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A La tentative révolutionnaire de mise en place d’une magistrature élue

Dans le document L'inamovibilité des magistrats : un modèle ? (Page 129-138)

121. La magistrature élue devait rapidement devenir une réalité sous la Révolution. Cependant, l’Assemblée nationale constituante échoua dans sa volonté de la substituer à l’inamovibilité (1°). Plus encore, le pouvoir politique ne parvint pas à ancrer durablement cette institution, laquelle disparût définitivement moins de dix ans après sa mise en place (2°).

1°) L’abandon contrarié de l’inamovibilité des magistrats

122. A l’occasion des débats de 1789 à l’Assemblée nationale constituante, la majorité des députés écarta le principe d’une magistrature nommée et permanente, en raison de son association au système de l’Ancien Régime. Le Député Lameth déclarait en ce sens : « …et nous ne pouvons nous le dissimuler, tant que les

Parlements conserveront leur ancienne existence, les amis de la liberté ne seront pas sans crainte et ses ennemis sans espérance. La Constitution ne sera pas solidement établie, tant qu’il existera auprès des assemblées nationales, des corps rivaux de sa puissance, accoutumées depuis longtemps à se regarder comme les représentants de

la nation »326. Cependant, l’Assemblée ne déniait pas aux compagnies judiciaires la

325 Ibid., pp. 295-296.

326 Séance du 3 novembre 1789, in P.-J.-B. Buchez, P.C. Roux-Lavergne, Histoire

parlementaire de la Révolution ou journal des Assemblées nationales depuis 1789 jusqu’en 1815, t.

légitimité qu’elles avaient acquise dans leur lutte contre la monarchie absolue, mais estimaient en revanche que leur statut était incompatible avec l’avènement d’un nouveau régime fondé sur la souveraineté nationale. Aussi, du point de vue statutaire, il convenait de substituer aux anciennes institutions, une organisation judiciaire en adéquation avec la France issue de la révolution. C’est pourquoi, l’idée des Constituants était de faire en sorte que le nouveau « pouvoir judiciaire » acquière une légitimité comparable à celle des autres pouvoirs, à savoir une légitimité de nature populaire, et que la durée et la situation des fonctions des magistrats ne conduisent pas à ce que ceux-ci puissent se considérer comme plus intouchables que les membres du Pouvoir politique.

123. La résolution de ces questions passait au préalable, par le desserrement du lien existant entre le magistrat et sa fonction. L’inamovibilité était alors directement visée, ainsi que l’exprimait le Député Chabroux devant l’Assemblée : « On a parlé de l’inamovibilité des juges ; je crois, moi, que des juges inamovibles

empiètent sur les droits du prince et sur ceux du peuple »327. Cette position se

justifiait de manière évidente, par le souvenir de l’appropriation de la justice par les magistrats inamovibles, sous l’Ancienne Monarchie. Le rapporteur Bergasse s’en était déjà fait l’écho, lors de la séance du 17 août 1789 : « Si le pouvoir judiciaire est

la propriété du juge qui l’exerce, n’est-il pas à craindre qu’il n’offre à l’esprit du juge, aussi souvent l’idée d’un droit que l’idée d’un devoir ; et celui qui dispose du pouvoir de juger, celui qui le considère comme une propriété qu’il exploite, plutôt que comme un devoir qu’il doit remplir, ne sera-t-il pas tenté d’en abuser ? Et parce que l’abus, quelque faible qu’on le suppose, est toujours un attentat contre la liberté

du citoyen, ne faut-il pas s’occuper soigneusement de le prévenir ? »328. Dans l’esprit

des Constituants, deux moyens devaient permettre d’atteindre cet objectif : d’une part, en supprimant la vénalité et l’hérédité des charges qui avaient contribué à renforcer exagérément l’inamovibilité des magistrats sous l’Ancien Régime ; d’autre part, en supprimant l’inamovibilité elle-même, au profit d’un système reposant sur l’élection des juges.

124. S’agissant de la vénalité et de l’hérédité des offices, un décret des 16 et 29 novembre 1789 décida que toutes les résignations et tous les traités de cession d’offices de judicature, seraient désormais regardés comme de simples transports d’offices de judicature. En outre, l’expédition des provisions de ces offices était abolie. Le décret des 7 et 11 septembre 1790 marqua une étape décisive, en

327 Séance du 30 mars 1790, in P.-J.-B. Buchez, P.C. Roux-Lavergne, Histoire parlementaire

de la Révolution…, t. V, op. cit., pp. 110-111.

328 Séance du 17 août 1789, rapport produit in P.-J.-B. Buchez, P.C. Roux-Lavergne, Histoire

supprimant les parlements, les conseils supérieurs, les présidiaux, les châtelets et bailliages, et plus largement l’ensemble des tribunaux d’Ancien Régime, qu’ils soient ordinaires, d’attributions ou de privilèges. Les officiers des parlements qui tenaient les chambres des vacations, furent invités par l’Assemblée à cesser leurs fonctions, le 15 octobre à Paris et le 30 septembre 1790 dans le reste du royaume. Les titulaires des offices supprimés devaient remettre leurs titres à un Comité de judicature spécialement créé, afin de pouvoir obtenir la liquidation et le remboursement de leurs charges, suivant les modalités prévues par le décret des 6 et 12 septembre 1790 et la loi du 20 janvier 1792329. Les révolutionnaires se voulaient

ainsi respectueux du droit de propriété, en appliquant la lettre de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen330. Il s’agissait également pour eux,

de ne pas apparaître plus arbitraires que le roi sous l’Ancien Régime, en acceptant, comme lui, de rembourser le prix des offices supprimés.

125. La question de la durée des fonctions fut abordée lors de la séance du 3 mai 1790, sous l’intitulé suivant : « Les juges seront-ils établis à vie ou pour un

temps déterminé ? ». Le Député Adrien Duport, réintroduisit la distinction faite par

Jean Bodin et Montesquieu en leur temps, entre les magistrats nommés par le roi et les magistrats élus : « Quand ils sont nommés par le roi, il est évident qu’ils peuvent

être à vie ; mais, lorsqu’ils sont nommés par le peuple, la question change : institués par lui et pour lui, il faut seulement que le juge puisse obéir sans crainte à la loi et à sa conscience, il faut uniquement le défendre contre l’opinion publique ». Le même

ajoutait : « Des juges à qui il n’aurait rien coûté pour se faire élire, que quelques

moments de contrainte et d’hypocrisie, seraient donc élus à vie ? Ainsi l’erreur d’un choix ne pourrait jamais se réparer. Les juges sont-ils donc les propriétaires de la

justice ? Les emplois à vie sont de véritables propriétés »331. Ainsi, la durée

permanente ou temporaire des fonctions se trouvait étroitement liée à l’autorité de désignation. Dans la mesure où le Pouvoir exécutif était synonyme d’arbitraire, celui- ci ne devait plus avoir la possibilité de faire pression sur le magistrat, une fois ce dernier nommé. En revanche, présumé vertueux, le peuple devait conserver la possibilité de ne pas reconduire le juge qu’il avait élu, dans l’hypothèse où celui-ci aurait perdu la confiance populaire pour l’exercice des fonctions judiciaires. Mais ce débat en couvrait en réalité un autre portant sur le maintien ou la remise en cause de l’inamovibilité. Il ressort effectivement des débats parlementaires de l’époque, une

329 G. Martin-Sarzeaud, op. cit., pp. 381-382.

330 « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est

lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ».

331 Séance du 3 mai 1790, in P.-J.-B. Buchez, P.C. Roux-Lavergne, Histoire parlementaire de

certaine confusion entre cette garantie et le principe de la désignation à vie. Or, les révolutionnaires voyaient avant tout dans les fonctions viagères, un synonyme d’irresponsabilité, sinon d’irrévocabilité332. C’est pourquoi, soucieux de supprimer

l’inamovibilité, les Constituants adoptèrent le décret du 3 mai 1790, prévoyant que les juges seraient élus pour un temps déterminé et qu’ils ne pourraient être réélus sans intervalle. Un décret ultérieur des 16 et 24 août 1790 fixait à six ans la durée du mandat, et complétant un décret de 5 et 7 mai 1790, interdisait au roi de s’opposer à l’admission d’un juge élu333.

126. Cependant, malgré la croyance des membres de l’Assemblée, l’inamovibilité n’avait pas été totalement remise en cause par l’affirmation de l’élection à temps des juges. En effet, à l’occasion du débat sur la désignation à vie ou à temps, les révolutionnaires ont concentré leur feu sur l’image qu’ils se faisaient de l’inamovibilité au sortir de l’Ancien Régime : une garantie étroitement liée à la patrimonialité des offices et synonyme d’intangibilité. Ils avaient en revanche occulté la question de l’éviction des juges pendant la durée des fonctions. Ce problème devait être soulevé par le Député Tronchet, déclarant en séance : « Est-il nécessaire,

est-il plus utile que la justice soit rendue par un certain nombre de personnes qui ne soient appelées à cette fonction que momentanément, successivement et casuellement, que de la faire rendre par un même nombre de personnes, mais attachées à cette fonction d’une manière stable et permanente ?…Je pense que le juge, même élu par le peuple, ne doit pas être inamovible et abandonné à l’inconstance de la faveur populaire ; mais je crois qu’il peut être subordonné à une révocation possible, pourvu qu’elle ne se fasse point d’une manière trop injurieuse, et que ce ne soit que par une très grande majorité de suffrages qu’il puisse être

révoqué »334. Cette intervention devait se traduire par l’insertion dans le décret des

16 et 24 août 1790, d’un article 8 suivant lequel les juges ne pourraient être : « ni

destitués que pour forfaiture dûment jugée, ni suspendus que par une accusation admise ». Cette disposition devait par la suite, être reprise dans le texte même de la

332 Lors de la séance du 30 mars 1790, le député Roederer critiquait en effet la désignation à

vie en ces termes : « Je demande que les juges soient temporaires ; je le demande pour l’intérêt des

juges, dans l’intérêt de la justice, pour l’intérêt politique national. Quant à l’intérêt de la justice, il est clair à mes yeux que des juges élus pour trois ans, qui pourront être éliminés du Tribunal, s’ils se conduisent mal, et conservés, s’ils se conduisent bien, assureront au ministère de la justice ce respect et cette majesté que l’opinion publique seule confère. Quant à l’intérêt des juges, les déclarer inamovibles, ce serait travailler uniquement pour l’intérêt des mauvais juges ; déterminer la durée de leurs fonctions et autoriser les réélections, c’est s’occuper de l’intérêt des bons juges : la confiance publique conservera ceux qui se seront montrés dignes de cette confiance », in P.-J.-B. Buchez, P.C.

Roux-Lavergne, Histoire parlementaire de la Révolution…, t. V, op. cit., p. 422.

333 G. Martin-Sarzeaud, op. cit., pp. 423-453.

334 Cité in P.-J.-B. Buchez, P.C. Roux-Lavergne, Histoire parlementaire de la Révolution…, t.

Constitution des 3 et 4 septembre 1791335. Or, il s’agissait là, d’un rappel presque

littéral des dispositions de l’édit du 21 octobre 1467. Certes, l’idée suivant laquelle l’office du juge ne pouvait être vacant que pour cause de mort, avait été remise en cause par le rejet des fonctions viagères. Mais il faut bien admettre qu’elle avait cessé d’apparaître comme une véritable garantie pour les justiciables, en faisant craindre le maintien de juges incompétents ou subversif. L’encadrement des modalités d’éviction, se trouvait au contraire renforcé en cette qualité. Un juge à vie ne pouvait être déclaré moins sûr qu’un juge temporaire, dès lors que tous deux étaient susceptibles d’être évincés dans les mêmes conditions, pendant la durée de leurs fonctions.

127. Au-delà de la situation des juges, restait à réglementer celle des membres du ministère public. L’Assemblée devait décréter à l’unanimité, lors de la séance du 8 mai 1790, que les officiers chargés des foncions du ministère public seraient nommés par le roi et institués à vie. Ce fut l’objet du décret du 8 mai 1790 et l’article 8 du titre II de la loi des 16 et 24 août 1790. Cette compétence du monarque avait été présentée comme le corollaire de sa fonction d’exécution des lois. La nomination à vie des officiers, apparaissait comme la contrepartie nécessaire de ce pouvoir. Ainsi, le représentant du ministère public se voyait reconnaître une inamovibilité proche de celle prévue par l’édit du 21 octobre 1467, bénéficiant notamment de la garantie juridictionnelle contre les évictions arbitraires. Ce statut fut confirmé par la Constitution du 3 septembre 1791, ces officiers prenant le titre de « commissaires du roi après des tribunaux ».

2°) L’institution contrariée d’une magistrature élue

128. Ainsi, à l’exception des membres du ministère public, les magistrats relevaient désormais, au mois de mai 1790, de cette « maxime inaltérable » suivant laquelle « les juges doivent être élus par les justiciables »336. Comme un symbole de

sa pérennité future, certains députés étaient venus lui prêter des origines de loin très antérieures à celles de l’inamovibilité. En ce sens, le Député Bouche déclarait : « L’histoire nous apprend que jusqu’à l’année 697, le peuple nommait ses juges…Je

me borne à proposer de rédiger le décret dans ces termes : L’Assemblée, considérant que le droit le plus ancien des peuples, notamment du peuple français, est d’élire ses

juges, a décrété que les juges seront élus par le peuple »337. Pourtant, confronté à

335 Article 2 du chapitre V du titre III de la Constitution des 3 et 14 septembre 1791.

336 Propos de Thouret du 24 mars 1790, cités in L. Duguit, La séparation des pouvoirs et

l’Assemblée nationale de 1789 (suite et fin), Revue d’économie politique, 1893, p. 574.

337 Propos de Bouche du 5 mai 1790, cités in L. Duguit, La séparation des pouvoirs…, op. cit.,

diverses difficultés, le système électif devait rapidement être remis en cause sous la Révolution.

129. Conformément au mode de désignation des juges prévu par le décret des 16 et 24 août 1790, les citoyens actifs furent pour la première fois convoqués dans les assemblées primaires au cours de l’hivers 1790-1791, afin d’élire les juges de paix, et de choisir les électeurs du second degré chargés d’élire les juges des tribunaux de district et du Tribunal de cassation. Cependant, ces élections furent marquées par un important abstentionnisme. Suite à l’abolition de la royauté338, et sans respecter le terme normal des mandats des juges, la Convention décréta sur proposition de Danton, le 22 septembre 1792, que : « les corps judiciaires seraient

renouvelés, ainsi que les juges de paix », et que « les juges pourraient être choisis indistinctement entre tous les citoyens ». Les élections qui se déroulèrent au mois de

janvier 1793, ne connurent malheureusement pas une participation plus importante. En outre, la Constitution de l’an I fut suspendue avec la proclamation du gouvernement « révolutionnaire jusqu’à la paix », le 10 octobre 1793.

Dans ce cadre, la Convention se chargea de pourvoir aux places vacantes, sans organiser de consultations électorales préalables. Puis, le Comité de salut public procéda concomitamment à des épurations dans les rangs des juges, comblant directement les places vacantes par des décrets successifs des 7 octobre 1793, 19 février, 13 et 18 mars 1794, ainsi que par un arrêté du 12 avril 1794339. Au lendemain

du 9 thermidor marquant la fin de la terreur, la Convention fit procéder au renouvellement des tribunaux par voie électoral. Mais en raison d’un abstentionnisme persistant, elle attribua à un comité de législation le soin de nommer à tous les emplois judiciaires, par un décret du 4 mars 1795340. La Constitution du 22 frimaire an VIII, consécutive au coup d’Etat de Napoléon Bonaparte et établissant le Consulat, devait finalement mettre un terme à l’expérience de la magistrature élective.

130. En dépit de son apparition sous la Monarchie constitutionnelle, le système électif a été étroitement associé par la suite au régime républicain. En effet, l’élection des juges a connu un regain d’intérêt à partir de la Restauration, dans la mesure où elle s’inscrivait en rupture avec l’affirmation des Chartes constitutionnelles, suivant lesquelles: « Toute justice émane du roi ». Dans ce cadre, elle a été érigée en véritable credo, et sa cause a été ardemment défendue à

338 Décret des 21 et 22 septembre 1792.

339 G. Picot, La réforme judiciaire en France, Hachette, Paris, 1881, p. 30-31, cité in G.

Martin-Sarzeaud, op. cit., p. 404.

l’occasion de chaque changement de régime, se traduisant par l’avènement d’une nouvelle République. Or, il est intéressant de souligner le rapport inversement proportionnel existant entre l’inamovibilité et le système électif. Les tentatives de rétablissement de ce dernier, coïncident avec chacune des grandes crises auxquelles s’est trouvée confrontée l’inamovibilité, en régime républicain.

Au lendemain de la proclamation de la Seconde République, le 2 mars 1848, le Ministre de l’intérieur Ledru-Rollin adressa en ce sens aux commissaires de la République, une circulaire ordonnant : « la suspension de l’inamovibilité en

attendant la mise en place d’une magistrature librement élue »341. Un mois plus tard,

le 17 avril 1848, le Gouvernement provisoire vint compléter cette instruction par un décret ainsi rédigé : « Considérant que le principe de l’inamovibilité de la

magistrature, incompatible avec le gouvernement républicain, a disparu avec la Charte de 1830 ; provisoirement, et jusqu’au jour où l’Assemblée nationale se prononcera sur l’organisation judiciaire, la suspension ou la révocation des magistrats peut être prononcée par le ministre de la justice, comme mesure d’intérêt public ». A défaut d’inamovibilité, le Gouvernement se prononçait en faveur de

l’élection des juges. Cependant, la Constitution du 4 novembre 1848 devait faire mentir cette affirmation, en accordant à des juges désignés par le chef de l’Etat, le bénéfice de cette garantie342.

Sous le Second Empire, la défense de l’élection des juges par les républicains, vint s’intégrer dans un courant plus vaste en faveur de la transposition en France d’un système inspiré des modèles suisse et américain. Sous ces influences, était suggérée à la fois l’élection des fonctionnaires au suffrage universel et la décentralisation territoriale. Ainsi, Jules Simon publiait en 1868, sa Réforme

radicale, dans laquelle il dénonçait l’existence d’une administration « d’esprit

monarchique », oppressive à l’égard des libertés343. De la même manière, Léon

Gambetta devait réclamer dans son Programme de Belleville de 1869, la désignation de l’ensemble des agents de la fonction publique par voie électorale344. Ainsi,

sachant que les juges américains et suisses bénéficiaient de l’inamovibilité, l’opposition entre le système électif et l’inamovibilité semblait se réduire.

341 A. Ledru-Rollin, circulaire du 2 mars 1848, citée in J. Poumarède, La magistrature et la

République. Le débat sur l’élection des juges en 1882, Mélanges Pierre Hébraud, éd. Université des

sciences sociales, Toulouse, 1981, p. 672.

342 Article 87.

343 J. Poumarède, La magistrature et la République…, op. cit., pp. 672-673.

344 J. Gaillard, Gambetta et le radicalisme entre l’élection de Belleville et celle de Marseille en

131. Pourtant, cet antagonisme devait renaître avec l’avènement de la IIIème

République. En tant que ministre de la justice du Gouvernement de la défense nationale, Adolphe Crémieux prit deux décrets, les 28 janvier et 3 février 1871, afin de révoquer des magistrats qui avaient siégé dans les commissions mixtes en 1852. Or, ce ministre avait déjà exercé des fonctions analogues au sein du Gouvernement provisoire de la Seconde République, et était en conséquence favorable à l’élection des juges. Cependant, l’Assemblée nationale nouvellement élue, et composée en majorité de monarchistes et bonapartistes, annula ces décrets le 26 mars 1871. En définitive, seule la Commune de Paris proclama l’élection des juges au suffrage universel direct345, pendant cette période troublée.

Un véritable débat devait en revanche s’engager sur le sujet, avec l’avènement de la « République aux républicains », dans le sillon des élections qui avaient porté une majorité républicaine à la Chambre des députés et au Sénat, entraînant la démission du Maréchal de Mac-Mahon de la présidence de la République, au profit du républicain Jules Grévy. Georges Clemenceau avait alors érigé en doctrine, la formule : « Toutes les places et tout de suite », avec pour réponse : « élisons les

juges ». Lors de la séance du 22 novembre 1880 à la chambre basse, un amendement

de l’extrême gauche radicale en faveur de l’élection, recueillit 175 voix346, dépassant

les frontières de ce courant politique347. Plus encore, il semblerait qu’aux élections

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