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Une tentative d’accord avortée entre les Verts et le PCF

Dans le document La genèse de la gauche plurielle (1993-1997) (Page 188-196)

Chapitre 9 – S’allier en dehors du PS ?

1) Une tentative d’accord avortée entre les Verts et le PCF

Comme nous l’avons vu, les relations entre les Verts et les partis de gauche restent, de manière globale, peu développées avant le début des années 1990. Cette affirmation est encore plus vraie concernant les Verts et les communistes, car ces derniers ont pris plus tardivement en compte la question environnementale que les socialistes et n’ont pas ou peu intégré dans leur rang des personnes sensibles à cette cause, à la différence du PS. Celui-ci a en effet incorporé au milieu des années 1970 de nombreux militants du PSU, organisation qui s’est intéressée aux thématiques écologistes, dans un contexte post-1968866. Comme expliqué dans un précédent chapitre, le PCF a, en particulier dans les années 1970, souvent associé l’écologie à la baisse du niveau de vie et affirmé que le capitalisme portait la responsabilité

866 Vanessa Jérôme, « Engagement et carrières militantes chez Les Verts - EELV : un éternel

recommencement ? », EcoRev', no 42, 2015/1, p. 49. Brice Lalonde a été par exemple membre du PSU de 1969 à

des problèmes environnementaux, critiquant ainsi l’analyse des écologistes867. De plus, les tentatives de rapprochement avec les Verts provoquées par les communistes avant 1993 ont été moins nombreuses que celles tentées par les socialistes. Comme le rappelle Guillaume Sainteny, « durant la campagne pour les législatives de 1993, Georges Marchais envisage des désistements au cas par cas en faveur des écologistes868 » mais cela ne se traduit par aucun accord concret et surtout, cela n’avait jamais été envisagé auparavant. Ce n’est qu’après ces élections que les communistes et les écologistes se côtoient davantage, comme nous l’avons souligné, dans le cadre de débats, par exemple lors des forums organisés par les communistes en 1996. Ces éléments permettent donc de mettre en lumière la singularité de la démarche de confrontation idéologique qui s’engage entre les Verts et le PCF en 1996, mais permet également d’éclairer les raisons, sur lesquelles nous reviendrons, pour lesquelles cette démarche n’a abouti à un aucun accord.

– Faire le bilan des convergences et des divergences

Si les Verts entament des négociations avec le Parti socialiste en 1996, la formation écologiste discute donc également de manière assidue, notamment par le biais des groupes de travail, avec le Parti communiste. Dominique Voynet souhaite « éviter à tout prix que tous les mouvements de gauche et écologistes donnent l’occasion au PS d’organiser des tête-à-tête qui lui permettraient de jouer les uns contre les autres869 ». Les Verts veulent donc favoriser le multilatéralisme. D’emblée, Jean-Luc Bennahmias indique concernant les négociations avec le PCF que pour les législatives, « aucune circonscription n’est négociable870 ». Une composante essentielle d’un éventuel accord étant évacuée, seule reste la possibilité d’un accord programmatique.

Selon la lettre de cadrage sur les groupes de travail Verts/PS et Verts/PCF, la même démarche de confrontations thématiques a été mise en place avec le Parti socialiste et avec le Parti communiste871. Ce processus s’amorce avec le PCF à partir de la réunion entre les délégations écologistes et communistes qui a lieu le 30 avril 1996, à l’issue de laquelle un communiqué commun est rédigé872. Ces délégations sont présidées par Dominique Voynet et Robert Hue, et composées de Jean-Luc Bennahmias et Alain Uguen pour les Verts, et Jean-Claude Gayssot, Marie-George Buffet et Sylvie Mayer pour le PCF. Dans ce communiqué, qui présente un

867 Guillaume Sainteny, « Le Parti communiste français face à l’écologisme », art. cit. 868 Ibid., p. 161.

869 Compte-rendu du CE du 5 mars 1996, p. 7, boîte D1 BE (CE) CIRE/POL/EELV/INST/BE/29, fonds des

Verts, CIRE.

870 Ibid., p. 8.

871 Document « Groupes de travail Verts/PS et PCF : le cadrage », 28 mai 1996, p. 2, boîte Correspondance 1996

CIRE POL/EELV/CORRES, fonds des Verts, CIRE.

premier bilan des convergences et des divergences, les deux organisations « soulignent combien la défense et la valorisation de l’environnement sont partie intégrante de la lutte pour le progrès humain873 » et expriment également « leur attachement à la représentation proportionnelle intégrale874 ». Les divergences portent, quant à elles, sur la construction européenne, la politique industrielle et énergétique, ainsi que les modalités de réduction de la durée du travail. L’étude de la poursuite des négociations doit permettre de les éclairer de manière plus précise.

Une autre réunion a lieu le 2 juin 1996 entre Yves Cochet et Jean-Claude Gayssot, membre du Bureau politique du PCF. Est convenue la mise en place de trois groupes de travail bilatéraux, dont le but est de comparer les orientations politiques875. Le premier porte sur le thème « Quel type de développement ? » et rassemble des problématiques très larges et diverses : exclusion, chômage, emploi, relance sélective, réduction du temps de travail, protection sociale, fiscalité, politique de la ville, énergie, transports, agriculture, aménagement du territoire, espaces et ressources naturels, déchets. Le deuxième groupe de travail doit se consacrer au thème de la mondialisation, afin de comparer les positions des deux formations à propos des rapports entre le Nord et le Sud, de l’Europe, de la coopération, de la défense, etc. L’intitulé du troisième et dernier groupe porte sur le thème « Démocratie-citoyenneté » : y seront abordés la question des institutions, la parité, l’immigration, la réforme de l’État, la justice, l’éducation et enfin, les services publics. Le champ de discussion de chaque groupe est donc extrêmement large, et les questions économiques et écologiques sont regroupées, à la différence des groupes de travail avec les socialistes, au sein d’un seul thème, ce qui illustre peut-être un moindre désir de procéder à des clarifications. La première réunion des groupes de travail, Verts/PS comme Verts/PCF, a lieu le 27 juin 1996876.

Un premier rapport d’étape, déjà utilisé dans l’analyse des négociations entre les Verts et les socialistes, a été retrouvé dans les archives, en annexe d’un rapport politique du CE. Ce rapport, daté du 4 octobre 1996 et rédigé par Denis Baupin, fait état de l’avancée des discussions avec le PS et le PCF à propos des questions écologiques et internationales. Il indique qu’une rencontre a eu lieu avec le PCF, durant laquelle l’ensemble des sous-thèmes du groupe de travail « Quel type de développement ? » a été abordé. Denis Baupin écrit que

873 Déclaration commune Verts-PCF, 30 avril 1996, boîte D6 CNIR juin 1996 CIRE/POL/EELV/INST/CF/49,

fonds des Verts, CIRE.

874 Ibid.

875 Document « Préparation des élections de 1998 : Premier rapport d’étape (et motion). Le cadrage », p. 10,

documents de séances no 2, CNIR des 15 et 16 juin 1996, boîte D6 CNIR juin 96 CIRE/POL/EELV/INST/CF/49,

fonds des Verts, CIRE.

876 Compte-rendu du CE du 4 juin 1996, p. 6, classeur E1 CE 1996 CIRE/POL/EELV/INST/BE/12, fonds des

« que c’est indéniablement sur l’énergie que nous avons constaté les divergences les plus fortes avec le PC877 ». La question nucléaire est, sans surprise, très sensible, puisque le PCF veut maintenir et renouveler le parc nucléaire français, y compris le surgénérateur Superphénix, tandis que les Verts souhaitent l’abandon de ce dernier et une sortie progressive du nucléaire civil. Les énergies renouvelables ne sont pas considérées comme une alternative crédible par le PCF, car jugées incapables de « répondre aux besoins du pays878 », ce qui le conduit à être favorable à l’augmentation du chauffage électrique. Les divergences sur cette question sont donc très profondes. Cependant, sur la question des transports, Denis Baupin écrit que « de larges places d’accord apparaissent clairement avec le PC879 », notamment sur la préférence du rail par rapport aux voies routières, sur la nécessité de privilégier les transports en commun en ville, sur l’abandon du canal Rhin-Rhône et sur la mise en place d’un canal Seine-Nord. Une philosophie commune existe aussi sur la valorisation d’une agriculture paysanne plutôt qu’exportatrice, la prévention des pollutions et le maintien des services publics sur tout le territoire880. Sur les questions internationales, le rapport de Marie- Hélène Aubert, du 4 octobre également, souligne qu’à l’inverse des discussions avec le PS, celles avec le PCF ont bien avancé, avec deux réunions ayant eu lieu en septembre 1996881. La membre du Collège exécutif des Verts explique qu’il n’y a « pas vraiment de divergences » sur l’analyse des conséquences du traité de Maastricht, mais que, à l’inverse, « les propositions pour en sortir traduisent la culture et l’histoire des deux partis »882. En effet, le Parti communiste insiste sur la pertinence du cadre national ainsi que sur d’autres points comme la question de l’élargissement, le problème de la circulation et de la taxation des capitaux, qui ne semblent pas primordiaux aux yeux des Verts. Ceux-ci rejettent aussi l’idée de l’instauration d’une monnaie unique « à marche forcée883 » et considèrent que la monnaie commune, qui permettrait à l’Europe de produire sa propre monnaie de manière souveraine sans attendre d’autres convergences, est une meilleure idée, d’autant plus que chaque pays aurait alors la possibilité, ou non, de fixer sa monnaie à la monnaie commune884. Mais il est certain que le Parti communiste, à la différence des Verts, refuse toute délégation

877 Document en annexe du rapport politique nommé « Préparation de 1998. Groupe de Travail Environnement-

Territoire. État des discussions avec le PS et le PC », p. 7, CNIR des 5 et 6 octobre 1996, boîte E5 CNIR 96 EELV CIRE/POL/EELV/INST/CF 84, fonds des Verts, CIRE.

878 Ibid. 879 Ibid., p. 8. 880 Ibid.

881 Document en annexe du rapport politique nommé « Groupes de travail PS, PC, Verts. Questions

internationales », p. 9, CNIR des 5 et 6 octobre 1996, boîte E5 CNIR 1996 EELV CIRE/POL/EELV/INST/CF/84, fonds des Verts, CIRE.

882 Ibid.

883 Document « Monnaie unique ou monnaie commune », classeur H1 Législatives 1993

CIRE/POL/EELV/ELEC/LEGI93, fonds des Verts, CIRE.

supranationale des pouvoirs dévolus habituellement aux États et propose au contraire une communauté européenne des peuples et des nations souverains, comme l’a rappelé le communiqué commun du 30 avril.

Un compte-rendu d’une réunion de la Commission stratégie des Verts qui s’est tenue le 10 septembre 1996 rapporte que « les experts du PS semblent peu motivés pour l’aboutissement des travaux, ceux du PC un peu plus. Bien qu’ils aient reçu des fiches synthétisant les discussions, il n’y a pas eu de réponse885 ». Il est cependant indiqué que les groupes de travail doivent perdurer en continuant à vérifier les convergences, « repérer les désaccords fermes » mais aussi « les points sur lesquels des évolutions semblent possibles »886. Il est prévu que les textes des groupes de travail soient achevés fin octobre. Le 5 octobre 1996, le rapport politique du Collège exécutif souligne « l’absence d’enthousiasme887 » vis-à-vis de la démarche proposée par les Verts, liant accord électoral et accord programmatique, ainsi que « le peu d’engagement des participants à certains groupes de travail mixtes Verts-PS ou Verts-PCF […]888 ».

Le rapport complet des groupes de travail thématiques Verts/PS et Verts/PCF peut de nouveau être utilisé pour analyser les négociations. Pour rappel, il a été rédigé par les rapporteurs des Verts et présente donc avant tout leur perception concernant les positions de leurs interlocuteurs. La lecture de ce rapport permet de comprendre qu’in fine le travail de confrontation des positions entre les Verts et les communistes a été moins approfondi que celui mené avec les socialistes.

Ce rapport s’ouvre sur un résumé de l’activité des groupes de travail portant sur l’environnement et le territoire (qui ne correspondait pas à un groupe en tant que tel pour les Verts et le PCF, mais à un sous-ensemble). Ce résumé confirme les clivages forts entre le PC et les Verts sur la question de l’énergie : le PCF ne souhaite ni une sortie totale du nucléaire ni la fermeture du surgénérateur Superphénix et de l’usine de retraitement de la Hague. Concernant les transports, ce rapport ne diffère pas non plus du rapport d’étape présenté plus haut : les points d’accords sont nombreux. À la suite du résumé, on trouve le texte détaillé sur l’état des discussions avec les communistes. En revanche, à propos des questions économiques et sociales, le chapeau du texte indique que « les réunions tenues avec le Parti

885 Compte-rendu de la Commission Stratégie, p. 2, 11 septembre 1996, Compte-rendu du CE du

10 octobre 1996, classeur E1 CE 1996 CIRE/POL/EELV/INST/BE/12, fonds des Verts, CIRE.

886 Ibid.

887 Rapport politique du CE, p. 6, 5 octobre 1996, CNIR 5 et 6 octobre 1996, boîte E5 CNIR 1996

CIRE/POL/EELV/INST/CF/84, fonds des Verts, CIRE.

communiste français n’ont pas permis de dégager suffisamment d’éléments comparatifs889 » et que les contacts se poursuivent. De plus, concernant les questions de démocratie et de citoyenneté, le texte issu des discussions entre les Verts et le Parti socialiste est détaillé sur plus de cinq pages, tandis que celui lié aux échanges entre les communistes et les écologistes est résumé sur une demi-page. En effet, « seules deux réunions ont été tenues » et « […] sont toujours restées à un niveau très général »890. Des points d’accord sont listés mais relèvent « d’impressions et non de certitudes891 » : il s’agit de la proportionnelle, déjà évoquée, de la parité hommes-femmes, du droit des étrangers (accolé à la mention « sous réserve »), des droits sociaux dans les entreprises (sous réserve de propositions plus détaillées), de l’exercice de la citoyenneté « prise sous l’angle des droits individuels (droit à…, droits des…) plus que sous celui des droits des associations (de défense de…)892 ». Les deux points de désaccord probables portent sur la régionalisation, puisque « le PC est jacobin par nature et départementaliste par opportunité [sic]893 », et la démocratie locale, le référendum d’initiative populaire « et d’une manière générale tout ce qui pourrait amoindrir le caractère représentatif des élus894 ». Enfin, à propos des questions internationales, deux réunions ont eu lieu entre les délégations Verts et PCF, alors qu’il n’y en a eu aucune avec le PS. Il en ressort une vraie différence, déjà constatée dans le rapport d’étape, entre la position du PCF, favorable à « une véritable communauté pour le renforcement des liens de solidarité forts entre nations partenaires et égales » et très « anti-Maastricht », et les Verts, partagés entre le « oui » et le « non » lors du référendum de Maastricht en 1992 et favorable à une Europe fédérale, démocratique, sociale, « de l’écodéveloppement »895. Le rapport note que le PCF est divisé concernant les institutions à adopter pour mettre en œuvre des projets communs européens, tandis que les Verts souhaitent « une constitution européenne de type fédéral, un Parlement européen et un Sénat des États-Régions aux pouvoirs renforcés, le principe de subsidiarité, une citoyenneté européenne896 ». Toutefois, les deux partis s’accordent sur la sortie de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et de l’Union de l’Europe occidentale (UEO). Ils se retrouvent également sur la nécessité d’accentuer la coopération et la solidarité entre les pays du monde et de repenser les institutions financières internationales.

889 « Rapport des groupes de travail thématiques Verts/PS et Verts/PCF », p. 10, boîte 4 AP/S/6 (cote provisoire),

Élections législatives 1997, série Scrutins, fonds EELV, FEP.

890 Ibid., p. 16. 891 Ibid. 892 Ibid. 893 Ibid. 894 Ibid. 895 Ibid., p. 17. 896 Ibid.

– L’échec des négociations : quelles raisons ?

Une dernière rencontre entre les Verts et les communistes, hors groupes de travail, a lieu le 29 novembre 1996897. Par la suite, en raison de la tenue du congrès du PCF fin décembre 1996, les discussions sont gelées. Le 30 janvier 1997, une nouvelle réunion a lieu entre les Verts et le PCF. Selon Marie-Françoise Mendez, membre du Collège exécutif des Verts, il a été proposé au PCF, entre autres propositions, de continuer à travailler sur un texte commun. D’après cette militante, les communistes ont répondu ne pas être contre le fait de continuer à travailler ensemble, même s’ils ne veulent pas d’un « texte qui fasse le tour des sujets898 ». Plus exactement, « ils ne veulent pas d’un texte de compromis mais plutôt un état des convergences et des divergences899 ». Un accord électoral paraît toujours inenvisageable : Marie-Françoise Mendez souligne le refus du PCF « d’une traduction électorale de cette idée de coalition900 ».

Cependant, les discussions ne reprennent pas au début de l’année 1997 et, compte tenu de la dissolution, ne reprendront jamais. La question que l’on peut se poser est alors : pourquoi un accord n’a-t-il pas été signé entre les Verts et les communistes ? À ce sujet, faute d’archives abondantes et précises du côté des communistes, on ne peut émettre que des hypothèses, fondées sur certains documents retrouvés dans les archives des Verts.

Première hypothèse, qui tend à relever du constat : les convergences idéologiques entre le PCF et les Verts semblent moins nombreuses qu’avec le PS. Nous l’avons vu, les divergences sont fortes sur la question européenne – même si les Verts ont un regard critique sur le traité de Maastricht et la monnaie unique –, mais aussi sur la politique énergétique, la décentralisation, qui ne sont pas des sujets secondaires pour eux. Il est donc possible qu’elles aient incité le PCF à renoncer à un accord avec les Verts, car il aurait alors fait état de trop de positions différentes pour paraître suffisamment crédible et rassembleur. Dans une lettre à Jean-Luc Mélenchon datée de février 1997, Dominique Voynet confirme cette hypothèse et écrit que la grande coalition alternative ne peut voir le jour en raison, notamment, de l’importance des divergences901.

897 Compte-rendu du CE des 12 et 13 novembre 1996, p. 4, classeur E1 CE 1996 CIRE/POL/EELV/INST/BE/12,

fonds des Verts, CIRE.

898 Compte-rendu du CE du 31 janvier 1997, p. 14, boîte 4AP/B/10 (cote provisoire), fonds EELV, FEP. 899 Ibid.

900 Ibid.

901 Lettre de Dominique Voynet à Jean-Luc Mélenchon, 24 février 1997, boîte W3 1er semestre 1997

S’il n’y a pas accord programmatique, il n’y a pas non plus accord électoral, peut-être en raison du doute concernant le bon report des suffrages écologistes sur les candidats communistes. Selon Dominique Voynet, le PCF est par ailleurs « désireux de mesurer son poids dans l’opinion902 ». La raison est peut-être également à chercher du côté de la rivalité entre les deux partis, qui cherchent à s’affirmer, et ce d’autant plus après les élections, comme le deuxième pôle de la gauche plurielle903. Dans ce contexte, le PCF préfère peut-être poursuivre plus avant les négociations avec le PS avant de signer un accord avec les Verts, même si la dissolution en avril 1997 contrarie cet éventuel projet.

Autre hypothèse : les cultures politiques sont trop différentes. C’est vrai tout d’abord sur le plan organisationnel : les Verts sont organisés d’une manière qui laisse largement la place aux différentes tendances et sensibilités et veillent à respecter scrupuleusement ce pluralisme, tandis que le PCF admet mal toute expression un peu divergente, récusant la formation des tendances au nom du centralisme démocratique, même si ce principe est supprimé en 1994. De plus, l’écologie plonge nombre de ses racines dans mai 1968, du point de vue des idées comme des trajectoires personnelles, puisque beaucoup de membres des Verts ont participé à mai 1968904, la plupart du temps cependant en dehors des groupes d’extrême gauche. À l’inverse, le PCF s’est traditionnellement méfié du « gauchisme » et de tous ceux qui remettaient en cause le modèle soviétique.

Si aucun accord n’a été signé, certains éléments motivaient tout de même la conduite de ces discussions. Tout d’abord, écologistes et communistes se rejoignent dans l’expression d’une certaine radicalité. De plus, ces discussions avec le PCF s’expliquent par le fait que les Verts ne souhaitent pas être marginalisés en cas d’accord entre le PS et le PCF, d’absence d’accord avec le PS ou d’accord avec le seul PS. Ils contestent, ou du moins n’entendent pas automatiquement laisser au Parti socialiste une position centrale au sein d’un système

Dans le document La genèse de la gauche plurielle (1993-1997) (Page 188-196)