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du Grand-Duché de Luxembourg inscrit le 20 juillet e chambre Audience publique du 22 février 2021

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Tribunal administratif N° 44673 du rôle

du Grand-Duché de Luxembourg inscrit le 20 juillet 2020 2e chambre

Audience publique du 22 février 2021 Recours formé par Madame ..., …,

contre une décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile en matière de protection internationale (art. 35 (1), L. 18.12.2015)

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 44673 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif en date du 20 juillet 2020 par Maître Cora Maglo, avocat à la Cour, assistée de Maître Fatim-Zohra Ziani, avocat, toutes deux inscrites au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Madame ..., née le … à … (Venezuela), de nationalité vénézuélienne, demeurant actuellement à L-…, tendant à la réformation de la décision du ministre de l’Immigration et de l’Asile du 17 juin 2020 portant refus de faire droit à sa demande en obtention d’une protection internationale et de l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif en date du 12 octobre 2020 ;

Vu l’ordonnance du vice-président présidant la deuxième chambre du tribunal administratif du 28 octobre 2020 refusant la production d’un mémoire supplémentaire ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Vu la circulaire du président du tribunal administratif du 22 mai 2020 portant notamment sur la présence physique des représentants des parties au cours des plaidoiries relatives à des affaires régies par des procédures écrites ;

Vu la communication de Maître Cora Maglo du 22 janvier 2021 informant le tribunal qu’elle ne se présenterait pas à l’audience des plaidoiries ;

Vu la communication de Madame le délégué du gouvernement du 25 janvier 2021 suivant laquelle elle marque son accord à ce que l’affaire soit prise en délibéré sans sa présence ;

Le juge rapporteur entendu en son rapport à l’audience publique du 25 janvier 2021.

Le 2 septembre 2019, Madame ... introduisit auprès du service compétent du ministère des Affaires étrangères et européennes, direction de l’Immigration, ci-après désigné par « le ministère », une demande de protection internationale au sens de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire, ci-après dénommée « la loi du 18 décembre 2015 ».

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Les déclarations de Madame ... sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg furent actées par un agent de la police grand-ducale, service criminalité organisée - police des étrangers, dans un rapport du même jour.

En date des 21 et 28 novembre 2019, elle fut entendue par un agent du ministère sur sa situation et sur les motifs se trouvant à la base de sa demande de protection internationale.

Par décision du 17 juin 2020, notifiée à l’intéressée par courrier recommandé expédié le lendemain, le ministre de l’Immigration et de l’Asile, ci-après dénommé « le ministre », informa Madame ... que sa demande de protection internationale avait été rejetée comme étant non fondée tout en lui enjoignant de quitter le territoire dans un délai de trente jours. Cette décision est libellée comme suit :

« (…) J’ai l’honneur de me référer à votre demande en obtention d’une protection internationale que vous avez introduite auprès du service compétent du Ministère des Affaires étrangères et européennes en date du 2 septembre 2019 sur base de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire (ci-après dénommée « la Loi de 2015 »).

1. Quant à vos déclarations

En mains le rapport du Service de Police Judiciaire du 2 septembre 2019, le rapport d'entretien de l'agent du Ministère des Affaires étrangères et européennes des 21 et 28 novembre 2019 sur les motifs sous-tendant votre demande de protection internationale ainsi que les documents versés à l'appui de votre demande.

Il en ressort que vous seriez originaire de ... où vous auriez vécu avec vos parents et votre fratrie et étudié à l'université jusqu'en 2015. Après vos études, vous auriez travaillé quelque mois en tant qu'enseignante avant de démissionner en mars 2016, parce que vous n'auriez pas été bien payée et que vous auriez en même temps dû payer beaucoup d'argent pour utiliser les transports en commun.

Le 17 mars 2016, vous seriez partie vivre au … avant de brièvement rentrer au … à cause de l'état de santé de votre père. En janvier 2017, vous seriez repartie vivre au ... pendant une année. En 2018, vous seriez encore une fois retournée pendant vingt jours au Venezuela en passant par la Colombie avant de retourner au … le 8 mai 2018, où vous auriez vécu jusqu'à votre départ pour l'Europe. Vous expliquez que vous auriez vécu au ... et que vous y auriez travaillé au noir pendant ces trois années dans le but d'épargner l'argent nécessaire pour venir au Luxembourg. Ainsi, vous expliquez votre départ initial du Venezuela par le fait que vous auriez eu besoin de gagner de l'argent pour payer « les médicaments desquels mon père avait besoin ». Etant donné que vous n'auriez réussi à gagner assez d'argent au ..., vous auriez décidé de venir au Luxembourg. Vous précisez encore qu'au cours de vos deux brefs séjour au Venezuela, vous n'auriez rien fait de spécial et passé du temps avec votre famille. Vous ne faites pas état d'un quelconque incident. Vous seriez finalement venue au Luxembourg en compagnie de votre sœur alors que votre cousine y vivrait aussi, tout comme votre tante, qui se trouverait également en tant que demandeur de protection internationale au Luxembourg.

Vous ajoutez être à la recherche d'une protection internationale parce que vous auriez craint d'être tuée par le groupe « colectivos ». Ainsi, vous expliquez que vous auriez été étudiante à l'université lorsque ... est venu au pouvoir et qu'entre 2013 et 2015, vous auriez participé à beaucoup de manifestations, notamment suite à l'appel des partis d'opposition aux universitaires, qui auraient été dirigées contre ... ou qui auraient été organisées pour protester

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contre les problèmes du quotidien liés au manque d'aliments, aux pannes d'électricité et aux coupures d'eau. Vous dites que les étudiants auraient été régulièrement attaqués par les forces de l'ordre munies de bombes lacrymogènes et par des gens armés avec des pistolets à balles réelles. Plus tard, le groupe « colectivos » se serait immiscé dans les manifestations et aurait commencé à menacer les étudiants en leur expliquant qu'ils les connaîtraient et qu'ils les auraient déjà remarqués dans des manifestations. Vous auriez alors décidé de ne plus participer aux manifestations par peur d'y trouver la mort. Vous expliquez pourtant par la suite qu'en janvier 2016, vous auriez encore participé à des manifestations.

Le 12 février 2016, à l'occasion du « jour de la jeunesse », vous précisez d'abord que tout le monde serait sorti dans les rues mais qu'il ne serait pas agi d'une manifestation.

Néanmoins, un de vos collègues y aurait trouvé la mort devant vos yeux lorsqu'il aurait été touché par une bombe lacrymogène et que vous n'auriez pas pu l'amener à l'hôpital à temps.

Vous précisez que plusieurs personnes seraient mortes ce jour là et que « c'était le dernier jour où j'ai manifesté ».

Vous ajoutez que le groupe « colectivos » enregistrerait des images des manifestants et qu'ils se seraient déplacés vers vous et vers d'autres étudiants pour vous dire qu'ils sauraient où vous habitez et menacer de vous tuer si vous continuiez à participer à des manifestations.

Après ces menaces de mort et la mort de manifestants, beaucoup de jeunes auraient décidé de quitter le pays où ne resteraient que « vieilles personnes qui ne peuvent pas partir ».

Vous expliquez toutefois votre plaidoyer par le fait que vous n'auriez pas rencontré de problèmes personnels lors de votre participation auxdites manifestations et que même si vous n'aviez pas participé à celles-ci, vous auriez tout de même quitté le Venezuela « pour trouver une situation économique pour la famille. Pour aider mon père, car il est encore très jeune et je devais trouver une solution de moyens économiques pour l'aider ».

Vous ajoutez qu'au Venezuela, les hôpitaux ne seraient plus en mesure de donner des médicaments aux patients par manque de produits et qu'il faudrait désormais les acheter à prix élevé l'hôpital comme dans une pharmacie.

En cas d'un retour au Venezuela, votre père serait condamné à mourir alors qu'il n'y aurait pas de médicaments pour lui, tandis vous n'y pourriez même pas manger au vu de la situation générale d'un pays qui manquerait de tout. Cette situation aurait fait en sorte que les gens feraient désormais « n'importe quoi » pour manger et que votre sécurité n'y serait pas garantie si vous essayiez de sortir le soir.

Vous présentez un passeport vénézuélien et vous versez des documents que vous auriez enregistrés sur votre ordinateur mais que vous n'auriez jamais publiés pour éviter des

« problèmes ».

Il s'agit en l'occurrence de photos de vous en différentes poses à la plage, au sport, à la musique, en public, avec une copine ou de commentaires en espagnol publiés sur

« facebook ».

Il est à préciser que ces pièces n'ont à première vue aucune connotation politique ou connotation liée à une quelconque prise de position anti gouvernementale, de sorte qu'il n'est pas compréhensible en quoi la publication de ces textes et photos ait pu vous causer des

« problèmes ».

2. Quant à la motivation du refus de votre demande de protection internationale

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Suivant l'article 2 point h de la Loi de 2015, le terme de protection internationale désigne d'une part le statut de réfugié et d'autre part le statut conféré par la protection subsidiaire.

Quant au refus du statut de réfugié

Les conditions d'octroi du statut de réfugié sont définies par la Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés (ci-après dénommée « la Convention de Genève ») et par la Loi de 2015.

Aux termes de l'article 2 point f de la Loi de 2015, qui reprend l'article 1A paragraphe 2 de la Convention de Genève, pourra être qualifié de réfugié : « tout ressortissant d'un pays tiers ou apatride qui, parce qu'il craint avec raison d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n'entre pas dans le champ d'application de l'article 45 ».

L'octroi du statut de réfugié est soumis à la triple condition que les actes invoqués soient motivés par un des critères de fond définis à l'article 2 point f de la Loi de 2015, que ces actes soient d'une gravité suffisante au sens de l'article 42 paragraphe 1 de la prédite loi, et qu'ils émanent de personnes qualifiées comme acteurs aux termes de l'article 39 de la loi susmentionnée.

Madame, force est de constater que, comme vous le confirmez vous-même, vous avez quitté le Venezuela sur base de considérations matérielles et financières. En effet, vous expliquez que, vue la maladie de votre père, vous vous seriez sentie contrainte, en 2016, à quitter le Venezuela pour gagner de l'argent à l'étranger afin de pouvoir continuer à payer les médicaments dont il aurait besoin. Depuis la crise générale dans laquelle se trouverait votre pays, les médicaments ne seraient plus distribués dans les hôpitaux et les patients seraient contraints de les acheter à prix cher. Vous auriez par ailleurs démissionné de votre travail d'enseignante au Venezuela parce que vous n'auriez pas gagné assez d'argent et vous confirmez que vous auriez quitté le Venezuela, que vous ayez participé à des manifestations ou pas.

Il ressort encore de vos déclarations qu'après que vous ayez vu que vous ne gagneriez pas assez d'argent en travaillant au noir au ..., vous auriez décidé de venir au Luxembourg.

Soulevons également qu'il ressort de manière claire de votre fiche de motifs manuscrite le 21 novembre 2019, que vous auriez quitté le Venezuela à cause de la situation générale, parce que vous n'y auriez pas vu « d'avenir prometteur », que vous n'y auriez pas voulu

« perdre » votre jeunesse » et parce qu'il y aurait des grandes difficultés pour pouvoir manger et avoir une vie sûre.

Vous confirmez par ailleurs que votre prétendue participation à des manifestations entre 2013 et 2015 n'aurait rien changé à votre décision de quitter le pays en 2016.

Vous confirmez en outre qu'après votre départ du Venezuela, vous seriez encore à deux reprises volontairement rentrée au pays, et ceci en 2017 et en 2018, pour des périodes de plusieurs semaines au cours desquelles vous auriez passé du temps avec votre famille sans faire état du moindre incident concret ou problème dans lequel vous auriez été impliquée.

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Il ressort en outre de vos explications que ces voyages se seraient faits de manière officielle et il ne ressort à aucun moment de vos dires que vous auriez rencontré le moindre problème avec les autorités lors de vos multiples sorties et entrées dans le pays.

Enfin, vous confirmez à la fin de votre entretien que vous n'auriez jamais rencontré de problèmes personnels avec les autorités ou avec le groupe « colectivos ».

Il faut déduire de tous ces constats que des motifs matériels et financiers, voire de convenance personnelle, fondent votre demande de protection internationale. De tels motifs ne sauraient cependant pas justifier l'octroi du statut de réfugié alors qu'ils ne sont manifestement pas liés au champ d'application de la Convention de Genève et de la Loi de 2015 qui prévoient une protection à toute personne persécutée dans son pays d'origine à cause de sa race, de sa nationalité, de sa religion, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social.

Il paraît en effet établi que vous avez décidé de quitter le Venezuela en 2016, tout comme la grande majorité des Vénézuéliens le fait depuis des années, sur base de considérations liées à la crise économique et la situation sécuritaire générale, sans être personnellement persécutés ou visés par les autorités ou des groupes armés tels les

« colectivos ». Ces derniers constituent une menace pour chaque citoyen vénézuélien et rappelons dans ce contexte que des centaines de milliers de Vénézuéliens ont participé, comme vous, à des manifestations anti-gouvernementales au cours de ces dernières années, sans que ces personnes ne soient toutes personnellement persécutées par les autorités ou les

« colectivos ».

La crise économique et humanitaire dans laquelle se trouve le Venezuela depuis les années 2010, et accessoirement la détérioration de la situation sécuritaire générale, a effectivement mené à un exode massif et une augmentation simultanée des demandes de protection internationale introduites par vos concitoyens dans d'autres pays américains ou européens: « Over the past few years, almost one million Venezuelans have left their homes in response to the country's worsening economy and security. While food has become so scarce that the average Venezuelan has lost 11 kilograms in body weight, doctors are fleeing the country and hospitals experience electricity crises and scarcity in medicines. As a result of poor living conditions, some have emigrated to the US or Spain and others to South-American countries, primarily neighbouring Colombia ».

L'UNHCR a retenu en décembre 2018 que « As of December 2018, more than 3 million Venezuelans have left for other countries in the region and beyond. Reasons cited for leaving included lack of food, medicine or essential social services, as well as incidents of violence and insecurity. Venezuelans continue to leave at an average of 5,000 a day. Fluctuating oil prices and a drop in production, increased international pressure and sanctions and continued hyperinflation and disparity between the official and unofficial exchange rates will impact negatively on the economy, resulting in increased hardship and poorer living conditions in Venezuela. The deterioration of infrastructure, public services and security may impact UNHCR's operations in 2019 ». Un million de personnes ont par ailleurs quitté le Venezuela depuis novembre 2018.

Quand bien même il serait établi que vous auriez également quitté le Venezuela par crainte d'être tuée par le groupe « colectivos » pour avoir prétendument participé à des manifestations entre 2013 et 2015, et que votre crainte pourrait donc à priori être définie comme étant liée à un des cinq critères susmentionnés, il s'agirait de soulever que vos craintes sont à percevoir comme étant totalement hypothétiques.

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En effet, vous confirmez qu'il ne vous serait jamais rien arrivée personnellement au Venezuela, ni pendant lesdites manifestations, ni après, et vous auriez uniquement été témoin d'incidents ou entendu d'incidents qui se seraient produits lorsque les autorités ou le groupe

« colectivos » auraient agressé des manifestations d'étudiants.

A cela s'ajoute que vous ne seriez plus étudiante depuis longtemps et que cela ferait à peu près quatre ans que vous auriez quitté le Venezuela pour aller vivre à l'étranger. Vous ne seriez d'ailleurs pas non plus membre d'un parti politique et vous confirmez encore vous être vue remettre un nouveau passeport lors de votre deuxième retour au Venezuela en 2018, c'est- à-dire bien après vos prétendues participations à des manifestations et les craintes de persécution qui auraient suivi.

Les craintes que vous exprimez par rapport au groupe « colectivos », voire les autorités en général, ne sauraient donc manifestement pas être perçues comme étant des craintes fondées de persécution au sens de la Convention de Genève, mais doivent être définies comme traduisant un sentiment général d'insécurité qui ne saurait justifier l'octroi d'une protection internationale.

Vos prétendues craintes en rapport avec votre situation au Venezuela paraissent d'autant plus exagérées que vous faites état, comme susmentionné, de deux retours volontaires et officiels au pays en 2017 et 2018, pour aller visiter la famille pendant quelques semaines ; des retours qui se seraient déroulés sans le moindre soucis.

Concernant un retour au Venezuela, on peut encore noter qu'il ressort des informations en nos mains que « Le traitement réservé aux demandeurs d'asile déboutés qui retournent au pays dépend de la situation du demandeur: pourquoi il/elle a quitté le pays, quel était son rôle ou sa profession et quelle était la nature du conflit avec le gouvernement. Par exemple, un avocat ou un juge qui quitte le Venezuela parce qu'il se trouve « littéralement du mauvais côté du régime » pourrait être aux prises avec des difficultés à son retour, comme par exemple être surveillé. Si le demandeur d'asile débouté était inculpé pour un crime avant de quitter le Venezuela, il s'agirait du « scénario à problèmes » le plus évident. Dans le cas où une personne aurait travaillé pour le gouvernement, mais pas dans un domaine politiquement sensible, elle ne serait peut-être pas surveillée à son retour, mais elle ne pourrait peut-être pas trouver un emploi dans le même secteur ou pour le gouvernement. ».

Sur base de tout ce qui précède, il faut déduire que, vue votre situation personnelle au Venezuela précédant votre départ de 2016, vous ne risquez manifestement pas d'être victime d'actes qui tomberaient dans le champ d'application de la Convention de Genève en cas d'un retour au Venezuela.

En effet, au des constats précédents, il est établi que vous n'êtes pas à considérer comme un activiste politique au Venezuela et que vous n'y avez pas été persécutée de quelque façon que soit à cause de vos opinions politiques, respectivement à cause de votre prétendue opposition au gouvernement ou de votre prétendue participation à des manifestations.

Eu égard à tout ce qui précède, il échet de relever que vous n'apportez aucun élément de nature à établir qu'il existerait de sérieuses raisons de croire que vous auriez été persécutée, que vous auriez pu craindre d'être persécutée respectivement que vous risquez d'être persécutée en cas de retour dans votre pays d'origine, de sorte que le statut de réfugié ne vous est pas accordé.

Quant au refus du statut conféré par la protection subsidiaire

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Aux termes de l'article 2 point g de la Loi de 2015 « tout ressortissant d'un pays tiers ou tout apatride qui ne peut être considéré comme un réfugié, mais pour lequel il y a des motifs sérieux et avérés de croire que la personne concernée, si elle était renvoyée dans son pays d'origine ou, dans le cas d'un apatride, dans le pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, courrait un risque réel de subir les atteintes graves définies à l'article 48, l'article 50, paragraphes 1 et 2, n'étant pas applicable à cette personne, et cette personne ne pouvant pas ou, compte tenu de ce risque, n'étant pas disposée à se prévaloir de la protection de ce pays » pourra obtenir le statut conféré par la protection subsidiaire.

L'octroi de la protection subsidiaire est soumis à la double condition que les actes invoqués soient qualifiés d'atteintes graves au sens de l'article 48 de la Loi de 2015 et que les auteurs de ces actes puissent être qualifiés comme acteurs au sens de l'article 39 de cette même loi.

L'article 48 définit en tant qu'atteinte grave « la peine de mort ou l'exécution », « la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d'origine » et « des menaces graves et individuelles contre la vie ou la personne d'un civil en raison d'une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

Madame, au de tout ce qui précède, il ne saurait manifestement pas être conclu que vous risquiez « la peine de mort ou l'exécution » au Venezuela et vos craintes d'être tuée par le groupe « colectivos » doivent dans ce contexte être définies comme étant totalement hypothétiques.

Il en est de même concernant des quelconques « traitements ou sanctions inhumains ou dégradants » alors que de tels faits ne ressortent nullement de vos déclarations, ni de vos prétendues craintes, ni des recherches ministérielles.

En effet, rappelons que non seulement vous confirmez qu'il ne vous serait jamais rien arrivé, mais en plus, vous faites état de deux retours volontaires au Venezuela en 2017 et en 2018, qui se seraient faits sans un quelconque incident à mentionner, tous comme les semaines que vous auriez ensuite passées auprès de votre famille avant de repartir du pays de manière officielle.

Enfin, soulevons que bien que la situation humanitaires, économique et sécuritaire au Venezuela est évidemment critiquable, la situation dans laquelle se trouve le pays n'équivaut pas à celle d'un conflit armé interne.

Bien au contraire, il ressort des dernières informations en nos mains que suite à l'exode massif des années 2010 susmentionné, l'année 2020 se caractérise par un certain retour au calme au Venezuela et par un retour de plus en plus de Vénézuéliens au pays qui sont désormais autorisés à investir en dollars et à faire proliférer leurs entreprises privées: « After leading his country's economy over a cliff, President Nicolas Madura has brought it a certain measure of stability. By allowing dollars to flow freely and private enterprise to flourish in recent months, he seems to have breathed new life into his regime. He remains widely despised but emigration has begun to slow, people are returning and the government is enacting laws to tax dollar transactions and allow companies to issue debt in Foreign currencies ».

Eu égard à tout ce qui précède, il échet de relever que vous n'apportez aucun élément crédible de nature à établir qu'il existerait de sérieuses raisons de croire que vous encouriez, en cas de retour dans votre pays d'origine, un risque réel et avéré de subir des atteintes graves au sens de l'article 48 précité, de sorte que le statut conféré par la protection subsidiaire ne vous est pas accordé.

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Votre demande de protection internationale est dès lors refusée comme non fondée au sens des articles 26 et 34 de la loi du 18 décembre 2015 relative à la protection internationale et à la protection temporaire.

Votre séjour étant illégal, vous êtes dans l’obligation de quitter le territoire endéans un délai de 30 jours à compter du jour où la présente décision sera devenue définitive, à

destination du Venezuela, ou de tout autre pays dans lequel vous êtes autorisée à séjourner. (…) ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 20 juillet 2020, Madame ... a introduit un recours tendant à la réformation de la décision précitée du ministre du 17 juin 2020 portant refus de faire droit à sa demande de protection internationale, ainsi qu’un recours en réformation contre l’ordre de quitter le territoire contenu dans le même acte.

En application de l’article 35 (1) de la loi du 18 décembre 2015, qui prévoit l’ouverture d’un recours en réformation contre les décisions ministérielles de refus d’une demande de protection internationale et l’ordre de quitter le territoire qui s’ensuit, le tribunal administratif est compétent pour connaître du recours en réformation introduit par Madame ... contre la décision du ministre du 17 juin 2020 portant refus de sa demande de protection internationale et ordre de quitter le territoire.

A titre liminaire, dans son mémoire en réponse, le délégué du gouvernement conclut à l’irrecevabilité du recours, dans la mesure où la requête introductive d’instance aurait été signée par un avocat qui ne serait pas inscrit sur la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats. Il renvoie, à cet égard, à un jugement du tribunal administratif du 8 octobre 2019, portant le numéro 41563 du rôle, dans lequel il aurait été retenu qu’aux termes de l’article 1er de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, dénommée ci-après « la loi du 21 juin 1999 », tout recours, en matière contentieuse, introduit devant le tribunal administratif, doit être formé par une requête signée d’un avocat inscrit à la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats et que le respect de cette exigence relative au recours à un avocat à la Cour se matérialiserait par l’apposition manuscrite sur l’acte introductif d’instance de la signature de l’avocat à la Cour constitué. Or, le recours n’aurait pas été signé par Maître Maglo, avocate inscrite sur la liste I du Barreau de Luxembourg, mais par Maître Ziani, qui serait une avocate inscrite sur la liste II, information qui aurait été en outre confirmée par l’étude Cerno Law Firm dont elles feraient partie, lors d’un entretien téléphonique. L’étude d’avocats en question serait, en outre, composée uniquement de ces deux avocates précitées. Dès lors, le recours serait irrecevable pour ne pas avoir été signé par un avocat inscrit sur la liste I.

Le litismandataire de la demanderesse n’a pas pris position quant à cette question d’irrecevabilité.

Aux termes de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999, « Tout recours, en matière contentieuse, introduit devant le tribunal administratif, dénommé ci-après « tribunal », est formé par requête signée d’un avocat inscrit à la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats. (…) ».

Selon une jurisprudence constante, la formalité de la signature de la requête introductive d’instance par un avocat inscrit à la liste I des tableaux dressés par les conseils des Ordres des avocats est une condition substantielle de recevabilité de la procédure contentieuse par laquelle le mandataire des parties en cause manifeste, par rapport à la juridiction saisie, son mandat

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ainsi que l’élection de domicile accordée à ses mandants. En l’absence d’une telle signature, la requête introductive d’instance est irrecevable.1

En l’espèce, force est de constater que la requête introductive d’instance porte in fine la mention dactylographiée « Profond respect Cora MAGLO ». En amont et en aval de l’indication « Cora MAGLO » ont été ajoutées de manière manuscrite les indications « p. » et

« emp. » signifiant respectivement « pour » et « empêché », lesquelles indications sont suivies d’une signature illisible. Au vu de ces indications le tribunal est amené à constater que la requête introductive d’instance n’a pas été signée par Maître Maglo elle-même mais par une autre personne en son nom, sans que l’identité ni la qualité de cette dernière ne soient précisées.

A cet égard, le tribunal est amené à relever en premier lieu que l’information du délégué du gouvernement selon laquelle le recours a été signé par Maître Ziani n’a pas été contestée par le litismandataire de la demanderesse. Si ce dernier s’est certes vu refuser la possibilité de déposer un mémoire supplémentaire, il n’a toutefois pas fait usage de la possibilité de prendre oralement position par rapport auxdites affirmations du délégué du gouvernement à l’audience publique des plaidoiries. Bien au contraire, il a même informé le tribunal par courrier électronique du 22 janvier 2021 qu’il ne se présenterait pas à l’audience et qu’il n’avait « rien à rajouter ».

Il y a, partant, lieu de conclure que l’acte a bien été signé par Maître Ziani. Etant donné qu’elle est inscrite sur la liste II du tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, elle n’a pu valablement signer le recours et l’introduire devant le tribunal administratif.

En effet, par la signature de l’acte introductif d’instance, un avocat de la liste I du tableau de l’ordre des avocats, seul habilité à signer un tel acte au vu de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999, manifeste par rapport à la juridiction saisie être le mandataire des parties en cause et accorde élection de domicile à ses mandants en son étude, de sorte que l’apposition de cette signature est une condition substantielle de recevabilité de la procédure contentieuse applicable2, la signature par un avocat de la liste II équivalant ainsi à l’absence de signature valide.

Il suit de ces considérations que la requête introductive d’instance viole les prescriptions de l’article 1er de la loi du 21 juin 1999, de sorte que le recours est à déclarer irrecevable.

Par ces motifs,

le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ; déclare irrecevable le recours en réformation introduit contre la décision ministérielle du 17 juin 2020 portant rejet d’un statut de protection internationale dans le chef de Madame ... et contre l’ordre de quitter le territoire à son encontre ;

donne acte à la demanderesse de ce qu’elle déclare avoir demandé le bénéfice de l’assistance judiciaire ;

1 Trib. adm., 10 février 1999, n° 10933 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure Contentieuse, n° 490 et autres références y citées.

2 Trib. adm., 14 juillet 2004, n° 17658 du rôle, Pas. adm. 2020, V° Procédure Contentieuse, n° 495 et autres références y citées.

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10 condamne la demanderesse aux frais et dépens.

Ainsi jugé par :

Françoise Eberhard, vice-président, Daniel Weber, premier juge,

Michèle Stoffel, premier juge,

et lu à l’audience publique du 22 février 2021 par le vice-président en présence du greffier Lejila Adrovic.

s.Lejila Adrovic s.Françoise Eberhard

Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 22 février 2021 Le greffier du tribunal administratif

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