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TRAFICS D’ENFANTS : LES ENJEUX D’UNE RÉPRESSION NATIONALE ET

INTERNATIONALE

DAMIEN VANDERMEERSCH

Vice-président et Juge d'instruction au Tribunal de première instance à Buxelles Professeur à l'Université Catholique de Louvain

Résumé

La conférence se divise en deux grandes parties. Dans la première, l’auteur développe la problématique des poursuites exercées par les juridictions nationales en prenant pour exemple la situation belge. Il aborde le cadre légal des poursuites exercées devant les juridictions nationales en énumérant les incriminations intégrées dans leur droit national ainsi que les compétences du juge national, l’initiative des poursuites en expliquant le rôle du ministère public, des parties civiles et en dressant un inventaire non exhaustif des difficultés auxquelles se heurte l’action de la justice.

Dans la seconde partie, l’auteur discute l’idée d’une incrimination en droit international des infractions graves commises à l’égard des enfants. Il analyse la définition, les règles de compétences et l’institution d’une compétence universelle, l’extradition et l’entraide judiciaire, la protection des droits et intérêts des enfants victimes.

Le but est de faire prendre conscience que le volet répressif n’est pas suffisant et qu’un décalage important subsiste entre les déclarations d’intention et les réalités du terrain.

Zusammenfassung

Der Vortrag besteht aus zwei Teilen. Im ersten Teil erörtert der Autor die Problematik der Strafverfolgung vor der innerstaatlichen Gerichtsbarkeit am Beispiel Belgiens. Den gesetzlichen Rahmen solcher Strafverfolgungen erläutert er, indem er die im nationalen Recht erfassten Anschuldigungen und die Zuständigkeiten der nationalen Richter aufzählt. Wie es zu einer Strafverfolgung kommt, zeigt er anhand der Rolle des Staatsanwaltes und der Zivilparteien auf. Schliesslich listet er - wenn auch nicht vollumfänglich - Hindernisse auf, die die Arbeit der Justiz beeinträchtigen.

Im zweiten Teil greift der Autor die Idee auf, schwere Verbrechen gegen Kinder rechtlich international zu verfolgen. Er analysiert die Definition, die

Regelung der Zuständigkeiten, die Einführung einer universalen Zuständigkeit, die Auslieferung und die Rechtshilfe, den Schutz der Rechte und Interessen der Kinder in ihrer Opferstellung.

Bewusst gemacht werden soll, dass das repressive Vorgehen bei weitem nicht ausreicht, dass die Absichtserklärungen und die Wirklichkeit oft weit auseinander driften.

Resumen

La conferencia se divide en dos grandes partes. En la primera, el autor desarrolla la problemática de las demandas ejercidas por las juridicciones nacionales tomando como ejemplo la situación belga. Aborda el marco legal de las demandas ejercidas delante de las juridicciones nacionales enumerando las incriminaciones integradas en su derecho nacional así como las competencias del juez nacional, la iniciativa de las demandas explicando el papel del ministerio público, de las partes civiles y en elaborando un inventario no exhaustivo de las dificultades con las que se topa la acción de la justicia.

En la segunda parte, el autor discute la idea de una incriminación en derecho internacional de las infraciones graves cometidas con respecto a los niños. Analiza la definición, las reglas de competencia y la institución de una competencia universal, la extradición y la ayuda judicial, la protección de los derechos e intereses de los niños víctimas.

El objetivo es que se tome consciencia del hecho de que el lado represivo no es suficiente y que una distancia importante subsiste entre las declaraciones de intención y las realidades del terreno.

Summary

The lecture is divided in two: the first part deals with the issue of legal processes started by national jurisdictions, with Belgium as an example. The author describes the legal background by listing the indictments proposed by their national law, the competences of the national judge, the role of the General Prosecutor and of the individuals in court action, and through a survey of the difficulties faced by Justice in its action.

In the second part, the author discusses the idea of international law indictment of serious offences towards children. He Analyses the definition, competence rules, and the institution of universal competence, extradition, international judicial cooperation, protection of child victims’ rights and interests.

INTRODUCTION

La protection des enfants contre toutes formes d’exploitation des enfants est une préoccupation commune à tous les Etats du monde qui s’inscrit dans la défense d’une des valeurs principales de l’humanité.

Dans le préambule du Statut de Rome créant la Cour pénale internationale, signé le 17 juillet 1998, les Etats signataires ont décrit le contexte de la mise en place de la Cour dans les termes suivants :

« Conscients que tous les peuples sont unis par des liens étroits et que leurs cultures forment un patrimoine commun, et soucieux du fait que cette mosaïque délicate puisse être brisée à tout moment,

Ayant à l’esprit qu’au cours de ce siècle, des millions d’enfants, de femmes et d’hommes ont été victimes d’atrocités qui défient l’imagination et heurtent profondément la conscience humaine,

Reconnaissant que des crimes d’une telle gravité menacent la paix, la sécurité et le bien-être du monde,

Affirmant que les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale ne sauraient rester impunis et que leur répression doit être effectivement assurée par des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la coopération internationale,

Déterminés à mettre un terme à l’impunité des auteurs de ces crimes et à concourir ainsi à la prévention de nouveaux crimes,

Rappelant qu’il est du devoir de chaque Etat de soumettre à sa juridiction criminelle les responsables de crimes internationaux…».

S’agissant de la criminalité commise à l’égard des enfants, ces principes sont plus que jamais pertinents.

Ces dernières décennies, les déclarations d’intention et les instruments internationaux et nationaux de lutte contre la criminalité commise à l’égard des enfants se sont multipliés et nous devons sans doute nous en réjouir. Cependant, nous devons constater le décalage fort important qui subsiste entre les réalités rhétoriques et normatives et la pauvreté de leur mise en œuvre sur le terrain. On ne peut qu’être frappé par le nombre peu élevé de cas de jurisprudence au regard du nombre de crimes commis et par les nombreuses limites de fait et de droit auxquelles sont confrontés quotidiennement les praticiens lorsqu’ils veulent exercer des poursuites du chef de crimes commis à l’égard des enfants.

Loin des caméras et des discours politiques, le cynisme des trafiquants d’enfants est patent : ils continuent à faire leur trafic en toute discrétion et souvent en toute impunité. Face à ces personnes sans foi ni loi, la répression a certainement un rôle à jouer.

Les filières criminelles n’hésitent pas à profiter de la vulnérabilité des populations visées et des failles du système pour développer leurs activités, spéculant souvent sur l’incapacité des systèmes judiciaires nationaux à développer une stratégie adaptée pour contrer leurs actions et assurer une répression effective.

Lorsqu’il s’agit de mettre en œuvre cette répression, les praticiens se heurtent à de nombreuses difficultés liées notamment à la dimension internationale : si la criminalité contre les enfants ne connaît pas de frontière, les acteurs judiciaires se trouvent trop souvent limités dans leur action par le principe de souveraineté nationale qui préside à l’action de la justice pénale.

C’est pourquoi loin des déclarations d’intention, il faut s’interroger sur l’efficacité des moyens juridiques qui sont mis à la disposition de la justice et sur les difficultés que cette dernière rencontre pour combattre ce type de criminalité.

En nous fondant sur notre pratique de magistrat instructeur, nous voudrions analyser les enjeux de la répression sur le plan national et le plan international à partir de l’expérience que nous en avons dans notre pays.

LES POURSUITES EXERCÉES PAR LES JURIDICTIONS