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pour y recourir. Au cas de refus de l'une des parties, l'autre

n'a aucun moyen pour la contraindre à se soumettre à

l'ar¬

bitrage.

20 Par ailleurs, la procédure est dominée par les

règles

suivantes. Le procédé syndicaliste est totalement

exclu. La

loi ne prévoit pas la collaboration des syndicats à

la

procé¬

dure. Elle ne les mentionne nulle part. Elle ne vise que les

patrons et les ouvriers en tant que groupements

de fait agis¬

sant par mandataires. Il n'est jamais question

ni des syndi¬

cats, ni de leurs organes statutaires (Gode du travail, art.

io4

et io5).

Toutes les opérations sont à base

conventionnelle

:

la

pro¬

cédure se déroule par une suite d'accords

successifs

entre

les

parties au litige.

Enfin ces opérations sont dirigées par le juge

de paix.

Ainsi en remplacement de l'élément

syndicaliste

qui

fait

défaut, on a un élément étatiste.

3° La procédure se divise en deux opérations successives : la conciliation et l'arbitrage.

La conciliation se déroule de la façon suivante :

L'une des parties saisit le juge de paix de ses

prétentions

et lui désigne ses représentants. Le juge de

paix notifie

à

l'autre partie et l'invite à désigner ses représentants.

Si

ces der niers sont ainsi désignés, les représentants des deux

par-lies se réunissent en comité de conciliation en vue d'établir

un accord sur le litige. Les réunions ont lieu en présence du juge de paix qui est à la disposition du comité pour diriger

ses débats.

Au cas de grève, et à défaut d'initiative de l'une des par¬

ties, lejuge de paix intervientd'office pour inviter les parties

à faire connaître leurs prétentions et à s'engager dans la pro¬

cédure de conciliation et d'arbitrage.

L'arbitrage intervient si la conciliation n'a pas pu aboutir.

A cet effet, si l'accord de conciliation ne s'est pas établi, le juge de paix invite les parties à désigner un ou plusieurs

arbitres. Si les arbitres ne peuvent pas s'entendre sur la solution à donner au différend, ils doivent d'un commun

accord choisir un tiers arbitre pour les départager. Faute

pour les arbitres de s'entendre sur le choix du tiers arbitre,

celui-ci est désigné par le président du tribunal civil. Les différentes décisions prises tant par les parties que par les arbitres sont publiées par voie d'affichage.

Ainsi cette procédure est bien à base conventionnelle. Elle

ne se poursuit qu'avec l'accord des parties. 11 faut que celles-ci s'accordent pour aller en conciliation et constituer le comité de conciliation pour vouloir l'arbitrage et pour

désigner les arbitres. Le refus de Lune des parties arrête

toute procédure. Mais ce caractère strictement conventionnel

est bien dans l'espritde

l'arbitrage.

En outre, la procédure est plutôt étatiste que syndicaliste.

C'est en effet l'autoritéjudiciaire qui est appelée à la diriger.

Lejuge de paix joue le rôle d'intermédiaire entre les parties

pour faire progresser la procédure et le président du tribunal civil intervient pour la désignation du tiers arbitre.

b) L'arbitrage obligatoire : Loi du 31 décembre 1936. Le

régime de l'arbitrage dans les conflits collectifs du travail a

été profondément modifié par la loi du 3i décembre ig36 complétée par le décret du 16 janvier 1937 et l'arrêté du 3 février 1937. L'élaboration de la réforme a été marquée par

une lutte très vive soutenue par le Gouvernement au sujet de l'introduction des procédés syndicalistes dans l'intervention

arbitrale. C'est pourquoi cette élaboration est passée par

beaucoup de péripéties.

C'était un des points importants du programme du Front populaire issu des élections de mai 1936, de remplacer par

un système d'arbitrage obligatoire le système d'arbitrage

facultatif de laloi du 27 décembre 1892. On tenait essentiel¬

lement à ce que l'arbitrage fut effectivement pratiqué et l'ex¬

périence avait prouvé que les intéressés profitaient du carac¬

tère facultatif de l'arbitrage pour ne pas y recourir.

Le ministère Blum, poussé par sa tendance aux procédés syndicalistes et pensant d'ailleurs mieux assurer le succès de

la réforme, essaya le moyen suivant pour élaborer une pro¬

cédure d'arbitrage ayant chance d'être acceptée par les deux parties, les patrons et les ouvriers. 11 chargea la confédéra¬

tion générale du patronat et la confédération générale du

travail d'établir d'un commun accord un projet d'organisa¬

tion de la procédure d'arbitrage. Mais, après deux mois de discussions, l'accord ne put pas se faire entre les deux con¬

fédérations. Alors le Gouvernement se décida à élaborer lui-même et à déposer un projet de loi sur l'arbitrage obliga¬

toire.

En outre du caractère obligatoire de l'arbitrage, ce projet

était caractérisé par l'admission complète des procédés syn¬

dicalistes. Il contenait la reconnaissance expresse de la par¬

ticipation des syndicats les plus représentatifsà la procédure

de conciliation et d'arbitrage. II visait notamment la partici¬

pation des deux confédérations générales du patronat et du travail, lesquelles étaient expressément nommées dans le

texte.

Le projet, accepté naturellement par la Chambre des dépu¬

tés, rencontra au Sénat une vive et irréductible hostilité à

cause de la participation des syndicats et de la limitation de

cette participation aux syndicats les plus représentatifs, à

cause de cette sorte de reconnaissance officielle des deux

grandes confédérations, et, particulièrement, à cause de la

reconnaissance de la C. G. T. Cette hostilité du Sénat obligea

le Gouvernement à retirer son projet et à adopter une autre combinaison pour réaliser la réforme de l'arbitrage.

R. BONNARB. 4

La loi monétaire du ier octobre 1936 avait donné auGou¬

vernement le pouvoir d'établir par décret pour six mois, une

procédure d'arbitrage obligatoire pour résoudre les conflits collectifs provoqués par la hausse du coût de la vie du fait de la dévaluation etrelatifs à la rédaction, exécution et revision des clauses des conventions ayant trait aux salaires.

Comme cette disposition avait été introduite dans la loi monétaire sur l'initiative du Sénat, le Gouvernement pensa pouvoir sortir de l'impassedans laquelle l'oppositionduSénat l'avait acculé, en proposant d'étendre indistinctement à tous les conflits collectifs du travail cepouvoir réglementaire extra¬

ordinaire accordé par la loi monétaire pour certains conflits.

En effet, cela fut finalement accepté non seulement par la Chambre, mais aussi par le Sénat. C'estprécisément ce qui a

fait l'objet de la loi du 3i décembre 1936 : elle habilite le Gouvernement à établir poursix mois une procédure de con¬

ciliationet d'arbitrage.Ce pouvoir réglementaire exceptionnel

a été exercé dans le décret du 16 janvier 1937. L'arrêté du

3 février 1937 estvenu compléter le décret en cequi concerne les commissions départementales de conciliation.

I. Leprojet du Gouvernement. Les principes du projet

du Gouvernement étaient les suivantes :

Obligation derenoncer à la grève ou au lock-out pour pou¬

voir recourir à l'arbitrage; Division de la procédure en deux parties constituées l'une, par la conciliation, l'autre, par

l'arbitrage ; Participation des syndicats patronaux et ouvriers aux procédures de conciliation et d'arbitrage; cette

participation syndicale remontant à travers les degrés de la hiérarchie syndicale jusqu'aux deux grandes confédérations générales qui étaient expressément nommées : la confédé¬

ration générale du patronat et la confédération générale du

travail (1).

(1) Le caractère syndicaliste de la procédure de conciliation et d'ar¬

bitrageprévueparle projetdu Gouvernementfut maintes fois affirmée

au cours des débats. Voici notamment dansquels termess'exprime àce

sujet lerapporteurduprojetàla Chambredesdéputés,M.Albert Paulin:

« Toute l'économie du projet repose surl'idée que c'est dans le cadre de

Voici les détails du projet quant à l'organisation des pro¬

cédures.

La conciliation était organisée en trois instances succes¬

sives. La demande en conciliation devait d'abord être portée

devant la commission départementale de conciliation com¬

mission prévue par une circulaire du 3 juillet 1986 et com¬

posée de représentants des chambres de commerce et des

unions départementales des syndicats.

La deuxième instance de conciliation était portée devant

une commission mixte formée par les fédérations nationales

dessyndicats intéressés les plus représentatifs. Enfin il était prévu comme troisième instance une commission nationale

de conciliation établie par les deux confédérations générales

du patronat et du travail, comme étant les confédérations les plus représentatives.

20 L'arbitrage était prévu parle projet comme devant inter¬

venir nécessairement au cas de refus de concilier ou d'in¬

succès de la conciliation. Sur la question essentielle, la

formation de l'organe arbitral, voici quelles étaient les dis¬

positions du projet.

Suivant le principe de tout système arbitral, le ou les arbi¬

tres devaient être désignés par les parties, sur invitation de

la commission nationale de conciliation, et le surarbitre,, désigné par les arbitres. Seulement, pour que l'arbitrage fut

effectivement obligatoire, le projet prévoyait une désignation

d'office des arbitres ou du surarbitre, au cas de défaillance

d'une des parties. Cette désignation devait être faite pour

les

arbitres par le ministre sur deux listes de quinze noms éta¬

blie par la section permanente du conseil national économi¬

que d'après deux listes de trente noms établies

respective¬

ment par les deux confédérations du patronat et du travail

ou librement par le ministre faute pour cette liste de pré¬

sentation d'avoir été établie. Quant au surarbitre, à défaut

la profession et avec l'intervention des organisations syndicales d'em¬

ployeurs et de salariés que doivent jouer les procédures de règlement

des conflits collectifs du travail telles qu'il les organise » (Chambre,

1erdécembre 1936,p. 3170).

de nomination par les arbitres, il devrait être désigné par le président du conseil sur une liste de quinze noms établie en commun par les deux confédérations générales du patronat

et du travail, ou librement par le président du conseil, faute pour cette liste d'avoir été établie.

En résumé, dans ce projet, l'arbitrage était bien rendu

obligatoire, puisque il ne pouvait pas être entravé par le

refus de l'une des parties de compromettre et de désigner

l'arbitre. D'autre part, tant pour la conciliation que pour

l'arbitrage,

le procédé syndicaliste était largement utilisé

sousforme d'interventiondessyndicats les plusreprésentatifs.

Enfin, Ies deux confédérations générales du patronat et du

travail étaient désignées et expressément nommées. C'est cette tendance syndicaliste du projet du Gouvernement qui

souleva l'opposition du Sénat et entraîna l'échec du projet;

car, si le Sénat ne voulait pas du procédé syndicaliste, le Gouvernement y tenait essentiellement et d'une façon irré¬

ductible.

II. L'opposition du Sénat. L'opinion de la grande majorité du Sénat était certainement contretoute reconnais¬

sance expresse par la loi de l'intervention des syndicats dans

les procédures de conciliation et d'arbitrage. On voulait s'en tenir au système de la loi du 27 décembre 1892 : les syndi¬

cats ne sont pas exclus, mais ils ne sont pas non plus nom¬

més et l'arbitrage peut ainsi se dérouler en dehors d'eux, exclusivement entre les patrons et l'ensemble des ouvriers

qui sont en conflit, sans intervention des organes statutaires des syndicats. On mit en avant que cette reconnaissance des

syndicats était inadmissible parce que, certains patrons et

certains ouvriers n'étant pas syndiqués, le syndicat même le plus représentatif ne se trouvait pas être vraiment le repré¬

sentantde la profession et venait parler indûment pour les

non syndiqués; qu'elle était surtout inadmissible comme

portant atteinte à la liberté syndicale : liberté de formation

et d'adhésion aux syndicats. Mais le Sénat se montra surtout

irréductiblement hostile à la reconnaissance officielle des confédérations générales du patronat et du travail nommé¬

ment désignées. Spécialementle monopole de représentation

accordé à la G. G. T. lui parut absolument inadmissible

considérantque de nombreux syndicats ne sont pas affiliés à

la C. G. T. Ces points de vue furent exposés avec beau¬

coup de vigueur par plusieurs sénateurs et notamment par MM. Millerand (i), Ghampetier de Ribes (2) et

Ray-(1) « ... Lesortdes litiges à réglerseraremisaux mains de la confé¬

dérationgénérale du travail qui ne représente pas l'ensemble des tra¬

vailleurs, car, en dehors d'elle, il est des travailleurs qui réclament à l'heure actuelle ledroit d'être représentés librement. Ce droit vous le leurrefusezendonnant à la confédération générale du travail un véri¬

table monopole, c'est elle qui a la haute main sur le sort de tous les travailleurs.

On vousdemande de voter un projetquiporte l'atteinte la plus grave

auxlibertés des associations ouvrières qui ne font paspartie, comme c'estleurdroit, de la confédération générale du travail. On organise

ainsiun véritable monopole » (Sénat, séance du 15 décembre 1936,

p. 1613).

(2) « Nousnepouvonsaccepter ni l'un ni l'autre deces projets parce que nous ne croyons pas possible d'attribuerà aucune confédération syndicale le pouvoir de représenterofficiellement la profession.

Est-ceà dire qu'une confédération patronaleououvrière, si nombreuse

etsipuissante qu'elle soit, puissereprésenterofficiellement la profession?

Jedis quec'est concevable dans un Etat totalitaire, lorsqu'il existe un

syndicalisme d'Etatauquelunedictature confère le monopole de larepré¬

sentation professionnelle.

Je dis quecelaest incompatible, non pas avec la loi que nous pour¬

rions modifier, mais avecla conception démocratique que nous avons

en Franceet àlaquelle,je pense, nous nevoulons pas renoncer,de l'or¬

ganisation syndicale.

En effet, en France, le syndicat n'estpas obligatoire. Tout syndiqué peutseretirer d'unsyndicatquand il lui plaît. Voilà lepremier principe.

Secondprincipe :tout syndicatrégulièrement constitué a vocationpour représenter et défendrel'intérêt collectif de la profession.

Donner à un seulsyndicat ou à uneseule confédération de syndicats

le droit exclusif de représenter la profession, c'est donc interdire aux autressyndicats l'exercice dece droit essentiel ; c'est rendre obligatoire

l'adhésion detous à un syndicat unique; c'est faire du syndicalisme

d'Etat;c'est violerexpressémentleprincipe auquelnousvoulons rester attachés, de la liberté syndicale.

Onpeut regretterquel'unité syndicale n'existe pas en France. C'est

naud (r), rapporteur de la commission de législation. En outre, la tentance antisyndicaliste trouva son expression dans

un amendement déposé par M. le sénateur Maulion qui pré¬

voyait une procédurede conciliation et d'arbitrage dont toute espèce d'intervention syndicale était exclue (2).

Contre la thèse du Sénat, M. Léon Blum maintint avec

beaucoup d'énergie le point de vue syndicaliste du Gouver¬

nement. Il s'efforça de démontrerque l'intervention des

syn-la difficulté, ruais c'est la grandeur des démocraties, où l'unité morale n'existe pas non plus. C'estla servitude, mais c'estlagrandeurdenotre démocratie française que tous les citoyens n'y soientpas astreints aux mêmes disciplines, que notre respect de la personne humaine et de la libertéindividuelle nousinterdised'imposer à nos concitoyensjene sais quelconformisme de lintelligence, du cœur et de l'activité » (Sénat,

Séance du 15 décembre 1936, p. 1614).

(1) « Qu'onle veuilleou non, on crée un véritable monopole aupro¬

fitd'une catégorie de syndicatset onviolepar même la loi de 1884en empêchant d'autres syndicatsdesterenjusticeet de représenter les inté¬

rêts professionnels de leurs membresdevanttoutes lesjuridictions. Car enfin, pourquoi ne pas le dire?la confédération générale dupatronat français ne représente pasplus l'ensemble des patrons que la confédé¬

ration générale dutravailnereprésente l'ensembledesouvriers»(Sénat,

séance du 15 décembre 1936, p. 1612).

(2) Voir l'exposé de l'amendement par M. le sénateur Maulion :

Sénat, séance du 17 décembre 1936, p. 1637.

Voici les dispositionsessentiellesde laprocédure proposée.

La conciliation devaitêtreassuréeenpremière instanceparune com¬

mission départementaleourégionaledeconciliation nommée par le pré¬

fetsur présentation des conseils de prudhommeset, en deuxième ins tance, par une commission nationale de conciliation. Cette dernière commission devait être annexée auconseil nationaléconomique etdivi¬

sée ensections correspondant aux sections du conseil. Les membres de

chaque section devaientêtre nommés parle secrétairegénéral duconseil

sur présentation des membres de la section.

Pourl'arbitrage, deux instancesétaientégalementconstituées :l'une, par des tribunauxarbitrauxrégionaux, l'autre, parun tribunalarbitral national. Les listes d'arbitres devant être établies pour les tribunaux régionaux par lesconseils de prudhommesde la régionetpourletribu¬

nal national par les sections professionnellesdu conseilnational écono¬

mique. La liste des surarbitres devait être établie par la section per¬

manente du conseil national économique.

dicals était non seulement possible, mais même

nécessaire.

Il présenta à ce

sujet les

arguments

suivants

: