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Article pp.207-208 du Vol.4 n°4 (2014)

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ÉDITORIAL /EDITORIAL

Recommandations pour le traitement des infections graves aux urgences : un aveu de faiblesse

Recommendation to Diagnose and Treat Severe Infections at the ED: Weaknesses that Threat Daily Practices

Y.-E. Claessens · J. Levraut

© SFMU et Springer-Verlag France 2014

La littérature internationale et les avis d’experts constituent le fondement des recommandations pour la pratique au lit du malade. L’utilité de ces textes est majeure tant pour les méde- cins que pour les patients. Ils permettent aux praticiens une lecture synthétique des connaissances actualisées et préconi- sent des procédures qui harmonisent les pratiques pour de meilleurs soins. Ce numéro desAnnales françaises de méde- cine d’urgencepropose une mise au point sur le traitement actuel des infections graves à partir de ces principes [1].

S’il est important de disposer de recommandations et de les appliquer, une seconde lecture est le plus souvent utile pour en connaître les limites. Pour illustrer les interrogations que peuvent susciter les conférences de consensus, il est pos- sible de s’arrêter sur les objectifs hémodynamiques proposés dans le traitement de l’infection grave. Ainsi, l’obtention d’une pression artérielle moyenne (PAM) de 65 mmHg ou plus est l’un des objectifs que le clinicien doit s’efforcer d’atteindre. Une PAM entre 65 et 70 mmHg a même été uti- lisée (de façon non exclusive) comme critère d’inclusion des patients en sepsis sévère dans plusieurs études cliniques sur le sujet, dont l’une récente testant des colloïdes pour le sou- tien hémodynamique [2]. Sur le plan physiologique, la PAM est considérée comme l’un des paramètres clés de perfusion des organes. La PAM dépend du débit cardiaque, des résis- tances vasculaires périphériques, également des pressions veineuses pour une moindre part. La mesure de la PAM est possible grâce aux dispositifs de recueil invasifs, et prend en compte les variations de pressions au cours des cycles hémo- dynamiques. En l’absence de mesure endovasculaire, un calcul selon la formule de Lian ([PAS + PADx2]/3) permet

d’approcher la valeur réelle. Les appareils non invasifs utili- sent habituellement cette formule pour produire la PAM. Ce calcul devient cependant imprécis dans les fréquences cardia- ques extrêmes, le ratio systole/diastole étant alors différent de 1/2. La plupart des moniteurs, invasifs et non invasifs, permet ainsi de disposer de l’information avec les limites de préci- sions que nous venons d’exposer pour les patients instables et, en l’espèce, notamment ceux qui seraient tachycardes.

Cependant, il faut s’interroger sur la signification de la PAM comme paramètre de routine pour les médecins et les soignants. Bien souvent, ces derniers ne tracent pas cette variable dans le cahier de recueil informatisé dont disposent nos structures. La simple raison qu’elle n’y est pas souvent intégrée questionne en soi. Le suivi de cette variable est donc souvent peu opérationnel. Tenter une évaluation des prati- ques professionnelles en recueillant a posteriori la PAM s’avère bien souvent hasardeux. De plus, la perception que les acteurs de santé ont de l’objectif tensionnel varie et la

« tolérance » de pressions plus hautes ou plus basses que les objectifs est fréquente, souvent guidée par la clinique [3]. Quelques années auparavant, plusieurs équipes avaient testé le concept de « supranormalisation », augmentant le débit cardiaque à l’aide de dobutamine [4]. L’objet était de compenser la dette en oxygène subie par les organes lors d’infection grave en majorant la délivrance. Les résultats négatifs, voire délétères de certains des essais, ont éteint cette ambition. La potentielle toxicité de l’excès des catécholami- nes, vérifiée depuis [5], avait alors été suggérée. Les récentes études s’intéressant aux vasopresseurs dans l’infection sévère ont tracé la PAM. La plus célèbre, publiée par l’équipe de Détroit, USA, est une étude monocentrique [6] dont est issue la plupart des recommandations pour l’urgentiste français, ainsi que le décrit l’article publié dans le présent volume [1]. Parmi elles, figure bien évidemment l’objectif de PAM de 65 mmHg. Dans cette étude, les patients avaient à l’évi- dence un authentique choc septique, la mortalité intrahospi- talière du groupe contrôle étant de 46,5 %. La PAM à l’inclusion était respectivement de 76 et 74 mmHg dans le

Y.-E. Claessens (*)

Département de médecine durgence,

centre hospitalier Princesse Grace, Principauté de Monaco e-mail : yann-erick.claessens@chpg.mc

J. Levraut

Département de médecine durgence, hôpital Saint-Roch, Nice ; Faculté de médecine, université Sophia-Antipolis

Ann. Fr. Med. Urgence (2014) 4:207-208 DOI 10.1007/s13341-014-0461-z

Cet article des Editions Lavoisier est disponible en acces libre et gratuit sur archives-afmu.revuesonline.com

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groupe contrôle et le groupe bénéficiant du traitement guidé par des objectifs. L’objectif de PAM était donc obtenu chez la majorité des patients avant même la première action théra- peutique. L’analyse des essais randomisés des dernières années traitant du soutien hémodynamique lors des infections graves renforce le constat. La PAM est le plus souvent au-delà de l’objectif chez les patients les plus sévères (Tableau 1). Ces études ne permettent pas de dégager de dif- férence dans le groupe testant l’intervention thérapeutique dans lequel il est de surcroît observé un excès d’événements secondaires graves, quelquefois un excès de mortalité [7].

À nouveau, il est rappelé que les valeurs de la PAM sont toujours dans les objectifs, voire supérieures, à l’inclusion dans les essais.

Quoiqu’il en soit, un objectif de pression de perfusion dans l’intervalle physiologique semble du domaine du bon sens médical. Une enquête européenne retrouve ce seuil comme valeur intuitivement acceptable pour les praticiens [3].

Nous venons d’illustrer que l’objectif de PAM >

65 mmHg dans le choc septique répond à un consensus qu’interrogent les observations relevées dans la littérature traitant le sujet. Comme c’est le cas de la PA systolique, l’objectif est certainement à adapter selon les comorbidités, fréquentes dans cette situation [8], et de l’état clinique du patient [9]. La publication récente de l’étude ProCESS dans leNew England Journal of Medicine appuie ce constat en suggérant que les soins non protocolisés permettent d’obte- nir les mêmes résultats en termes de mortalité que des pro- cédures formalisées ou des soins invasifs [10].

Notre confiance dans la PAM comme objectif hémodyna- mique, paramètre commode et robuste en première lecture, est peut-être le reflet de notre connaissance encore trop par- cellaire des mécanismes qui régissent le devenir du patient

souffrant d’infection grave. Ce signal nous rappelle que cette maladie requière toujours notre attention et qu’il nous faut inventer aujourd’hui dès les urgences des stratégies qui feront les recommandations demain.

Références

1. Le Conte P, Montassier E, Potel G, Batard E (2014) Prise en charge des états septiques sévères chez ladulte aux urgences.

Ann Fr Med Urg 4:242-8

2. Brunkhorst FM, Engel C, Bloos F, et al (2008) Intensive insulin therapy and pentastarch resuscitation in severe sepsis. N Engl J Med 358:12539

3. Takalaa J (2010) Should we target blood pressure in sepsis? Crit Care Med 38:S6139

4. Hayes MA, Timmins AC, Yau EH, et al (1994) Elevation of sys- temic oxygen delivery in the treatment of critically ill patients.

N Engl J Med 330:1717–22

5. Patel GP, Grahe JS, Sperry M, et al (2010) Efficacy and safety of dopamine versus norepinephrine in the management of septic shock. Shock 33:37580

6. Rivers E, Nguyen B, Havstad S, et al (2001) Early Goal-Directed Therapy Collaborative Group. Early goal-directed therapy in the treatment of severe sepsis and septic shock. N Engl J Med 345:1368–77

7. Asfar P, Claessens YE, Duranteau J, et al (2014) Residual rates of mortality in patients with severe sepsis: a fatality or a new chal- lenge? Ann Intens Care 3:27

8. Claessens YE, Aegerter P, Boubaker H, et al (2013) Are clinical trials dealing with severe infection fitting routine practices?

Insights from a large registry. Crit Care 17:R89

9. Levy MM, Artigas A, Phillips GS, et al (2012) Outcomes of the Surviving Sepsis Campaign in intensive care units in the USA and Europe: a prospective cohort study. Lancet Infect Dis 12:91924 10. The ProCESS investigators (2014) A randomized trial of protocol-

based care for early septic shock. N Engl J Med 370:168393 Tableau 1 Caractéristiques des études ayant pour objet la diminution de la mortalité des patients présentant un sepsis sévère ou un choc septique (2001-2012).

Premier auteur, journal, année

Intervention N° de patients PAM (mmHg) à linclusion Contrôle Intervention Tuchschmidt,

Chest, 1992

Oxygénation tissulaire 51 74 (3) 74 (3)

Gattinoni,

N Engl J Med, 1995

Oxygénation tissulaire 762 85,6 (18,1) 85 (19,1) 84,4 (19,7) Rivers,

N Engl J Med, 2001

Traitement guidé par des objectifs

263 76 (24) 74 (27)

Annane, Lancet, 2007

Adrénaline vs

noradrénaline dobutamine

330 68 (19) 68 (19)

Russel,

N Engl J Med, 2008

Arginine-vasopressine 778 73 (10) 72 (9)

Morelli,

Brit J Anaesth, 2008

Terlipressin 59 73 (4) 74 (2)

72 (3)

208 Ann. Fr. Med. Urgence (2014) 4:207-208

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