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Sixième journée juridique : 9 octobre 1966

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Conference Proceedings

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Sixième journée juridique : 9 octobre 1966

FLATTET, Guy, CORNIOLEY, Pierre, GRAVEN, Jean

FLATTET, Guy, CORNIOLEY, Pierre, GRAVEN, Jean. Sixième journée juridique : 9 octobre 1966 . Genève : Georg, 1967, 146 p.

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:141988

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GUY FLATTET - PIERRE CORNIOLEY JEAN GRAVEN

SIXIÈME

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JOURNEE JURIDIQUE

9 octobre 1966

GENÈVE

LIBRAIRIE DE L'UNIVERSITÉ GEORG & Cie S.A.

1967

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SIXIÈME

JOURNÉE JURIDIQUE

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MÉMOIRES PUBLIÉS PAR LA FACULTÉ DE DROIT DE GENÈVE

22

GUY FLATTET - PIERRE CORNIOLEY JEAN GRAVEN

SIXIÈME

,

JOURNEE JURIDIQUE ·

9 octobre 1966

GENÈVE

LIBRAIRIE DE L'UNIVERSITÉ GEORG & cie S.A.

1967

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et d'adaption réservés pour tous pays.

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La propriété par étage

par Guy FLATTET,

Professeur ordinaire à la Faculté de droit de Lausanne

La propriété par étage, abolie par le Code civil fédéral de 1912, a été rétablie par une loi du 19 décembre 1963. Depuis le ler jan- vier 1965, date d'entrée en vigueur de la loi, il est permis de créer de nouvelles propriétés d'étage. Ainsi donc, il est possible d'acquérir une fraction d'un immeuble bâti et non sa totalité.

Non seulement l'interdiction dont cette forme de propriété fai- sait l'objet depuis un demi-siècle a été levée, mais une organisation minutieuse - qui faisait défaut dans les anciens codes civils can- tonaux - lui a été donnée par les nouveaux textes insérés au livre quatrième du Code civil. Ce rétablissement a marqué la fin d'une période au cours de laquelle des efforts divers avaient été tentés pour échapper à l'interdiction légale et procurer les avantages de la propriété par étage à travers des formes juridiques appropriées.

En effet, l'éclipse de la propriété par étage n'avait pas été totale:

d'abord, parce que les propriétés existant avant l'introduction du Code civil fédéral avaient été maintenues et qu'il était simplement interdit d'en créer de nouvelles, ensuite, parce que la pratique s'était ~fforcée de mettre au point des formes juridiques qui permet- taient de réaliser sur le plan économique la propriété par étage.

Les anciennes propriétés, sans doute, étaient destinées à s'éteindre peu à peu avec le temps. Mais les nouvelles formes connaissaient un succès certain. Une première réalisation apparut vers 1918 en Valais. Elle consistait à combiner le droit de copropriété sur un immeuble avec des servitudes conférant à chaque copropriétaire un droit sur une partie de l'immeuble. Il n'est pas douteux que cette forme' était nulle comme contraire aux dispositions du Code civil sur les servitudes, qu'au surplus elle était de portée limitée puisqu'au

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bout de dix ans, tout copropriétaire pouvait demander le partage (ce qu'a d'ailleurs confirmé un arrêt du Tribunal fédéral). Néan- moins, il s'en constitua un nombre appréciable en Valais. Hors de ce canton, cette forme ne fut employée, semble-t-il, que pour per- mettre à d'anciennes propriétés d'étage d'être inscrites au registre foncier. Une autre réalisation apparut en 1948 - et à Genève - pour atteindre le même but que la propriété par étage, mais en usant d'une tout autre forme, légale celle-là: la combinaison d'une société anonyme propriétaire d'un immeuble avec des contrats de bail conclus avec les actionnaires eux-mêmes. Usant de la forme sociale, les associés se répartissaient ensuite la jouissance directe de l'immeuble. Le système bien adapté aux besoins et à la loi se développa, surtout en Suisse romande.

Les résultats atteints incitèrent certains milieux à demander la suppression de l'interdiction dont la propriété par étage faisait l'objet. Mais une appréciation inexacte portée sur la validité du moyen de la copropriété-servitude fit croire au législateur qu'il était inutile de retoucher la loi et les choses en restèrent là. La seule forme compatible avec les prescriptions légales demeura la société immobilière d'actionnaires-locataires. Elle se multiplia, notamment dans les stations de montagne. Mais la résistance de la Suisse alé- manique au principe même de la société immobilière et le désir de se procurer néanmoins les avantages de la société d'actionnaires- locataires réveilla le désir d'abolir la vieille interdiction de 1912.

En 1956, la Société suisse des juristes porta la question de la pro- priété par étage à l'ordre du jour de son assemblée annuelle. A l'issue des travaux fut votée une résolution appelant une solution législative. Quelques mois après, une commission était constituée par le Département fédéral de Justice et Police pour élaborer un projet de loi. Ce sont les travaux de cette commission qui ont abouti à la loi du 19 décembre 1963. Une étape était franchie. Nous en commençons une nouvelle: celle de l'application de la nouvelle loi.

Quel est donc l'avenir de la propriété par étage? Pouvons-nous le scruter avant d'examiner la nouvelle organisation mise en place?

La question mérite qu'on s'y arrête, car nous avons pu lire derniè- rement que dans certaines villes des appartements étaient offerts en vente et qu'ils ne trouvaient pas acquéreurs. D'aucuns ont alors

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LA PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE 9 déjà conclu que la loi resterait sans application, que d'ailleurs elle n'avait pas résolu le problème de la pénurie de logement. Sur le second point, la réponse est facile: la loi est entrée en vigueur le 1er janvier 1965, il n'y a pas encore deux ans. Une crise de loge- ment ne se résout pas si vite. Une loi civile ne produit pas de résul- tats aussi rapides qu'une loi fiscale augmentant le taux de l'impôt.

Pratiquement, il était difficile de mettre la nouvelle institution en mouvement immédiatement, construire des immeubles et vendre des appartements. C'est une question de temps. Et celui-ci est trop bref pour qu'un jugement soit porté à cet égard. Quant à la diffi- culté de vendre des appartements, on peut lui trouver deux causes.

D'abord, la propriété par étage n'est pas encore entrée dans les.

mœurs. Eliminée pendant cinquante ans, elle n'est pas connue du public helvétique, qui se tient sur la réserve à l'égard de cette inno- vation. Le même phénomène s'est produit en Allemagne, à l'imi- tation de laquelle la propriété par étage avait été abolie en Suisse.

L'Allemagne a rétabli la propriété par étage il y aura bientôt vingt ans et après les réserves du début, l'institution s'est développée normalement. Ensuite, il faut noter ce fait que les immeubles qui jusqu'ici avaient été propriété de sociétés d'actionnaires-locataires étaient des immeubles de luxe, voire de très grand luxe, à l'excep- tion de ceux qui avaient été établis dans les débuts d'application de cette forme de propriété. C'étaient des immeubles de qualité, mais non de grand luxe. Il en est résulté dans l'esprit d'un certain public que la propriété par étage est réservée aux immeubles de . grand prix. Il s'agit là d'une erreur due à des circonstances particu-

lières. Non seulement la propriété par étage peut s'appliquer aux immeubles de condition moyenne ou modeste, mais il est probable que c'est de ce côté qu'elle va se développer de plus en plus.

En effet, le logement est un besoin élémentaire de la population.

Et actuellement, pour un certain nombre d'années encore, ce besoin sera toujours plus pressant. Trois facteurs agissent en ce sens.

Nous assistons partout à une croissance démographique dont les effets se manifestent non seulement quand naissent les enfants, mais surtout quand devenus adultes ils sont eux-mêmes en quête d'un logement propre. En outre, la migration des campagnes vers la ville est irréversible et elle n'est pas terminée. Enfin, l'immigra-

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La cession même d'un appartement ne s'opère d'ailleurs pas nécessairement de la même manière que l'aliénation d'un immeuble.

Sans doute, quand un propriétaire d'appartement voudra le céder, le contrat qu'il passera avec l'acquéreur ressemblera beaucoup aux contrats classiques. Mais il faut prévoir le cas - et on peut imaginer qu'il sera fréquent - où des amateurs seront sollicités d'acquérir des appartements non encore achevés, peut-être même non encore commencés. Avant l'achèvement de la construction et la finition des appartements, des relations de droit particulières s'établiront entre ceux qui auront pris l'initiative de la construction et les acquéreurs. Et elles doivent être examinées avec d'autant plus d' atten- tion que l'établissement de la loi sur la propriété par étage a donné un sentiment de sécurité à des personnes qui n'étaient pas très averties dans le domaine juridique et qui s'étaient tenues, pour cette raison, à l'écart des sociétés d'actionnaires-locataires. Le problème des rapports entre souscripteurs ou acquéreurs d'actions de sociétés d'actionnaires-locataires et constructeurs des immeubles sociaux s'était bien posé, mais il a toujours été résolu sans heurt, car les acheteurs avaient affaire avec des groupements expérimentés aux bases financières solides. Désormais, des amateurs, pour ne pas dire des bricoleurs, sont incités à se lancer dans l'exploitation de la propriété par étage, les difficultés juridiques leur paraissant levées.

L'apparition sur le marché de ces nouveaux venus, peu renseignés sur les questions de droit, risque de mettre en évidence l'incerti- tude des rapports entre les parties avant l'entrée en possession des appartements achevés. Ce risque n'est pas négligeable. A vues humaines, la propriété par étage va maintenant s'étendre à de nouvelles couches d'intéressés, de classe moyenne, aux ressources comptées. En face de constructeurs inattentifs à l'aspect juridique de leurs opérations va apparaître une clientèle elle-même mal informée. Dès lors que se produira-t-il en cas d'imprévu: dépasse- ment de devis, malfaçons, prolongation de délai de livraison, par exemple? Qui supportera les risques? Qui devra payer les supplé- ments de prix? L'acheteur? Le vendeur? Mais sommes-nous seule- ment en présence d'un acheteur et d'un vendeur? Celui qui a cons- truit et qui aliène des parts de copropriété est plus ou autre chose qu'un vendeur: il est constructeur sans doute - ce qui peut être

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LA PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE 13 compatible avec l'établissement des contrats de vente - mais encore il est répartiteur des lots - et cela, ce n'est pas une fonction du vendeur. D'ailleurs, les rapports entre les constructeurs et les acquéreurs n'entrent pas nécessairement dans le cadre du contrat de vente. Le constructeur qui a pris l'initiative de bâtir peut appa- raître comme un représentant de la copropriété. Les futurs copro- priétaires peuvent· éventuellement être considérés comme des maîtres, dont le constructeur n'est que l'entrepreneur. Et nous pouvons même envisager l'application des règles de la société simple au groupe des constructeurs et des acquéreurs d'apparte- ments.

L'intérêt de la question est évident. Et si occasionnellement celle-ci a été signalée, jamais elle n'a été traitée systématiquement.

Il faut donc se placer sur le terrain des rapports contractuels de droit commun pour tenter de tracer les lignes directrices condui- sant à une ou à des solutions. Cette recherche doit inciter les inté- ressés à la prudence.

L'acquéreur d'un appartement ne doit pas seulement se soucier de conclure un contrat - parfois malaisé à définir - et de se faire accepter dans la collectivité des copropriétaires: il doit encore connaître la loi de ce groupement, les règles qui le gouvernent et qui détermineront ses droits et ses obligations.

Le législateur helvétique a créé une copropriété d'un type par- ticulier. Il ne s'est pas borné à autoriser la création de propriétés d'étages: il leur a donné une structure propre et il a même poussé le souci jusqu'à modifier les règles de la copropriété ordinaire.

La loi de 1963 a réformé ainsi le système de la copropriété en géné- ral et introduit un chapitre spécial pour la propriété d'étage. Ce sont ces deux textes qui établissent le statut de la propriété par étage et non pas seulement le chapitre spécial, dont certaines dispo- sitions renvoient d'ailleurs expressément à la partie générale.

La copropriété ainsi établie est agencée de telle sorte que les copropriétaires jouissent chacun d'une partie de l'immeuble d'une manière exclusive et qu'ils puissent céder et transmettre leurs droits sur cette partie, tout en étant membres d'une commu- nauté qui gère le bien en copropriété. Le caractère communau- taire domine dans le régime instauré. Mais il n'efface pas les

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droits individuels: il les limite en les intégrant. C'est une copropriété très particulière, puisqu'à la différence du régime romain, qui ne connaissait que des parts indivises, le mode d'usage de la part de copropriété est ici la jouissance directe, matérielle d'une fraction du bien commun. Mutatis mutandis, le mode d'exercice du droit de copropriété peut être rapproché de la servitude d'habita- tion du système de remplacement de la copropriété-servitudes ou du bail conféré à l'actionnaire de la société d'actionnaires-loca- taires.

Le copropriétaire est solidement protégé contre les décisions de la majorité dans la mesure où son droit essentiel - le droit sur une part de l'immeuble - risquerait d'être compromis. Ce qui est très important, c'est que - contrairement à ce que certains désireraient.- les intéressés n'aient pas le sentiment qu'ils sont propriétaires tout puissants chez eux. Ils font partie d'une communauté organisée.

C'est à cette conscience d'être membre d'un groupe que l'on doit d'éliminer les difficultés et les querelles de jadis, chacun se croyant indépendant des autres et agissant dans une certaine anarchie.

Le nœud du système de la propriété par étage, le problème fon- damental de son organisation est l'ajustement des droits individuels et des droits communs, des droits des copropriétaires considérés comme particuliers indépendants les uns des autres et des droits de la communauté des copropriétaires. C'est de leur répartition et de leur délimitation, de l'exercice des uns et des autres que dépend la réussite ou l'échec de la propriété par étage. L'établissement d'une solution est d'autant plus délicat que les copropriétaires ne sont pas seulement associés à la gestion juridique et financière de la chose commune: ils en jouissent matériellement et directement.

Si l'on peut employer ce terme: ils sont associés physiquement, et il importe d'assurer dans ces conditions une coexistence pacifique.

Conséquence de cette combinaison de droits exercés en commun et de droits exercés individuellement, l'immeuble en copropriété comprend deux sortes de parties: les parties privées et les parties communes. La loi tire elle-même une démarcation entre les por- tions de l'immeuble soumises à usage commun et celles qui restent sous le contrôle des copropriétaires pris individuellement. C'est le défaut de répartition précise des charges et de nette séparation

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dans leur jouissance directe des propriétaires d'étages qui a été à l'origine des querelles dont nous avons reçu le lointain écho. Ainsi se dégage l'idée maîtresse de la loi de rétablissement de la propriété par étage: il s'agit d'une copropriété d'un type particulier portant sur un immeuble divisé en parties communes et en parties privées, combinant les droits et pouvoirs de la collectivité des coproprié- taires avec les droits individuels des mêmes copropriétaires pour leur permettre de jouir directement et exclusivement d'une partie de l'immeuble. En bref, le droit de jouissance exclusif, cessible et transmissible, vient s'enchâsser dans une forme de copropriété conçue pour lui. C'est bien un droit de portée analogue que l'on trouvait dans la société d'actionnaires-locataires.

Cette complexité de droits communs et de droits individuels risque de se compliquer encore avec la vie moderne. Les difficultés du service domestique, le peu de temps dont dispose l'homme de 1966 lui font souhaiter parfois de se décharger sur un service exté- rieur de l'entretien de son logement, de se faire servir ses repas tout préparés chez lui ou d'aller à proximité immédiate dans un restaurant, si possible sans sortir de sa maison.·

L'idée et sa réalisation ne sont pas nouvelles. Une expérience en ce sens a été tentée il y a trente ou quarante ans. Mais l'époque n'était pas encore propice. Aujourd'hui, de nouvelles réalisations voient le jour, sur une grande échelle. Et l'on peut imaginer d'au- tres entreprises que l'hôtellerie et la restauration pour fournir des services aux copropriétaires d'appartements. Il est quelquefois difficile de faire la distinction entre les relations de droit qui s'éta- blissent à la suite de cette greffe d'une entreprise commerciale sur la copropriété. Mais il est absolument nécessaire de la faire pour se rendre compte de la valeur réelle de la copropriété.

Ce développement de la propriété par étage montre la richesse de cette solution moderne du problème du logement. Suivant l'ordre chronologique, nous examinerons d'abord les questions relatives à l'acquisition d'un appartement (I), puis nous passerons à l'examen de la structure et du fonctionnement de la propriété d'étage (II).

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I

ACQUISITION D'UN APPARTEMENT

Deux situations doivent être envisagées: l'appartement désiré existe déjà (peut-être est-il même habité), ou bien il n'est qu'à l'état futur; il faut l'achever ou même construire l'immeuble dans lequel il se trouvera.

Le première hypothèse est la plus simple. C'est celle qui se rapproche le plus de l'achat d'une chose, en l'espèce d'un immeuble.

Néanmoins, elle présente des différences appréciables, puisque l'acquéreur n'achète pas seulement son appartement, mais qu'il entre aussi dans une collectivité. Et à cet égard, il semble normal et équitable que la collectivité ait un droit de regard sur le transfert d'un appartement. Le nouveau venu:... il faut le souhaiter pour ceux qui vivront à côté de lui - doit être sociable (ainsi que ceux qui viendront vivre avec lui) et solvable. Or le Code civil dans sa rédac- tion primitive, actuellement dans la rédaction de l'article 682 nou- veau·, prévoit que:

Les copropriétaires ont un droit de préemption légal contre tout tiers acquéreur d'une part de l'immeuble indivis.

Mais ce droit qui permettrait d'écarter un indésirable n'est _pas maintenu en ce qui concerne la propriété par étage (où il serait particulièrement utile). Le texte spécial à la propriété par étage, l'article 712c dispose:

Le copropriétaire n'a pas le droit de préemption légal contre tout tiers acquéreur d' itne part ...

En principe, par conséquent, il n'y a pas de droit de préemption.

Toutefois la loi autorise de le rétablir par convention:

... mais un droit de préemption peut être créé dans l'acte constitutif de la propriété par étages ou par convention ultérieure et annoté au registre foncier.

On ne saurait trop recommander de prévoir ce droit de préemption qui permet l'élimination d'un acquéreur gênant pour les coproprié- taires en place.

Le droit de préemption n'est pas toujours aisé à exercer, puisque le bénéficiaire qui en fait usage doit se substituer à l'acqué- reur et verser au vendeur le prix qui avait été convenu. Aussi un

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autre moyen peut-il être employé. Mais la loi ne l'établit pas d'office:

il doit être spécialement prévu. C'est le même article 712c, qui dans ses alinéas 2 et 3 permet ce moyen:

L'acte constitutif ou une convention ultérieure peut prévoir qu'un étage ne sera valablement al·iéné, grevé d'un usufruit ou d'un droit d'habitation ou loué si les autres copropriétaires n'ont pas, en vertu d'une décision prise à la maforité, formé opposition dans les quatorze jours après avoir reçu com- munication de l'opération.

L'opposition est sans effet si elle n'est pas fondée sur un juste motif;

le juge en décide à la demande du défendeur dans une procédure sommaire.

Les auteurs de la loi ont été parfaitement conscients de ce besoin des copropriétaires de veiller à l'élimination d'intrus. Ils ont d'ailleurs autorisé l'opposition non seulement pour les aliénations en général, mais encore pour tous les actes juridiques qui pour- raient introduire dans l'immeuble un indésirable. Cette mesure de protection suppose pourtant l'existence préalable d'un acte juridi- que spécial: acte constitutif ou convention. En l'absence de ces actes, les copropriétaires n'ont pas de droit de regard sur l'entrée d'un nouveau venu.

L'opposition ne saurait être arbitraire: elle est soumise au con- trôle judiciaire. Il s'agit d'un juge et non d'un arbitre. Cette préci- sion est nécessaire, car bien souvent l'arbitrage est prévu pour résoudre les litiges possibles entre copropriétaires.

Ces mesures de protection de la collectivité sont complétées par la possibilité d'exclure, à certaines conditions et sous contrôle de justice, un copropriétaire dont le comportement serait incompa- tible avec les égards dus aux autres.

Entrant dans une communauté régie par un règlement, l'acqué- reur doit en prendre connaissance, car ce règlement lui est opposable en vertu de la loi. Il le trouvera publié au registre foncier. Il doit prendre garde également que des contributions tardives ne soient pas encore payées, auquel cas il pourrait voir sa part hypothéquée en vertu de l'article 7r2i du Code civil.

Ainsi donc l'aliénation d'une part de copropriété est libre: elle peut seulement être restreinte dans une certaine mesure et en vertu d'un acte spécial. Le contenu des actes à passer concerne à la fois la partie de l'immeuble aliénée et l'ensemble de l'immeuble.

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tiers. Et si l'on veut envisager toutes les hypothèses possibles sans même chercher à peindre le diable sur la muraille, il ne faut pas négliger l'article 533, alinéa 3, du Code des obligations aux termes duquel:

Il est permis de stipuler qu'un associé qui apporte son industrie est dispensé de contribuer aux pertes, tout en prenant ime part dans les bénéfices.

Or le promoteur apporte essentiellement son industrie. Théori- quement, il pourrait s'exonérer de toute contribution au passif de la société simple qu'il aurait suscitée, en prenant la précaution de ne faire aucune mise de fonds. C'est un cas extrême sans doute, mais il n'est pas exclu a priori, en dépit de son caractère éminemment choquant. Les souscripteurs assumeraient ainsi les risques, dont serait déchargé le promoteur qui, lui est particulièrement intéressé à l'affaire. Cela montre que certaines dispositions du Code datent d'une époque où la puissance économique était liée au capital et que, pour protéger le plus faible économiquement, les risques pouvaient être rejetés sur les possédants. Les temps ont changé: le possédant n'est plus nécessairement le plus fort du point de vue économique, et c'est lui qu'il faut parfois protéger contre celui qui demeure pré- tendûment faible.

Quoi qu'il en soit, cette rapide revue des types de relations entre le promoteur et les souscripteurs d'appartements montre la gravité du problème, quand le contrat d'acquisition est passé en vue d'un appartement futur.

Mais si nous serrons maintenant la question de plus près, nous devons préciser avec exactitude les risques courus par les souscrip- teurs. On peut les classer en trois chapitres. D'abord, les qualités et le prix de l'appartement peuvent ne pas coïncider avec ce qu'espé- rait légitimement le souscripteur. Ensuite, l'organisation même de la copropriété peut receler des ·clauses particulières défavorables aux souscripteurs, le promoteur se réservant certains avantages. Enfin, le pire évidemment, c'est l'arrêt des travaux pour manque de fonds, ce qui entraîne soit la perte des versements, soit l'obligation pour les souscripteurs qui le peuvent de fournir une rallonge au prix convenu primitivement.

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LA PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE 2I

Le souscripteur prudent peut se prémunir contre ces éventualités, partiellement en tout cas, mais de manière appréciable, en prenant quelques précautions. S'il achète un appartement futur, il doit exiger d'abord le droit de se renseigner, il devrait ensuite exiger une garantie pour ses versements, enfin s'il y a création d'une société à laquelle il est associé, contrôler et surveiller la gestion sociale. Mais il faut bien reconnaître que c'est beaucoup demander à un souscrip- teur qui n'a en vue que d'occuper son logement enfin achevé contre le paiement du prix stipulé. Non seulement, il n'en aura pas toujours le goût, mais il en aura rarement la compétence. Dès lors, on mesure l'importance du promoteur auquel est confiée la réalisation de l'im- meuble et de la copropriété. C'est à lui - qui a pris l'initiative de l'opération -que se confient les souscripteurs. Il serait anonnalqu'en dégageant sa responsabilité, il fasse retomber sur eux les risques de l'affaire. Il est notamment nécessaire de le tenir pour responsable de la surveillance des travaux. Pourtant il peut se donner pour simple intermédiaire et chercher à limiter sa responsabilité à la conclusion des contrats ou même au simple rapprochement des co- propriétaires avec les entrepreneurs de construction, se présentant comme simple courtier par exemple.

L'examen approfondi de cette question nous mènerait très loin.

Nous ne pouvons qu'en esquisser les grandes lignes. Mais il semble nécessaire de suggérer quelques solutions protectrices des intérêts de tous.

D'emblée, nous rejetons l'éventualité d'une solution législative.

D'abord, elle ne se justifierait pas en raison du caractère hypothé- tique - pour le moment - de ces craintes. Ensuite, elle risquerait soit de laisser subsister des lacunes et d'être partiellement inefficace soit de poser des exigences si draconiennes qu'elle découragerait désor- mais toute initiative.

En revanche, le premier conseil à donner aux amateurs d'appar- ments est d'exiger des informations très complètes sur les projets tant de la construction que de la copropriété. Il reste encore la question de la garantie des fonds versés et de l'exécution correcte des projets.

La garantie des versements pourrait faire l'objet de la surveil- lance d'une banque ou d'une fiduciaire. On pourrait même imaginer

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gués par une lettre. Le texte va de l'article 712a à l'article 712t compris. Ce sont ces articles 712 qui sont essentiellement le siège de la matière, en dépit des renvois occasionnels à la partie générale de la copropriété ou à telle autre partie du Code, par exemple aux règles relatives aux associations pour régir certaines questions touchant l'assemblée des copropriétaires. La loi modifie encore un article du Code civil pour faire entrer les parts de copropriété dans la catégorie des immeubles; enfin elle modifie et complète certains passages du titre final du Code civil.

Nous devons donc étudier la propriété par étages en partant des articles 712 et nous reporter parfois à d'autres textes légaux, en général ceux qui posent les règles communes sur la copropriété.

Le régime des articles 712 est spécial par rapport au régime général:

il le complète et y déroge.

La philosophie de l'institution consiste en ceci que l'immeuble dans son ensemble est en copropriété, qu'il appartient donc globale- ment à une collectivité, mais que les membres de cette collectivité ont chacun un droit exclusif sur une partie déterminée de l'immeu- ble. Leur droit de copropriété leur confère donc un droit sur l'im- meuble pris dans son ensemble et en outre un droit particulier sur les parties qui leur sont spécialement assignées. Un immeuble en co- propriété par étage va donc avoir deux parties distinctes: d'une part, des parties communes soumises à l'usage général et collectif des copropriétaires, d'autre part, des parties privées réservées à l'usage exclusif de chaque copropriétaire. La loi définit alors l'as- siette des droits collectifs et des droits individuels.

Les parties soumises aux droits exclusifs sont en quelque sorte soustraites de l'ensemble de l'immeuble, à la condition de remplir certaines exigences: qu'il s'agisse d'un étage ou d'une partie d'étage à usage d'habitation ou de commerce ou de tout autre usage, formant un tout et disposant d'un accès propre. On dit parfois que l'assiette du droit exclusif constitue une «unité d'habitation ». Ainsi cette forme de copropriété ne pourrait être utilisée pour répartir les diverses pièces d'un appartement entre plusieurs copropriétaires, à plus forte raison pour diviser une chambre. Cette division inadé- quate conduirait à trop de difficultés entre les habitants du même appartement. C'est faute de cette précaution que la propriété par

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étage a pris jadis si mauvaise réputation. La coexistence paisible des copropriétaires suppose leur indépendance réciproque dans leurs habitations. Mais si cette condition est satisfaite, il est permis d'annexer à l'appartement des locaux distincts, par exemple une chambre indépendante, un hangar de dépôt, un garage. Il ne peut donc se produire un émiettement indéfini des parts de copropriété:

la loi établit un minimum au-dessous duquel on ne saurait descendre;

l'unité d'habitation est une cellule indivisible.

Mais tout ne peut pas être soustrait à l'usage commun, de telle sorte que l'immeuble ne serait constitué que de l'addition des parties privées. La loi précise que certaines parties de l'immeuble ne peuvent jamais faire l'objet d'un droit exclusif: ce sont le bien-fonds même ou le droit de superficie en vertu duquel peut être faite la construc- tion, les structures du bâtiment, c'est-à-dire les parties importantes pour l'existence, la disposition et la solidité de l'immeuble ou des locaux des copropriétaires, ou encore celles qui donnent au bâtiment sa forme extérieure et son aspect. Enfin les ouvrages et installations qui servent également aux copropriétaires pour l'usage de leurs locaux sont aussi soustraits à l'exercice du droit exclusif. Même par contrat, ils ne pourraient être retranchés des parties communes auxquelles ils sont attachés par nature.

Si soigneusement qu'ait été établie cette distinction des parties communes et des parties privées, des dissensions pourront s'élever.

Par exemple, l'appartement du concierge peut-il appartenir à un propriétaire (avec une charge d'affectation, sans doute) ou doit-il rester dans les parties communes? L'hésitation est sérieuse. Les auteurs de la loi n'ont peut-être pensé qu'aux concierges qui sont chargés d'un travail partiel, voire occasionnel. Dès lors, on pourrait admettre que leur appartement soit une partie privée. Mais si l'on envisage le développement à venir de la propriété urbaine, spéciale- ment pour les immeubles en copropriété par étage, il faut envisager la présence d'un concierge entièrement occupé à plein temps au service de l'immeuble et de ses occupants.

Dès lors, son logement n'est-t-il pas un ouvrage ou une installation qui sert à tous les copropriétaires pour l'usage de leurs locaux? Sans doute, les copropriétaires n'utilisent-ils pas directement cet appartement. Mais dans un immeuble de ce

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taire et un usufruitier, une seule personne peut assister à l'assemblée et y voter.

Ce système toutefois pourrait donner des résultats peu satisfai- sants en certains cas. Prenons l'exemple d'un bâtiment comportant appartements, bureaux, magasins et un grand nombre de garages appartenant à des personnes logées hors de l'immeuble. La seule considération du nombre des copropriétaires pourrait donner la majorité aux propriétaires de garages, à des personnes qui n'ont pas du tout les mêmes intérêts que les habitants de l'immeuble. C'est pourquoi un certain nombre de décisions ne peuvent être prises qu'à une majorité qualifiée par la valeur des parts représentées.

La considération de la valeur des parts va protéger les coproprié- taires, tout au moins un certain nombre d'entre eux, contre une majorité qui ne serait que faiblement intéressée économiquement à l'ensemble de l'immeuble.

Nous trouvons ainsi une organisation assez différente de celle des sociétés commerciales. Le souci de protéger les copropriétaires considérés individuellement, mais de tenir compte ·des intérêts économiques engagés conduit à ce régime complexe pour assurer en même temps une gestion normale de l'immeuble. Il faut alors déterminer avec précision et détail l'objet des décisions collectives.

A l'article 721m, la loi énumère une série d'attributions de l'assemblée. Il s'agit là de ce qu'on pourrait appeler les affaires courantes: celles qu'une assemblée générale ordinaire dans une société anonyme porte régulièrement dans son ordre du jour: régler les affaires administratives qui ne sont pas laissées à la compétence de l'administrateur, nommer celui-ci et le surveiller, désigner éven- tuellement un comité ou un délégué pour assurer la permanence. de l'assemblée, approuver les devis de frais annuels, les comptes et la répartition des frais entre les copropriétaires, décider la création d'un fonds de rénovation, assurer le bâtiment. Mais ce qui est le plus important, ce sont les pouvoirs pour les actes d'administration et les travaux de construction. Sur ce point, nous avons un article spécial, l'article 712g,qui établit un système assez délicat à manier.

Sa terminoloie peut prêter à discussion. Pour en discuter, rappelons- en le texte:

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LA PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE 31 Existe-t-il alors un moyen pour protéger le copropriétaire du rez- de-chaussée et lui donner la jouissance paisible du jardin? Peut-être.

On a préconisé l'établissement d'une servitude en ce sens. En tant que copropriétaire, il pourrait avoir une servitude, sa part de copro- priété jouant le rôle de fonds dominant. La servitude pourrait lui donner la jouissance du jardin. C'est une solution un peu curieuse, il est vrai, car la loi interdit de donner sur le bien-fonds le droit exclusif qu'elle accorde aux copropriétaires sur les parties privées, mais la servitude de jouissance aboutit pratiquement au même résultat. Ne dira-t-on pas qu'il y a fraude à la loi? C'est une éven- tualité que l'on ne peut écarter à priori. Une autre solution pour- rait probablement être trouvée en attachant à la part de copropriété de l'occupant du rez-de-chaussée un droit (de conception appropriée) au bail du jardin.

Si notre interprétation est juste, les règles de compétence pour décider les travaux de construction et les actes d'administration sont seules soumises à la loi de l'unanimite. C'est un moyen de pro- tection pour assurer la sécurité des copropriétaires; ceux-ci savent une fois pour toutes qui peut prendre ces décisions et à quelles con- ditions.

Voyons donc comment sont établies ces règles et quelle est leur contenu.

L'article 712g permet d'abord à la volonté individuelle du fon- dateur ou à la volonté unanime des copropriétaires de déterminer si les décisions seront p1ises à l'unanimité ou à la majorité, et à quelle majorité. Ace pouvoir, il y a pourtant deux restrictions. L'une découle de l'article 647, al. 2, au chapitre de la copropriété en général:

Le règlement ne pei1t supprimer ou limiter le droit de chaque coproprié- taire:

I. De demander que les actes d'administration indispensables ait maintien de la valeur et de l'utilité de la chose soient exécutés et, au besoin, ordonnés par le juge;

2. De prendre lui-même aitxfrais des copropriétaires les mesures urgentes requises pour préserver la chose d'un dommage imminent oit s'aggravant.

Il s'agit donc d'exiger des mesures indispensables d'administra- tion pour sauvegarder la valeur ou l'utilité de la chose ou d'interve- venir personnellement en cas d'urgence.

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Les règles de la copropriété s'appliquent à la compétence pour procéder à des actes d'administration et à des travaux de construction.

Si ces règles ne s'y opposent pas, elles peitvent être remplacées par des dispositions différentes prévues dans l'acte constitutif ou adoptées à l' unani- mité par tous les copropriétaires. ·

Pour le reste, chaque copropriétaire peut exiger qu'un règlement d' admi- nistration et d'ittilisation valable dès qu'il a été adopté à la majorité des copropriétaires représentant en outre la moitié de la valeur des parts, soit établi et mentionné au Registre foncier; même si le règlement figure dans l'acte constitutif, il peut être modifié par décision de cette double majorité.

Ainsi donc une distinction fondamentale est introduite: cer- taines décisions demeurent soumises à la loi de l'unanimité (celles qui sont visées à l'alinéa 1er), d'autres peuvent être prises à une majorité qualifiée et cette majorité qualifiée peut toujours les modi- fier. La distinction est d'importance: il faut maintenant détermi- ner son objet, ce qui peut prêter à des hésitations en raison de la terminologie. D'une part, nous devons envisager: ((la compétence pour procéder à des actes d'administration et à des travaux de construction», d'autre part: ((le reste ».

Qu'est-ce que: (< le reste »? Ce n'est pas un terme juridique bien défini. Et le recours au texte allemand ne nous éclaire guère. Il emploie le terme: (<lm übrigen. »

Sans doute peut-on dire que la règle de l'unanimité s'applique à la détermination de la compétence pour procéder à des actes d'administration, et la règle de la majorité - qualifiée - à l'adminis- tration proprement dite, au mode d'administration, à son exercice, à l'utilisation des parties communes. Mais dans les faits, la distinc- tion peut devenir difficile. Prenons un exemple pratique, qui s'est d'ailleurs déjà présenté.

L'article 712b interdit de placer le bien-fonds dans les parties privées sujettes à un droit exclusif. En vertu de cet article, on ne pourrait donner au copropriétaire d'un rez-de-chaussée un droit exclusif sur le jardin qui s'étend devant ses fenêtres: ce jardin est une partie commune que l'on ne peut faire sortir de cette catégorie.

Pratiquement c'est regrettable, car le copropriétaire du rez- de-chaussée devra supporter devant chez lui et jusqu'à ses fenêtres la présence des autres copropriétaires et celle de leurs enfants. La rigidité de la loi est très mal commode. Non seulement le coproprié-

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LA PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE 33 disposition légale subsidiaire serait mal commode dans une pro- priété d'étage: c'est pourquoi l'acte constitutif établira en général une autre règle, par exemple délégation de ce pouvoir à l'adminis- trateur.

Ensuite viennent les actes d'administration plus importants.

Ils sont décidés à la double majorité des copropriétaires et des parts.

Il s'agit, par exemple, de la conclusion ou de la résiliation de baux, de la nomination d'un administrateur.

Pour les actes de construction qui dépassent les actes d'adminis- tration courante, une nouvelle gradation est établie.

Les constructions nécessaires sont décidées à la majorité absolue des copropriétaires. Mais si elles sont simplement utiles, c'est- à-dire si elles ont pour but l'augmentation de la valeur de la chose, l'amélioration de son rendement ou de son utilité, elles requièrent la majorité absolue des copropriétaires représentant les deux tiers des parts. Comme elles ne sont plus cc nécessaires», elles ne doivent pas imposer à un copropriétaire non consentant de trop lourdes charges. Dès lors, si elles ont pour conséquence de gêner durable- ment et notablement l'usage ou la jouissance de la chose ou d'en compromettre le rendement elles ne peuvent être exécutées sans son consentement. Et si la dépense qui en résultait était disproportion- née avec fa valeur de la part d'un copropriétaire non consentant, on ne saurait lui demander plus que sa part raisonnablement estimée.

Enfin s'il s'agit de dépenses dites somptuaires, c'est-à-dire destinéès à embellir la chose ou à en rendre l'usage plus aisé, l'unanimité est requise. Toutefois, la majorité absolue des copropriétaires repré- sentant les deux tiers des parts peut décider les travaux à condi- tion de ne pas entraver durablement la jouissance des opposants, de les indemniser de l'atteinte temporaire à leur droit et d'assumer entièrement leur part de frais. La loi a entendu ainsi protéger les copropriétaires minoritaires contre les décisions de la majorité.

Tout cela est très détaillé, mais un peu compliqué. Les auteurs de la loi se sont efforcés de prévoir toutes les éventualités pour leur fournir une solution. Mais la contre-partie, c'est que la loi est difficile à saisir par les profanes - pas pour les juristes, bien sûr - et qu'ils peuvent éprouver un sentiment d'insécurité. Nous avons vu qu'il fallait distinguer entre les règles posées par la convention

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ou par la loi; que certaines règles légales sont impératives et les autres seulement dispositives; que les unes sont générales, les autres spé- ciales: qu'il fallait encore distinguer entre les actes d'administra- tion indispensables, urgents, courants, plus importants, les travaux de construction nécessaires, utiles ou somptuaires.

A l'exposé des règles légales subsidiaires, on comprend l'utilité, sinon la nécessité, d'un acte qui établisse toutes les règles de compé- tence, d'administration et d'utilisation d'un immeuble en copro- priété. Les copropriétaires disposent alors d'un document unique qui définit leurs droits et leurs obligations. C'est une véritable charte de la copropriété d'un bâtiment déterminé. Cet acte est opposable aux tiers acquéreurs.

Voilà quel est l'objet des décisions prises dans le cadre d'une compétence qui relève, elle, de la loi de l'unanimité, et que l'on con- signera dans ce que l'article 647 appelle un règlement d'admini- stration et d'utilisation.

Ce terme, à notre avis, devrait être réservé à ce que l'article 712g appelle: « le reste », et qui impérativement (il n'est pas pos- sible de changer la règle de compétence, cette fois), est laissé à la décision de la double majorité des copropriétaires et de la valeur des parts. C'est en d'autres termes ce qui correspond au règlement de maison, règlement qui lui aussi peut être mentionné au Registre foncier.

La volonté de la communauté des copropriétaires a donc pour objet les parties communes et elle s'exerce dans des formes pré- cises. Elle ne peut pas prendre de décision qui affecterait les par- ties privées, pas même en cas de destruction et de reconstruction de l'immeuble. C'est pourquoi l'on a déjà ·pu dire: «Les immeubles placés sous le régime de la copropriété sont appelés à renaître sans cesse de leurs cendres sous la même forme, dans un perpétuel recommencement.» De même l'assemblée ne pourrait pas décider, par exemple, l'interdiction de diviser un appartement (à la condition bien entendu que chaque partie constitue un tout indépendant).

La définitîon et la délimitation des droits et pouvoirs de la com- nunauté des copropriétaires sont capitales. C'est le nœud même de la protection du copropriétaire au sein de la collectivité. Nous

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LA PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE 35 pouvons en saisir l'importance si nous comparons ce système à celui de la conception primitive de la propriété par étage, conçue comme une propriété complétée de servitudes.

L'assemblée des copropriétaires n'est pas permanente. Ses déci- sions, le règlement de copropriété, l'administration de l'immeuble sont mis en œuvre par un administrateur. Celui-ci n'est pas nécessairement un copropriétaire. Il sera fréquemment choisi parmi des professionnels. Nommé par l'assemblée en principe, il peut l'être à son défaut par le juge saisi de la requête d'un copro- priétaire ou d'un créancier gagiste ou d'un assureur. L'adminis- trateur peut être révoqué par l'assemblée ou par le juge, à la requête d'un copropriétaire.

La communauté des copropriétaires n'a pas la personnalité morale. Néanmoins, elle acquiert en son nom les contributions des copropriétaires et les disponibilités qui vont constituer un fonds de rénovation. Elle este en justice en son nom. L'administrateur représente la communauté, en ce qui concerne l'administration commune.

Les dépenses nécessitées par le fonctionnement de la copropriété sont à la charge des copropriétaires, qui contribuent dans la mesure où ils sont intéressés, c'est-à-dire proportionnellement à la valeur de leurs parts. Il est prévu notamment que la communauté doit conclure des assurances pour protéger la valeur de l'immeuble:

assurance responsabilité civile, assurance-incendie, assurance contre les autres dommages. Pour faire face aux constructions ou même simplement à l'entretien, la loi impose la constitution d'un fonds de rénovation alimenté par des contributions annuelles.

Encore faut-il que les rentrées de fonds ne soient pas trop com- pliquées. Pour parer à la négligence, à la mauvaise volonté et même à l'insolvabilité possible de certains copropriétaires, la loi a orga- nisé deux sortes de garanties: une hypothèque légale (régie par les mêmes règles que l'hypothèque légale des artisans et des entrepre- neurs) et un droit de rétention sur les meubles garnissant l'apparte- ment du copropriétaire. Ces sûretés couvrent les contributions des trois dernières années.

Voilà donc comment se présente cette communauté de copro- priétaires. Il reste à dire comme elle peut se former. Eh bien, la loi

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prévoit deux sources: la convention passée entre les copropne- taires d'un immeuble (celui-ci va passer de la copropriété de droit commun à la copropriété par étage) ou la déclaration de volonté unilatérale du propriétaire de l'immeuble ou du titulaire du droit de superficie. L'acte doit être passé en la forme authentique ou successorale et inscrit au registre foncier. C'est du jour de son ins- cription que la propriété par étage sera constituée.

L'acte doit indiquer la part que représente chaque fraction de la propriété. Cette répartition originaire peut être modifiée dans la suite - au cas où l'objet de la copropriété de l'un des copropriétaires s'est modifié par rapport aux parts des autres copropriétaires - mais avec l'accord des intéressés et de toute manière, avec la rati- cation de l'assemblée des copropriétaires.

L'étendue et l'exercice des droits collectifs sont ainsi très com- plètement définis. Le copropriétaire doit bien savoir qu'il ne doit pas considérer « son» appartement comme une villa familiale isolée des voisins. On va lui assurer une jouissance très étendue et très stable de cet appartement, mais il se trouve dans un groupement au sein duquel il dispose de cette jouissance. Il a des intérêts communs avec les autres membres du groupe. Il doit les exercer avec eux.

Bref, il doit avoir une part d'intérêt communautaire pour jouir de son droit individuel. Et il doit accepter cet esprit de communauté.

Ce qui est vraiment nouveau dans la loi, c'est qu'il a fallu créer une assemblée de copropriétaires à l'image des assemblées de sociétés ou plutôt: des associations. Mais une assemblée sociale a la jouissance et l'exercice de tous les droits afférents à l'objet social, alors que l'assemblée des copropriétaires n'a qu'une jouis- sance limitée: elle doit partager les droits avec les copropriétaires eux-mêmes, considérés individuellement. C'est ce qui a rendu difficile l'établissement de la loi. Nous allons examiner maintenant les droits du copropriétaire sur son «appartement>>.

* *

*

Le droit essentiel du copropriétaire, ce qui constitue le but de la copropriété par appartement, c'est la jouissance exclusive d'une

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LA PROPRIÉTÉ PAR ÉTAGE 37

partie de l'immeuble en copropriété. La loi dit expressément, à l'article 712a:

... le droit exclusif d'utiliser et d'aménager intérieitrement des parties déterminées d'un bâtiment.

C'est donc un droit d'usage (d'un usage au sens très large du terme) délimité matériellement. Et le texte précise aussitôt l'étendue des pouvoirs du copropriétaire sur la partie de l'immeuble qui lui a été attribuée:

Le copropriétaire a le pouvoir d'administrer, d'utiliser et d'aménager ses locaux dans la mesure où il ne restreint pas l'exercice du droit des autres copropriétaires, n'endommage pas les parties, ouvrages et installations com- muns du bâtiment, n'entrave pas leur utilisation ou n'en modifie pas l'aspect extérieur.

Pratiquement, le copropriétaire agira dans son appartement comme «chez lui n. Du moment qu'il ne portera pas atteinte aux droits des autres copropriétaires, il pourra aménager son apparte- ment comme il le voudra et l'utiliser à sa guise. Une obligation pèse pourtant sur lui: il doit entretenir son appartement de manière à ne pas porter atteinte à l'état ou à l'aspect du bâtiment.

Son droit est cessible entre vifs et transmissible à cause de mort.

La loi de 1963 a même écarté le droit de préemption légal existant en faveur des copropriétaires. Manifestement, les auteurs de la loi ont voulu rapprocher autant que possible la situation du proprié- taire de celle d'un propriétaire ordinaire.

Qui peut le plus peut le moins. Le copropriétaire d'étage peut constituer des droits partiels sur sa part, notamment l'hypothéquer indépendamment de l'ensemble de l'immeuble. Il peut louer, cons- tituer un usufruit, un droit d'habitation.

Maître chez lui, protégé contre l'intrusion d'indésirables, le copropriétaire a encore un droit de surveillance ou d'intervention dans l'administration de la chose commune, non pas seulement comme membre de l'assemblée des copropriétaires, mais indivi- duellement, il peut demander au juge la désignation d'un adminis- trateur s'il n'y en a pas ou sa révocation s'il y en a un qui ne remplit pas correctement ses fonctions.

Enfin, il a le droit de sauvegarder le bâtiment et de faire pren- dre les décisions nécessaires. Ce droit est celui qui lui est conféré

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envisagées. Le texte est assez difficile à comprendre. Pourtant, il faudra sans doute que la pratique l'interprète ou même le complète.

C'est pourquoi nous pouvons suivre avec un vif intérêt l'évolution dans l'application de la loi. Il est vraisemblable que la question de la propriété par étage n'est pas définitivement épuisée, ce qui est le meilleur signe qu'il s'agit d'une institution bien vivante et bien actuelle.

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Questions posées par la réforme de la juridiction administrative à Genève

par Pierre CORNIOLEY

Chargé de cours à la Faculté de droit

1. INTRODUCTION

La réforme de la juridiction administrative à Genève est un sujet dont on connaît l'actualité. Chacun en parle et l'appelle de ses vœux. Mais ceux qui la réclament n'en saisissent pas toujours claire- ment les conditions et n'en mesurent pas toutes les difficultés.

Il nous a donc paru intéressant de donner ici un aperçu des problè- mes que cette réforme soulève et de présenter quelques-unes des réflexions que nous avons été amené à faire en participant aux travaux de mise au point d'un projet par le Département de justice et police.

Notre intention n'est pas de faire œuvre de doctrine, et encore moins de proposer des solutions définitives, mais d'aider les juristes à prendre conscience de l'importance et de la complexité du pro- blème, dues en grande partie à l'incohérence du système actuel.

Comme on le sait, une réforme est en cours sur le plan fédéral:

deux projets de lois ont été présentés par le Conseil fédéral à l' As- semblée fédérale, le 24 septembre 1965, avec les messages d'usage;

l'un concerne l'extension de la juridiction administrative fédérale, c'est-à-dire, avant tout, l'extension des compétences du Tribunal fédéral en matière administrative par une modification de la loi fédérale d'organisation judiciaire 1, l'autre institue une procédure administrative applicable au contentieux qui ne relève ni du Tri- bunal fédéral, ni du Tribunal fédéral des assurances, ainsi qu'au domaine non contentieux 2

1 Feitille fédérale (citée: FF), 1965, II, pp. 1301 ss.

2 FF, 1965, II, pp. 1383 ss.

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de faire revoir la décision par l'autorité administrative supérieure,.

c'est-à-dire par le Conseil d'Etat, dans le délai de 30 jours dès la communication de la décision attaquée. Dans ses effets le système est donc analogue à celui que prévoit l'article 103, alinéa 2 de la constitution fédérale, et l'existence de ce droit coutumier a été plu- sieurs fois reconnue par la jurisprudence - malheureusement non publiée - du Conseil d'Etat 8 .

b) Dans de très nombreux cas, cependant, le recours de droit coutumier au Conseil d'Etat, autorité supérieure, se trouve consacré par une disposition légale ou réglementaire expresse. A notre sens, de telles dispositions ne font que codifier le droit coutumier et con- firmer le principe du contrôle général du Conseil d'Etat sur l'admi- nistration. On en compte plus de 80 dans la législation genevoise, dont la plupart se bornent à mentionner la possibilité du recours et à en fixer le délai (30 jours en général).

L'abondance de ces dispositions montre bien que le système dit 'de l'administrateur-juge' reste le système de base de notre justice administrative et que l'existence de juridictions administratives indépendantes n'est encore qu'une exception, conçue comme une limitation des pouvoirs de contrôle général du Conseil d'Etat.

c) Le législateur genevois, en effet, a parfois jugé bon de sous- traire certains domaines du contentieux administratif à la connais- sance du Conseil d'Etat pour les confier à des juridictions administra- tives plus ou moins indépendantes de l'administration, qu'il s'agisse d'autorités judiciaires fonctionnant comme juridictions administra- tives - par exemple la Cour de justice en matière de contributions publiques- ou de commissions spéciales, composées souvent, d'après les tâches qui leur sont dévolues, soit d'experts, soit de représentants des milieux intéressés.

Le trait caractéristique de ces juridictions spéciales est la limi- tation étroite de leurs compétences à un domaine déterminé, défini

8 Il serait intéressant de déterminer la véritable nature - constitutionnelle ou légale - et le véritable contenu de cette règle de droit coutumier car, dans la mesure où elle devrait être considérée comme analogue à la disposition de l'art. 103, al. 2 const. féd., elle ne permettrait pas à une loi cantonale de supprimer le recours au Conseil d'Etat et de donner à un département la compétence de trancher en dernier ressort.

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RÉFORME DE LA JURIDICTION A GENÈVE 45

en général par le champ d'application de la loi qui les a créées 9 ou, au maximum, par celui de deux ou trois lois apparentées 10•

D'autre part, du fait de leur origine, les commissions qui consti- tuent ces juridictions spéciales sont composées et organisées de façon très diverse, qui fait plus d'honneur à l'imagination du législa- teur qu'à son esprit de système. Tantôt elles comprennent deux

degrés de juridiction 11, tantôt un seul 12 ; tantôt elles statuent en premier ressort, sous réserve d'un recours au Conseil d'Etat ou à la

·Cour de justice 13, tantôt en dernier ressort, au premier ou au second degré 14 ; tantôt leurs membres sont nommés par le Conseil d'Etat, tantôt par le Grand Conseil, ou encore par ces deux corps, chacun pour moitié, et souvent sur présentation des milieux intéressés.

Elles comprennent 3, 5, 7, 9, voire 12 membres, avec ou sans sup- pléants ; leur présidence est parfois réservée à un magistrat de

9 C'est le cas, p. ex., de la commission de recours en matière d'impôt pour la défense nationale (cf. Rec,Syst. D.3. 16, art. 5), de la commission de recours en matière de sanctions prises contre les fonctionnaires de police (cf. Rec. Syst. F.I.l, art. 28) - différente de la commission de recours en matière de sanctions prises contre les fonc- tionnaires de la prison (cf. Rec. Syst. F.r.18, art. 12) -, de la commission de recours en matière de taxe militaire (cf. Rec. Syst. G.r.1, art. 2), etc.

lO Ainsi, la commission cantonale de recours en matière d'impôts, instituée par la loi sur les contributions publiques (Rec. Syst. D,3.1, art. 351 ss.), est compé- tente, en dehors du cadre de cette loi, en matière de droits de succession (loi sur les droits de succession, Rec. Syst. D.3.5,5, art. 67 et 68), de réserves de crise (loi sur la constitution deréserves de crise par l'économie privée, Rec. Syst. D.3.8, art. 8) et en matière d'impôt anticipé (règlement d'application de diverses dispositions fiscales fédérales, Rec. Syst. D.3.16, art. 15). Voir aussi les compétences de la com- mission de recours en matière de constructions (Rec. Syst. L.5.1, art, 212 ss. ; L.r.ro, art. 19 ; L.r.rr, art, 7 ; L.5,ro, art, 3).

11 C'est le cas, notamment, en matière de limitation du droit de résiliation des baux, le règlement cantonal instituant une commission de première instance et une commission de recours (Rec. Syst. I.5.15, art. 4 ss.), en matière de refus ou de retrait de caltes de chômeurs et d'occupation d'employés en chômage, les deux degrés étant représentés par une sous-commission de la commission de surveillance du marché de l'emploi et par la commission plénière(!) (Rec. Syst. J+1, art. 3 ss.

et 13 ; J+11, art, 17; J+12, art, 13) et en matière d'améliorations foncières (Rec. Syst. lVLr.1, art. 16, 19 ss. et 26),

12 Cf, commissions de recours en matière de sanctions prises contre les fonc- tionnaires de police (Rec, Syst. F.r.1, art, 28 ; F.r.4, art. l ss.) et contre ceux de la prison (Rec. Syst. F.r.18, art. 12) ; commission de recours en matière d'allocation~

familiales (Rec. Syst. J.7.1, art. 23 ss.), etc.

13 Cf. commissions de recours en matière de contributions publiques (Rec, Syst.

D.3,1, art. 359), de constructions (Rec. Syst. L.5.1, art. 220), d'assurance-chômage (Rec. Syst. J+5, art. rr).

14 Cf. exemples cités supra, notes II et 12.

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l'ordre judiciaire, ou à un juriste, quand ce n'est pas au chef du département intéressé 16 ; et quelquefois la commission comprend un fonctionnaire du département intéressé ~6 ou bénéficie de son assistance, en qualité de secrétaire, avec voix consultative 17 •

C'est dire non seulement qu'il serait vain de chercher les règles qui ont présidé à la création de ces tribunaux spéciaux, mais aussi que l'indépendance de ces derniers n'est pas la préoccupation ma- jeure de notre législateur, plus attiré semble-t-il par un système proche de l'arbitrage par des prud'hommes, selon un mode pari- taire 18, que par l'institution de :véritables juridictions indépen- dantes. Pourtant, dans cette floraison même de commissions de tout genre, une tendance se manifeste, que l'on retrouve sur le plan fédéral 19 : celle d'abandonner le système de l'administrateur-juge, depuis longtemps dépassé, pour donner au justiciable une impression d'impartialité et d'indépendance. Cette tendance est heureuse ; il est pourtant regrettable que le législateur ne soit pas allé jusqu'au bout de sa pensée et qu'il se soit contenté d'apparences, démenties souvent par le mode d'élection des membres des commissions, par la composition de celles-ci ou par leur méthode de travail. Siégeant sporadiquement, et n'étant pas toujours composées de juristes en nombre suffisant, les commissions de recours - M. ZwAHLEN l'a fort bien relevé 20 - dépendent souvent dans une large mesure de la pré- paration des dossiers par l'administration, représentée parfois jusque dans leur sein par un fonctionnaire rompu aux problèmes qui se posent et exerçant de ce fait une influence prépondérante.

La tendance n'en est pas moins nette puisque notre droit can- tonal compte 24 commissions de recours, au premier ou au second degré, contre trois cas de recours administratifs à la Cour de justice.

15 Cf. loi sur le service de l'emploi (Rec. Syst. J+1), art. 3, al. 4 et art. 4, al. 1.

16 Cf. loi sui: l'assurance-chômage (Rec. Syst. J+s). art. 17.

17 Cf. commission de recours en matière d'impôt de défense nationale (Rec. Syst.

D.3.16, art. 5).

lB C'est le cas not. en matière de législation sociale. Cf. loi sur le service de l'em- ploi (Rec. Syst. J.4.1), art. 4 ; loi sur l'assurance-chômage (Rec. Syst. J.4.5). art. 17 ; loi sur les allocations familiales (Rec. Syst. J.7.1), art. 23.

19 Cf. ZWAHLEN, op. cit., pp. 128a SS.

20 ZWAHLEN, op. cit., p. 135a.

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