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LES CONCEPTS FONDAMENTAUX DE L’ADOPTION INTERNATIONALE

• L’adoption internationale consiste à trouver une famille pour un enfant

qui n'en a pas et non pas à satisfaire le désir des couples en manque d’enfants.

• Le droit à l’enfant n’existe pas. Le seul droit qui puisse être évoqué est

celui de l’enfant abandonné ou orphelin d’avoir une famille.

• L’adoption internationale doit être conçue comme la dernière solution

lorsque toutes les autres alternatives ont été épuisées (réhabilitation familiale, accueil par la famille élargie, adoption nationale, famille d’accueil à long terme).

Face à ces principes, voici le point sur la situation comme elle se présente actuellement.

Le trafic d’enfants en vue d’adoption internationale est un phénomène qui n’a cessé d’augmenter ces vingt dernières années. La demande est croissante pour l’adoption d’enfants en bas âge et en bonne santé de la part des couples vivant dans les pays industrialisés (Europe, Amérique du Nord), alors que le nombre d’enfants qui correspondent à ces critères diminue constamment. Les pays d’origine font en effet des efforts considérables pour trouver des solutions satisfaisantes sur place. Ce déséquilibre s’est traduit par le développement d’un marché parallèle, détestable d’un point de vue éthique, et souvent illégal.

Après s’être installé en Amérique latine et en Asie dans les années 1970, de nouveaux marchés se sont ouverts en Europe de l’Est au début des années 1990, répondant à la préférence de certains couples pour des enfants à la peau claire. La globalisation, Internet et la facilité accrue de voyager aux quatre coins du monde ont énormément contribué à mercantiliser ce domaine.

Les adoptions commerciales sont aujourd’hui la manière la plus fréquemment utilisée pour accueillir un enfant. Il est devenu banal et normal de payer des sommes énormes aux avocats, de faire des cadeaux et des dons substantiels aux institutions et aux autorités ou d’inventer des problèmes de santé pour justifier l’adoption internationale au détriment de l’adoption nationale.

L’inventivité pour obtenir des enfants ne s’arrête pas là et implique souvent des procédés illégaux ou criminels, tels le kidnapping de bébés, de faux certificats d’abandon ou des consentements à l’adoption d’une fausse mère.

Les astuces et les stratagèmes pour contourner les lois sont de plus en plus nombreux et chaque faille dans le système est exploitée. Une affaire de fausses reconnaissances en paternité fait actuellement la une en Roumanie et en Angleterre,

où plusieurs couples sont activement recherchés. La police roumaine enquête sur des dizaines de cas qui impliquent aussi des « parents » allemands, français, espagnols, italiens et grecs. Elle estime que des centaines d’enfants pourraient être concernés. Ce sont les certificats de naissance qui ont éveillés les soupçons, puisque les « pères » se sont annoncés plusieurs mois après la naissance de l’enfant, alors que leur nom ne figurait pas sur le certificat d’origine. Cependant, on suppute que bon nombre de ces « arrangements » sont conclus pendant la grossesse déjà, afin de pouvoir inscrire le nom du « géniteur » directement sur le certificat.

Une affaire similaire a été découverte cet été en France, où la police a démantelé un réseau de trafiquants qui faisaient accoucher des femmes bulgares à Paris, mais aussi au Portugal et en Italie, puis revendaient leurs bébés à des couples complices.

En dehors du fait que ces procédés sont parfaitement illégaux et punissables par la loi, ils sont particulièrement pernicieux puisque la notion de l’adoption n’apparaît même plus; pas d’implication des services sociaux, des pouvoirs publics, des tribunaux. Pour l’enfant, cela signifie l’effacement de son histoire et le déni complet de son droit de connaître un jour ses origines.

Aux Etats-Unis, il est possible de passer commande par Internet – aussi depuis l’Europe – en précisant ses désirs concernant la mère, ses origines, la couleur de ses cheveux, si elle aime les animaux domestiques, etc. Les futurs parents reçoivent les résultats des bilans de santé et des échographies pendant la grossesse pour être rassurés sur le développement du fœtus. Au moment de l’accouchement, ils sont sur place et partent avec le bébé quelques jours plus tard. De telles « transactions » se pratiquent dans les Etats où la mère ne dispose que d’un délai de 48 ou 72 heures après la naissance pour donner le consentement définitif à l’adoption de son enfant. Ce délai extrêmement court ne lui permet évidemment pas de prendre une décision de façon sereine. Par ailleurs, elle se trouve dans une situation de dépendance financière puisque elle a été entièrement prise en charge pendant la grossesse.

Selon l’organisation internationale Advocates for Children, l’adoption internationale est une « industrie » qui engendre un chiffre d’affaires de 6,3 milliards de dollars par an.

La Convention de La Haye du 29 mai 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale.

La Convention a pour objet :

1. d’établir des garanties pour que les adoptions internationales aient lieu dans l’intérêt supérieur de l’enfant et dans le respect des droits fondamentaux qui lui sont reconnus en droit international;

2. d’instaurer un système de coopération entre les Etats contractants pour assurer le respect de ces garanties et prévenir ainsi l’enlèvement, la vente ou la traite d’enfants;

3. d’assurer la reconnaissance dans les Etats contractants des adoptions réalisées selon la Convention.

Cette Convention a connu un large succès et compte 62 pays contractants à ce jour, aussi bien parmi les pays d’origine que les pays d’accueil des enfants.

Elle constitue actuellement l’outil le plus efficace pour combattre le trafic et lutter contre les abus dans le domaine de l’adoption internationale, puisque l’intérêt de l’enfant est primordial pendant toutes les étapes de la procédure.

Cependant, le fait d’avoir ratifié la Convention ne donne aucune garantie que l’adoption internationale se fasse dans l’intérêt de l’enfant !

Les mesures d’application son peu contrariantes : seule obligation est la création d’une Autorité Centrale qui a pour tâche de coopérer avec les homologues dans les autres pays contractants et de collaborer avec les autorités compétentes et les organismes agréés dans leur pays.

Dans bon nombre de pays d’origine, la ratification de la Convention se résume ainsi à la désignation d’une Autorité Centrale « boîte aux lettres », qui est souvent loin de remplir son rôle de coordination et de contrôle. Pour répondre aux exigences de la Convention, il faudrait changer les législations, mettre en place des structures et des procédures, améliorer la protection de la famille et former du personnel dans les maternités, les institutions et au sein des services sociaux.

Quelques pays ont fait des efforts considérables pour mettre sur pied des systèmes qui répondent aux besoins des enfants, alors que d’autres n’ont pas ou ne se donnent pas les moyens de se conformer aux exigences. Il est vrai que, selon la Convention, il appartient aux pays d’origine de réguler et contrôler les procédures d’adoption internationale. Ils ont la responsabilité de s’assurer que l’adoption se fait dans l’intérêt de l’enfant, que ses droits et ceux de sa famille biologique ont été sauvegardés et qu’aucune solution satisfaisant n’a pu être trouvée dans son pays d’origine.

Face à l’ampleur du travail et au manque de moyens, de nombreux pays d’origine délèguent bon nombre de tâches aux organismes agrées, voire à des personnes privées. Ces dernières sont soumises à un contrôle très sommaire concernant leurs activités, surtout sur le plan financier. Les abus sont ainsi presque programmés. Ces personnes (avocats, facilitateurs, démarcheurs de tout genre) sont basées dans les pays d’origine et traitent souvent directement avec les parents pour trouver l’enfant désiré.

Les intermédiaires, ou organismes agréés, ont généralement leur siège dans les pays d’accueil et travaillent avec un employé ou un représentant sur place. Ces organisations sont censées agir dans l’intérêt de l’enfant, un précepte dont elles se font par ailleurs souvent le porte-parole. Seulement, en y regardant de plus près, on se rend compte que la satisfaction des parents prime fréquemment sur l’intérêt des enfants. Ces organismes agréés font le forcing en envoyant des centaines de dossiers

de parents dans les pays d’origine, désireux d’adopter un enfant pour qui, à priori, une solution adéquate peut être trouvée sur place. Ils n’hésitent souvent pas non plus à faire des « dons » aux maternités, aux institutions et auprès d’autorités consentantes pour s’assurer un statut privilégié quand il s’agit d’obtenir la proposition d’enfants. Il est évident que l’argent ainsi disponible suscite des « vocations ».

Il n’y a pas que les organismes agréés qui exercent des pressions. Certains gouvernements des pays industrialisés multiplient les efforts pour nouer des contacts avec des pays qui offrent des possibilités d’adoption. Sous prétexte de sentiments humanistes, pour « sauver » des enfants sans avenir dans leur pays d’origine pauvre et misérable, de hauts dignitaires parcourent le monde en quête d’enfants adoptables. A ce sujet, on se souvient du « deal » - découvert au début de cette année – que Berlusconi a conclu avec Nastase, le 1er Ministre roumain, qui consistait à « troquer » une centaine d’enfants adoptifs pour des parents italiens contre un coup de pouce pour l’entrée de la Roumanie à l’Union Européenne. Du reste, il semble que l’Italie n’ait pas été le seul pays à proposer un tel marchandage, et ceci malgré un moratoire instauré en Roumanie en juin 2001 – sur pression de l’Union Européenne...

Pour le formuler clairement, ce ne sont pas les besoins des enfants qui sont déterminants pour le choix du pays d’origine, mais l’opportunisme. Preuve en est l’augmentation des adoptions d’enfants venant de la Russie et de la Chine. Ces deux pays ont ouvert leurs frontières à l’adoption internationale au milieu des années 90 et depuis, le nombre d’enfants placés à l’étranger ne cesse d’augmenter. Aux Etats- Unis, en Espagne et en Italie, on trouve la Chine et la Russie en tête des pays de provenance des enfants, alors qu’ils arrivent en 2ème et 3ème position en France, après Haïti.

A noter qu’aucun de ces pays d’origine n’a ratifié la Convention de La Haye. Par conséquent, il s’agit d’adoptions indépendantes ou privées, c.à.d. que les couples adressent directement leur demande d’adoption à une personne de contact sur place, ce qui constitue une forte hypothèque en ce qui concerne le respect des droits de l’enfant au départ.