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Au cœur du territoire : le village et la maison mising L’organisation spatiale des villages L’organisation spatiale des villages

processus de résilience socio-écologique

4.1 Au cœur du territoire : le village et la maison mising L’organisation spatiale des villages L’organisation spatiale des villages

Les villages mising s’implantent généralement le long des bourrelets alluviaux pour dominer les dépressions marécageuses et les zones inondables (Carte 22). Les communautés mising sont pour la plupart légalement sédentarisées depuis l’indépendance de l’Inde et la généralisation des revenues villages. Ainsi, les villages de Bohikhowa, Beloguri à Bokakhat, Malapindha à Majuli ou Kardoïguri à Dhakuakhana s’étendent le long des bourrelets alluviaux et sont relativement stables bien que certains ne soient pas cadastrés. Les villageois prévoient de rester mobiles afin de se déplacer vers d’autres sites lorsque les cours d’eau frayent de nouveaux chenaux, emportant les terres cultivées sur leur passage. En revanche, les familles des villages dont les terres furent érodées, comme ceux de Bamun gaon à Bokakhat, de Sonowal, Sumoï Mari, Kaniyajan à Majuli et de Matmora à Dhakuakhana, se sont réfugiées sur les digues qui remplacent les bourrelets alluviaux (Carte 23).

Les villages sont le plus souvent composés de deux clans majoritaires (cf. Tableau 6, Tableau 7 et Tableau 8). Dans le village de Kardoïguri qui s’étale le long d’un bourrelet alluvial, d’un côté les Doley occupent une quarantaine de maisons, de l’autre les Pegu en occupent une trentaine. Les clans se partagent l’espace du village composé des fratries d’un même lignage dédoublant souvent leurs maisons suivant le nombre de frères pour ainsi former des hameaux. À l’intersection des routes, les deux clans cohabitent. Dans les villages recomposés le long des digues, l’espace étant plus réduit, la répartition spatiale des clans n’est pas homogène et des lignages s’insèrent parmi d’autres en construisant trois ou quatre maisons.

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Carte 22 : Organisation d’un village mising s’étalant le long d’un bourrelet alluvial. Exemple du hameau de Kardoïguri regroupant des familles des clans Doley et Pegu, subdivision de Dhakuakhana.

Carte 23 : Organisation d’un village mising sans terre, réinstallé le long d’une digue. Exemple du village de Sumoi Mari composé des clans Payeng et Kaman, subdivision de Majuli.

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Que les villages s’organisent le long des bourrelets alluviaux ou le long d’une digue, l’entrée des maisons s’oriente généralement en direction des axes de communication, fluviaux ou terrestres.

Les écoles primaires (LP school) d’État sont les lieux de rassemblement des élus au Panchayat. Elles servent de bureau de vote, de salle de réunion publique lors des campagnes électorales ou des campagnes de prévention des risques d’inondations et de sensibilisation à l’hygiène. Les namghar, temples installés par les institutions vaishnavites (satra), sont utilisés par les communautés lors des événements religieux hindous. Ces deux types d’infrastructures collectives (écoles et namghar) ont remplacé les murong ghar ou morung, temples et lieux de rassemblement autochtones, depuis plus d’un siècle107

. Les Kebang se réunissent désormais dans les namghar ou dans les écoles selon l’objet de la réunion, religieux ou non. En dehors de ces lieux de rassemblement, l’intersection des chemins et des digues devient un espace public où se rassemblent les petits commerces. Les villageois se rendent dans les bourgs, en empruntant les transports collectifs, pour acheter des denrées alimentaires allochtones, dont le sucre raffiné, le pétrole des lampes à huile ou le riz subventionné pour les familles qui ont perdu leurs terres et ne sont plus en mesure d’en produire elles-mêmes. Si aucun désastre ne s’est produit, l’autosuffisance alimentaire prédomine puisque les villages produisent tous les aliments et les outils artisanaux nécessaires à leur subsistance.

Le fonctionnement d’une exploitation agricole mising

L’exploitation agricole mising s’organise autour de la maison (okum, ms.). Chaque famille cultive des jardins potagers pour produire les légumes nécessaires aux repas quotidiens, entretient un bosquet et une bambouseraie mettant à disposition les ressources nécessaires aux activités artisanales, se rend dans les marais pour la pêche, met en valeur les terres de la plaine pour la production du riz ou du colza et guide son bétail vers les bancs de sable pour pâturer et produire du lait revendu sur le marché et assurant des sources de revenus complémentaires indispensables pour payer les redevances foncières à l’État. La maison est un espace de socialisation à partir duquel s’organisent les activités de l’exploitation agricole.

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Il est difficile de donner une date précise de l’abandon des murong ghar. L’avènement de l’Indépendance de l’Union indienne au milieu du XXème

siècle et la création des panchayat est sans doute un facteur important de leur disparition.

164 La maison : un espace de socialisation

L’architecture de la maison mising, appelée okum (ms.) ou chang ghar108

(as.), contribue à la mobilité des villages. Elle est érigée sur des pilotis tout comme celle des Tani et d’autres groupes tribaux tibéto-birmans peuplant les collines et les montagnes de l’Himalaya oriental et de l’Asie du sud-est (Mills 1853 ; Nguyen Van Huyen 1934). Construite en bambou (Figure 24) et en bois, cette structure flexible et légère reste aujourd’hui très fonctionnelle dans le milieu de la plaine alluviale du Brahmapoutre soumis aux tremblements de terre, aux crues et aux inondations. Une telle maison protège de l’intrusion d’animaux sauvages ou domestiques. Son caractère semi-permanent rappelle les pratiques du nomadisme fluvial.

Avant de commencer la construction d’une maison ou d’installer un village, les membres de la communauté sollicitent l’aide d’un spécialiste des rituels et accomplissent ensemble une cérémonie (among yukang, ms.). Le socle (kumdang, ms.), sur lequel la maison est édifiée, doit être dégagé des maladies et mauvais esprits. Une lampe d’argile (chaki, as.) est allumée telle une offrande pour prier les ancêtres. Des grains de riz, enveloppés dans des feuilles de Tora, sont placés aux quatre coins de la parcelle. Ces lots sont enterrés en invoquant les grands-parents paternels et maternels (tato et yayo, ms.), le Soleil et la Lune, appelés respectivement Donyi et Polo en mising et en récitant le mantra suivant : Oh, ancêtres et protecteurs de la maison, à vous de décider si ce terrain est bon pour construire une maison. Le jour suivant, les paquets de riz sont ouverts et leur contenu détermine la qualité du terrain : pour que celui-ci convienne, il faut retrouver les grains intacts. En revanche, si l’on trouve des fourmis dans les paquets, celui-ci serait vulnérable aux vers de terre et insectes ; des grains séparés les uns des autres présagent une mésentente entre les frères du foyer ; un grain de riz manquant annonce le décès d’un proche. Puis, le spécialiste, en accord avec la famille, choisit un jour approprié pour commencer les travaux. Les membres du village et des proches sont conviés au moment de placer les premiers piliers, puis au moment de l’inauguration de la maison (okum gisang, ms.). Comme nous l’avons observé à Bokakhat, Majuli et Dhakuakhana, tous les membres d’un village participent à la construction d’une maison, pour laquelle ils sont remerciés par un repas commun. L’entraide est fondamentale dans la culture Mising, tout comme dans les autres communautés, surtout tribales, du nord-est de l’Inde : elle reflète l’interdépendance des villageois par l’échange de services, solidarité qui ressurgit lors des catastrophes « naturelles ». En effet, pour pallier les dommages créés par les aléas hydrologiques, et pour reconstruire, chaque famille a besoin de soutien et d’effort collectif. La

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Cette dernière appellation se compose en assamais du mot chang : une plateforme en bambou et du mot ghar : la maison.

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vie familiale et la vie sociale commune sont très importantes pour les membres de la communauté, comme peut en témoigner leur devise : On vit tous ensemble, tout le monde fait tout ensemble.

Il arrive que toute la famille élargie vive sous le même toit, ce qui peut représenter jusqu’à 20 personnes (Pegu N. 2005). Les dimensions de ce type d’habitat sont donc variables, de 10 à 40 mètres de long, sur 4 à 10 mètres de large, comme l’évoque Sisoram Pegu, à Bamun Gaon (Bokakhat) en 2007 : Dans le village de mon enfance, les maisons étaient si longues que l’on ne pouvait en voir l’extrémité. La taille d’une telle habitation n’empêchait pas les familles de se déplacer puisqu’une maison pouvait être reconstruite rapidement si nécessaire. Traditionnellement, il n’existe pas de cloison intérieure dans les chang ghar, c’est un espace qui forme une unité polyvalente avec des usages de jour et des usages de nuit. Mais cette architecture évolue sous l’influence de la culture assamaise moderne et de la scolarisation des plus jeunes qui réclament des espaces d’intimité et des cloisons, entre autres pour faire leurs devoirs le soir. Le cloisonnement de l’espace de la maison illustre une évolution des rapports familiaux, pouvant aller jusqu’à un éclatement de la famille traditionnelle. Progressivement, l’espace des maisons se réduit pour héberger des familles composées en moyenne de douze membres (deux grands-parents, deux couples soit quatre adultes et six enfants) ou parfois simplement une famille nucléaire (Pegu N. 2005 ; Doley 2008).

Photo 10 : Le foyer au cœur de la vie des familles mising. Chez les Pegu de Malapindha, novembre 2010.

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La maison mising constitue un espace fonctionnel et polyvalent ; c’est aussi un lieu de transmission des savoirs. Au sein de la famille élargie, ces savoirs sont transmis au cours de la vie collective quotidienne et de rituels dédiés aux ancêtres. Au centre de la maison, l’élément le plus important est le foyer (meram, ms.). Il est formé d’un châssis en bois dans lequel de la terre est tassée et régulièrement lissée avec de la boue, ce qui le rend ignifugé (Photo 10).

Lieu spirituel et fonctionnel, le meram représente le cœur sacré de la maison et tout l’espace intérieur s’articule autour de lui. On s’y réunit tout autant pour faire des offrandes à ses ancêtres que pour cuisiner. Ainsi, le foyer constitue un espace privilégié de la transmission orale et intergénérationnelle des savoirs. Trois étagères en bambou suspendues au-dessus du feu, perab, rabbong et kumbang (ms.), sont employées pour faire sécher du bois, des plantes, fumer des aliments ou/et faire fermenter l’alcool de riz (apong, ms.). Positionné au centre de l’habitat, il divise l’espace en deux. Une partie (rising, ms.), est utilisée par les hommes pour le couchage et par les chefs de famille pendant la journée. L’autre moitié (kogtog, ms.), est réservée aux femmes qui y gardent leurs ustensiles de cuisine, et le filtre à apong (tasuk, ms.). La fumée s’évacue par les cloisons, passe au travers du chaume en paille (kher, as.) ou par les interstices de la charpente.

Des maisons sédentarisées, près des bourgs, sont construites en dur avec des matériaux industriels (ciment, briques et tôles). Néanmoins, la cuisine reste un lieu important, elle est toujours construite en bambou en annexe de la maison. Avant de quitter leur habitation pour un voyage, les membres de la famille rendent hommage aux ancêtres devant le meram dans un rituel appelé meram kumsunam.

L’architecture de la maison mising et des bâtiments annexes

Les personnes chargées de la construction d’une maison déterminent d’abord la hauteur des pilotis, supportant la plateforme, en fonction du niveau maximum de l’eau pendant les crues. La plateforme peut ainsi s’élever d’un mètre à plus de deux mètres au-dessus du sol (Figure 24).

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Figure 24 : Éléments d’architecture de la maison traditionnelle mising. Source : observation de terrain. Réalisation de J.M. Chauvin, 2005

À l’avant de l’édifice, une entrée sous auvent (tungeng, ms.) offre un espace extérieur abrité pour accueillir les invités. Il est essentiellement destiné à installer les instruments de tissage, de décorticage du paddy, et sert également à exécuter d’autres travaux domestiques. Il est généralement divisé en deux niveaux : une plateforme qui prolonge la salle principale de la maison vers l’extérieur et un espace au sol couvert par le prolongement du toit. Ces deux niveaux sont reliés par une échelle de 5 à 7 marches taillée dans un tronc d’arbre (kobang, ms.). Elle est accompagnée d’une rambarde en bambou (lagjum, ms.). À l’arrière de l’édifice, le yapkur tungeng (ms.) est une autre plateforme utilisée pour le séchage du paddy, des épices ou du linge (cf. Sarma 2004 : 120). La maison est composée de dix épaisseurs de matériaux : cinq couches supérieures et cinq couches inférieures. Selon les croyances Mising, les cinq couches supérieures qui composent la toiture (midum, ms.), protègent du soleil, de la pluie, du vent, des tempêtes et les cinq couches inférieures protègent des fourmis, des serpents, des grenouilles et d’autres animaux. Il n’y a pas d’ouvertures latérales, mais la lumière passe entre les lames de bambou du sol et des cloisons. L’air qui circule sous la maison rafraîchit l’atmosphère de l’intérieur. L’espace situé sous la maison (kitig, ms.), permet de stocker le bois de cuisson, les instruments de pêche, d’agriculture et de tissage. Il est également aménagé comme étable pour les animaux d’élevage (volaille, caprin, porcin).

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Planche photo 11 : 1- Tissage d’une gomusha109 (serviette assamaise). 2 – Confection d’une nasse. Les femmes passent plusieurs heures par jour à tisser, pendant que les hommes fabriquent des objets usuels, des nasses pour la pêche, des cages à poules, des paniers ou des vans à partir d’un brin d'osier qu’ils piquent, tressent, serrent. Les hommes se chargent notamment de la collecte des matériaux nécessaires à leurs travaux artisanaux.

Diversité des ressources utilisées pour construire une maison

La construction d’une maison mobilise un ensemble de savoirs écologiques et des savoir-faire. Les villageois prélèvent les matériaux de construction à proximité des villages sous leurs formes naturelles ou cultivées. Comme nous l’a expliqué Kamala Kanta Kaman, un paysan mising de l’île de Majuli, le bambou constitue la matière première principale utilisée dans l’édification des maisons. En effet, il comporte de grands avantages physiques et mécaniques (flexible, résistant, imperméable…).

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La gomusha est une serviette tissée en fil de coton blanc et rouge. Particulièrement emblématique en Assam, son usage est aussi bien fonctionnel que rituel. Elle peut être utilisée comme un chiffon, un turban, une serviette de toilette, etc. Mais elle est aussi un objet important dans les rituels car elle est employée comme nappe pour disposer les objets de valeur symbolique. Elle est offerte aux invités pour les honorer.

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Trois variétés de bambous sont cultivées pour la construction : la variété bholuka (Bambusa balcoa), d’un diamètre de 10 à 15 cm, est utilisée pour la structure de base, la plateforme et la charpente ; les variétés jati (Bambusa tulda) et makal (Bambusa pallida), de diamètres plus petits, sont employées pour les rampes d’accès, l’encadrement des portes, les cloisons, le plancher en lamelles espacées et le mobilier attaché à la structure (Chauvin 2005)110. Comme nous l’avons observé dans les villages de Bokakhat, de Majuli et de Dhakuakhana, chaque famille mising possède un bosquet de bambous, dans un enclos exclusivement réservé à cet effet à côté ou à l’arrière de la maison. Lorsque le bambou atteint sa maturité, il est coupé à sa base et subit un traitement assurant sa durabilité, puis il est séché et manufacturé pour son utilisation future. Certains villages de Bokakhat portent le nom de ces espèces de bambou comme le village de Bholuka Guri Gaon qui signifie « village derrière les bholuka », attestant la présence et la prégnance de cette variété de bambou dans la localité. Différentes essences d’arbres peuvent également être employées dans la construction : nahor (Mesua ferrea), mekai (Shorea assamica), simolu (Bombax Ceiba), gomari (Gmelina arborra), etc. Certaines de ces espèces ont disparu, car il reste peu de forêts. L’ikora (Erianthus ravennae), une variété de jonc que l’on trouve dans les zones humides, est récolté en fagots d’une quarantaine de brins qui sont séchés au soleil pendant plusieurs semaines. Ses brins sont tressés pour réaliser des cloisons. Le chaume utilisé pour les toitures provient des graminées (kher, as.), collectées dans les sapori, séchées, traitées, puis rassemblées dans un bouquet d’une centaine de brins (muthi, as.). Il faut au moins 300 de ces bouquets pour assurer l’étanchéité de la couverture d’une maison de 30 m2. Les matériaux sont assemblés à l’aide de lianes (Calamus) collectées dans les forêts autour du village. L’entretien est permanent et les parties endommagées sont remplacées au fur et à mesure des saisons. Ces maisons ont une durée de vie de 5 à 15 ans selon la solidité de la structure. Lorsque les inondations et l’érosion s’annoncent trop sévères, les habitants de ces maisons peuvent les démonter en quelques heures et déplacer les matériaux sur des pirogues pour les reconstruire plus loin, sur des terres exondées.

Le programme de logement IAY (Indira Aawas Yojana) encourage la construction de maisons en dur pour remplacer les matériaux végétaux. Le programme donne droit à des maisons à prix subventionné pour les familles en possession de la carte des BPL (Below Poverty Line). L’objectif de ce programme est d’aider les foyers les plus démunis des zones rurales à construire une maison. En accord avec le Département du développement rural111 (RDD) et le panchayat, le gaon bura recueille les demandes des familles et soumet une liste à l’administration centrale, au SDO (Sub-Divisionnal Officer) qui donne l’autorisation, les fonds, les emplacements et des matériaux pour la construction. Ce

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J.M. Chauvin a réalisé une étude approfondie de l’architecture traditionnelle Mising en 2005.

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programme offre une bourse de 20 000 INR (400 euros) par famille pour construire des maisons composées de matériaux durs (poutres en béton armé, ciment, toit en tôle, etc.) afin de remplacer celles composées de matériaux peu persistants (poutres en bambou, toit de chaume, etc.). Les familles n’ont pas la liberté de choisir les caractéristiques de leur nouvelle maison, car celles-ci sont souvent standardisées. Les subventions doivent être employées pour l’achat de toits en tôle, car le chaume (kher), matière première des toits traditionnels, n’est plus disponible à proximité des villages. Toutefois, les matériaux industriels sont peu adaptés aux conditions du milieu. En effet, les toits en tôle conduisent et maintiennent la chaleur et les poutres en ciment contribuent à la sédentarisation des foyers. Les supports en bois et en bambou permettaient aux familles de se protéger des inondations et d’être mobiles en cas d’érosion. De plus, ces programmes tendent à défaire les liens sociaux qui s’exerçaient par l’entraide communautaire généralement associée à l’édification d’une maison. Lorsque les pièces sont standardisées et préfabriquées, les membres de la communauté ne se réunissent plus pour participer à la construction de la maison et les rituels liés à cet acte important ne sont pas suivis dans leur totalité. Bien que dans chaque village étudié près de la moitié des habitants devraient bénéficier du programme IAY, celui-ci n’est finalement octroyé qu’au compte-gouttes ce qui crée des conflits entre les villageois, les chefs de villages et les membres des panchayat qui sont souvent accusés de détourner les budgets ou de les accorder après avoir reçu des pots-de-vin.

Le type de maison construit suivant l’architecture assamaise, composé de bois et de boue, n’a généralement pas été adopté par les Mising dans les zones inondables, car ce type de bâti sans pilotis ne résiste pas aux inondations. En revanche, à Amtenga (subdivision de Bokakhat), les familles mising, relocalisées par le gouvernement sur les terrasses alluviales exondées, se sont approprié cette architecture. Les villageois trouvent que ce type de construction rehaussée sur une plateforme de terre est plus confortable et plus adapté pour installer une table, à proximité d’une fenêtre, nécessaire aux enfants scolarisés. Les familles dont les moyens économiques sont suffisants privilégient aussi des constructions en brique, béton et ciment pour montrer leur statut social. Dans ce cas, la maison est mise en avant, avec son salon pour l’accueil des invités. La cuisine est toujours construite en bambou et sur des pilotis, selon la méthode traditionnelle, indispensable pour cuisiner les repas traditionnels mising et pour réaliser les rituels. Elle est placée en annexe à l’arrière sur une plateforme couverte d’un toit de chaume. La majorité de la population n’utilise pas de latrines et se rend pour cela dans les