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Sous la grammaire cognitive, les verbes sont classés en deux grands groupes aspectuels : perfectifs et imperfectifs (Langacker, 2008, 2001). La distinction est faite à partir des caractéristiques inhérentes des processus. Le verbe est défini comme un élément linguistique qui désigne un processus, le processus lui-même étant défini comme une relation qui subit le balayage séquentiel lors de son évolution dans le temps.

Langacker dépendrait du concept de l'aspect lexical (aktionsart). Cependant, à la différence du classement de Vendler (1957, 1967), la répartition des verbes selon Langacker est fondée sur deux critères fondamentaux : l'hétérogénéité/homogénéité du processus du verbe, et la délimitation temporelle du processus. Les verbes perfectifs sont délimités dans le temps et hétérogènes : ils comportent une sorte de changement interne dans le temps. Les imperfectifs sont, par contre, homogènes : le processus qu'un verbe imperfectif désigne est une situation stable. En plus, ils n'ont pas de délimitation temporelle. Nous acceptons d'employer le terme processus sous réserve : nous croyons que le terme ne convient guère à la description d'une situation stable d'un verbe imperfectif.

23. Dans tous les cas étudiés, la formation du participe ou de l'infinitif a comme effet de rendre atemporel, le

processus du verbe dont l'infinitif ou le participe dérive. La base processuelle perd sa nature temporelle par de divers moyen. Quels que soient ces moyens, l'expression qui en résulte n'est pas un verbe, car il n'est plus temporel au sens de désigner une relation complexe balayée de manière séquentielle dans le temps conçu - notre traduction.

Les verbes perfectifs désignent des processus qui ont un début et une fin. Ils comportent un changement observable dans la situation décrite. Par exemple, tomber désigne, du point de vue dénotatif, changer rapidement de position d'un point supérieur vers un point inférieur sur l'axe

vertical (au sens concret), sur l'axe hiérarchique (au figuré) ; apprendre quelque chose désigne changer d'ignorer cette chose-là à la savoir. Les verbes perfectifs désignent toujours un

mouvement d'un point de départ vers un point final déterminé.

Pour leur part, les verbes imperfectifs désignent des situations stables de durée indéfinie. Cette conception langackerienne veut dire que les situations désignées par les imperfectifs ne changent pas et rien ne se passe. On dirait que les verbes imperfectifs équivalent à l'état (statives) vendlerienne ; les autres, à savoir, l'achèvement, l'accomplissement et l'activité tombent sous la catégorie des perfectifs. Cette description ne veut pas dire que la relation désignée n'a ni début ni fin, ce qu'elle dénote, c'est plutôt que le verbe imperfectif exclut ces extrêmes de la partie mise en scène pour le traitement. Par exemple, le verbe exister (ainsi qu' être, savoir, et avoir) n'indique rien sur la permanence de l'existence des optiques prospective et rétrospective. Le verbe permet d'interpréter la situation (relation) évoquée comme constante dans la durée sous considération (la visée temporelle immédiate). Connaître et savoir indiquent une situation psychologique sans limites temporelles intrinsèques. Pourtant, la situation de connaître/savoir peut avoir un point de départ marqué par la fin du processus indiqué par apprendre et un point final marqué par oublier.

En anglais, la différence est appréhendée à travers le comportement grammatical contrastif des deux types verbaux: l'occurrence au simple present (approximativement, présent de l'indicatif) et au progressif (marqué par le morphème -ing). Dans l'usage normal, un perfectif désignant un processus contemporain de l’énonciation ne se manifeste pas au simple present mais il présente des formes au progressif. Le comportement inverse est affiché par l'imperfectif : il n'affiche pas de formes aux temps progressifs mais il se manifeste au simple present. Les mêmes tests peuvent se réaliser avec les verbes du français ceux et de l'akan : en français, les perfectifs figurent dans des constructions avec (être) en train de, les verbes imperfectifs n'y figurent pas. En akan, le particule morphémique (infixe) -r e - (et -ri-, -ro-, -ru- uniquement pour la variante fanti) marque les perfectifs ; l'impossibilité de la co-occurrence d'un verbe avec ce particule est le signe que le verbe est imperfectif.

Pour cette classification dichotomique, Langacker (2008 : 148) distingue entre « 'true'

facteurs conceptuels comme le présent générique, le présent habituel et le présent prospectif ou futur.

Cette différence fondamentale n'empêche pas pourtant que plusieurs verbes qui désignent des états stables puissent fonctionner comme des perfectifs : en référence à une action contemporaine du moment d'énonciation, les imperfectifs pareils (sleep, learn, perspire, meditate,

wear a shirt, swim) s'emploient au progressif. À vrai dire, swim, (nager) par exemple, possède une

homogénéité inhérente : chaque partie est semblable à toute autre partie, mais ces processus se déroulent dans des épisodes bien délimités, comparables aux noms désignant des entités homogènes mais bien cernées, comme trou et lac. Les deux catégories sont homogènes mais bien délimitées, et l'inclusion des bornes leur confère une certaine hétérogénéité. L'inclusion des limites dans la portée immédiate de traitement permet de catégoriser les deux types d'éléments soit comme des noms comptables, soit comme des verbes perfectifs.

Il s'ensuit que la distinction perfectif/imperfectif est flexible, donc, beaucoup de verbes peuvent s'employer avec les deux optiques. Cette flexibilité de catégorisation est due à des influences conceptuelles subtiles attribuables à plusieurs sources.

Des verbes comme entourer, courir, to demand, to connect, to realise, sont et perfectifs et imperfectifs selon qu'ils véhiculent une situations ou une activité délimitée. Dans ces paires de phrases, les verbes sont perfectifs dans les unes, imperfectifs dans les autres :

Lie

a. Laurie is lying on the couch.

b. Britain lies 24 kilometres off the Pas de Calais. Stand

a. My son is standing behind the door now...

b. The statue of Lord Nelson stands at the Trafalgar Square in London.

Il paraît donc que les verbes de position sont normalement délimités temporellement, surtout avec les entités mobiles. Par contre, comme les pays et les grosses édifices sont immobiles les verbes pareils sont imperfectifs, sauf dans le cas des statues, etc. placées provisoirement dans un endroit donné. À propos de la conjugaison, ces verbes à double caractère ne se conjuguent pas au simple

present en anglais s'ils désignent un processus impliquant ds entités mobiles et contemporain du

cette explication, l'on peut déduire que la nature des participants à une relation peuvent influencer l'interprétation du verbe comme perfectif ou imperfectif.

En ce qui concerne les verbes de sensation et de perception, ce sont les objets qui exercent l'influence sur les sujets grammaticaux, en contraste à d'autres verbes. Les verbes de perception s'emploient donc comme des imperfectifs. Pourtant, les sensations sont normalement brèves et pas stables. Linguistiquement parlant, la stabilité et la durée ne sont pas absolues, mais relatives par rapport à une situation donnée. Qu'une situation soit interprétée comme durable et/ou stable dépendrait du laps de temps sous considération. Cette interprétation dépendrait aussi du but de l'échange. Le but constitue la portée temporelle immédiate du verbe, c'est-à-dire, le laps de temps mis en scène pour qu'on s'y focalise. La longueur absolue de ce laps est variable. La perception en général est un processus instantané. Le cadre temporel pour l'évaluation du changement ou de la stabilité est très restreint. La perception de la lumière, de la musique et de la douleur implique des sensations capables de durer un certain temps. Cette nature permet d'employer des verbes de perception en tant qu'imperfectifs. Par contre, un éclair ou une explosion sont semblables aux points car ils sont instantanés ; ainsi, ils génèrent une perception ponctuelle ou extrêmement brève ; il est impossible de la considérer comme stable, même pour une période limitée. (Il n'y a qu'un début, suivi immédiatement d'une fin, ou mieux, le début et la fin se mêlent au même instant : on ne peut parler d'une intervalle perceptible entre les deux bouts). Puisque l'on parle d'un point, d'un début et d'une fin, l'on a affaire à un événement cerné qui se prête donc à une interprétation perfective, ce qui justifie des énoncés comme :

I heard an explosion (j'ai entendu une explosion, non : j'entends une explosion ) ; I (just) saw a flash (Je viens de voir un éclair, non : je vois un éclair).

Dans les deux cas, l'expérience ne peut pas être contemporaine de l'acte énonciatif parce que l'énonciation elle-même est une réaction à l'expérience subite.

Les adjectifs d'intensité peuvent changer l'interprétation des verbes imperfectifs. comme

aimer, détester, à des perfectifs. Considérons les énoncés : Jacques aime Amélie (stable, intemporel) ;

Amélie aime Jacques davantage (cerné dans le temps, suggère un mouvement par rapport au

degré).

Le champ de vision peut changer un verbe qui décrit un état. Sil l'on adopte un champ de vision globalisant, le verbe est d'ordinaire imperfectif : wind (serpenter) donne donc :

Si, par contre, il s'agit du champ de vision immédiat et local de quelqu'un qui avance sur la route, ce champ permet de voir wind comme perfectif, désignant le processus comme une évolution dans le temps car l'observateur ne voit ou conçoit pas toute la portion serpentine de la route. Dans ce cas,

wind peut figurer dans une construction à la forme progressive : the road went winding through thhe mist-covered hills.

Qu'un verbe soit interprété comme perfectif ou imperfectif n'est due à aucune propriété inhérente d'une scène ; plutôt, il dépend des connaissances générales ou contextuelles, ou comment l'énonciateur veut dépeindre la situation :

A statue stands in the park (permanent donc, imperfectif) ; A statue is standing in the park (provisoire : perfectif).

Our professor is sitting in his office, meditating. (l'on sent qu'il va changer de position) : Rodin's The Thinker sits and meditates perpertually.

Même dans certains cas, l'on peut employer un verbe qui désigne un processus ponctuel de façon à communiquer une situation imperfective selon l'interprétation imposée aux suites de l'événement. L'on peut dire normalement : Je vois (ou peux voir) la lumière, mais pas je vois l'éclair pour les raisons expliquées supra. Cependant, comme les phénomènes instantanés sont souvent « violents », une foudre laisse des empreintes visuelles et auditives pendant quelques secondes après, et parfois, sur la mémoire pendant des années. Pour ces cas, l'on peut employer des verbes de perception ponctuels avec une interprétation imperfective, quelquefois à la forme progressive et avec les adverbes de durée : I can still see the flash of the monstrous lightning. I 'm still seeing the flash

which occured a short while ago.

Joe entend toujours l'explosion du coup de feu.

Tous ces énoncés sont interprétés sans la délimitation inhérents aux processus instantanés . Ils sont sujets à l'extension due aux effets persistants d'un événement fuyard. Voilà pourquoi l'on peut interpréter le processus et toute la situation comme durable.

Nous sommes conscient de l'apparente contradiction ente cette conception de l'aspect verbal et les approches antérieures, (Guillaume, Comrie, Vendler, Dahl, etc.), du point de vue de la terminologie et de la définition, étant donné que l'approche originelle associe le progressif et l'imperfectif, par exemple. Mais le processus désigné ou dénoté par l'imperfectif grammatical (en tout cas, avec les verbes des types achèvement et activité) renferme et une transformation et un point final. L'aspect imperfectif (du point de vue grammatical) des verbes d'états est intégralement

pris en charge sous la grammaire cognitive. Du coup, il est plus apte de dire que la grammaire cognitive réunit les approches grammaticale et lexicale dans sa théorisation de l'aspect.