• Aucun résultat trouvé

B Figure II.2 : Cartographie d’occupation du sol du bassin versant du Mercier (UMR 5600)(A) et vue

2.3 Connaissances acquises sur le Mercier

2.3.1 Infiltrabilité des sols et observations du sous sol

Dans le cadre du projet AVuPUR, parallèlement à mon travail de thèse, deux types de campagne de terrain visant à mieux comprendre le fonctionnement hydrologique sub-surfacique des zones rurales ont été menées. La première campagne a permis de documenter les propriétés hydrodynamiques des sols en surface (courbe de rétention, courbe de conductivité hydraulique) d’un échantillon représentatif des combinaisons d’unité cartographiques de sol et d’occupation des sols (Gonzalez-Sosa & al., 2010). Cette campagne a montré que l’occupation des sols était beaucoup plus discriminante sur les propriétés d’infiltrabilité des sols que le type de sol lui-même. Ainsi, une infiltration beaucoup plus importante a été observée sous forêt que sous prairie, puis sous cultures. Sous forêt et prairie, la porosité du sol est par ailleurs plus importante que sur sols cultivés du fait d’un système racinaire plus dense et d’une activité biologique plus importante, qui favorisent la rétention de l’eau.

L’autre campagne, exploratoire, visait à quantifier l’intérêt de prospections géophysiques (résistivité électrique) pour documenter les profondeurs de sol (Goutaland, 2009). Trois transects ont été réalisés : l’un sous forêt, les deux autres sur des prairies sur des pentes contigües à un ruisseau. Les résultats montrent que les talwegs présentent des épaisseurs de sol assez faibles qui surmontent des zones de socle altéré dont les épaisseurs peuvent dépasser les 10-15m. Ces résultats sont cohérents avec le schéma de bassin sur socle décrit plus haut (section 2.2.2) à partir de Lachassagne et Wyns (2001), et nous conduisent à penser que ces zones peuvent en effet constituer des volumes de stockage privilégiés de l’eau. Les quelques transects réalisés n’ont pas permis d’appréhender la continuité/discontinuité des zones. En revanche, sur un des sites, un profil transversal et un profil latéral à la pente ont été réalisés. Ils montrent la grande hétérogénéité locale des épaisseurs de sols, avec parfois le socle rocheux affleurant à la surface.

2.3.2 Caractérisation géomorphologique

Compte tenu des informations produites par l’observation locale du sous sol il semble que les talwegs du Mercier présentent très certainement des épaisseurs variables liées aux dynamiques antérieures de transfert de sédiments en provenance des versants par des processus de colluvionnement. Comme sur de nombreux tronçons de réseau hydrographique du bassin versant de l’Yzeron, certains talwegs amont du bassin versant du Mercier sont sujets à des phénomènes d’incision importants. Une épaisseur parfois importante de matériaux a été arrachée au fond de talweg. Ce type d’incision peut contribuer très localement à favoriser le drainage. Les impacts des activités humaines sur la stabilité des cours d’eau sont généralement liés à la modification des régimes hydriques et sédimentaires dans le bassin versant à travers l’évolution de l’occupation des sols et de la végétation.

Schmitt et Grospretre (2008) ont étudiés l’impact de l’urbanisation sur le développement et l’entretien de phénomènes d’incision sur le bassin versant de

66

l’Yzeron. La grande majorité des zones touchées a fait l’objet de substitution de surfaces agricoles par des surfaces urbanisées présentant une part significative de surfaces imperméabilisées. Schmitt et Grospretre (2008) remarquent cependant que des bassins versants dépourvus de rejets urbains significatifs présentent quelques incisions non négligeables. D’une part, cela révèle l’existence d’autres facteurs déclencheurs à l’origine des incisions (changements d’occupation du sol sans qu’il y ait eu urbanisation, piétinement des berges par le bétail, mise en charge des écoulements par une canalisation…). D’autre part, cela pourrait manifester une sensibilité intrinsèque des sous-bassins à ce mécanisme érosif.

Le bassin versant du Mercier est dans ce cas de figure car sur la zone amont aucune surface urbanisée ne peut être significativement en cause pour expliquer les quelques incisions présentes. En revanche une reconstitution historique de l’occupation du sol dans le sous bassin versant du Bouillon (2 km²), actuellement entièrement recouvert par de la forêt, a montré qu’une grande partie de la surface était occupée par des parcelles cultivées au cours du 19ème et au début du 20ème siècle (Privolt, 2009). Les cultures pérennes vignes, arboriculture, ou les cultures maraichères positionnées sur des versants très pentus ont accru fortement les coefficients de ruissellement et le transfert de matériaux par érosion qui se sont progressivement agrégés dans les fonds de vallée (Delile, 2009). Rapidement au cours du 20ème siècle la déprise agricole a touchée ces versants qui sont les plus pentus et difficiles à exploiter malgré l’aménagement éventuels de murets et de terrasses. Comme pour l’ensemble des monts du Lyonnais, l’espace rural devait sans doute être très ouvert au début du 20è siècle avec de nombreuses structures linéaires du paysage telles que haies, murets et fossés (Privolt, 2010). Cet espace s’est depuis refermé par le développement de la forêt, réduisant significativement les flux de matières sédimentaires vers l’aval.

Les différents travaux conduits en géographie et géomorphologie ces dernières années sur le bassin de l’Yzeron et en partie sur celui du Mercier, convergent vers l’hypothèse d’un lien étroit entre occupation du sol et géomorphologie des réseaux hydrographiques. Ainsi l’arrêt progressif des flux de sédiments dans les talwegs a induit des formes d’incisions du chenal par l’énergie du cours d’eau. La géométrie du chenal tend alors brutalement vers un nouvel équilibre. On pourrait donc considérer que les incisions constituent des indicateurs très grossiers des fonds de vallée qui ont été les plus exhaussés au cours des derniers siècles. Cette accumulation de matériaux ainsi que certains aménagements tels que seuils, ou retenues collinaires participent, en plus du système hydrogéologique sur socle, à la dynamique des transferts hydrologiques au sein des talwegs.

2.3.3 Observations du fonctionnement hydrologique

La moyenne annuelle des précipitations observées dans le bassin versant du Mercier sur la période 1997-2009 est de 728 mm avec un écart type de 155 mm (Michel, 2009). Les minima et maxima de température moyenne sont de 6,8°c et 15,8°c respectivement. La Figure II.4 illustre la variabilité du bilan hydrique moyen effectué à l’échelle mensuelle. Sur cette figure, l’évapotranspiration potentielle (ETP) a été calculée à l’aide des données de la base de données SAFRAN (Quintana-Segui et al., 2008 ; Vidal et al., 2010) qui fournit, sur des mailles de 8x8 km², les variables climatiques (rayonnement solaire et grandes longueurs d’ondes incidents, température et humidité spécifique de l’air, vitesse du vent, pluviométrie) à pas de temps horaire. Les données étaient disponibles

67

depuis 1970 et ont été utilisées pour calculer une évapotranspiration potentielle journalière (ETP) sur le bassin versant selon la méthode préconisée par la FAO (Food Agriculture Organization, 1998 ; Vannier & Braud, 2010). La pluviométrie est issue du pluviomètre de Pollionnay situé sur le bassin et les débits sont issus de la station hydrométrique d’IRSTEA située à l’exutoire du bassin. Il existe une grande saisonnalité des écoulements : la période de recharge se situe en automne et les coefficients d’écoulement sont les plus importants en hiver lorsque les réservoirs sont rechargés. Au printemps et en été la demande climatique contrôle l’affaiblissement des débits dans le cours d’eau.

Figure II.4 : Moyennes mensuelle de l’ETP calculée à partir de la base SAFRAN, des pluies et de la lame d’eau écoulée à l’exutoire du bassin versant du Mercier ainsi que du coefficient d’écoulement égal au rapport entre lame écoulée et lame pluviométrique.

La distribution des coefficients d’écoulement mensuels montre avec une borne minimale située systématiquement proche du 0 le caractère transitoire du réseau hydrographique du Mercier en particulier de mai à novembre. L’analyse des hydrogrammes de crue du Mercier laisse apparaitre une bonne corrélation entre le coefficient de ruissellement et le débit de base en début d’épisode (Gnouma, 2006). Cette proximité souligne une tendance de fonctionnement par aires saturées contributives : Le débit de base peut être associé au niveau de

68

saturation des fonds de talweg qui, en interrelation avec les caractéristiques de la pluie, conditionne les processus d’apparition du ruissellement.

Des traçages géochimiques ont été effectués à l’exutoire du Mercier dans le but de décomposer les hydrogrammes de crue. Parallèlement des piézomètres ont été installés le long d’un profil en travers pour identifier différents niveaux de saturation le long d’un versant à proximité du cours d’eau (Gnouma, 2006). Les résultats montrent qu’un processus hortonien semble être activé lors des épisodes de crues au niveau des versants occupés par des parcelles agricoles. Par ailleurs une participation non négligeable des eaux du sol à la crue est à envisager lorsque l’état d’humidité est important avant épisode. Ce phénomène semble bien associé au fonctionnement de zones saturées contributives qui au-delà d’un certain seuil conduisent au mélange entre eau de pluie et eau du sol dans la dynamique de crue.

69