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un procédé syndicaliste, mais un procédé étatisle

On pourrait peut-être soutenir qu'il en est ainsi en fait.

Mais on ne peut pas soutenir qu'il en soit ainsi en droit. En effet, au point de vue du caractère public, la Charte du tra¬

vail (art. 7) fait nettement la distinctionentreles associations

professionnelleset lescorporations pourréserveràcesderniè¬

res la qualité d'organes de l'Etat. Les corporationssont recon¬

nues par la loi comme des organes de l'Etatparce qu'elles

constituent l'organisation unitaire des forces de la pro¬

duction, en représentent les intérêts et parce que ces inté¬

rêts sont des intérêts nationaux. Les associations profession¬

nelles n'ont pas reçu la qualité d'organes de l'Etat parce que leur rôle se limite à l'organisation des rapports des employeurs et des travailleurs.

La législation française. A la différence de la loi ita¬

lienne du 3 avril 1926, la loi française du 24juin ig36 surles

conventions collectives de travail a adopté comme procédé syndicaliste la modalité intermédiaire qui comporte limita¬

tion de la compétence législative du syndicat : pour l'élabo¬

ration de la convention collective en tant que loi de la pro¬

fession, la compétence du syndicat est réduite à un pouvoir

d'initiative et de présentation à l'égard du Gouvernement.

Cette intervention syndicaliste a d'ailleurs eu dans la législa¬

tion française des précédents qu'il faut brièvement rappeler,

carils marquentles progrèsdu procédé syndicaliste enFrance.

à) Lesprécédents. Dans cesdernières années, la collabo¬

ration réglementaire des syndicats avec le Gouvernement a été prévue pour diverses matières relativesàl'organisation du travail. Les syndicats ont été appelés à collaborer aux régle¬

mentations d'application prescrites par certaines lois. Mais le caractère decette collaboration s'estprogressivementtrans¬

formé. D'intervention purement consultative, c'est-à-dire

consistant simplement à donner des avis, l'intervention du

syndicat est devenue une intervention d'initiative et de pré¬

sentation, laissant uniquement au Gouvernement un pouvoir d'approbation delà réglementation

élaboréeparlesyndicat(i).

(1) Surles modes de collaboration des syndicats au pouvoir régle¬

mentaire du Gouvernement,cf. Brethe de la Gressaye, Le syndica¬

lisme, /'organisation professionnelleetCElat, p. 76et s.

Avec la loi du 23 juin igig sur la journée de huit heu¬

res, on ne trouve encore qu'un simple pouvoir consultatif.

Cette loi qui n'avait fait que poserle principe de la journée

dehuit heures, avait décidé que, pour les règlements d'admi¬

nistration publique à intervenir en vue de régler par catégo¬

rie professionnelle les modalités d'application de la loi, les organisations patronales et ouvrières devaient être consul¬

tées, donner leur avis et communiquer les accords conclus déjà entre elles au sujet de la durée journalière du travail.

Cette collaboration futinterprétée comme devant être pure¬

ment consultative. Le syndicat devait se borner à donner

son avis, lequel n'avait aucun caractère obligatoire pour le

Gouvernement. Le syndicat n'avait pas à élaborer le texte du règlement, ni même à participer à cette élaboration. En

outre, les accords intersyndicaux antérieurement conclus et

qui étaient communiquésau Gouvernement nevalaient pour lui que comme simples documents, ne s'imposant nullement

à son pouvoir réglementaire pour le limiter (i).

Le même pouvoir consultatif se retrouve dans la loi du

13juillet 1906surlerepos hebdomadaire. Cette loi avaitprévu

que les dérogations au repos du dimanche ne pouvaient être

accordées par le préfet qu'après avis des syndicats patronaux

et ouvriers intéressés; ce n'était là qu'un simple avis qui ne liait en rien le préfet. Mais une loi postérieure a élargi l'in¬

tervention syndicale.

La loi du 29 décembre 1923 est venue en effet décider que, si les syndicats patronaux et ouvriers d'une région englobant

la majorité des membres de la profession se sont mis d'ac¬

cord pour une certaine organisation du repos hebdomadaire,

à la suite de cet accord intersyndical, le préfet peut, sur la

demande des syndicats intéressés, consacrer réglementaire¬

ment par voie d'arrêté l'organisation prévue par l'accord intersyndical et le sanctionner au besoin par un ordre de

fermeture générale des établissements au jour prévu pour

(1) C. E. Fédération des agents des chemins de fer, 27 mars 1925,

p. 342; Fédération des travailleurs des chemins de fer,2juillet 1926,

p. 683.

le repos. Ce n'est là qu'une faculté pour le préfet. Mais, s'il intervient, il ne peutdécider que conformément aux disposi¬

tions de l'accord intersyndical (i). Ainsi il ne s'agit plus ici

(1) La jurisprudence a formulé les règles suivantes ausujet de l'in¬

tervention du préfet.

a) Conformitéde l'arrêté du préfet avec /'accordintersyndical.

10 Le préfet ne peutprendre son arrêtéqu'envertu de l'accordinter¬

syndical intervenu et conformément à cet accord. Unarrêté non con¬

forme à l'accord serait illégal comme « manquant de baselégale » : C. E. Pachet, 12juin 1925, p. 574.

Aussi l'arrêté dupréfet doitintervenir peu de temps après la conclu¬

sion de l'accord intersyndical, car les intentions des syndicats peuvent changer :C. E. Sijndicatdes charcutiersde Saint-Servan,13 mars1931, p. 283.

2° Pour toute modification de l'arrêté du préfet,un nouvel accord intersyndical doit intervenir : C. E. Syndicat des patrons boulangers d'Annecy, 9 février 1934, p.200. De même, si un nouvel accord inter¬

syndical a été conclu, le préfetest tenu de modifier son arrêté.

Cependantl'arrêté préfectoral peutnepasêtrestrictement lacopie

pure et simple de l'accord intersyndical. L'arrêté peut compléter l'ac¬

cord pardes dispositions de détail destinéesà en assurer l'application : C. E. 27 mars 1925 ; Mazurier, 17 juillet 1925, p. 697.

b) Les syndicats qualifiéspourétablir C accord intersyndical.

Il n'est pas nécessaire quel'accord intersyndical émane de l'unani¬

mité des syndicats intéressés :

C. E. 27 mars 1925, p. 339 (D. 1925. 3. 73. Arrêt contraire aux

conclusions du commissaire du gouvernement Berget quis'était pro¬

noncépour la règle de l'unanimité. Voir aussi en faveur de la règlede

l'unanimité : NotePic, D. 1925. 3. 219) ; Syndicat desmarchands

forains de Limoges, 15janvier1926, p. 47 ; Rey, 29 décembre 1926, p. 1198 ; Société Félix Potin, 13 décembre 1929, p. 1119.

Cependant, à défaut d'unanimité, il faut qu'il y ait adhésion de la majorité des membres de la profession. Il faut donc que les syndicats

intervenants englobent la majorité des membres de la profession. C'est

aupréfet qu'il appartient, en principe, d'apprécier sous le contrôle du

juge si l'accord intersyndical qui lui est présenté émane vraiment de la

majorité de la profession.

C. E. 27 mars 1925, p. 339 ; Syndicat des marchands forainsde Limoges, 15 janvier 1926, p. 47; Richard-Lefranc, 20 mars 1926, p. 320.

Mais il peut y avoir lieu à consultation spéciale s'ily a doute sur l'existence de la majorité prétendue : C. E. Russon, 16 juillet 1929,

p. 320. Il en"est ainsi notamment lorsque l'opinion de la majorité a