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Quels sont les effets d'un entrainement de la mémoire de travail sur les capacités syntaxiques chez les enfants avec un trouble du spectre autistique?

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Reference

Quels sont les effets d'un entrainement de la mémoire de travail sur les capacités syntaxiques chez les enfants avec un trouble du spectre

autistique?

BERTHERIN, Julie

Abstract

Cette étude vise à déterminer les effets d'un entrainement intensif de la mémoire de travail sur les performances en syntaxe complexe, chez des enfants avec un trouble du spectre autistique, âgés entre 6 et 14 ans. Pour cela, 32 enfants ont suivi un nouvel entrainement de la mémoire de travail, nommé Magic Memory. Cet entrainement a duré huit semaines à raison de trois séances par semaine pendant 30 minutes. Afin d'objectiver les effets de ce programme, les performances des enfants sur différentes tâches de mémoire de travail et de syntaxe complexe ont été comparées à trois reprises : avant l'entrainement, immédiatement après et trois mois après. Les résultats révèlent que l'entrainement a permis d'améliorer les performances des enfants sur les tâches de mémoire de travail ainsi que sur certaines tâches de syntaxe. De plus, ces progrès semblent se maintenir après trois mois...

BERTHERIN, Julie. Quels sont les effets d'un entrainement de la mémoire de travail sur les capacités syntaxiques chez les enfants avec un trouble du spectre

autistique?. Master : Univ. Genève, 2020

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:139047

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(2)

UNIVERSITE DE GENÈVE

FACULTÉ DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L’ÉDUCATION

Section de psychologie Master en logopédie

Par

Julie Bertherin Session de juin 2020

Sous la direction de

Hélène Delage, Stephanie Durrleman et Emily Stanford

Nombre de mots : 19’127

Quels sont les effets d’un entrainement de la mémoire de travail sur les capacités syntaxiques

chez les enfants avec un trouble du spectre

autistique ?

(3)

En premier lieu, je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à ma directrice de mémoire, le Docteur Hélène DELAGE. Je la remercie pour sa disponibilité et pour m’avoir encadrée, orientée, aidée et conseillée tout au long de ce travail.

Ensuite, j’adresse aussi mes sincères remerciements à Mme DURRLEMAN qui a su guider mes réflexions et répondre à mes questions durant cette recherche.

Un grand merci également à Emily STANFORD pour sa disponibilité et pour tout le temps qu’elle a consacré à corriger nos données statistiques.

Je remercie aussi les logopédistes et surtout les familles et leurs enfants qui ont accepté de s’impliquer autant dans ce projet et qui m’ont toujours accueillie très chaleureusement dans leur quotidien malgré les nombreuses adaptations et le temps que cela a demandé.

Je remercie également ma collègue de mémoire et véritable amie, Ombeline VAGLIO, avec qui j’ai eu vraiment beaucoup de plaisir à travailler.

Finalement, je tiens à remercier l’ensemble de ma famille et mes proches pour leur soutien et leurs encouragements tout au long de ce travail.

(4)

Cette étude vise à déterminer les effets d’un entrainement intensif de la mémoire de travail sur les performances en syntaxe complexe, chez des enfants avec un trouble du spectre autistique, âgés entre 6 et 14 ans. Pour cela, 32 enfants ont suivi un nouvel entrainement de la mémoire de travail, nommé Magic Memory. Cet entrainement a duré huit semaines à raison de trois séances par semaine pendant 30 minutes. Afin d’objectiver les effets de ce programme, les performances des enfants sur différentes tâches de mémoire de travail et de syntaxe complexe ont été comparées à trois reprises : avant l’entrainement, immédiatement après et trois mois après. Les résultats révèlent que l’entrainement a permis d’améliorer les performances des enfants sur les tâches de mémoire de travail ainsi que sur certaines tâches de syntaxe. De plus, ces progrès semblent se maintenir après trois mois. Nos résultats sont donc prometteurs pour une possible application clinique de ce type d’entrainement dans les thérapies logopédiques. Cependant, ce programme reste pour le moment destiné à des enfants avec un certain type de trouble du spectre autistique et ne peut pas convenir à tous les enfants avec cette pathologie.

(5)

INTRODUCTION ... 1

I. CADRE THÉORIQUE ... 2

1. Définition du trouble du spectre de l’autisme (TSA) ... 2

2. La mémoire de travail (MdT) chez les enfants avec un TSA ... 4

2.1. La MdT et ses modèles ... 4

2.1.1. Le modèle de la MdT de Baddeley et Hitch (1974) ... 4

2.1.2. Modèle théorique de Majerus (2006, 2008) ... 6

2.1.3. The Time Based Ressource Sharing Model (Barrouillet et Camos, 2007) ... 7

2.2. Déficit en MdT chez les enfants avec un TSA ... 8

3. La syntaxe chez les enfants avec un TSA ... 9

4. Le rôle de la MdT dans le traitement des structures syntaxiques complexes ... 13

4.1 Relation entre la MdT et la syntaxe chez les enfants avec un développement typique (DT) ... 14

4.2. Relation entre la MdT et la syntaxe chez les enfants avec un trouble développemental du langage (TDL) ... 15

4.3. Relation entre la MdT et syntaxe chez les enfants avec un TSA ... 16

5. Entrainements de la MdT ... 18

6. Hypothèses théoriques ... 21

7. Analyse complémentaire ... 22

7.1. Définition de la théorie de l’esprit (TDE) ... 22

7.2. Lien entre la TdE et la MdT ... 23

7.3. Lien entre TdE et langage ... 24

II. MÉTHODOLOGIE ... 25

1. Déroulement général de l’étude ... 25

2. Population ... 26

2.1. Procédure de recrutement ... 26

2.2. Critères d’inclusion et d’exclusion ... 27

3. Pré- et post-tests ... 28

3.1. Evaluation des compétences en MdT ... 28

3.1.1. Empans simples ... 28

3.1.2. Empans complexes ... 30

3.2. Evaluation des compétences en syntaxe complexe ... 31

3.2.1. Epreuves de compréhension ... 31

3.2.2. Epreuves de production ... 32

3.4. Evaluation des compétences en TdE ... 35

4. Entrainement de la MdT : Magic Memory ... 38

4.1. Activité 1 : En route vers le royaume – Reconstruction de l’ordre sériel ... 39

4.2. Activité 2 : Les potions malicieuses (endroit) - Empan de couleurs endroit ... 40

4.3. Activité 3 : Les potions malicieuses (envers) – Empan de couleurs envers ... 40

4.4. Activité 4 : Le grimoire enchanté – Ordre sériel et tâche interférente ... 41

4.5. Activité 5 : La mémoire du chaudron – Mise à jour de la MdT ... 41

4.6. Synthèse des activités de MM ... 42

5. Variables expérimentales ... 43

6. Hypothèses opérationnelles ... 44

6.1. Hypothèse sur le lien entre la MdT et la syntaxe complexe ... 44

6.2. Hypothèses sur les effets de l’entrainement ... 44

6.2.1. Effet direct de l’entrainement de MdT sur la MdT ... 44

6.2.2. Effet indirect de l’entrainement de MdT sur la syntaxe complexe ... 45

6.3. Hypothèses complémentaires ... 46

6.3.1. Effet indirect de l’entrainement de la MdT sur la théorie de l’esprit ... 46

(6)

2. Effet direct de l’entrainement MM sur les performances en MdT ... 50

2.1. Effet direct de l’entrainement sur les performances en MdT ... 50

2.2. Maintien des effets de l’entrainement sur la MdT ... 51

3. Effet indirect de l’entrainement MM sur les performances en syntaxe complexe ... 53

3.2. Effet immédiat de l’entrainement sur la syntaxe ... 53

3.2. Maintien des effets de l’entrainement sur la syntaxe ... 54

4. Hypothèse complémentaire ... 56

4.1. Effet indirect de l’entrainement MM sur la TdE ... 56

IV. DISCUSSION ... 59

1. Hypothèse 1 : Lien entre les performances en MdT et en syntaxe complexe ... 60

2. Hypothèses 2 : effet direct de l’entrainement de MdT sur la MdT ... 61

2.1. Hypothèse 2A : Effet direct immédiat de l’entrainement sur les performances en MdT ... 61

2.2. Hypothèse 2B : Maintien à long terme de l’effet direct de l’entrainement sur les performances en MdT ... 62

3. Hypothèse 3 : Effet indirect de l’entrainement MM sur les performances en syntaxe complexe ... 62

3.1. Hypothèse 3A : Effet indirect immédiat de l’entrainement sur les performances en MdT ... 62

3.2. Hypothèse 3B : Maintien à long terme de l’effet indirect de l’entrainement sur les performances en MdT ... 64

4. Hypothèse 4 : Effet indirect de l’entrainement MM sur les performances en TdE..65

5. Limites de l’étude ... 65

V. CONCLUSION ... 67

BIBLIOGRAPHIE ... 68

ANNEXES ... 75

(7)

DT : Développement Typique

TDL : Trouble Développemental du Langage TSA : Trouble du Spectre Autistique

MdT : Mémoire de Travail MLT : Mémoire à Long Terme MCT : Mémoire à Court Terme TdE : Théorie de l’Esprit VC : Vraie Croyance FC : Fausse Croyance Cclause : Phrases Complétives MM : Magic Memory SVO : Sujet-Verbe-Objet ET : Ecart-Type

(8)

INTRODUCTION

Certaines études suggèrent que le développement du langage est associé au développement d’autres fonctions cognitives plus générales. C’est dans ce contexte que certains chercheurs ont relié la mémoire de travail et la syntaxe complexe chez les enfants avec un développement typique pour ensuite supposer un lien entre les déficits sur cette fonction cognitive et les déficits en syntaxe complexe (Jakubowicz, 2011). Delage et Frauenfelder (2019), ont pu montrer, par exemple, que les scores obtenus à différentes tâches de MdT pouvaient prédire les compétences en syntaxe complexe à la fois chez des enfants avec un développement typique mais aussi chez des enfants avec un trouble développemental du langage. Suite à ces résultats, d’autres auteurs (Delage, Stanford, Piller & Durrleman, sous presse) ont proposé à ces enfants un entrainement de la MdT dans le but d’améliorer leur syntaxe. Les résultats très encourageants dans cette population nous ont amenés à réaliser la même étude chez des enfants avec un trouble du spectre autistique. En effet, ces enfants présentent, en plus de leurs déficits de la communication et des interactions sociales, des faiblesses en syntaxe complexe (Durrleman, Marinis & Franck, 2016 ; Tuller, Ferré, Prévost, Barthez, Malvy, & Bonnet-Brilhault, 2017) et aussi en mémoire de travail (Shuh & Eigsti, 2012 ; Habib, Harris, Pollick & Melville, 2019). De plus, plusieurs recherches soulignent que ces deux déficits sont reliés au sein de cette population. Ainsi, dans cette étude nous allons nous demander quels seront les effets d’un entrainement de la mémoire de travail sur les capacités syntaxiques des enfants avec un trouble du spectre autistique. Pour cela nous avons proposé à des enfants âgés entre 6 et 14 ans présentant un trouble du spectre autistique, un entrainement intensif de la mémoire de travail à l’aide d’un nouveau programme appelé Magic Memory (MM). Afin d’objectiver leur progression, il leur a aussi été demandé de passer un ensemble d’épreuves de mémoire de travail et de syntaxe complexe avant et après l’entrainement.

Dans ce travail, nous commencerons par définir le trouble du spectre autistique, puis nous nous focaliserons sur le déficit en mémoire de travail et en syntaxe dans cette population pour ensuite développer le rôle de cette fonction cognitive dans le traitement des structures syntaxiques complexes. Cela conduira à aborder les effets des différents programmes d’entrainement qui existent actuellement. Dans un deuxième temps, nous présenterons notre méthodologie puis nos résultats. Enfin, nous les discuterons dans une troisième et dernière partie.

(9)

I. CADRE THÉORIQUE

1. Définition du trouble du spectre de l’autisme (TSA)

Le DSM-5 classifie le TSA parmi les troubles neuro-développementaux. Selon cette classification, le diagnostic peut être posé si l’on observe, d’une part, des déficits persistants de la communication sociale et des interactions sociales et, d’autre part, des comportements, des intérêts et des activités restreints et répétitifs (American Psychiatric Association, 2013). Le DSM-5 ajoute que les symptômes doivent être présents dès la petite enfance et doivent impacter le fonctionnement dans la vie quotidienne. Enfin ces difficultés ne doivent pas pouvoir être expliquées par une déficience intellectuelle ou un grave retard de développement.

Le DSM-5 est la première classification qui parle de « spectre ». Cette notion a été introduite afin de répondre aux connaissances actuelles sur l’autisme. On considère maintenant à l’autisme comme un trouble unique dont les manifestations s’étendent sur un continuum de degré de sévérité. En effet, on observe une grande variabilité interindividuelle en ce qui concerne la force de l’atteinte de la communication et du langage. Chez certains enfants avec un TSA, le langage peut être tout à fait adéquat et leur trouble se limiter à des compétences communicationnelles moins élaborées, avec des difficultés, par exemple, à maintenir le regard avec son interlocuteur, à comprendre les gestes et les expressions faciales etc. Selon plusieurs auteurs, ces difficultés pourraient être en partie attribuables à un déficit en théorie de l’esprit (TdE) (Baron-Cohen, Leslie & Frith, 1985) ; Yirmiya, Erel, Shaked & Solomonica-Levi, 1998).

Chez d’autres enfants, l’altération peut être plus sévère et il peut se rajouter aux difficultés de communication, d’importantes difficultés sur les aspects formels du langage, jusqu’à, dans certains cas, un mutisme total.

Cette hétérogénéité se retrouve aussi en ce qui concerne les atteintes des différents niveaux linguistiques. En effet, les niveaux articulatoire, phonologique et lexical ont tendance à être davantage préservés que le niveaux syntaxique et pragmatique (Zebib, Tuller, Prévost, &

Morin, 2013 ; Kjelgaard & Tager-Flusberg, 2001).

En plus des atteintes sur la sphère langagière d’autres auteurs ont remarqué, dans cette population, la présence de déficit en mémoire de travail (Shuh & Eigsti, 2012 ; Durrleman &

Delage, 2016 ; Wang, Zhang, Liu, Cui, Wang, Shum et Chan, 2017 ; Habib et al., 2019).

(10)

Dans ce mémoire nous nous intéresserons plus particulièrement à la mémoire de travail et à la syntaxe chez les enfants avec un TSA. Puis nous explorerons l’hypothèse d’un lien entre le déficit en mémoire de travail et en syntaxe.

(11)

2. La mémoire de travail (MdT) chez les enfants avec un TSA

Plusieurs études ont montré un déficit en MdT chez les enfants avec un TSA (Shuh &

Eigsti, 2012 ; Durrleman & Delage, 2016 ; Wang et al., 2017 ; Habib et al., 2019). Cependant, avant d’aborder ce sujet plus en détail, il nous paraît important de définir la MdT et de présenter les modèles sur lesquels s’appuie ce mémoire.

2.1. La MdT et ses modèles

La MdT est un système qui sert à stocker temporairement et à manipuler conjointement les informations nécessaires pour réaliser différentes tâches cognitives complexes telles qu’impliquées dans le raisonnement, l’apprentissage et la compréhension du langage (Baddeley, 2003 ; Barrouillet & Camos, 2012). En 1974, Baddeley et Hitch sont parmi les premiers à modéliser le fonctionnement de la MdT. Bien qu’ils soient encore aujourd’hui souvent cités, d’autres modèles ont depuis été développés. Ces nouveaux modèles (Majerus, 2006, 2008 ; Barrouillet & Camos, 2007, 2012) se différencient notamment par leur volonté d’établir des relations plus étroites entre la MdT et d’autres fonctions exécutives, comme l’attention.

2.1.1. Le modèle de la MdT de Baddeley et Hitch (1974)

Bien que datant un peu, le modèle de Baddeley et Hitch (1974) apparaît aujourd’hui encore comme un modèle très important en psycholinguistique pour caractériser le fonctionnement de la MdT. Dans sa forme initiale, ce modèle présente la MdT avec trois composantes : l’administrateur central et deux système esclaves, le calepin visuo-spatial et la boucle phonologique. La boucle phonologique stocke l’information verbale. Cela est possible grâce au système de stockage phonologique qui retient l’information verbale pendant quelques secondes et au système de récapitulation articulatoire qui s’occupe de rafraichir l’information par un processus de subvocalisation (Baddeley, 2003). Pour évaluer cette composante, on utilise les tâches d’empans simples sur un matériel verbal, dans lesquelles il est demandé de maintenir active une information verbale (Barouillet & Camos, 2007). Les tâches d’empans de chiffres endroits ou d’empans de mots et de non-mots, par exemple, sont fréquemment utilisées. Le calepin visuo-spatial est l’un des autres sous-systèmes de la MdT. Il stocke les informations

(12)

visuelles et spatiales (Baddeley, 2003). Il s’évalue aussi par l’intermédiaire de tâches d’empans simples mais sur du matériel non verbal. Toutefois, ce sous-système ne sera pas plus discuté dans le cadre de ce mémoire. L’administrateur central est un système de contrôle attentionnel.

Il contrôle les deux sous-systèmes esclaves présentés ci-dessus – la boucle phonologique et le calepin visuo-spatial. Il régule les ressources attentionnelles et interagit avec la mémoire à long terme (Baddeley, 2003). Les capacités de l’administrateur central sont évaluées par des tâches d’empans complexes (Barrouillet & Camos, 2007). Les tâches d’empans complexes diffèrent des tâches d’empans simples dans la mesure où elles demandent de stocker une information tout en réalisant une autre activité concurrente en parallèle. Ainsi, par exemple, on utilise souvent les tâches du type counting span et de listening span pour évaluer cette composante.

En 2000, Baddeley modifie le modèle en y ajoutant une quatrième composante : le buffer épisodique ou mémoire tampon. Il assure le stockage temporaire et l’intégration d’informations multimodales avant que celles-ci soient encodées en MLT (mémoire à long terme). En liaison avec la boucle phonologique et le calepin visuo-spatial, le buffer épisodique reste néanmoins sous le contrôle de l’administrateur central qui vient aussi y récupérer des informations (Baddeley, 2000 ; Barrouillet & Camos, 2007) (voir Figure 1).

Figure 1. Modèle de la MdT à composants multiples (Baddeley, 2003).

Administrateur central

Mémoire à long terme

Boucle phonologique Buffer

épisodique Calepin

visuo-spatial

(13)

2.1.2. Modèle théorique de Majerus (2006, 2008)

En 2006, Majerus, Poncelet, Greffe et Van der Linden, proposent une distinction intéressante au sein de la MdT verbale entre la mémoire « item » et la mémoire « sérielle ». La mémoire « item » fait partie d’un système langagier. Cette mémoire s’occupe de retenir l’information phonologique, sous-lexicale et sémantique. Alors que, la mémoire sérielle fait partie d’un autre système spécialisé distinct qui gère le traitement et le stockage de l’ordre séquentiel des stimuli. Ces deux systèmes sont chapeautés par un troisième système, le système de focalisation attentionnelle dont le but est d’allouer les ressources attentionnelles au système langagier et au système de traitement de l’ordre sériel (Majerus, 2008) (voir Figure 2)

Ainsi, afin d’isoler l’implication de la mémoire item et de la mémoire sérielle et d’évaluer plus spécifiquement cette dernière, les auteurs ont créé une tâche dans laquelle le contenu était donné à l’enfant sous la forme d’image d’animaux. Il lui était ensuite demandé de retrouver l’ordre de présentation de ces images. Cette tâche sera décrite de manière plus détaillée dans la méthodologie (voir « course des animaux », partie méthodologie).

Figure 2. Modèle de la MdT de Majerus (Majerus, 2008).

Contrôle attentionnel/

exécutif

Représentations lexico- sémantiques

(langage) Représentations

phonologiques (langage)

Traitement de l’ordre sériel

(14)

2.1.3. The Time Based Ressource Sharing Model (Barrouillet et Camos, 2007)

Depuis le modèle de Baddeley et Hitch (1974), la recherche a connu une évolution particulièrement importante surtout en ce qui concerne la place accordée à l’attention dans la MdT. Bien que déjà présente dans le modèle de Baddeley, son importance n’a cessé de croître.

Ainsi, Barrouillet et Camos (2012, 2007) lui accorde un rôle fondamental dans leur modèle TBRS (The Time Based Resource Sharing Model). Selon eux, le traitement et le maintien de l’information en MdT sont deux processus cognitifs qui ont besoin chacun de ressources attentionnelles propres pour qu’ils soient réalisés correctement. Cependant, les ressources attentionnelles sont limitées, par conséquent le focus attentionnel ne peut se porter sur ces deux processus simultanément. Par ailleurs, lorsque le focus attentionnel cible le traitement, il devient totalement indisponible pour maintenir l’information active en mémoire. Ainsi, le focus attentionnel doit continuellement alterner entre le traitement et le stockage de l’information pour éviter que l’information ne disparaisse en mémoire. L’attention et, plus particulièrement l’alternance attentionnelle, apparaissent donc, dans ce modèle, comme un facteur primordial à la MdT.

(15)

2.2. Déficit en MdT chez les enfants avec un TSA

Dans la littérature, on retrouve de nombreuses études qui se sont intéressées à la MdT chez les enfants avec un TSA. Ainsi, par exemple, Shuh et Eigsti (2012), relèvent dans un groupe d’enfants âgés de 9 à 17 ans avec un TSA (N = 18) des performances en MdT verbale déficitaires dans une tâche de répétition de pseudo-mots, évaluant les empans simples et dans une tâche d’empan d’écoute (listening recall task), évaluant les empans complexes. Durrleman et Delage (2016) confirment cette atteinte de la MdT verbale sur les deux types d’empans en retrouvant des performances déficitaires chez d’autres enfants avec un TSA, âgés entre 5 et 16 ans (N = 21) sur la tâche de répétition de pseudo-mots et d’empans de chiffres endroits ainsi que dans la tâche d’empans de chiffres envers.

Ces résultats se reflètent dans les conclusions de deux méta-analyses. La première méta- analyse, réalisée par Wang et al., (2017) conclue, sur la base de 29 études, que les individus avec un TSA ont un déficit en MdT, quel que soit leur âge et que ce déficit s’observe à la fois sur les tâches d’empans simples et sur les tâches d’empans complexes. Cependant, ils trouvent que le déficit en MdT verbale est plus important qu’en MdT visuo-spatiale. En 2019 une seconde méta-analyse, portant sur 34 études (Habib et al., 2019) retrouve quant à elle aussi une MdT déficitaire chez les enfants avec un TSA mais tout autant sur le versant verbal que sur le versant visuo-spatial.

Ces deux méta-analyses s’accordent donc sur la présence d’un déficit en MdT verbale chez les enfants avec un TSA, même si elles s’opposent sur la force de l’atteinte de la MdT visuo-spatiale par rapport à la MdT verbale. Dans ce mémoire, cette opposition ne sera pas soulevée car nous nous concentrerons surtout sur le déficit du versant verbal de la MdT.

Nous allons maintenant voir qu’en plus d’un déficit en MdT verbale, nous retrouvons aussi souvent des difficultés syntaxiques chez les enfants avec un TSA.

(16)

3. La syntaxe chez les enfants avec un TSA

Plusieurs études relèvent que de nombreux enfants avec un TSA ont des déficits pour traiter certaines structures syntaxiques telles que les phrases enchâssées, les phrases relatives, les phrases passives, les questions objets et les pronoms clitiques objets. En effet ces structures ont, selon Jakubowicz (2011), un degré de complexité élevé. Elle évalue la complexité de ces structures syntaxiques en fonction de deux facteurs : le nombre d’enchâssements propositionnels et le nombre de déplacements syntaxiques dans la phrase.

A) L’enchâssement propositionnel

L’enchâssement de plusieurs phrases entre elles est un facteur de complexité dans la mesure où cela demande de mettre une phrase dans une autre et logiquement, cela entraine la réalisation de plusieurs opérations syntaxiques (Delage & Frauenfelder 2012 ; Jakubowicz &

Tuller, 2008). Ainsi, plus il y a de phrases insérées l’une dans l’autre, plus l’enchâssement sera profond et plus la phrase sera difficile à traiter. Dans l’exemple ci-dessous (voir Figure 3), la phrase (3) est particulièrement complexe car elle contient deux enchâssements.

(1) [Jean habite à Genève] 0 enchâssement

(2) Marie sait [que Jean habite à Genève] 1 enchâssement (3) Arthur sait [que Marie pense [que Jean habite à Genève]] 2 enchâssements

Figure 3. Degrés d’enchâssement.

Plusieurs auteurs (Tuller et al., 2017 ; Eigsti, Bennetto, & Dadlani, 2007) retrouvent un impact de ce facteur chez les enfants avec un TSA. Par exemple, Tuller et al. (2017) observent dans le langage spontané d’enfants avec TSA (âgés de 6 à 12 ans ; N = 20) qu’ils produisent nettement moins de phrases enchâssées, en comparaison aux trois groupes DT (14 DT, âgés de 4 ans ; 12 DT, âgés de 6 ans ; 12 DT âgés de 8 ans). De plus, lorsqu’ils en produisent, ils font davantage d’erreurs que les enfants DT.

(17)

B) Les déplacements syntaxiques

Le deuxième facteur de complexité est le déplacement syntaxique. Un déplacement syntaxique est un déplacement d’un élément grammatical dans une position différente de sa position initiale dans la phrase. Cela génère une perturbation de l’ordre canonique de la phrase et la structure SVO, typique de la langue française, se retrouve ainsi transformée. Par conséquent, plus l’énoncé comprend de déplacements, plus il sera complexe à traiter. Or on retrouve des déplacements dans plusieurs des structures syntaxiques qui sont difficiles à traiter pour les enfants avec un TSA comme les pronoms clitiques objets, les questions objets et les phrases relatives objets.

Les pronoms clitiques objets

L’utilisation correcte du pronom clitique est difficile pour les enfants avec un TSA (Durrleman & Delage, 2016 ; Terzi, Marinis, Kotsopoulou, & Francis, 2014). Tuller et al.

(2017) ont ainsi observé que les performances des enfants de 8 ans avec un TSA en production de pronoms clitiques objets étaient inférieures à celles d’enfants typiques de 4 ans. La complexité de ce cette structure s’explique par le fait que l’emploi d’un pronom clitique dans une phrase entraine, comme on peut le voir dans l’exemple (1) de la figure 4, le mouvement de l’objet avant le verbe (ordre non canonique) alors qu’habituellement il se trouve après le verbe (ordre canonique).

(1) Que fait Marie avec la fleur ?

Elle la prend [la fleur]. à Ordre SOV

Figure 4. Déplacement syntaxique dans la phrase avec un pronom clitique objet.

(18)

Les questions

En français, il existe plusieurs manières, plus ou moins complexes, de poser une question. Zebib et al., (2013) identifient cinq types de structures différentes (Voir Figure 5).

L’exemple (1) est le plus facile car le pronom interrogatif est en position in situ et l’ordre des mots suit la structure SVO, habituelle du français. Les questions du type (2), (3) et (4) sont plus difficiles car il y a une antéposition du pronom interrogatif en position initiale et l’ordre obéit à la structure OSV. Enfin, les questions comme (5) sont les plus compliquées car il y a une antéposition du pronom interrogatif et une inversion qui engendre une structure OVS.

Figure 5. Déplacement syntaxique dans les questions.

Les études montrent qu’ici aussi les enfants avec un TSA sont sensibles à la complexité des différents types de question. Cette sensibilité apparaît notamment dans l’étude de Zebib et al. (2013) qui montre chez des enfants avec un TSA (âgés de 6 à 12 ans) un évitement des structures complexes et une tendance à utiliser surtout les questions de type in situ. De plus, leurs difficultés ne se limitent pas seulement à la production de questions. En effet, d’autres auteurs (Durrleman et al., 2016) ont aussi retrouvé un déficit pour comprendre les questions, plus elles impliquaient une syntaxe complexe.

(1) Tu filmes qui ? In situ

S – V – O

(2) Qui tu filmes ? Antéposition sans inversion O – S – V

(3) Qui est-ce que tu filmes ? Antéposition avec est-ce que O – S – V

(4) C’est qui que tu filmes ? Antéposition + clivée O – S – V

(5) Qui filmes-tu ? Antéposition avec inversion O – V – S

Moins complexe

Plus complexe

(19)

Les phrases relatives

Riches, Loucas, Baird, Charman et Simonoff (2010) montrent que les adolescents avec un TSA (N = 16 ; moyenne d’âge = 14.8), avec un QI dans la norme, ont des difficultés avec les phrases relatives objets. Cette difficulté se révèle par des performances inférieures au groupe contrôle dans une tâche de répétition de phrases relatives. Durrleman, Hippolyte, Zufferey, Iglesias et Hadjikhani (2015) retrouvent aussi ces difficultés chez des adolescents et des jeunes adultes avec TSA (N = 28 ; âge moyen = 21.8), avec un QI dans la norme mais pour comprendre les phrases relatives objets. Plus celles-ci étaient complexes, plus les participants avec un TSA étaient en difficulté.

Les phrases relatives objets sont en effet plus complexes à traiter que les phrases relatives sujet (Voir Figure 6). En effet, les phrases relatives sujet, comme en (1) sont les plus faciles car elles respectent l’ordre canonique SVO habituel du français et il n’y a pas de déplacement. Par contre, les phrases relatives objets transgressent cet ordre et nécessitent un ou plusieurs déplacements d’éléments lexicaux. Par exemple, en (2), la phrase suit l’ordre OSV et demande un déplacement. La phrase (3) est encore plus compliquée car elle suit l’ordre OVS et deux déplacements doivent être réalisés.

(1) L’enfant qui caresse le chat sur son lit. à Ordre SVO (2) Le chat que l’enfant caresse ø sur son lit. à Ordre OSV

(3) Le chat que caresse l’enfant ø ø sur son lit. à Ordre OVS

Figure 6. Déplacement syntaxique dans les phrases relatives objet.

Ces études montrent donc chez les enfants avec un TSA la présence d’un déficit sur plusieurs structures syntaxiques et plus particulièrement sur les structures complexes dont le traitement génère des enchâssements et un bouleversement de l’ordre canonique.

Face à la coexistence d’un déficit en MdT et d’un déficit syntaxique, certains auteurs ont chercher à savoir s’ils pouvaient être mis en lien.

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4. Le rôle de la MdT dans le traitement des structures syntaxiques complexes

En plus d’avoir établi une échelle de complexité syntaxique, Jakubowicz (2011) fait l’hypothèse que le développement de la syntaxe serait en fait lié aux capacités de MdT. Dans ses travaux, elle développe l’idée que la MdT serait particulièrement nécessaire au traitement des phrases complexes, dans la mesure où, il faut retenir de l’information tout en réajustant ses connaissances au fur et à mesure de l’avancée dans la phrase. Par exemple, pour comprendre cette phrase relative objet « montre-moi le chien que le monsieur promène », il faut tout d’abord traiter l’objet (« le chien »), le retenir en mémoire pendant qu’on traite les autres éléments de la phrase, puis enfin, rassembler toutes les informations en reliant correctement le verbe à chacun de ses arguments (Finney, Montgomery, Gillam, & Evans, 2014). On peut aussi comprendre l’intervention de la MdT dans la production du pronom clitique objet à la 3ème personne car pour produire correctement le pronom il faut garder en mémoire les propriétés grammaticales du référent (le genre, le nombre…), tout en réalisant un mouvement syntaxique pour placer le pronom avant le verbe.

Toutes ses activités de traitement et de mise à jour perpétuelle impliquées dans le traitement des phrases complexes causent une charge cognitive importante. C’est pourquoi, les jeunes enfants typiques et les enfants avec un développement atypique commencent par traiter des phrases simples et courtes afin d’éviter la surcharge cognitive. Puis, avec la maturité, les capacités de MdT augmentent et permettent à l’enfant typique de réaliser davantage d’opérations syntaxiques en parallèle pour comprendre et produire les structures du français de plus en plus complexes (Delage & Frauenfelder, 2012 ; Delage et al., soumis). Cependant, chez l’enfant atypique, ce développement peut être perturbé.

Plusieurs auteurs se sont donc intéressés plus particulièrement à cette question et ont pu justement relever des liens entre la MdT et la syntaxe dans plusieurs populations – à la fois chez les enfants typiques et chez les enfants atypiques, avec notamment un trouble développemental du langage (TDL).

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4.1 Relation entre la MdT et la syntaxe chez les enfants avec un développement typique (DT)

La littérature scientifique a mis en évidence un lien entre la MdT et la syntaxe chez les enfants DT. En effet, déjà chez les très jeunes enfants, les études ont montré un effet positif de la répétition de non-mots sur la répétition de phrases complexes (Willis & Gathercole, 2001) et sur la longueur et la complexité syntaxique du langage spontané des enfants (Adams &

Gathercole, 2000).

Ce lien continue à se maintenir au cours du développement typique, comme l’ont montré Finney et al. (2014) dans leur étude sur des enfants entre 7 et 11 ans (N = 54), chez qui, ils ont mis en évidence un lien positif entre leurs performances dans une tâche de listening span et une tâche syntaxique de compréhension de phrases relatives objet. Montgomery, Magimairaj et O’Malley (2008) ont également démontré la présence d’une corrélation entre le traitement des structures complexes et la MdT chez des enfants entre 6 et 12 ans (N = 52). Cependant, ces derniers sont allés plus loin et ont cherché à comparer les valeurs corrélationnelles des épreuves d’empans simples sur la compréhension de phrases complexes par rapport aux épreuves d’empans complexes. Les résultats ont montré qu’il y avait seulement un lien entre les épreuves d’empans complexes et la compréhension de phrases complexes mais pas avec les épreuves d’empans simples. De plus, des analyses de régression ont révélé que 30% de la variance de la compréhension syntaxique pouvait s’expliquer par les empans complexes. Delage et Frauenfelder (2012) ont montré quant à eux, chez des enfants francophones entre 6 et 12 ans, que les épreuves d’empans simples et d’empans complexes corrélaient avec plusieurs mesures évaluant la complexité syntaxique (répétition de phrases complexes, compréhension de phrases complexes, longueur moyenne des énoncés, taux de subordination, taux d’enchâssement profond). En plus des liens corrélationnels retrouvés entre les capacités en MdT et en syntaxe, cette étude a aussi soulevé l’existence d’un fort lien prédictif entre ces deux composants. En effet, ces auteurs ont trouvé que les empans complexes pouvaient prédire 49% de la variance des performances en compréhension de phrases complexes, 30% de la variance de la longueur moyenne des énoncés (LME), 16% de la variance du taux de subordination et 18% de la variance du taux d’enchâssements profonds. Concernant les empans simples, ils pouvaient expliquer 50% de la variance des scores en répétition de phrases complexes.

Ces nombreuses études permettent donc d’établir une relation étroite entre la MdT et la syntaxe complexe chez les enfants DT. Non seulement, elles mettent en évidence des liens

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corrélationnels significatifs entre ces deux domaines mais elles démontrent aussi que la MdT et plus particulièrement les tâches d’empans complexes font partie des prédicteurs les plus importants pour expliquer les compétences syntaxiques des enfants typiques.

4.2. Relation entre la MdT et la syntaxe chez les enfants avec un trouble développemental du langage (TDL)

Du fait de la relation entre les compétences en MdT et en syntaxe chez les enfants typiques, d’autres travaux (Montgomery & Evans, 2009 ; Durrleman & Delage, 2016) ont cherché à savoir si ce lien existait aussi au sein des populations atypiques, comme chez les enfants avec un TDL. Pour ce faire, Montgomery et Evans (2009) ont évalué les performances d’enfants d’âge scolaire avec un TDL (N = 24) en compréhension de plusieurs types de phrases (simples, passives, pronominales, réfléchies). Parallèlement, leurs compétences en MdT ont été mesurées par une tâche d’empans simples (répétition de non-mots) et par une tâche d’empans complexes (empan d’écoute). Les résultats ont montré que les empans simples corrélaient seulement avec la compréhension de phrases simples mais pas avec la compréhension de phrases complexes et que les empans complexes corrélaient avec les phrases complexes (passives, pronominales et réfléchies).

Durrleman et Delage (2016) ont aussi remarqué une relation entre la MdT et l’utilisation d’une autre structure complexe – le pronom clitique à la 3ème personne du singulier. Plus les enfants avec un TDL (âgés entre 5 et 16 ans ; N = 22) étaient performants dans la tâche d’empan de chiffres envers, plus ils produisaient des pronoms clitiques. Pour appuyer ce lien, une autre étude (Riches et al., 2010) a aussi montré que la répétition et la compréhension de phrases complexes étaient corrélées avec les performances en MdT (moyenne d’âge 15 ;3 ;

N = 14).

Enfin l’étude de Delage et Frauenfelder (2019) a su révéler, en plus, un lien prédictif entre ces différentes tâches syntaxiques et la MdT puisqu’ils ont trouvé que les empans simples, les empans complexes et l’âge permettaient d’expliquer ensemble 50% de la variance des performances en compréhension de phrases complexes et 58% des résultats en répétition de phrases complexes.

Ainsi, la recherche assure, autant chez les enfants DT, que chez les enfants avec un TDL la présence d’un lien corrélationnel mais aussi prédictif entre les tâches de MdT et diverses

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tâches syntaxiques. Il semble donc probable que ce lien se retrouve aussi dans d’autres populations atypiques, comme notamment chez les enfants avec un TSA.

4.3. Relation entre la MdT et syntaxe chez les enfants avec un TSA

À l’heure actuelle, peu d’études ont encore été réalisées afin d’explorer la présence d’un lien entre la MdT et la syntaxe chez les enfants avec un TSA. Cependant nous nous attendons à retrouver ce lien aussi dans cette population pour plusieurs raisons.

Nous pouvons observer que les enfants avec un TDL partagent un profil cognitif très similaire aux enfants avec un TSA.

En ce qui concerne leur profil langagier, ces populations semblent avoir d’importantes difficultés en morpho-syntaxe et plus particulièrement avec les structures morpho-syntaxiques complexes. Riches et al., (2010) ont trouvé que les adolescents TDL et TSA étaient en difficulté pour répéter des phrases relatives de complexité variable. Cependant, les enfants avec un TDL sont apparus encore plus sensibles à la complexité des phrases que les TSA et ont davantage tendance à éviter les structures complexes en simplifiant les répétitions de phrases relatives objet en phrases relatives sujet. Par ailleurs, les enfants avec un TSA ou un TDL étaient tout autant en difficulté pour la production de pronom clitique objet. Par contre, Durrleman et Delage (2016) ont révélé différents types d’erreurs entre les enfants TSA en comparaison avec les enfants TDL. En effet, l’erreur la plus fréquente chez les enfants avec un TSA était l’omission du pronom clitique alors que chez les TDL, le groupe nominal était souvent produit à la place du pronom clitique.

Enfin, d’autres auteurs (Zebib et al., 2013) ont trouvé que, malgré des difficultés au sein des deux populations pour produire des questions, cela était encore plus difficile pour les TSA que les TDL (TSA = 60,6% de réponses correctes vs TDL = 87,9%). Pour expliquer ce résultat, les auteurs émettent l’hypothèse de l’impact du déficit pragmatique, caractéristique des enfants avec TSA. De plus, même si les deux groupes tentent d’éviter les structures complexes et préfèrent les questions de type in-situ, les auteurs remarquent que les enfants avec un TDL le font encore davantage que les enfants avec un TSA (TSA = 27% de questions in-situ vs TDL = 54,9% de questions in-situ).

En ce qui concerne leur profil en MdT, plusieurs études ont montré qu’il était déficitaire chez les enfants avec un TSA et un TDL. Cependant, il semble que ce déficit soit plus fort chez les enfants avec un TDL. Durrleman et Delage (2016) ont ainsi trouvé des performances

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déficitaires chez les TSA et les TDL aux épreuves de répétition de non-mots, d’empans de chiffres endroits et d’empans de chiffres envers. Par contre, elles relèvent un déficit plus important chez les TDL par rapport aux TSA à la tâche de répétition de non-mots. Alloway, Rajendran et Archibald (2009) ont observé le même pourcentage d’enfants avec TDL ou avec un TSA ayant un déficit sur les tâches d’empans simples mais ils ont remarqué une atteinte plus généralisée dans la population des enfants avec un TDL (80%) par rapport à la population d’enfants avec un TSA (30%) sur les tâches d’empans complexes.

Même si on relève quelques différences entre les TSA et les TDL on peut voir qu’ils partagent tous deux des déficits en MdT et en syntaxe. Or, comme nous l’avons vu plus haut, ces deux déficits ont pu être reliés chez les TDL, il apparaît donc probable qu’ils le soient aussi chez les TSA.

Les études qui ont été réalisées jusqu’à présent confirment cette idée. Schuh et Eigsti (2012) notamment, ont révélé par une analyse de régression que la MdT parvenait à expliquer 60% des performances langagières des enfants avec un TSA. Les auteurs suggèrent ainsi une implication importante de la MdT sur le langage et cela d’autant plus que les structures sont complexes. Durrleman et Delage (2016) ont remarqué une relation avec la production du pronom clitique à la 3ème personne et la MdT. Elles ont pu montrer, dans un groupe d’enfants avec un TSA, une corrélation entre la production du pronom clitique objet et la tâche de répétition de non mots, d’empans de chiffres endroits et d’empans de chiffres envers. L’étude de Riches et al. (2010) a aussi permis de tisser un lien corrélationnel, chez des adolescents avec un TSA entre une tâche de répétition de phrases relatives objets et plusieurs tâches de MdT comme la répétition de pseudo-mots, l’empan de chiffres endroits et l’empan de chiffres envers.

Ainsi, au vu des nombreuses études qui supposent un lien entre la MdT et la syntaxe à la fois dans une population typique et atypique et puisqu’un déficit en MdT apparaît être en partie responsable des limitations syntaxiques aussi chez les enfants avec un TSA, il semble donc possible qu’en entrainant la MdT des enfants avec un TSA on puisse réduire leurs déficits syntaxiques. Nous allons donc maintenant nous intéresser aux différents programmes d’entrainement qui existent aujourd’hui et à leurs efficacités.

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5. Entrainements de la MdT

En 2002, Klingberg, Forssberg et Westerberg (2002) ont entrainé des enfants TDAH sur trois tâches de MdT : empan visuo-spatial, empan de chiffres envers, empan de lettres. Il en a résulté une amélioration sur les tâches directement entrainées et sur des tâches de MdT similaires non entrainées mais surtout une augmentation des scores sur l’épreuve d’intelligence des Matrice de Raven (Raven, Court & Raven, 1998). Ces résultats ont eu un très fort impact et ont participé à l’essor des programmes d’entrainement.

Actuellement, il existe plusieurs programmes d’entrainement de la MdT, tels que CogMed, Jungle Memory ou encore Cognifit. Cependant, dans la littérature, les conclusions sur l’utilité et les effets de ces types d’entrainement sont assez controversées et certains auteurs ont remis en cause la méthodologie de plusieurs études sur ce sujet.

Melby-Lervag, Redick et Hulme (2016) soulèvent notamment plusieurs problèmes évidents dans l’étude de Klingberg et al. (2002). En effet, le groupe expérimental et le groupe contrôle n’ont pas suivi le même nombre d’heures d’entrainement. Alors que le groupe expérimental devait réaliser 30 épreuves chaque jour, on en demandait seulement 10 au groupe contrôle. De plus, la taille de l’échantillon dans chaque groupe était très faible, avec, seulement 7 enfants par groupe. Une autre étude, réalisée par Holmes, Gathercole, Place, Dunning, Hilton,

& Elliott (2010) chez des enfants de 8 à 11 ans avec TDAH (N = 25) a montré une amélioration sur plusieurs composantes de la MdT, suite à l’entrainement Cogmed pendant 20 jours mais contrairement à Klinberg et al. (2002) ils n’ont pas trouvé d’effet sur le QI. Quelques années plus tard, Holmes et ses collaborateurs ont à nouveau réalisé une étude sur les effets de l’entrainement CogMed mais chez des enfants (moyenne d’âge = 9 ;9 ans ; N = 12) avec un faible niveau langagier (Holmes, Butterfield, Cormack, van Loenhoud, Ruggero, Kashikar, &

Gathercole, 2015). Les résultats et les conclusions divergent légèrement : le groupe d’enfants a progressé sur les mesures de mémoire à court terme visuo-spatiale mais pas significativement sur les mesures de mémoire à court terme verbale. Les auteurs attribuent cela à la prédominance d’exercices visuo-spatiaux dans CogMed. De plus, les auteurs relèvent, dans cette étude, une augmentation sur les scores du QI verbal et non verbal. Enfin, ils ont remarqué que les enfants qui avaient les plus faibles compétences langagières étaient ceux qui retiraient le plus de bénéfice de l’entrainement sur les mesures de mémoire à court terme verbale. Cependant, ici

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aussi il est difficile de se fier à ces résultats car comme le relève Majerus (2016), il manque notamment un groupe contrôle à qui on n’aurait pas administré l’entrainement CogMed.

Après avoir réalisé une méta-analyse sur 87 études sur ce sujet, Melby et al. (2016) en arrivent à la conclusion que les entrainements de la MdT permettent un effet de transfert direct sur des mesures de MdT (verbale et spatiale). Cependant, cet effet semble se maintenir difficilement au-delà de quelques semaines après la fin de l’entrainement (Melby-Lervag &

Hulme, 2013). De plus ils observent dans les études, peu de généralisation à d’autres capacités cognitives non entrainées (compétences non verbales, compétences verbales, décodage, compréhension écrite, arithmétique). Ils présentent plusieurs facteurs qui pourraient expliquer cette variabilité au sein des résultats comme le type d’activité réalisée par le groupe contrôle, l’âge des participants, la durée de l’entrainement, le type de trouble des personnes entrainées, le design expérimental, le biais de publication.

Ainsi, les nombreuses erreurs méthodologiques révélées au sein de toutes ces études peuvent représenter l’une des causes de variabilité des résultats mais Majerus (2016) émet aussi une réserve importante concernant les programmes d’entrainement en eux-mêmes. En effet, cette inconsistance pourrait venir du fait que les programmes comme CogMed ou Jungle Memory sont des programmes qui stimulent la MdT de façon globale et multimodale, sans réelle prise en compte des difficultés spécifiques de la population entrainée. Ainsi, dans l’entrainement CogMed, l’accent est mis particulièrement sur la MdT visuo-spatiale or cette mémoire n’est pas forcément affectée de la même manière dans toutes les populations. Il préconise donc dans son article des approches plus spécifiques.

Les résultats concernant l’effet des entrainements de la MdT sont donc très variables et de nombreuses études ont des failles méthodologiques. Face à cette inconsistance, il apparaît primordial de mener davantage d’études sur le sujet avec notamment une méthode plus sérieuse.

Dans cette optique, Delage et ses collaborateurs de l’Université de Genève (Delage et al., soumis) ont créé un cadre de recherche plus rigoureux pour tester leur nouveau programme d’entrainement, baptisé Magic Memory (MM) (Delage, Da Costa, Durrleman, 2017).

Initialement testé sur des enfants avec un TDL, MM se veut intensif et spécifique aux déficits observés en MdT de la population entrainée. Il est basé sur les tâches les plus prédictives des performances en syntaxe complexe chez les TDL, c’est-à-dire la MdT sérielle et les empans complexes (Delage et Frauenfelder, 2019). Les résultats de ce programme sur 32 enfants avec un TDL de 6 à 12 ans sont particulièrement encourageants. En effet, ils montrent non seulement un effet direct de l’entrainement sur toutes les tâches de MdT qui n’ont pas été entrainées, sauf l’empan de chiffres envers, mais aussi une généralisation de ces effets au versant langagier avec

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un effet indirect sur plusieurs tâches de syntaxe complexe, exceptée l’épreuve de production de questions racines (Stanford, Durrleman & Delage, 2019).

Ces résultats amènent donc à se poser la question d’une application possible de ce programme à d’autres populations et plus particulièrement aux enfants avec un TSA, étant donné leurs similarités cognitives avec les enfants TDL sur le plan de leurs difficultés à la fois en MdT et en syntaxe et du lien entre ces difficultés dans ces deux populations. C’est donc dans cette idée que s’inscrit ce mémoire en voulant étudier les effets de l’entrainement de la MdT sur la syntaxe à l’aide du programme d’entrainement de MdT Magic Memory (MM), chez les enfants avec un TSA.

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6. Hypothèses théoriques

En résumé, plusieurs études ont mis en évidence chez les enfants avec un TSA l’existence d’un déficit en MdT à la fois sur les empans simples et sur les empans complexes.

D’autres études ont aussi observé un déficit pour traiter certaines structures syntaxiques, telles que les phrases enchâssées, les phrases relatives objets, les phrases passives, les pronoms clitiques objets et les questions racines. Le traitement de ces structures est particulièrement complexe et entraine un coût cognitif élevé dans la mesure où il nécessite de réaliser plusieurs opérations syntaxiques. La MdT serait alors primordiale et très sollicitée pour réaliser ces opérations. Ainsi, les limitations en MdT des enfants TSA pourraient fournir une explication à leurs difficultés pour traiter les phrases syntaxiquement complexes. Plusieurs travaux vont dans le sens de cette hypothèse, en ayant observé une corrélation entre la MdT et la syntaxe dans plusieurs populations, comme chez les enfants DT ou chez les enfants avec un TDL. Cette relation a encore été renforcée par d’autres études qui ont montré qu’il était possible de prédire les performances en syntaxe complexe par les capacités en MdT. Ce lien a été encore peu étudié chez les enfants avec un TSA, cependant les quelques travaux disponibles aujourd’hui montrent qu’il y a de bonnes raisons de croire qu’il soit aussi présent dans cette population. En effet, leur profil cognitif ressemble beaucoup aux enfants avec un TDL en ce qui concerne leurs difficultés en MdT et en syntaxe complexe et le lien entre ces deux difficultés

Ainsi, face à cette relation, des chercheurs ont pensé qu’en entrainant la MdT, on pourrait améliorer les compétences en syntaxe complexe. Cependant, jusqu’ici, les conclusions concernant les effets de ces entrainements sont très inconsistantes et certains auteurs critiquent la méthodologie et les programmes utilisés dans de nombreuses études.

Nous faisons donc l’hypothèse, qu’en proposant un programme d’entrainement intensif de la MdT, qui tient compte de ces failles méthodologiques, nous observerons chez les enfants avec un TSA, des effets bénéfiques directs non seulement sur la MdT mais aussi indirectement sur les performances en syntaxe complexe.

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7. Analyse complémentaire

Une des caractéristiques principales qui définit le TSA est un déficit sur le plan des interactions sociales. Pour certains chercheurs ces difficultés seraient la conséquence de leur déficit au niveau de la théorie de l’esprit (Baron-Cohen et al., 1985 ; Yirmiya et al., 1998). Or dans la littérature, deux facteurs semblent être particulièrement reliés au développement de la théorie de l’esprit : les capacités en MdT et les capacités langagières. Il nous semble donc particulièrement intéressant de faire des analyses complémentaires sur ce sujet. Avant d’aborder ces liens plus en détail nous allons définir la théorie de l’esprit

7.1. Définition de la théorie de l’esprit (TDE)

La théorie de l’esprit (TdE) représente la capacité à pouvoir attribuer des états mentaux (croyances, intention, désirs et émotions) à soi-même et à autrui (Pellicano, 2007 ; Kouklari et al., Tsermentseli & Auyeung, 2018 ; Premack & Woodruff, 1978). Dans le développement typique, c’est vers 4 ans que l’enfant comprend que l’autre peut avoir des états mentaux différents des siens et que les individus agissent en fonction de leurs représentations de la réalité plutôt qu’en fonction de la réalité elle-même (Callaghan, Rochat, Lillard Claux, Odden, Itakura, Tapanya & Singh, 2005).

Ainsi en acceptant que l’on agit parfois selon des croyances qui ne reflètent pas la réalité l’enfant réussit à attribuer à autrui ce qu’on appelle une fausse croyance. Afin d’évaluer cette compétence, il est fréquent d’utiliser une tâche de type « Sally et Anne » (Baron-Cohen et al.,1985). Cette tâche suit le scénario suivant : Sally met une bille dans un panier puis s’en va.

Pendant ce temps, sa copine Anne déplace la bille et la met dans une boîte. Puis Sally revient.

On demande alors à l’enfant qui a été témoin de toute la scène, « Où Sally va-t-elle aller chercher sa bille ? ». Si l’enfant répond correctement, nous saurons qu’il a compris que les autres pouvaient avoir des croyances différentes des siennes mais qu’elles pouvaient aussi être différentes de la réalité. Or c’est précisément dans ce type de tâche que les enfants avec un TSA se retrouvent en difficulté (Baron-Cohen et al., 1985 ; Yirmiya et al., 1998).

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7.2. Lien entre la TdE et la MdT

Afin d’expliquer ce déficit en TdE, plusieurs chercheurs se sont intéressés aux liens entre cette compétence et les performances en MdT. Peu d’études montrent encore actuellement ce lien chez les enfants avec un TSA mais Kouklari et al., (2018) ont révélé la présence d’une corrélation entre la tâche de fausse croyance et la MdT verbale (mesurée par une tâche d’empans de chiffres endroits et envers) chez des enfants âgés entre 6 et 8 ans. De plus, la corrélation reste significative dans le groupe des TSA quand on contrôle l’âge et le niveau intellectuel.

Ce lien a davantage été étudié chez les enfants avec un DT. Keenan (1998) a ainsi montré chez des jeunes enfants DT que la MdT verbale (évaluée par une tâche d’empans de comptage) parvenait à expliquer 21% de la variance des performances dans la tâche de fausse croyance. Les résultats de l’étude de Mutter, Alcorn et Welsh (2006) sont un peu plus mitigés.

Ils révèlent aussi chez des enfants DT d’âge pré-scolaire une corrélation entre la MdT et une tâche de fausse croyance. Cependant, des analyses de régression supplémentaire ont mis en évidence que c’était surtout l’âge qui prédisait les performances à la tâche de fausse croyance.

Or, ce facteur, une fois contrôlé, la MdT n’arrivait à prédire plus que 6% de la variance.

Enfin, Arslan, Wierda, Taatgen et Verbrugge (2015) ont évalué la relation entre la MdT et la TdE en simulant les effets d’un entrainement de MdT sur une tâche de fausse croyance à l’aide d’un modèle computationnel. L’étude compare ainsi deux types d’entrainement de MdT sur les performances en TdE par rapport à aucun entrainement. Dans le premier type d’entrainement, le modèle s’entraine en réalisant plusieurs fois des tâches qui demandent des stratégies de MdT simples. Dans le deuxième type d’entrainement, le modèle réalise cette fois des tâches de MdT qui font appel à des stratégies de MdT complexes. Les résultats montrent que quel que soit le type d’entrainement, le modèle réussit toujours plus rapidement les tâches de fausse croyance que lorsqu’il n’a pas été entrainé. En outre, lorsqu’il a suivi l’entrainement complexe, le modèle réussit encore plus rapidement les tâches de fausses croyances. Les auteurs concluent donc qu’avoir des compétences en MdT impacte positivement les performances sur les tâches de fausses croyances indépendamment de la complexité des stratégies de MdT entrainées.

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7.3. Lien entre TdE et langage

D’autres auteurs ont fait un lien entre les compétences en TdE et les capacités langagières. Selon Wellman, Cross et Watson (2001) les enfants DT avec les aptitudes langagières les plus élevées réussissent le mieux les tâches de TdE. De plus, parmi toutes les capacités langagières, une méta-analyse (Milligan, Astington & Dack, 2007) révèle que l’acquisition de la syntaxe des complétives est particulièrement reliée aux performances en TdE et surtout à la compréhension des fausses croyances. Chez les enfants avec un TSA, cela semble aussi être le cas. En effet, dans l’étude de Durrleman et al., 2019 les enfants avec un TSA qui ont été entrainés aux complétives ont obtenu des scores supérieurs aux épreuves de TdE par rapport à ceux qui ont eu un entrainement lexical.

Ainsi au vu de ces différentes études, des analyses complémentaires sur l’effet de notre entrainement de la MdT sur la TdE semblent justifiées. En effet, plusieurs études ont observé la présence de liens entre la MdT et la TdE et une relation entre la syntaxe et la TdE. Or, comme nous l’avons vu précédemment, la syntaxe est aussi en lien avec la MdT, c’est pourquoi il se pourrait que l’entrainement de la MdT améliore la TdE par ce biais-là. Par conséquent, nous faisons l’hypothèse qu’en entrainant la MdT nous observerons un effet bénéfique indirect sur la TdE.

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II. MÉTHODOLOGIE

1. Déroulement général de l’étude

L’étude commence par une phase de recrutement impliquant la passation de plusieurs tests standardisés afin de sélectionner seulement les individus répondant aux critères d’inclusion et d’exclusion. Puis les participants continuent avec une phase de pré-tests (environ une à deux séances pour une durée totale d’1h30 à 2h) qui évaluent leurs compétences initiales en MdT, en syntaxe complexe, en attention ainsi qu’en théorie de l’esprit. Deux semaines plus tard, l’enfant débute la phase d’entraînement avec MagicMemory (MM) sur un IPad. Cette phase dure huit semaines durant lesquelles l’enfant doit réaliser trois séances d’entrainement de 30 minutes, trois fois par semaine. Deux semaines après la fin de l’entraînement, l’enfant réalise ensuite la phase de post-tests. Les post-tests ont été appariés aux pré-tests pour éviter un effet d’apprentissage. Enfin, trois mois après la fin des post-tests, l’enfant termine l’étude par une phase de post-tests à distance pour apprécier la stabilité à long terme des effets observés.

La figure 7 synthétise le déroulement général de l’étude.

Figure 7. Déroulement général de l’étude.

Recrutement Pré-tests : 1 à 2 séances

Entrainement : 24 sessions 30 min/session

Post-tests : 1 à 2 séances

Post-tests à distance :

1 à 2 séances 2 semaines

semaines

2 semaines 3 mois

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2. Population

Notre échantillon se compose de 32 enfants présentant un TSA entre 6 et 14 ans (moyenne (m) = 8 ;10 mois ; écart type (ET) = 1 ;11), dont 29 garçons et 3 filles. Ils ont tous été diagnostiqués selon les critères du DSM-5 du TSA par des psychiatres et psychologues.

Nous avons recruté ces enfants en Suisse romande et en France voisine. Certains sont scolarisés en classe ordinaires et d’autres dans des structures spécialisées telles que les classes ULIS (Unités Localisées pour l’Inclusion Scolaire).

2.1. Procédure de recrutement

L’approbation de notre projet de recherche par la Commission cantonale d’éthique de la recherche (CCER) nous a permis d’entreprendre les démarches pour recruter nos participants.

Dans un premier temps, nous avons fait appel à des connaissances personnelles et professionnelles pour recruter les enfants présentant des troubles du spectre autistique. Puis, afin d’augmenter la population de notre échantillon, nous nous sommes tournées vers des associations et des logopédistes en Suisse ou en France voisine. Enfin, les réseaux sociaux1 nous ont aussi beaucoup aidées dans notre recrutement. Les logopédistes et les parents intéressés ont reçu une affiche qui décrivait synthétiquement le sujet de l’étude (cf. Annexe I).

Quand les familles nous contactaient, nous leur expliquions le déroulement de l’étude. Nous demandions enfin aux parents de signer un formulaire de consentement (cf. Annexe II) attestant leur accord à la participation de leur enfant. Malgré la volonté des parents, certains enfants n’ont pas pu terminer l’étude car celle-ci était trop exigeante pour eux.

1 Nous avons utilisé Facebook, qui nous a permis de rentrer en contact avec des

groupes spécialisés en autisme tels que : Autisme et handicap en Rhône-Alpes, Autisme bassin lémanique et Autisme Genève.

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2.2. Critères d’inclusion et d’exclusion

Lors de la sélection de nos participants nous avons été attentives au respect de plusieurs critères :

Critères d’inclusion :

Pour participer à l’étude, les enfants devaient avoir entre 6 et 14 ans. En effet, le choix de cette tranche s’explique par le lien prédictif très fort entre la MdT et la syntaxe, retrouvé chez les DT et les TDL entre 6 et 12 ans (Delage & Frauenfelder 2019, 2020).

Au vu de ces résultats et des difficultés importantes des enfants avec un TSA, nous avons élargi le recrutement jusqu’à 14 ans. Les enfants devaient être de langue maternelle française ou bilingues simultanés, exposés au français avant l’âge de 3 ans.

De plus, ils devaient présenter un score plus grand ou égal à -1,25 écart-type (ET) en syntaxe expressive à la tâche standardisée de production d’énoncés du BILO3C (Khomsi, Khomsi, Pasquet & Parbeau-Guéno, 2007) (cf. Annexe IV). Ils devaient aussi avoir au moins trois scores sur six plus grands ou égaux à -1,25 ET pour 6 tâches d’évaluation de la mémoire de travail (Boutard & Gatignol, 2015) ou un score moyen plus grand ou égal à -1 ET lorsqu’on fait la moyenne de ces 6 scores (cf. Annexe IV).

Enfin, nous avons dû raisonner au cas par cas afin de garder uniquement les enfants qui avaient une bonne compréhension des consignes. Les matrices de Raven (Raven et al., 1998) (cf. Annexe IV) et nos observations qualitatives ont été utiles pour cette sélection.

Critères d’exclusion :

Nous avons fait le choix de ne pas retenir les enfants dont les parents ne semblaient pas motivés car un investissement important de leur part était essentiel au bon déroulement des entraînements de leur enfant.

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3. Pré- et post-tests

Les pré- et post-tests se composent de plusieurs tâches de MdT (empans simples et complexes) et de syntaxe complexe. À cela s’ajoutent des épreuves de théorie de l’esprit et d’attention. Cependant, les tâches d’attention ne seront pas analysées dans ce mémoire. Afin d’éviter un effet d’apprentissage dû à l’effet test-retest, deux versions (A et B) ont été élaborées et appariées en fréquence et longueur (pour les stimuli verbaux) et en complexité visuelle et accord sur le nom (pour les stimuli visuels). L’enfant commence par exemple par la version A en pré-tests et passe la version B en post-tests puis à nouveau la version A en post-tests à distance et inversement s’il a débuté l’étude par la version B. Dans les deux versions, l’ordre des épreuves est le même et alterne entre des épreuves de mémoire, de syntaxe complexe, d’attention et de théorie de l’esprit (cf. Annexes III).

3.1. Evaluation des compétences en MdT

3.1.1. Empans simples

La course des animaux

La course des animaux (Majerus et al., 2006 ; Majerus, 2008) est une épreuve ayant pour but l’évaluation de la composante sérielle de la MCT (mémoire à court terme) verbale.

L’enfant entend un enregistrement sonore énonçant une série de noms d’animaux ayant participé à une course. Il s’agit de mots monosyllabiques de haute fréquence : chien, chat, lion, ours, loup, singe, coq. L’objectif est ensuite de placer sur le podium les images correspondant à ces animaux, en respectant leur ordre d’arrivée (voir Figure 8). Le critère d’arrêt de l’épreuve est l’échec de deux items d’une longueur identique. Dans cette épreuve, trois scores sont relevés : la longueur de la plus longue séquence, le nombre total d’items correctement rappelés (en ordre) et le nombre total de séquences correctement rappelées. Pour nos analyses, nous retenons le nombre total d’items correctement rappelés dans l’ordre. Nous avons choisi ce score car celui-ci introduit le plus de variabilité entre les enfants et il a été sélectionné dans d’autres études. Tous les scores suivants ont été retenus pour les mêmes raisons.

Références

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