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3. Méthode

3.7 Validité de l’étude

Pour assurer la scientificité de cette étude, des critères de validité ont été considérés pendant la collecte de données et la démarche d’analyse. Ces critères de validité, les principes scientifiques qu’ils sous-tendent ainsi que les stratégies utilisées sont décrits dans les prochains paragraphes.

3.7.1 Critère de validité de signifiance ou d’acceptation interne

Le critère de validité de signifiance aussi nommé « critère d’acceptation interne » est défini comme étant le « degré de concordance et d’assentiment qui s’établit entre le sens que le chercheur attribue aux données recueillies et sa plausibilité telle que perçue par les participants à l’étude » (Mucchielli, 2009, p. 1). Ce critère est aussi nommé « crédibilité » par certaines auteurs (Gohier, 2004; Pourtois & Desmet, 2007), la traduction de « credibility » qui est son équivalent en anglais (Mertens, 2005; Miles & Huberman, 2003; Morrow, 2005). Pour parler de ce même critère, plusieurs

auteurs francophones de textes méthodologiques utilisent plutôt le terme « validité de signifiance » (Pourtois & Desmet, 2007; Pourtois, Desmet & Lahaye, 2006). Gohier (2004) fait d’ailleurs une distinction entre la « validité de signifiance de l’observation » et la « validité de signifiance des interprétations »; ces deux formes de validité de signifiance sont les termes privilégiés dans cette thèse.

Pour soutenir la validité de signifiance des observations, une première stratégie a été utilisée dans la présente étude. Il s’agit d’une stratégie suggérée par Mertens (2005) qui consiste à valider le sens ou la compréhension des propos recueillis auprès des personnes participantes elles-mêmes. Cette stratégie a été incluse pendant la collecte de données en clôture d’entrevue, ce qui a d’ailleurs été particulièrement fructueux pour récolter des propos additionnels et enrichir le matériel déjà recueilli.

Une stratégie de validation de signifiance des interprétations a été appliquée un an après la collecte de données à l’occasion d’ateliers animés dans cinq des neuf écoles participantes. Il convient de rappeler que les écoles participantes pouvaient bénéficier d’un atelier de deux heures dont le contenu a été déterminé en fonction de la valeur formative que pouvait en retirer les membres du personnel scolaire. Cette activité de retour auprès des participantes a permis de mettre à niveau les connaissances de la LPJ. Certains aspects des résultats ont aussi été présentés sous forme conviviale, ce qui a permis de recueillir des réactions et commentaires qui viennent appuyer la signifiance des interprétations. Toutefois, le temps alloué à l’atelier ne permettait pas de réaliser un travail approfondi de validation et par conséquent, seulement quelques aspects des résultats ont pu être discutés en groupe : par exemple, « la punition corporelle comme pratique acceptable » ou « le manque de connaissance des lois et du traitement d’un signalement à la DPJ comme obstacle ». En somme, même si quelques résultats préliminaires ont pu être présentés au personnel scolaire, il s’agissait davantage d’un survol rapide que d’une procédure rigoureuse de validation des interprétations.

Une autre façon de valider la signifiance des interprétations consiste à présenter les résultats à des collègues et à vérifier leur plausibilité (Mertens, 2005; Miles & Huberman, 2003), ce qui a été fait lors des séminaires doctoraux au cours desquels les résultats ont été présentés aux membres du

comité de thèse qui ont pu se prononcer sur l’interprétation des résultats. De plus, les rencontres de supervision entre l’étudiante-chercheuse et sa directrice de thèse ont aussi contribué à vérifier la plausibilité des interprétations.

3.7.2 Critère de fiabilité

Ce critère pour favoriser la scientificité de l’étude est souvent comparé à la notion de fidélité en recherche quantitative (Mertens, 2005; Morrow, 2005; Mucchielli, 2009; Pourtois & Desmet, 2007) soit « la constance et la prédictibilité d’une mesure ou d’un instrument » (Mucchielli, 2009, p. 97). Par exemple, Miles et Huberman (2003) expliquent que la « fiabilité » se résume à savoir si « le processus de l’étude est cohérent et suffisamment stable sur la durée, entre les chercheurs et entre les différentes méthodes » (p. 503). Au contraire, Mucchielli (2009) argumente que la recherche qualitative ne vise pas la « mesure » d’un phénomène et qu’en ce sens, elle n’est pas concernée par les fins de la fidélité; il parle plutôt de « fiabilité » et explique qu’une étude qualitative menée consciencieusement et habilement est considérée comme fiable. Ainsi, pour contribuer à la fiabilité des résultats d’une étude, il faut que le processus par lequel les résultats ont émergé soit le plus explicite et reproductible possible (Morrow, 2005).

Dans cette étude, la description de la démarche d’analyse est détaillée de telle sorte qu’il est possible de suivre la logique de la progression de l’analyse en fonction du matériel qui lui est soumis. La directrice des travaux et les membres du comité de thèse ont pris connaissance des détails de cette démarche.

3.7.3 Critère de confirmation externe

Le critère de confirmation externe réfère à « la capacité du chercheur d’objectiver les données recueillies » (Mucchielli, 2009, p. 29). Mucchielli explique que même s’il est difficile de prétendre assurer totalement l’objectivité des données, l’analyste doit quand même tenter de démontrer qu’elles ont été recueillies de façon systématique. Encore une fois, les stratégies suggérées pour y parvenir est de faire appel à une personne étrangère à la recherche afin qu’elle effectue des vérifications et des critiques de la démarche. La directrice des travaux de l’étudiante-chercheuse et le

comité de thèse, par leur rôle d’encadrement et d’évaluation des travaux de l’étudiante-chercheuse, ont suivi la démarche d’analyse entreprise.

2.7.4 Critère de « transférabilité » des résultats

La « transférabilité » réfère à la possibilité d’appliquer les résultats et les interprétations à d’autres contextes (Merriam, 2009). Cette notion est souvent mise en parallèle avec le concept de validité externe en recherche quantitative, soit la capacité de généraliser les résultats de l’étude (Mertens, 2005; Miles & Huberman, 2003; Morrow, 2005). Toutefois, en recherche qualitative, il faut interpréter ce concept avec prudence car étant donné le nombre habituellement petit de l’échantillon sur lequel sont basés les résultats de l’étude, il n’est pas possible de généraliser les résultats au sens quantitatif. Merriam (2009) mentionne que pour accroitre la possibilité que les résultats d’une étude qualitative soient transférables à un autre contexte, plusieurs stratégies peuvent être utilisées; l’une d’elle, communément connue sous son appellation en anglais « thick description », consiste à fournir une description riche et détaillée du contexte de la recherche et des personnes participantes aussi bien qu’une description détaillée des résultats. Plusieurs auteurs reconnaissent que la composition de l’échantillon permet au lecteur d’évaluer si une certaine « transférabilité » est possible à son contexte (Creswell, 2007; Gohier, 2004; Lewis & Ritchie, 2003; Merriam, 2009; Mertens, 2005). Merriam (2009) fait référence à la « variation maximum de l’échantillon », c’est-à-dire de chercher à ce qu’il soit le plus diversifié possible. En somme, le fait de fournir ces informations est important afin que les lecteurs puissent déterminer si les résultats et les conclusions de l’étude sont applicables ou « transférables » à leur contexte.

Le choix de colliger quelques caractéristiques professionnelles et personnelles des participantes découle du désir d’optimiser la « transférabilité » des résultats de cette étude. Ainsi, le lecteur peut prendre connaissance de la composition du groupe de participantes et constater qu’il est diversifié sur plusieurs caractéristiques dont les sous-groupes de personnel scolaire représentés, soient les enseignantes de différents niveaux scolaires, les enseignantes en adaptation scolaire et en francisation de même que les éducatrices spécialisées et les directions des écoles. Par ailleurs, parmi le personnel scolaire sollicité pour participer à cette étude, il est à souligner qu’aucun

psychologue, orthopédagogue ni psychoéducateur(trice) n’y a pris part; les résultats et conclusions ne sont donc pas transférables à ces groupes.

3.7.5 Critère de saturation

Il est généralement considéré que la saturation soit atteinte lorsque les nouvelles données recueillies ne produisent plus de nouvelles catégories. Quelques textes abordent la question de la saturation des données qualitatives comme critère de validité. Pirès (1997) propose deux types de saturation : la « saturation empirique » et la « saturation théorique ». Selon lui, la saturation empirique renvoie aux données elles-mêmes et elle serait atteinte lorsque le chercheur juge que les dernières données amassées n'apportent plus d'informations suffisamment nouvelles pour justifier de continuer à en recueillir de nouvelles. Quant à la saturation théorique, il s’agirait d’un critère qui s’appliquerait au concept et à ses propriétés et elle est atteinte lorsque les nouvelles données ne modifient ni les concepts ni l’explication développée par la mise en relation entre les concepts. Ce dernier rejoint la notion de saturation de Corbin et Strauss (2008) qui soulignent que la saturation se rapporte au développement des catégories et à leurs propriétés, ainsi qu’aux relations entre les catégories.

Paillé et Mucchielli (2008) mentionnent qu’il est primordial de comprendre qu’il n’y a pas de règles, ni de nombre, ni de mécanisme pour pouvoir affirmer que la saturation est atteinte. Les auteurs expliquent que la décision revient à l’analyste de considérer l’importance théorique d’un concept, laquelle n’est pas nécessairement liée à sa forte occurrence dans le corpus de données.

En somme, les écrits sur la validité de la recherche qualitative présentent des critères de qualité scientifique qui se distinguent de ceux reconnus en recherche quantitative. De plus, les principes qui sous-tendent les critères de validité et leurs appellations ne sont pas concordants entre les textes méthodologiques de recherche qualitative. Il convient de remarquer que les mêmes stratégies sont suggérées pour remplir des critères de validité, notamment, la stratégie de vérification de la démarche d’analyse par un collègue (Creswell, 2007) ou une personne externe à la recherche (Mucchielli, 2009). Dans le but de rendre compte de sa validité, cette étude fournit une description détaillée de la démarche d’analyse afin de rendre compte de la logique qui a permis d’identifier les

divergences dans les façons de prendre des décisions de signaler les enfants de groupes culturels minoritaires à la protection de la jeunesse.