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Limitations des techniques de diagnostic classiques

3.1 Zones périphériques des colonnes d’arcs

Depuis quelques années, les applications relatives aux arcs électriques ne sont plus limi-tées à la soudure, aux disjoncteurs et à l’éclairage. On développe de plus en plus de procédés chimiques basés sur les décharges d’arcs. Dans le contexte actuel d’augmentation du coût de l’énergie, des travaux sur la valorisation de la biomasse et d’hydrocarbures lourds par décharges d’arcs fleurissent. Malheureusement, les méthodes de diagnostic que nous avons présenté pré-cédemment ne permettent pas une analyse efficace de l’arc et de son environnement : seule une petite partie, la plus chaude, peut être étudiée.

Afin de bien comprendre la problématique de cette thèse, considérons une décharge d’arc typique établie entre deux électrodes en pointe. L’arc et son environnement peuvent gros-sièrement être découpés en 3 zones (fig. 3.1). La première zone est le milieu ambiant à la température de l’ordre de 300 K. Son analyse ainsi que des mesures de températures peuvent être aisément menées. La deuxième zone est le cœur "chaud" de la décharge, sa température est comprise entre 8000 et 20000 K. De fait, les méthodes de diagnostic présentées précédemment sont applicables pour mesurer sa composition, sa température.

Le domaine qui nous intéresse se situe entre le cœur de la décharge et le milieu ambiant : c’est la zone périphérique de l’arc. Sa température moyenne est de l’ordre de 4000 K, on comprend donc l’intérêt de cette zone pour la plasma-chimie puisque c’est entre 300 et 8000 K qu’a lieu la majeure partie des réactions chimiques.

Essayons de quantifier son importance en considérant que le cœur de la décharge est un cylindre de rayon r0 à une température moyenne de T0=10000 K. On montre expérimenta-lement que le rayon de la zone périphérique peut être jusqu’à 3-5 fois plus important que le

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12000 K 8000 K 300 K

Température

R0

2R0

N0 9 N0

Coeur de la décharge

Zone périphérique

Figure 3.1 – Réprésentation schématique d’une décharge électrique. Le cœur de la colonne est largement moins étendu que la zone périphérique. Du fait de la différence de température moyenne entre les deux zones, on constate que la zone périphérique contient une quantité de particules supérieure de un à deux ordre de grandeur à celle du cœur de la colonne.

rayon du cœur de la colonne [25, 26]. Soyons pessimiste et choisissons un rayon de la zone périphérique de2r0. Comme spécifié précédemment, la température moyenne de cette zone est de l’ordre deT1=4000 K. Comptons le nombre de particules présentes dans chaque domaine ; dans le cœur de la décharge, on aura, en raisonnant grossièrement :

N0 =πr20hn0. (3.1)

Avec h la hauteur de la colonne et n0 la densité de particules moyenne dans la partie chaude. Pour la zone périphérique, on aura :

N1 =π3r20hn1. (3.2)

On peut exprimer les densités de particules moyennes en fonction des températures moyennes grâce à la loi des gaz parfaits :n=P/(kT). Si l’on compare le nombre de particules dans les deux zones, on aura :

N1

N0 = 3T0

T1 = 9. (3.3)

La zone périphérique de l’arc contient, dans le pire des cas, un nombre de particule su-périeur de un ordre de grandeur à celui du centre de la décharge. Ce fait est de première importance car l’ensemble des travaux considérant un volume actif égal au volume du cœur de la décharge sont erronés. Cela pourrait expliquer la sous-estimation de certains rendements de réaction chimique obtenus à l’aide de simulations.

Discutons maintenant du diagnostic de ces zones périphériques. La température maximale est de l’ordre de 8000 K et la température minimale de l’ordre de la température ambiante.

Dans la plupart des cas, ces zones présentent de forts gradients de température et de densité ce qui rend l’hypothèse de l’ETL caduque. En outre, les raies atomiques et ioniques sont

3.1. Zones périphériques des colonnes d’arcs 41 difficilement utilisables car peu intenses. Finalement, la densité électronique est peu importante dans cette zone ; pour un plasma d’argon par exemple, le taux d’ionisation à 8000 K est de 10−3 tandis qu’il n’est que de10−5 à 6000 K (fig.3.2), le fond continu ainsi que l’élargissement Stark sont donc difficilement perceptibles.

n n nrD1o

3-2 3-3) 3-34 3-)0

nro

)--- 0--- 2--- 4--- 3-0

Figure3.2 – Densité électronique en fonction de la température dans un plasma d’argon à pression atmo-sphérique et à l’ETL.

L’ensemble des méthodes "classiques" basées sur la spectroscopie d’émission atomique sont mises en défaut lorsqu’il s’agit de sonder les zones périphériques. Il en va de même avec des méthodes mises au point pour sonder les décharges hors équilibre.

Afin d’étudier ces zones périphériques, nous avons choisi de mettre en place des méthodes de diagnostic non intrusives basées sur l’indice de réfraction. Comme nous le verrons par la suite, l’indice de réfraction varie fortement avec la température dans un domaine compris entre 300 K et 4000 K. En outre, aucune hypothèse concernant l’équilibre thermodynamique ne doit être faite car l’indice permet, moyennant une connaissance relativement "grossière" de la composition, d’obtenir une mesure de la densité du milieu.

Dans les parties de la zone périphérique assez "chaudes" pour rayonner, nous avons tenté de mettre en place des méthodes de diagnostic basées sur la spectroscopie optique d’émission moléculaire. En effet, il est bien connu que les spectres moléculaires sont observables pour des températures comprises entre 1000 et 8000 K, ce genre de méthode est donc bien adapté pour le diagnostic des bords de colonne. Une des molécules les plus importantes en chimie de l’atmosphère, chimie des hydrocarbures et en combustion, le radical OH, a été choisie pour développer des méthodes spectroscopiques simples de mesure de températures. Elle est souvent présente dans les plasmas et les flammes dès que ces derniers contiennent des traces d’eau ou de chaînes carbonées, ce qui rend son utilisation précieuse pour le développement de procédés.

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