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3 Apports du concept de connectivité hydrologique

3.2 Une exigence de dispositifs spatialisés d’observation in situ

3.2.1 Recherche de « pattern » de connectivité

Les études in situ et le développement des modèles doivent adopter une approche à la fois spatiale et temporelle. Le concept de connectivité suppose que les cheminements, liens, discontinuités et leur variabilité doivent être mieux pris en compte. Le zonage des aires actives et/ou contributives est une solution pour comprendre la topologie du fonctionnement interne au bassin (Ambroise, 2004), et pour mettre en évidence les facteurs majeurs qui contrôlent cette organisation. Le « pattern » de connectivité suppose que la structure spatiale et temporelle observée dans la réponse hydrologique du bassin versant n’est pas liée à un processus aléatoire. La théorie de la connectivité hydrologique suppose que le fonctionnement d’un bassin versant amène vers un « pattern » reproductible exprimé par des hétérogénéités qui dans une certaine mesure agissent systématiquement de la même façon.

L’approche peut être purement spatiale en caractérisant la connexité entre les différents objets du paysage assurée par le mouvement des masses d’eau. Elle peut également être déduite de l’exécution de différents processus hydrologiques comme les processus sub-surfaciques qui assurent la connexion versant – réseau : l’activation de certains processus est alors indicatrice d’un certain niveau de connectivité atteint par le bassin versant. On parle de connectivité spatiale ou de connectivité des processus. Les deux approches se rejoignent lorsque l’on cherche à déterminer le « pattern » ou la structure spatiale de variables hydrologiques telles que l’humidité des sols. Cette dernière approche relie les contraintes d’observation spatiales et temporelles. Elle ne se limite pas à décrire la connectivité entre objets dans l’espace mais impose de comprendre l’impact de cette connectivité sur la nature de la réponse hydrologique du bassin. Il ne suffit pas de montrer quelles unités spatiales contribuent ou pas à l’écoulement mais également comment cette « dose supplémentaire » de connectivité renforce la concentration des flux et réduit les temps de transfert.

3.2.2 Stratégie d’échantillonnage du « pattern » de connectivité

L’évaluation in situ du pattern de connectivité soulève de nombreux problèmes à la fois d’ordre méthodologique et métrologique. L’observation précise des processus et de la réponse hydrologique doit se dérouler à une échelle fine compatible avec celle de l’initiation des processus. Cependant les problèmes d’extrapolation à l’échelle du bassin versant sont récurrents. La question majeure de l’échantillonnage temporel et spatial de la connectivité hydrologique est posée : le type de données à acquérir, le choix du meilleur site expérimental, la précision et l’efficacité de la métrologie pour un coût raisonnable.

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Tableau I.I : Comparaison de méthodes in situ pour échantillonner le pattern de connectivité selon des critères de mise en œuvre et de qualité spécifique (Ali & Roy, 2009). Les cercles noirs, blancs et barrés signifient respectivement que le critère est validé, partiellement validé, invalidé.

Ali et Roy, (2009) comparent plusieurs méthodes à l’aide de critères à prendre en compte pour mettre en place des stratégies d’observation du pattern de connectivité (Tableau I.I). Ces critères soulèvent la question de l’échelle adéquate à laquelle la connectivité hydrologique doit être observée. Les méthodes ne remplissent pas toujours les conditions requises pour atteindre tous les objectifs. L’emboitement topographique des bassins versants est par exemple particulièrement recommandé pour évaluer des différences de processus et de comportement au travers de multiples niveaux d’échelle. Le protocole d’observation peut être systématique ou aléatoire. La stratification des mesures par l’Indice topographique (Equ.1.1) répond à un autre objectif car c’est un moyen utile pour délimiter des zones sensiblement homogènes en termes de fonctionnement. Toutes les zones possédant le même indice topographique sont supposées avoir a priori la même ampleur potentielle de saturation mais cela reste dépendant de l’échelle optimale de validité de cet indice. Enfin l’échantillonnage cyclique est bien noté car il est souple et économique mais le point noir est qu’il nécessite au préalable de connaitre le niveau d’échelle auquel le pattern recherché est observable.

3.2.3 Compromis entre qualité et quantité des observations spatialisées

L’organisation spatiale et temporelle des observations est une des principales lacunes dans les sciences de l’environnement, car elles ne couvrent pas toutes les échelles pour lesquelles des simulations sont réalisées par les modèles (Bloschl, 2001). Les observations qualitatives de type présence absence d’une zone saturée ou d’un écoulement en surface peuvent aider au changement d’échelle de la représentation d’un processus local. Lorsqu’elles sont spatialisées et en grand nombre, ces données peuvent offrir une bien meilleure connaissance de la dynamique spatiale et temporelle des écoulements qu’une seule mesure de grande qualité métrologique effectuée ponctuellement (Puech, comm personnelle). La qualité de l’information ponctuelle est dégradée mais la quantité permet de gagner en explication du « pattern » de connectivité. Ces approches permettent de vérifier des hypothèses de fonctionnement des bassins versant, tout simplement pour éliminer des causes ne produisant pas les effets observés. La recherche du compromis entre qualité et quantité des mesures effectuées sur le terrain est importante car les campagnes lourdes sont limitées économiquement et par conséquent peu reproductibles d’un site à un autre.

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Krasovskaia (1988) a étudié la variabilité spatiale du ruissellement. Partant du constat que les réseaux de stations de mesure n’existent qu’à une échelle grossière, plusieurs campagnes de mesures ont été réalisées en Norvège au sein d’un bassin versant de plusieurs kilomètres carrés. Les mesures sont mises en œuvre sur plusieurs sous bassins aux mêmes moments et durant de courtes périodes par plusieurs personnes sur le terrain. De la même façon Woods & al (1995) parlent de 600 heures de travail sur le terrain pour étudier la variabilité des débits en stations emboitées. Plus récemment, Kuras & al (2008) ont effectué des campagnes ponctuelles de mesures des débits sur 42 points de jaugeages dans un petit bassin versant et font l’hypothèse que la mesure est synchrone.

Les stratégies de terrain spatialisées doivent être revisitées et multipliées selon de nombreux auteurs (Kuras & al, 2008). Cela suppose également de faire évoluer les moyens techniques de leur mise en œuvre en s’appuyant sur des capteurs peu onéreux en grand nombre voire avec le soutien des technologies de l’information et de la communication.

3.2.4 Bref regard sur les réseaux de capteurs sans fils

Caractériser la variabilité spatiale et temporelle des flux d’eau voire de solutés répond à la nécessité de connaitre la connectivité hydrologique d’un bassin versant. L’idéal est de disposer de fortes fréquences de mesures à la fois spatiales et temporelles. L’aspect temporel est important car des processus peuvent se dérouler rapidement de l’ordre de la minute par exemple pour une onde de ruissellement en tête de bassin versant. Cette onde peut s’accompagner d’un pic de concentration en soluté si on s’intéresse également aux flux de polluants. Or, il apparaît que pour des raisons de coût de fonctionnement, la plupart des réseaux de mesures actuels à haute fréquence temporelle sont réduits à un faible nombre de sites. Cette différence profonde entre la faible fréquence de mesure spatiale et la forte fréquence temporelle, visible dans la plupart des cas, peut d’ailleurs être vue comme un paradoxe face aux problèmes posés par la connaissance de la connectivité hydrologique, et par le nombre de paramètres des modèles spatialisés.

Des projets de collecte de données hydrologiques sur des sites densément instrumentés sont en cours notamment aux USA avec l’objectif d’atteindre des résolutions spatiales et temporelles sans précédents via un emboitement d’échelle (WATERS Network : WATer and Environmental Research System Network http://www.watersnet.org/about.html consulté le 28/11/2009). Ces observatoires environnementaux doivent faire face à des contraintes technologiques et budgétaires. Pour ces raisons la métrologie déployée de manière densifiée est simplifiée et optimisée en termes d’interventions humaines (Horsburg & al, 2009).

Une densité plus importante d’information représente une assistance dans la compréhension des mécanismes de cheminement des écoulements dans le bassin versant. C’est également une aide à la décision dans le choix de zones ou de périodes les plus propices à une investigation in situ plus lourde : prélèvements, instrumentation.