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CHAPITRE 2 : CADRE THÉORIQUE

2.6 Synthèse du cadre théorique et questions spécifiques de recherche

Cette recherche porte sur l'amélioration de la formulation d'inférences, c'est-à-dire l'infé- rence de cohésion et d'élaboration, en contexte de compréhension de texte chez des élèves du 3e cycle du primaire à l'aide de dispositifs d’enseignement. Nous avons présenté, dans ce chapitre,

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les notions théoriques et empiriques recensées dans la littérature scientifique en lien avec l’ap- prentissage et l’enseignement entourant ces concepts. Bien que la compréhension soit nettement moins documentée que la reconnaissance de mots, elle suscite de plus en plus l'intérêt des cher- cheurs. Nous disposons actuellement de quelques modèles en compréhension de la lecture qui mettent en exergue les interactions entre plusieurs variables pour construire des représentations mentales qui, lorsqu'imbriquées de manière cohérente, aboutissent à la création d'un modèle de situation. En d'autres termes, construire sa compréhension d'une lecture nécessite l'activation d'opérations et le traitement de plusieurs variables importantes. L'inférence représente l'une de ces opérations hautement reliées à la compréhension de la lecture. Elle joue un rôle majeur pour maintenir la cohérence interne du texte à travers la clarification de mots et des liens qu'ils entre- tiennent ainsi qu'entre les parties du texte afin d'assurer la présence d'un fil conducteur logique. Elle maintient la cohérence externe du texte par l'ajout de compléments d'information issus des connaissances personnelles de l'élève. L'inférence ne représente pas l'explication unique à une difficulté de compréhension. Agent de médiation, la capacité à générer une inférence s'améliore lorsque l'élève dispose de connaissances pertinentes sur le sujet à lire, lorsque son vocabulaire est adéquat et lorsque ses capacités mnésiques s'avèrent fonctionnelles. Les chercheurs qui ci- blent les difficultés de compréhension en lecture se confrontent avec le dilemme, toujours d'ac- tualité, de déterminer qui influence qui et dans quelles proportions. Sans compter que ces fac- teurs d'influence varient d'un élève à l'autre : le potentiel de compréhension de l'un diffère de l'autre tout comme les difficultés ou les sujets d'intérêt en lecture. Ce qui permet à plusieurs d'affirmer qu'apprendre à comprendre un texte s'avère un apprentissage complexe.

Le chercheur et l'enseignant désireux d'améliorer la capacité de compréhension de l'élève disposent d'enseignements dont la valeur est de plus en plus reconnue. Nous les avons regroupés en deux catégories. Premièrement, il y a l'enseignement explicite de stratégies issu du courant cognitiviste et centré sur un travail de construction du sens à travers la maitrise de stratégies cognitives. Deuxièmement, il y a l'enseignement par l'imprégnation partiellement en lien avec le courant humaniste et leur recherche de sens au sein de l'apprentissage. Par la suite, nous avons présenté un dispositif qui conjugue des éléments propres à l'enseignement explicite et à l'ensei- gnement par l'imprégnation. Il s'agit de l'enseignement réciproque qui propose un enseignement

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explicite de quatre stratégies de compréhension pratiquée à l'aide de séances de discussion col- laborative afin de maintenir l'engagement, comme le suggère l'enseignement par l'imprégnation.

Lorsque les chercheurs implantent l'enseignement réciproque dans le contexte particulier de la classe ordinaire, ils se butent à divers obstacles. Les recherches analysées mentionnent qu'il est parfois difficile de respecter les principes théoriques du dispositif lorsque ceux-ci en- trainent des problèmes de gestion de classe; en effet, l'enseignant préfère apporter des modifi- cations qui facilitent le travail de l'élève, mais qui n'assurent pas nécessairement le succès de l'enseignement expérimenté. Aussi, les études décrites ne tiennent pas toujours compte de la diversité des profils d'apprenants. Une classe ordinaire est peuplée d'élèves aux compétences d'apprentissage ou de comportements fort variés. Il serait utile de savoir à qui profite cet ensei- gnement dans une classe ordinaire.

La problématique et le cadre théorique de ce devis soulignent l'importance d'enseigner la compréhension d'une lecture, et particulièrement l'inférence, par des pratiques reconnues par la recherche, ceci afin de contrer les difficultés d'accès au sens d'une lecture que vivent plusieurs élèves québécois. Dans le contexte scolaire montréalais, qui contient plusieurs zones de défavo- risation et de populations allophones, ces difficultés s'accentuent. Cependant, très peu d'études s'intéressent justement à l'amélioration de la capacité inférentielle d'un élève du primaire en considérant l'engagement que celle-ci nécessite. Il nous faut donc trouver un enseignement dont la structure suscite l'engagement et qui peut être viable en classe ordinaire considérant les con- traintes que ce milieu impose. L'enseignement réciproque, qui consiste en un enseignement ex- plicite de stratégies de compréhension bonifié par l'implantation de séances de discussion col- laborative permet, à la fois, de travailler de manière différenciée avec l'élève, de pratiquer les stratégies de cet enseignement et de stimuler l'engagement de celui-ci.

Dans le contexte de la classe ordinaire québécoise, et plus particulièrement dans le con- texte de la classe montréalaise, nous disposons de très peu d'études qui vérifient l'efficacité d'un dispositif d'enseignement de la compréhension en lecture. À notre connaissance, aucune étude ne vérifie les effets d'un enseignement réciproque pour améliorer la formulation d'inférences pour une clientèle d'élèves du 3e cycle du primaire évoluant en classe ordinaire montréalaise et dont l'implantation est assurée par l'enseignant. L'enseignement réciproque, qui a fait ses

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preuves ailleurs qu'au Québec, mais dont l'implantation en classe ordinaire nécessite d'appliquer une méthodologie particulière, serait pertinent à expérimenter. Par ailleurs, il nous semble jus- tifié de savoir si l'effet d'un enseignement réciproque se distingue de l'effet d'un enseignement plus magistral que l'on retrouve généralement dans les classes du primaire. À cela, il serait ins- tructif d'ajouter la comparaison avec un groupe contrôle qui n'effectuerait, par exemple, que les mêmes lectures que les autres élèves avec des tâches individuelles. Finalement, en se basant sur les recommandations de Hilden et Pressley (2011), il s'agirait de combiner deux outils afin d'ob- tenir les informations en lien avec les trois conditions expérimentales mentionnées précédem- ment, soit un test de compréhension en lecture marié à un protocole verbal de type entretien d'explicitation pour recueillir les commentaires des élèves. En ce sens, les questions spécifiques de cette recherche doctorale sont les suivantes :

1- Est-ce que les résultats obtenus à un test de compréhension en lecture varient en fonc- tion de chacune des trois conditions expérimentales suivantes: soit une condition de type ensei- gnement réciproque, une condition de type enseignement magistral et une condition contrôle?

2-Est-ce que l’une des trois conditions expérimentales crée une différence sur le plan de l’amélioration de la formulation d’inférences de cohésion et d’inférences d’élaboration?

3- Est-ce que les élèves sont en mesure de formuler des commentaires en lien avec les inférences sollicitées par les textes?

Dans le prochain chapitre, nous présentons, de manière détaillée, les propositions mé- thodologiques pour répondre à ces questions de recherche.