeux de Sarah.

Elle ne voit pas ce qu’elle prend dans la commode. Clique pour voir. Sarah pense prendre quoi dans la commode ? ». Il s’agit ici d’une VC, car Sarah prend vraiment ce qu’elle voulait : l’écharpe.

Figure 1. Item d’évaluation de TdE non verbale avec valeur de vérité vraie.

2 Une tâche entièrement non verbale, exigeant une réponse explicite, est très difficile à créer et même à comprendre pour les participants. Nous utilisons donc le terme « non verbale » par opposition à « verbale », mais, en réalité, il s’agit ici d’une tâche qui repose le moins possible sur les capacités langagières.

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Voici un exemple d’item de TdE non verbale avec FC : « Jean est en train de pêcher. Il est heureux d’être au lac et de pêcher. Regarde, on cache les yeux de Jean, il ne voit pas ce qu’il pêche. Clique pour voir (une chaussure apparaît). Jean pense pêcher quoi ? ». Cette fois, il s’agit d’une FC, car Jean pêche une chaussure alors qu’il voulait prendre un poisson.

Pour répondre correctement à cette tâche, l’enfant doit simplement être capable de faire des inférences sur l’animation présentée, tout en se mettant à la place du personnage qui a les yeux bandés.

3.3.1.1.1.2 Évaluation de la théorie de l’esprit verbale

Inspirée du test de Sally et Anne (Baron-Cohen et al., 1985), cette tâche regroupe douze items de TdE verbale (TdE V VC et TdE V FC). La réussite de ces items, contrairement aux précédents, implique un recours inévitable au domaine verbal et aux capacités langagières résultantes. La moitié des questions de test étaient formulées avec la syntaxe la plus simple possible, c’est-à-dire avec des phrases dans lesquelles le mot interrogatif est à la fin (in situ), tandis que les autres questions avaient le mot interrogatif au début (ex situ)3. Puisque les enfants TSA comprennent en général mieux que les questions in situ (Durrleman et al., 2016). Il sera intéressant d’explorer l’impact possible des interrogatives ex situ sur leurs performances.

Pour illustrer ces items, prenons d’abord un exemple de TdE verbale avec VC : « Voici le lapin. Voici le mouton. Le lapin est à côté de l’herbe. Le mouton est à côté de la paille. Le lapin prend la carotte et la met derrière l’herbe. Le lapin va faire une sieste. Le mouton prend la carotte derrière l’herbe et il mange un bout de la carotte. Le mouton remet la carotte derrière l’herbe. Maintenant, le lapin revient. Il veut manger sa carotte. Le lapin va chercher sa carotte où ? ».

Voici un exemple de TdE verbale avec FC, illustré par la Figure 2 : « Voici le cowboy.

Voici l’indien. Le cowboy est à côté d’un buisson. L’indien est à côté d’un rocher. Le cowboy a un chapeau. Il met le chapeau derrière le buisson. Le cowboy part faire une sieste. L’indien essaie le chapeau et, après, il le repose derrière le rocher. Maintenant, le cowboy revient. Il veut mettre son chapeau sur sa tête. Où le cowboy va chercher son chapeau ? ».

3 Voici un exemple de phrase interrogative in situ : « Tu pars quand ? » et un exemple d’interrogative ex situ :

« Quand pars-tu ? ».

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Figure 2. Item d’évaluation de TdE verbale avec valeur de vérité fausse.

Ici, pour donner la bonne réponse, l’enfant doit dissocier sa propre connaissance de celle du personnage sur la situation présentée.

Notons que la dissociation entre items de TdE verbale et non verbale est pertinente pour exclure la possibilité que les participants échouent aux items verbaux, du fait de leurs difficultés de langage.

3.3.1.1.2 Évaluation des complétives

Cette troisième tâche comporte douze items évaluant les compétences en complétives (CO V et CO F). Elle est constituée de scénettes dans lesquelles les personnages utilisent un verbe de communication sous la forme « X dit [que Y] ». L’enfant doit alors comparer l’énoncé contenant la complétive avec ce qui est réellement observé dans la scénette.

Prenons un exemple de complétive vraie : « Le grand-père demande à la maman ce que Jean est en train de faire et la maman répond [que Jean est en train de jouer avec des bateaux dans le bain]. Regarde, Jean est en train de jouer avec des bateaux dans le bain. La maman dit [que Jean fait quoi] ? ».

Voici un exemple de complétive fausse, illustré par la Figure 3 : « La maman demande au papa ce que Julien est en train de faire. Et le papa répond [que Jean est en train de manger du poisson]. Mais regarde, au lieu de ça, Julien est en train de donner du poisson au chat. Le papa dit [que Julien fait quoi] ? ».

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Figure 3. Item d’évaluation d’une complétive avec valeur de vérité fausse.

3.3.1.1.3 Évaluation des compétences précédant la fausse croyance

Suite au pré-test « cible », les participants ayant respecté les critères d’inclusion sont confrontés à un mini-test sur ordinateur, inspiré de la tâche de Burnel, Perrone-Bertolotti, Reboul, Baciu, et Durrleman (2018). Le mini-test est composé de six items évaluant les capacités en TdE qui précèdent l’attribution de fausses croyances, à savoir trois items évaluant les croyances distinctes et trois autres évaluant les désirs distincts. En d’autres termes, pour répondre correctement à la question posée, l’enfant doit distinguer sa préférence ou son idée de celle du personnage.

Formellement, l’enfant est confronté à des items dans lesquels il doit dissocier sa préférence de celle du personnage, tels que : « Tu préfères la banane ou le biscuit ? Clique.

Regarde ! Tom préfère le biscuit. Tom veut quoi pour le goûter ? Clique. ».

Aussi, comme illustré par la Figure 4, l’enfant voit des items dans lesquels il doit distinguer sa connaissance de celle du personnage : « Voici Felix. Felix aime se cacher dans les buissons. Felix aime aussi se cacher dans le garage. Voici Linda. Linda cherche Felix. À ton avis, Felix est où ? Dans les buissons ou dans le garage ? Pour Linda, Felix est… Linda va chercher Felix où ? ».

Figure 4. Item d’évaluation des compétences précédant la compréhension des fausses croyances.

L’enfant doit choisir parmi trois propositions imagées, dont deux sont en lien avec l’histoire (ce qui est dit et ce qui est réel) et une troisième qui n’y est pas reliée.

L’exemple (13) ci-dessous illustre un cas où la phrase enchâssée est vraie :

(13) « La maman demande au papa ce que Julien est en train de faire et le papa répond que Julien est en train de donner le poisson au chat. Regarde, Julien est en train de donner le poisson au chat. L e papa dit que Julien fait quoi ? »

Ici aussi, l’enfant doit choisir parmi trois propositions imagées, dont cette fois une seule est en lien avec l’histoire alors que les deux autres ne le sont pas.

2.2.1.3 Evaluation du raisonnement non verbal

Le raisonnement non verbal est évalué par une tâche sur papier : les Matrices Progressives de Raven (PM-47, intelligence fluide ; Raven, Court & Raven, 1998). Cette épreuve comporte 36 planches représentant des figures auxquelles il manque une partie ou une suite de figures où il faut trouver la figure manquante. L’enfant doit choisir la cible parmi 5 distracteurs. Les 36 planches sont réparties en trois séries de 12 planches (A, AB et B) de difficulté croissante.

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3.3.1.2 Évaluation du langage

Les participants sont soumis à une évaluation standardisée de leurs compétences langagières via EXAlang 3-6 (Helloin & Thibault, 2006).

Par la passation de neuf épreuves sur ordinateur, ce test nous donne une idée globale des compétences langagières de l’enfant. Ces tâches, dont nous avons une illustration à la Figure 5, évaluent les compétences lexicales (quantificateurs et nombres, désignation d’images, topologie en compréhension) et morphosyntaxiques (compréhension de récit, aptitudes morphosyntaxiques), la phonologie (répétition de logatomes), l’attention auditive et la mémoire (empan de chiffres et de mots). Ainsi, ce test nous permet de vérifier que l’enfant dispose de compétences réceptives suffisantes et nécessaires à la compréhension des complétives.

Figure 5. Item de l’épreuve d’aptitudes morphosyntaxiques du test EXAlang 3-6.

3.3.1.3 Évaluation du raisonnement non verbal

Nous avons administré les Matrices Progressives de Raven (Raven et al., 1998) aux enfants afin d’évaluer leur raisonnement non verbal.

Les items de ce test sont répartis en trois séries de douze planches de difficulté progressive (A, AB, B), comme illustré par la Figure 6. L’enfant doit alors compléter les trente- six illustrations en désignant la pièce manquante parmi six propositions.

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