• Aucun résultat trouvé

Les taux d’intérêt des marchés de capitaux à long terme

Encadrement du taux de marché par les taux officiels

3- Les taux d’intérêt des marchés de capitaux à long terme

Les taux d’intérêt se présentent, avons-nous dit, selon une structure pyramidale. Des liens sont tissés entre les différents taux d’intérêt. Les mouvements de baisse et de hausse de certains taux se propagent dans les autres compartiments du système financier. Nous avons vu comment se définit le taux de crédit dans le système bancaire. Il n’est pas inintéressant d’élargir la description pour avoir une vue d’ensemble globale sur l’instrumentalisation multiforme et complexifiée de cette catégorie économique.

Dans cet esprit, nous examinons comment se fixe le taux d’intérêt au niveau des marchés de capitaux à long terme, abstraction faite du marché des actions qui ne concerne pas

1 F. RASSI, J. - P. GOURLAOUEN et G. MERCIER, Les taux d’intérêt, ouvrage cité, p.°31.

2 C’est ce que nous apprenons du document La Banque de France : son histoire, son organisation et son rôle, déjà cité, p.°19.

directement à ce stade notre propos. Nous nous intéresserons donc au marché obligataire et subsidiairement au marché hypothécaire. Mais nous devons par là même aussi présenter les instruments financiers permettant de se couvrir contre le risque de fluctuation du taux d’intérêt, instruments développés dans le mouvement des innovations financières.

3.1- Les taux du marché obligataire

Le marché obligataire offre en réalité de nombreux taux entre lesquels il est difficile de choisir un taux représentatif. Néanmoins lorsqu’on évoque les taux du marché obligataire, l’on se réfère très généralement aux taux de rendement des obligations à taux fixe pour des emprunts d’État. On sait en effet que le taux d’intérêt nominal de l’obligation n’a qu’une signification limitée eu égard à l’existence de primes d’émission et de primes de remboursement ou encore d’écart éventuel entre la date de règlement et la date de jouissance. Ces taux sont appréciés soit sur le marché primaire au moment de l’émission, soit sur le marché secondaire lorsque les titres font l’objet d’un échange entre prêteurs et emprunteurs de capitaux. Il faut aussi préciser que le rendement fixé correspond peu ou prou à l’état du marché lors de l’émission du titre, car l’emprunteur (État, collectivité, organisme public ou société privée) ne peut se permettre d’offrir une rémunération trop faible s’il désire attirer les investisseurs.

3.1.1- Des obligations à taux fixe et à taux flottant

En outre, pour exprimer le prix de l’argent à long terme, il est courant de distinguer les obligations à taux fixe de celles à taux flottant ainsi que nous l’avons expliqué à propos du risque de taux. Pour les titres à taux fixe, deux taux sont principalement déterminés :

- le taux moyen mensuel du rendement des obligations nouvellement émises à taux fixe dans le mois non indexées et garanties par l’État (TMO), en l’occurrence les obligations du secteur public hors État lui-même;

- le taux des obligations du secteur privé non garanties par l’État, obligations dites de seconde catégorie.

Le taux moyen du marché obligataire (TMO) est normalement plus faible pour les titres publics que pour les autres valeurs ; la personne de l’emprunteur joue un rôle important dans la détermination des taux. En revanche, en ce qui concerne les obligations à taux flottant, il importe de rappeler la différence entre les taux révisables et les taux variables.

Dans le cas du taux révisable, le taux d’intérêt est déterminé avant la période au cours de laquelle il s’applique ; les termes du contrat de prêt ou de placement indiquent quand interviendront les révisions, par exemple chaque fin d’année. Dans le cas du taux variable, au contraire, le taux qui varie continuellement est calculé durant cette période de sorte qu’il ne peut, bien entendu, être défini qu’à l’issue de celle-ci; le montant des intérêts payés ou reçus ne sera réellement et définitivement connu qu’à l’échéance du prêt ou du placement.

Ces taux révisables ou variables sont modifiés en fonction de différents indices servant de base à leur réévaluation ; la palette des possibilités est large entre les taux à court terme et les taux à long terme tels que :

- un taux à indexation monétaire : TMM (moyenne de taux mensuels du marché interbancaire au jour le jour), TAM (taux annualisé du marché monétaire), EURIBOR, TMB (taux moyen des bons du Trésor) ;

- un taux à référence obligataire : TMO ou TME (). Les deux indices TMO et TME sont publiés chaque mois par la Caisse des dépôts et consignations (moyenne arithmétique des douze taux moyens mensuels de rendement des emprunts de l’État à long terme ou assimilés).

En outre, il est possible de “corriger” ces taux en accordant, par exemple, seulement 95% du TMO, TME - 0,75% ou TAM + 0,75. Certains titres à taux variable offrent une rémunération minimale. Bien entendu, c’est lors du lancement de l’emprunt que l’émetteur établit une référence qui servira de base de calcul au coupon du titre.

3.1.2- Risque de taux

Les obligations à coupons prédéterminés c’est-à-dire à taux fixe ou révisable et dans une moindre mesure celles à taux variable comme aussi les titres de créances négociables sont-elles sujettes au risque de taux d’intérêt. En quoi consiste-t-il précisément ?

3.1.2.1- Définition du risque de taux

Le risque de taux d’intérêt est le risque couru par un porteur de réaliser une moins-value sur la valeur de son titre ou de subir un coût supplémentaire - effectif ou d’opportunité sur une opération de prêt ou d’emprunt. La créance ou la dette peut être actuelle (prêt ou emprunt existant), future (engagement de prêter ou d’emprunter) ou conditionnelle (éventualité de contracter un prêt ou un emprunt). Il provient de la variation ultérieure des taux d’intérêt. Il augmente avec la variabilité de ces derniers.

L’évolution des taux se traduit par une augmentation des risques (en capital et en revenu). Ce risque de taux n’est pas seulement dû à leur variabilité mais aussi à leur tendance générale (à la hausse ou à la baisse). La fréquence et l’amplitude des fluctuations des taux d’intérêt ont intensifié les incertitudes liées à la gestion prévisionnelle de trésorerie, de portefeuille et des investissements.

3.1.2.2- Réaction des titres face aux mouvements des taux

L’incidence de la fluctuation des taux d’intérêt des marchés à long terme n’est pas identique selon qu’il s’agit de titres émis à taux fixe ou de ceux offerts à taux variable.

3.1.2.2.1- Titres à taux fixe

Les obligations à taux fixe sont très sensibles à l’évolution des taux d’intérêt. En pratique, leurs cours varient en sens inverse des taux, c’est-à-dire qu’ils progressent quand les taux diminuent et qu’ils baissent quand les taux remontent. A priori surprenant, ce phénomène s’explique aisément : lorsqu’un investisseur désire acquérir des titres, il a le choix entre acheter des obligations à l’émission sur le marché primaire ou des titres anciens cotés sur le marché secondaire. D’un côté, la nouvelle obligation va proposer le taux du marché afin

d’attirer les investisseurs. De l’autre, le titre “d’occasion” va ajuster son cours en vue d’offrir un rendement équivalent et de demeurer ainsi compétitif.

Ainsi le détenteur d’un portefeuille d’obligations à taux fixe voit la valeur de marché de son portefeuille se déprécier si les taux d’intérêt augmentent sur le marché. La valeur de marché d’une obligation à un instant donné s’établit en effet par l’actualisation au taux de marché des flux financiers futurs générés par cette obligation. Une obligation d’un montant en principal de P, à échéance dans N années et portant intérêt au taux annuel de i verra donc, si le taux du marché s’établit à t, sa valeur portée ou ramenée à C déterminé selon la formule suivante : C = i x P (1 + t)n + P (1 + t)N n = 1 N

A titre d’illustration, une obligation de valeur nominale 100 portant intérêt au taux annuel de 10% et à échéance de 10 ans verra sa valeur évoluer de la manière suivante en fonction du taux de marché :

Taux de marché 8% 9% 10% 11% 12%

Valeur de l’obligation 113,42 106,42 100,00 94,11 88,70

Il ressort qu’un point de hausse du taux de marché se traduit pour le détenteur de cette obligation par une perte potentielle en capital de l’ordre de 6%, correspondant à plus de sept mois d’intérêt. Cette perte ne deviendra toutefois réelle et définitive que dans l’hypothèse où le détenteur serait contraint de céder son obligation à l’instant considéré.1

3.1.2.2.2- Titres à taux variable

La valeur des obligations à taux variable évolue dans une fourchette étroite autour du nominal. En fait, la valeur du capital n’évolue guère puisque c’est la valeur du coupon qui s’ajuste selon une périodicité prévue dans le contrat d’émission (en général, tous les ans). Quand les taux progressent, le montant de la rémunération est revu à la hausse et quand les taux baissent, il est diminué.