• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 : Théorie intégrative

A) Un champ de bataille

Depuis sa création, la RBR a été attaquée dans une multitude de publications (par ex. Mair, 2004a). Dans la période plus récente, l’on en est arrivé à une bataille en mode ping-pong de type « nous avons dit/ils ont dit » (Wormith et al. 2012 : 111).

Une accusation fréquemment proférée à l’encontre de la RBR, tant de la part du camp de la désistance, que de celui de la GLM, est que la RBR serait un modèle « punitif » et « non-éthique » qui relèverait d’une « gouvernance » répressive. Cet argument est dirigé tant contre les outils d’évaluation actuariels (Harcourt, 2006 et en France, par ex. Dubourg et Gautron, 2015) que contre ses méthodes de traitement. Il leur est reproché de se focaliser exclusivement sur la sécurité publique plutôt que sur la réinsertion (Canton, 2012 ; McNeill, 2009a). Toutefois, les accusateurs confondent ici la théorie, qui n’a rien de répressif, comme la lecture de leurs écrits le démontre très largement (Andrews et Bonta, 2010 ; Bonta et Andrews, 2017) et les politiques pénales et/ou pratiques professionnelles, à supposer qu’il soit vrai que les politiques répressives soient constamment en augmentation (Jonson et al., 2013) et encore que Fergus McNeill ait dû admettre par la suite que la RBR n’était pas responsable de ces dernières (McNeill, 2012).

Le recours à des méthodes d’évaluation non EBP peut au demeurant être tout aussi non éthique, dans la mesure où l’évaluation aura bien lieu de toute façon et notamment chaque fois qu’un agent de probation rédige un rapport ou exprime un avis. A l’heure actuelle, la meilleure façon connue de limiter, certes imparfaitement, les erreurs et biais ou la discrimination est de s’appuyer sur un protocole. Au demeurant, la Cour Suprême des Etats-Unis a déclaré que des outils d’évaluation qui n’avaient pas été évalués et qui étaient susceptibles d’avoir un impact sur la liberté des prévenus ou accusés, violait les règles du procès équitable et que, lorsqu’ils étaient utilisés au stade du prononcé de la peine, ils pouvaient mettre en cause le 8e amendement » (United States v. C.R., 792 F. Supp. 2d 343, 461 (E.D.N.Y. 2011)), soit l’équivalent de l’article 5 de la convention EDH. Nous avons hélas, tout du long de la présente recherche, constamment été les témoins d’évaluations « dans le marc de café » durant le très court temps que représentait la LSC – les conditions procédurales aggravant forcément ici le problème – où, généralement les CPIP, mais parfois aussi le parquet, concluaient sans la moindre argumentation ni support : « défavorable : risque de récidive ». Voilà l’alternative quotidienne et réelle à laquelle nous renvoient les opposants aux outils d’évaluation. Si ces derniers ne sont pas parfaits, ils constituent pour l’heure une approche très hautement supérieure à ces

l’investigation quelque peu supérieure qui le caractérise, pour autant les « évaluations écrites » sur lesquelles reposent les avis formulés en CAP sont tout aussi vide de support empirique et fort peu documentés sur le plan matériel.

D’autres arguments qui sont formulés à l’encontre des méthodes de traitement proposées dans le cadre RBR ne devraient pas mériter la moindre attention. Dès lors qu’ils sont encore parfois mentionnés dans notre pays, il nous faut toutefois en dire quelques mots. Ils peuvent être résumés comme suggérant que toute tentative pour tenter de modifier le sort des délinquants et leur parcours chaotique relève d’une croyance dans la « production de la croyance technologique » (Harcourt, 2007: 32). Dans bien des cas ces arguments manquent manifestement de logique. Tel est par exemple le cas lorsqu’ils se plaignent de taux de base et de risque d’overriding (Gottfredson et Moriarty, 2006) ou du fait que de faux positifs ou négatifs existent (Casey, 2016), mais sont aveugles quant au fait que l’alternative (Harris, 2003), comme c’est si souvent le cas en France et nous l’avons mentionné supra, est un jugement clinique tiré d’un chapeau, lequel est immanquablement le reflet d’un considérable manque d’informations tant factuelles que cliniques de qualité et d’une bonne dose de préjugés. En dehors de protocoles, le cerveau humain recherche dans ses « bases de données heuristiques » la solution à ses problèmes (Kahneman (2012). Lesdites bases de données comportent justement une très bonne dose de préjugés et d’erreurs d’appréciation. Un tel jugement présente à l’évidence un risque bien supérieur de faux positifs et de faux négatifs (Baratta et al., 2012). Les outils d’évaluation ne sont certes pas la panacée et, dans bien des cas, une analyse des schémas de pensée délinquants (Kroner et Morgan, 2014) sera également nécessaire. Toutefois, le véritable défi que ces outils soulèvent est de nature juridique et concerne la preuve, le procès équitable et le contrôle normatif et judiciaire (H-Evans, 2016 c).

Dans bien des cas, c’est le traitement cognitif et comportemental (TCC) qui est critiqué comme étant une méthode taille unique et comme menaçant l’entretien individuel traditionnel (Burnett, 2004). C’est pourtant la méthode de traitement psychologique la plus validée au monde à l’heure actuelle (Epp et Dobson, 2010 et, s’agissant de la délinquance, v. la littérature citée par Andrews et Bonta, 2010 et dans Tafrate et Mitchell, 2014). Au demeurant, quelle est l’alternative proposée sinon du travail social inefficace à l’ancienne (Fischer, 1973) ou de la probation « Rien ne Marche » (Martinson, 1974), ou encore de la psychanalyse à long, voire très long terme (Smit et al., 2012) tout aussi inopérante. Il faut cependant se souvenir que les TCC se présentent sous une variété de formes inégalement évaluées (Dobson, 2010) et que si le travail social à l’ancienne est sans effet sur la récidive, pour autant, il représente un devoir humain et humanitaire et contribue incidemment à l’alliance thérapeutique si nécessaire dans la RBR elle-même.

De fait, si lorsque les programmes RBR sont mis en œuvre de manière industrielle, l’accusation de modèle taille unique peut être tout à fait pertinente, ce n’est nullement ainsi que l’ont conçu ses créateurs. Bien au contraire, leur insistance sur la réceptivité contredit totalement les affirmations de leurs opposants. Les créateurs de la RBR ont par ailleurs insisté depuis fort longtemps sur l’importance des différences individuelles (Andrews et al., 1990).

Néanmoins, une critique faite par Gannon et Ward (2014) mérite attention. Selon ces auteurs, les TCC doivent être mis en œuvre par des psychologues ayant une expérience suffisante. Cet argument apparaît d’autant plus pertinent lorsque l’on se souvient qu’un très grand nombre de probationnaires présentent des troubles de la personnalité, dont l’approche requiert d’exceptionnelles qualités professionnelles et l’utilisation de formes de TCC particulières (par ex. la thérapie des schémas

124 : Keulen de Vos et al., 2010; Young et al., 2003) ainsi que des méthodes programmatiques et structurées (Livesley et al., 2016). Il nous semble quant à nous important d’ajouter qu’en réalité, les données empiriques ne sont guère optimistes et pour le moins faibles s’agissant de l’amélioration des troubles de la personnalité, particulièrement le trouble antisocial (Antisocial Personality Disorder, ci-après ASPD) (Matusiewiczet al., 2010). Or, précisément, l’ASPD est, selon la RBR elle-même, l’un des besoins criminogènes statistiquement les plus pertinents (Andrews et Bonta, 2010 ; Bonta et Andrews, 2017). Ceci pourrait peut-être expliquer pourquoi même dans des conditions optimales, la RBR produit des résultats somme toute assez modestes – quoi qu’infiniment supérieurs à toute autre méthode. Ceci pourrait par ailleurs expliquer pourquoi la RBR et sa méthode de traitement, les TCC, produisent des résultats nuls sur les auteurs de violence domestique (Feder et al., 2008; Smedslund et al., 2011), lorsque l’on se souvient que le continuum antisocial est très fortement représenté dans les violences domestiques (Holtzworth-Munroe et Stuart, 1994; Holtzworth-Munroe et al. 2000 et plus encore: Johnson, 2006; Dixon et Browne, 2003).

Une autre critique soulevée spécialement par les tenants de la désistance et de la GLM (par ex. Ward et al. 2012), concerne le manque de considération de la RBR pour l’autodétermination des personnes prises en charge. Bien que la RBR ait récemment ajouté la notion d’ « autonomie personnelle » à son modèle en tant que « grand principe » (Andrews et Bonta, 2010 : 46, n° 2), elle ne comporte effectivement aucune théorie de la motivation. Pour sa part, la GLM affirme avoir inclus la SDT dans son modèle, mais en réalité, force est de constater que la SDT n’a pas été solidement ancrée à la GLM et sa méthode de traitement et que la GLM a d’ailleurs une vision distincte des besoins humains fondamentaux dont l’origine théorique et empirique n’est pas très claire et semble emprunter à une multitude de modèles (v. par ex. Yates et al., 2010). De son côté, la RBR a répondu totalement « hors sujet » que les partisans de la GLM affirmeraient que « le comportement délinquant sera prévenu lorsque les condamnés deviendront motivés plus intrinsèquement et plus autodéterminés » et que ceci voudrait finalement dire que l’on devrait prêter moins attention « aux standards de bon comportement en société et plus attention au renforcement de leur bien-être » (Andrews et al., 2011: 740). En réalité, cependant, la SDT offre, nous l’avons vu supra, une théorie validée empiriquement de la motivation, vise à favoriser le changement à long terme chez les individus et n’est pas du tout incompatible et bien au contraire complémentaire, des TCC. Certes, elle n’a pas encore été validée, nous l’avons également souligné, sur les délinquants, mais l’a été sur divers comportements humains (Sheldon et al., 2013) et notamment dans le domaine voisin de l’addiction (Ryan, et al. 1995; Zeldman et al. 2004). Pour cette raison, la SDT devrait être intégrée à toute construction théorique intégrant la motivation, car elle est susceptible d’améliorer la compliance normative ou adhésion (Bottoms, 2001; Robinson et McNeill, 2008) et à réduire la résistance active (Sučić et al. 2014) et leur conséquence, les très dangereux taux d’attrition dont nous avons déjà parlés supra.

Il est notamment important de souligner que les recherches SDT ont montré qu’encourager la motivation intrinsèque, naturellement en la guidant de manière prosociale, produisait des résultats à long terme. Ceci aurait dû en bonne logique être relevé par les spécialistes de la désistance, lesquels font pourtant à juste titre remarquer que la plupart des recherches-évaluation ne mesurent que sur la base de résultats officiels et qui plus est à court terme, et qu’en réalité, sortir de la délinquance est un très long processus (Farrall et al., 2014) et qu’en attendant qu’il se produise, le système pénal

parvient, dans le meilleur des cas, à obtenir une soumission à court terme (Robinson et McNeill, 2008).

Il se trouve que nombre de spécialistes de la désistance exercent au Royaume-Uni, où les programmes RBR n’ont pas initialement été couronnés de succès (Cannet al., 2003; Falshawet al., 2003) ; une réalité embarrassante que le gouvernement devait d’ailleurs tenter de dissimuler en exerçant des pressions sur les chercheurs (Maguire et Raynor, 2006). La cause majeure de l’échec de ces programmes tenait toutefois non à un défaut dans la théorie même, mais à leur immense taux d’attrition (Martin et al., 2009; Olver et al. 2011) et de violation du suivi (Kemshall et Canton, 2002), du fait précisément d’une volonté d’un exécutif centralisé trop pressé de « forcer » l’implémentation industrielle desdits programmes. Cet échec a toutefois eu le mérite d’attirer l’attention sur la question de l’intégrité des programmes, la « probation dans le monde réel » étant aujourd’hui un domaine de recherche très prolifique. Hélas, d’autres dimensions de l’échec d’Outre-Manche n’ont pas été suffisamment étudiés et notamment, la nécessité de développer des approches efficaces des personnes atteintes de troubles de la personnalité, qui sont précisément les moins compliantes et les plus fuyantes ou encore la réduction des files d’attente (Kemshall et Canton, 2002) ou de la proximité des lieux de suivi (Lockwood, 2012) et la nécessité de se tenir à l’écart de mises en œuvre industrielles. Observons pour notre part qu’un tel débat aurait nécessité de s’appuyer sur les théories du management sus-évoquées (not. Lee et al., 2010) et aurait dû surtout questionner, comme nous l’avons fait supra, sur la base des théories de l’implémentation, les formes centralisées et étatiques en mode « prisonbation » (H- Evans, 2015 e) ainsi que les

« recherches monopolistiques » (Raynor, 2008) qui leur sont immanquablement liées.

Récemment la GLM et ses sympathisants ont commencé à s’attaquer aux fondements théoriques même de la RBR. Pour résumer une série d’arguments d’une extrême complexité, il est affirmé, en premier lieu que la RBR serait par essence athéorique car elle établirait des principes sur la base de données empiriques (approche data-driven) et non sur la base de théories (approche theory-driven ou encore abductive: Cording, et al., 2016; Polaschek, 2016). Il est ajouté que la RBR n’aurait en particulier aucune théorie de la délinquance (Casey et al., 2013).

Les auteurs GLM et d’autres opposants arguent, en deuxième lieu, que les « besoins » criminogènes ou facteurs de risque dynamiques manquent de validité conceptuelle (du construit) et échouent à établir l’existence d’un lien causal entre de tels facteurs et la récidive (Cording et al., 2016). Il peut parfois être même illogique d’affirmer que les besoins criminogènes ont causé l’infraction, lorsque ce sera à l’inverse l’infraction qui aura contribué au besoin criminogène. Tel est par exemple le cas en matière de violence : les attitudes qui soutiennent la violence sont souvent le résultat même du fait d’avoir commis antérieurement des infractions violentes (Klepfisz et al., 2016). Il est, en troisième lieu, ajouté que, bien que la RBR insiste fortement sur la nécessité de s’appuyer sur des preuves empiriques solides, l’essentiel des recherches sur lesquelles elle repose elle-même ne sont pas véritablement expérimentales : elles ne sont pas randomisées, ce qu’elles ne peuvent raisonnablement être pour des raisons éthiques et juridiques. Il s’ensuit que ses créateurs et partisans ne devraient pas user de la terminologie de la causalité et, en ses lieux et place, utiliser celui de l’association (Serin et al., 2016: 153). De plus, ce qui cause le crime n’est pas nécessairement ce qui le maintient (« causalité asymétrique »). Ces critiques contestent également la pertinence des prétendus facteurs protecteurs, lesquels ne sont guère plus que la forme inversée (Serin et al., 2016: 157, citant Baird, 2009; Harris et Rice, 2015) des facteurs de risque (Polaschek, 2016 ; Serin et al.,

126 2016). Plus récemment, Jean-Pierre Guay a toutefois pu montrer la pertinence d’une partie, mais d’une partie seulement, des facteurs de protection (Guay, à paraître). Il est piquant de constater que l’on y retrouve l’existence d’un emploi, élément sur lequel insistent les théoriciens de la désistance, mais point, habituellement, du moins de manière centrale – ils ne font pas partie des « Quatre Centraux » (mais v. toutefois l’édition de 2017 de Bonta et Andrews qui remet en cause la différence entre quatre centraux « et « quatre secondaires »)– ceux de la RBR. En outre, à tout le moins, si les facteurs protecteurs sont repérés et traités, les facteurs dynamiques, quelle que soit leur pertinence empirique et leur validité théorique, sont de nature à favoriser l’établissement d’une alliance thérapeutique (Woldgabreal et al., 2014).

Un autre type d’argument provient des auteures féministes. Ces dernières contestent encore aujourd’hui que le genre soit une question de réceptivité – la position d’Andrews et Bonta – et considèrent que les femmes ont des besoins criminogènes distincts (Hannah-Moffat, 2016) ou que ceux-ci se présentent différemment (Taylor et Blanchette, 2009). De son côté, l’origine ethno- culturelle est bien considérée par la RBR comme étant un facteur de risque – mais un facteur de risque modéré ne faisant pas partie des « Huit Essentiels »– si bien que les critiques ont raison d’affirmer que puisque la RBR est aveugle sur les questions politiques et sociales, elle se refuse à voir que cela est dans une proportion importante le résultat de la discrimination et du racisme, ainsi que de la pauvreté (Hannah-Moffat, 2016). Il est exact que la RBR se présentant comme étant une méthode de traitement généraliste applicable à toutes les formes de délinquance tend à nier ou minimiser l’existence de spécificités, qu’il s’agisse de certaines catégories de personnes (les femmes ou d’autres cultures) ou de catégories de délinquants (par ex. les auteurs de violence, pour lesquels, au moins pour partie, des besoins criminogènes particuliers sont en cause : Douglas et Skeem, 2005.

V. par ex. pour les auteurs de violence domestique : Feder et al., 2008 ; Smedslund et al., 2011). Cette minimisation était particulièrement forte dans la cinquième édition d’Andrews et Bonta (2010), les auteurs passant beaucoup de temps à faire rentrer dans les tiroirs RBR des infractions comme les faits de violence domestique, d’infraction à caractère sexuel, de stalking, etc. Si l’utilité de la RBR ne fait nul doute pour ce type d’infraction, en nier les particularités – par exemple pour la délinquance sexuelle ne pas faire le lien avec les théories générales et ses composants essentiels (il est vrai notamment théorisé par Ward – Ward et al., 2006) ou, pour la violence domestique ne pas faire référence à la dimension patriarcale et à l’entitlement particulier qui en découle, ni à la proportion considérable de troubles de la personnalité chez les auteurs – est pour le moins réducteur notamment en termes d’efficacité.

De son côté, la RBR a critiqué tant les théories de la GLM que de la désistance; avec plus de virulence envers cette dernière. Avec un indéniable humour, ses créateurs se sont moqués de l’entreprise de « destruction de la connaissance » (v. en particulier, Andrews et Bonta, 2010 : 537-538, Note Technique n° 2.2). Ils se sont aussi moqués du fait que la désistance est essentiellement de nature qualitative voire essayiste (Andrews, 2011). Ils ont toutefois, ce faisant, ignoré les preuves empiriques considérables dérivées des études longitudinales de ces derniers. Il est indéniable, néanmoins, que la RBR peut aisément revendiquer que sa méthode de traitement est empiriquement très supérieure (v. Andrews et Bonta, 2010 pour une présentation complète). Ses auteurs ont par ailleurs insisté sur le fait que la validité des objets du traitement qui sont proposés tant par la GLM (des « biens ») que la désistance (le capital social) n’a nullement été démontrée en matière de récidive (Andrews, 2011; Andrews et al., 2011). Sur ce dernier point, toutefois, la GLM a répondu que tant les besoins criminogènes chers à la RBR que les « biens » devaient être visés (Ward

et al., 2012. Et déjà : Yates et al., 2010). Ajoutons pour notre part, une fois de plus, que traiter du capital social et d’autres besoins humains est, quoi qu’il en soit de leur impact sur la récidive, vital si l’on veut établir une bonne alliance thérapeutique et constitue par ailleurs un devoir humain et, dans certains cas même, une obligation juridique ou professionnelle.

Par ailleurs, les partisans de la RBR estiment qu’à l’heure actuelle la GLM n’a rien d’unique (Wormith et al., 2012). Récemment, ils ont accusé la GLM d’être trop simpliste et même potentiellement dangereuse, en ce qu’elle viserait à rendre les délinquants heureux (Bonta et Andrews, 2003). Cet argument peut toutefois être aisément contré, car la GLM est également concernée par la sécurité publique. En revanche, tout en adressant leurs « meilleurs vœux » à la GLM (Andrews et Bonta, 2010 : 512), les théoriciens de la RBR ont argué, jusqu’à présent de manière convaincante, que le support empirique de la GLM en était « encore à ses balbutiements » (Wormith et al., 2012 : 116).

Le débat assez féroce, mais constructif, entre la RBR et la GLM a quoi qu’il en soit produit des effets positifs. Il a en effet contraint les deux camps à mieux clarifier leurs positions et à améliorer leur modèle. Ce faisant, ceux-ci se sont rapprochés l’un de l’autre. Il est en outre patent qu’en dépit des joutes académiques, le respect mutuel est apparent (par ex. Andrews et al., 2011).

Les partisans de la RBR sont bien plus cruels envers la désistance. Même lorsqu’ils paraissent leur faire crédit de quelque qualité, ils ne peuvent parfois s’empêcher de diriger des piques par la même occasion. Ainsi, peu avant son décès, Andrews avait-il affirmé (Andrews, 2011 : 17) qu’il considérait que percevoir la désistance comme étant foncièrement opposée à la RBR était une erreur qui pouvait s’expliquer par le fait que certains des théoriciens de la désistance étaient vexés du fait que « leurs variables préférées dans le champ de la criminologie critique sont d’une pertinence nulle ou minime ». En réalité ils distinguent manifestement selon les auteurs de la désistance, entre ceux qui ont mené