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Le Sud américain selon Hollywood : une Amérique « exoticisée »

Dans le document Le « local » dans l’histoire du cinéma (Page 176-188)

Caroline Hourdry

(Université de Bordeaux)

Introduction

Parler du local dans une perspective hollywoodienne n’est pas une entreprise aisée, dans la mesure où la grande industrie du film améri- cain centralise un certain nombre de clichés, opérant ainsi à un nivel- lement culturel maintes fois décrié. Hollywood, de par son statut d’en- treprise « artistique », se doit de promouvoir un consensus bien com- préhensible, et toute représentation d’une culture locale — qu’elle soit nationale ou non — court le risque d’être exoticisée afin de plaire à un public-cible le plus large possible.

Tel a longtemps été le cas de la culture dite « sudiste » aux États-Unis, que le cinéma hollywoodien présente le plus souvent sur un mode très distancié, contribuant ainsi à une quasi-folklorisation de la ceinture du soleil américaine — folklorisation douce cela dit, puisqu’il faut à la fois titiller la curiosité d’un public non-sudiste et conforter le public du Sud dans sa croyance orgueilleuse en un exceptionnalisme culturel. Le cinéma hollywoodien, à travers leSouthern film, a tenté de retranscrire

une culture bien à part dans la culture américaine, très localisée dans la géographie et dans les esprits, avec les lieux communs que cela sup- pose : un climat torride et oppressant, des personnages troubles, des racistes invétérés ou des secrets de famille inavouables. La littérature américaine — à commencer par Faulkner — a sans nul doute influencé

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producteurs et cinéastes hollywoodiens (Faulkner écrivit le scénario de Intruder in the Dust en ) qui voyaient dans le Southern film

une occasion d’exploiter les bizarreries d’une région historiquement et culturellement différente.

Nous nous demanderons dans cette étude quelle définition appor- ter au label de Southern film dans l’univers hollywoodien. Dans un

premier temps, nous aborderons le dilemme de la représentation du « sud américain » dans l’après guerre : le Sud est-il une section géogra-

phique politisée ou une construction culturelle ? Dans un deuxième temps, nous examinerons les stratégies hollywoodiennes de représen- tation visant à esquiver toute peinture socio-politique d’une région embourbée dans la pauvreté, le racisme et la démagogie politique dans la période d’après-guerre. Pour illustrer nos propos, nous examinerons le film de Robert MulliganDu Silence et des Ombres (To Kill a Mocking- bird, ), adapté, comme bon nombre de Southern films, du roman

éponyme.

Le dilemme d’une représentation filmique du « Sud américain » dans l’après guerre

Parler d’une culture locale sudiste aux États-Unis ne va pas de soi. Si certains historiens préfèrent voir dans le Sud américain une culture nationale exacerbée, à l’instar du très controversé Howard Zinn, beau-

coup d’autres, relayés par les romanciers notamment, s’accordent à dire que le Sud est une entité bien distincte dans le corps national.

Sud et « localisme »

Il faut souligner le fait que les Américains du Sud affichent souvent une certaine fierté ou « localisme ». On pourrait ici parler de « sectio- nalisme », mot hérité de la Guerre de Sécession auquelThe American Heritage® Dictionary of the English Language (Fourth Edition) donne

. Il faut préciser ici que le Southern film pourrait se rapprocher du Western en ce sens que le Western voit parfois son action se déployer dans de toute petites villes du Sud des États-Unis. Toutefois, le Western renvoie à un univers plus ouvert que celui du

Southern film, marqué pour sa part par une certaine claustrophobie et des rapports

interraciaux problématiques.

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ces deux définitions : « dévotion excessive à des intérêts locaux et à des coutumes » et « partialité vis-à-vis d’un endroit en particulier. »

Dans le domaine de la distribution cinématographique, ce localisme s’est manifesté à de multiples occasions, lorsque certains censeurs du Sud menèrent la vie dure aux studios hollywoodiens, notamment dans la période d’après guerre, au moment où tout film sur le Sud subissait l’examen de censeurs sous peine d’être boycotté dans les villes les plus réactionnaires du Sud. Les « Conseils de Citoyens Blancs » (en anglais

White Citizens’ Councils) s’engagèrent dans une chasse aux sorcières

accablant sans relâche l’industrie du cinéma qui vit ses producteurs céder au chantage afin de rentrer dans leurs frais. Difficile dans ces conditions de dénoncer le localisme du Sud, son provincialisme exa- cerbé par le conflit racial, un Sud paranoïaque qui ne souffrait aucune critique des libéraux du Nord et d’Hollywood. Ainsi, les scénaristes évi- taient soigneusement toute problématique raciale, puisque le fameux « problème noir » étaitle tabou par excellence. Qui plus est, les acteurs

noirs voyaient leurs scènes coupées dans les cinémas du Sud. Le pro- ducteur Harry Cohn, lequel travaillait pour le compte de Columbia, exprima sans détour la peur des studios de tomber dans la polémique : « Give me something I can use and nothing controversial — like niggers or God. » Le Sud américain était donc une région à ménager à tous prix.

Des nombreux bureaux de censure du Sud, deux s’avéraient être parti- culièrement pointilleux : ceux de Memphis et d’Atlanta. Thomas Cripps, historien du cinéma américain, cite dans son ouvrageMaking Movies Black deux censeurs sudistes médiatisés, véritables bêtes noires d’Hol-

lywood : Lloyd Binford, président du bureau de censure de Memphis, et Christine Smith, personnage bien connu dans l’histoire de la censure d’Atlanta. Ces individus avaient naturellement un fort penchant ségré- gationniste, et leur volonté farouche de censurer les films traitant du problème racial au Sud trahissait des intentions bien plus politiques que morales. Binford, pour sa part, s’opposa fortement à la distribution du film de WerkerLost Boundaries () traitant du parcours difficile

. Disponible sur www.bartleby.com/61/84/S0208400.html. Nous ne parlons pas ici de la définition historique de « sectionalisme », laquelle renvoie à la guerre de sécession (-).

. Cripps, Thomas. Making Movies Black, Oxford University Press, , p. . Il faut à ce propos préciser que les États du Sud appartenaient à ce qu’on nomme communé- ment la « ceinture biblique » ouBible Belt.

Traduction : « Donnez-moi quelque chose dont je puisse me servir, mais rien qui ne prête à controverse, comme des nègres ou Dieu ».

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d’un métisse. En fait, Binford a toujours cherché à limiter l’influence de films destinés à instaurer la fraternité interraciale, en coupant au mon- tage des scènes où apparaissaient des acteurs ou actrices noirs tels que Lena Horne.

La susceptibilité du Sud était ainsi un paramètre de taille dans la conception d’un film, surtout si celui-ci abordait les problèmes raciaux. Lloyd Binford, qui contrôla le moindre contenu des films sortis à Mem- phis entre  et , personnifiait cette force contestataire qui pou- vait, au nom de la préservation d’une certaine image du Sud américain (qui devait apparaître comme moralement irréprochable), boycotter à sa guise ou même mutiler les créations filmiques hollywoodiennes. Tou- tefois, pour l’historienne du cinéma Allison Graham, c’est davantage la menace de la censure que la censure elle-même qui contraria Hol- lywood : « ... en général, le Production Code Administration se souciait de la représentation des Noirs Américains et fit relativement peu pour bousculer les attitudes conservatrices des blancs du Sud. » C’est donc

dès la conception des films que l’autocensure opérait dans les milieux hollywoodiens. Graham voit donc dans le militantisme conservateur du Sud un réel problème pour Hollywood dont la vocation, plus progres- siste, a maintes fois été contrariée.

Le créneau du « film de plantation » dans l’après-guerre : le Sud idyllique

Pour pallier à ce genre de déconvenues, Hollywood continua d’exploi- ter le filon du « film de plantation » qui visait, démagogie oblige, à exalter le passé glorieux d’un Sud en mal de reconnaissance.L’aristocratie ter-

rienne est ainsi portée aux nues, à travers des personnages tantôt nos- talgiques du Vieux Sud pré-Guerre Civile tels que Ashley dansAutant

. Lloyd Binford était un conservateur invétéré : il désapprouvait par exemple qu’une actrice divorcée joue dans un film distribué à Memphis.

. Graham, Allison. Framing the South. Hollywood, Television, and Race during the

Civil Rights Struggle, Baltimore : Johns Hopkins University Press, , p. .

. Thomas Cripps, en revanche, minimise l’impact de la menace de censure. Il parle en effet du « mythe » de la censure sudiste. Ainsi, selon Cripps, le règne des censeurs tout puissants était achevé en . À ses yeux, la résistance des censeurs du Sud eut peu de répercussions dans l’opinion, si l’on considère le succès phénoménal, même au Sud, des films sur le Sud.

. À noter qu’un des premiers « films de plantation » est Birth of a Nation (D. W. Grif- fith, ), film réalisé par un sudiste faisant l’apologie du Klan.

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en Emporte le Vent (), tantôt combatifs et fiers de leur fief ancestral

à l’image d’une Scarlett O’Hara. Dans une autre veine, le film de plan- tation peut être situé dans un hors-temps bien commode, peuplé de personnages anachroniques vivant dans une innocence toute aristocra- tique. Des films tels queSong of the South/Mélodie du Sud (Harve Fos-

ter et Wilfred Jackson, ), Showboat (George Sydney, ), Band of

Angels/L’esclave Libre (Raoul Walsh, ) sont la preuve que Hollywood

persévérait dans son désir de donner au public une image passéiste du Sud à travers le personnage de laSouthern Belle qui transcende même le

genre du film de plantation (on retrouve ainsi la Belle du Sud — abîmée — dansUn Tramway Nommé Désir, à travers le personnage de Blanche

Dubois).

Dans tous ces films prenant pour centre névralgique la plantation, les personnages de femmes et d’hommes du Sud américain sont souvent les victimes de stéréotypes, parce que les cinéastes étaient le plus sou- vent originaires de Californie, ou du Nord du pays. Pour John Cones, conseiller américain dans la production filmique, le film Autant en Emporte le Vent n’est pas un film sur le Sud, mais une mauvaise redite

du livre de Margaret Mitchell. Les femmes sont présentées comme faibles ou inconsistantes, les hommes comme prétentieux ou inca- pables. La caricature semble être le mode privilégié du film de plan-

tation, qui parfois prend des allures de comédie musicale, pour rendre encore plus intemporelle l’histoire de la Belle du Sud (comme l’atteste

Show Boat, avec Ava Gardner). Le Sud est le nouvel age d’or qui permet

au spectateur de s’évader. On a bien affaire à du divertissement pour ce type de production à gros budget qui, malgré des sujets graves tels que la filiation ou le mythe de l’origine (Showboat), distille des intrigues sou-

vent bien prévisibles.

La ruse hollywoodienne : quand le mode détourne la réalité

Après épuisement du créneau offert par le « film de plantation », Hol- lywood se dirige — sans toutefois y parvenir — vers une peinture plus

. Cones, John. Regional Prejudice : Hollywood’s Rape of the South. Patterns of Bias

in Motion Picture Content, Rivas Canyon Press, 

. Le « film de plantation » a aujourd’hui quasiment disparu, exception faite du der- nier film du controversé Lars Van Trier, dont leManderlay () donne à voir une plan-

tation bien singulière, dont l’épure des décors contraste avec le faste des Tara et autres plantations luxueuses du cinéma hollywoodien.

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réaliste du Sud américain. Toutefois, l’industrie du cinéma ne saurait se défaire de sa mauvaise habitude à caricaturer, recourant à certains modes et tonalités filmiques pour exoticiser autrement le Sud améri- cain.

Le mode satirique

De nombreux personnages satirisés jalonnent le corpus de films sur le Sud américain : la Belle (blanche et riche), l’esclave noir (idiot ou rebelle), leredneck (alcoolique et lyncheur à ses heures) encore appelé

« petit blanc du Sud », dont la frustration est évoquée dans le courant récent duWhite Trash Cinema, dans des films comme Gummo d’Har-

mony Korine. Allison Graham ne manque pas de souligner l’existence d’un autre personnage-type de l’iconographie sudiste qui traverse le cinéma mais aussi la presse : le petit shérif raciste à la tête d’une bourgade perdue du Sud américain. Ce personnage est naturellement fortement caricaturé au cinéma, et encore de nos jours si l’on prend l’exemple du shérif deMississippi Burning (Alan Parker, ), peu zélé

vis-à-vis de l’autorité fédérale, ouvertement raciste (il peste contre les agitateurs qui voudraient accorder aux Noirs les droits civiques) et paresseux. Parfois, il bénéficie d’une rédemption finale lorsque ses pré- jugés tombent au contact de son « alter ego » (pour citer Allison Gra- ham), l’agent du F.B.I., toujours intègre et soucieux de justice sociale, ou encore l’avocat incorruptible qui plaide la cause des démunis.

Le shérif est donc le plus souvent satirisé par son accent du Sud incompréhensible, ses manières frustes, et le ridicule de son arrogance de petit fonctionnaire. Il est le représentant de la population blanche populaire, le porte-parole ducracker, petit blanc pauvre de sa ville ou

de son comté. DansLa poursuite Impitoyable (The Chase, Arthur Penn,

) et Dans la Chaleur de la Nuit (In the Heat of the Night, Jewison, ), le shérif est inefficace ou non-coopératif. À chaque fois, l’homme chargé de l’ordre public n’est qu’une marionnette aux mains des scéna- ristes hollywoodiens, et c’est le plus souvent à l’outsider qu’incombe le devoir de justice.

De même, le redneck du Sud est caricaturé à l’extrême, comme

l’atteste le personnage incarné par Tony Curtis dansLa Chaîne (The Defiant Ones, Kramer, ), pour lequel l’acteur s’est volontairement

enlaidi pour mieux signifier la laideur morale de son personnage... Celui-ci est raciste (naturellement !), pauvre, délinquant et sans famille.

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Il va découvrir la tolérance au contact du Noir (Sydney Poitier en l’occur- rence). Le petit blanc demeure un personnage-clé du cinéma consacré au Sud américain, même s’il évolue lentement : il est souvent ridiculisé, physiquement et moralement, et révèle le désordre social qui règne au Sud dans l’après-guerre. Bien souvent, il cherche à tuer avec l’aide de

sa bande un Noir emprisonné, ou fait partie du K.K.K., à l’instar du per- sonnage de Hank dansStorm Warning (Heisler, ). À chaque fois, le

membre du Klan est issu du prolétariat (alors que tout le monde sait per- tinemment que des notables américains y adhéraient en masse dans l’après-guerre).

Le mode fantastique

Pouvant se combiner à la satire, le mode du fantastique participe également d’une véritable exoticisation du Sud. Des films tels queThe Beguiled (Don Siegel,) ou plus récemment Angel Heart (Alan Parker,

) pourraient entrer dans la catégorie du Southern gothic, même si ce terme apparaît peu fréquemment dans la littérature consacrée au film sur le Sud. Nous nous contenterons de cette définition duSouth- ern gothic appliquée à la littérature et fournie par Tennessee Williams,

dramaturge américain ayant inspiré de nombreux films hollywoodiens : « intuition, abomination qui sous-tend l’expérience moderne. » Le

« gothique sudiste », pour tenter une traduction très improbable, mêle donc réalisme social et fantastique, alliage plutôt intéressant pour les studios qui y voient l’occasion de faire une peinture syncrétique — donc peu lisible — du Sud américain. Le Sud, à travers le miroir gros- sissant du gothique, qui magnifie les tares d’une population stigmati- sée, va devenir le cousin arriéré de l’Amérique, honte inavouable autant qu’objet de fascination, et ce rapport ambivalent au Sud, cette relation de répulsion et d’attirance, trouve son expression dans la peur distillée par le gothique.

Concrètement, le gothique tel qu’il apparaît dans les films sur le Sud américain va rendre compte d’une culture sudiste étrange et parfois dérangeante, où la religion (qui a pour pendant le vaudou dans une certaine communauté noire) dicte des conduites rigides et intolérantes,

. Naturellement, le petit Blanc du Sud est un outil bien commode pour les stu- dios puisqu’il est à lui tout seul le bouc émissaire d’une société malade qui pratique le racisme institutionnalisé.

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où les individus sont atteints d’une folie qu’on décrite bon nombre de romanciers et où l’atmosphère est chargée d’une certaine langueur inquiétante, d’une menace perpétuelle due au désordre social, d’une violence souterraine alimentée par les lynchages ou les crimes odieux (voire gore). On voit donc que le réalisme social n’est jamais bien loin, dans la mesure où même si le gothique sudiste repose sur le fantastique (supernatural en anglais), il est un instrument non pas de suspense

(comme c’est le cas du genre auquel il appartient, le gothique) mais un moyen d’exploration d’une culture bien particulière. Le Southern gothic est en rupture avec les romans et les films « de plantation », car

contrairement à ceux-ci, il dépeint des personnages comiques souvent grotesques, dont l’étroitesse d’esprit laisse entrevoir une bonté d’âme. À cet égard, le personnage de la Mama dans le film des frères Cohen

The Ladykillers () en est l’exemple parfait. Le gothique tel qu’il est

appliqué aux films sur le Sud permet de personnifier le malaise de la région grâce à un personnage peu héroïque, les studios pouvant expo- ser les bizarreries du Sud sans verser dans la moralisation.

To Kill a Mockingbird ou comment exoticiser le Sud par tous les

moyens

Si j’ai choisi d’analyser ici le film de Robert MulliganTo Kill a Mock- ingbird (Du Silence et des Ombres), , c’est parce que ce film, adapté

du best-seller de Harper Lee (Prix Pulitzer), obtint trois oscars en son temps. Ce succès considérable s’explique, pour avancer une théorie toute personnelle, par diverses stratégies visant à faire du Sud une sorte de bête curieuse aux yeux de l’Amérique.

Malgré un scénario assez consensuel, le film a ceci de particulier qu’il renseigne sur les couleurs locales, en exposant la vie quotidienne (ima- ginée ?) au Sud. Ainsi, le spectateur découvre la fascination des habi- tants du Sud pour les armes à feu, laissant deviner toutes les potentia- lités d’une violence à venir. Cette fascination pour l’arme est transmise de père en fils, nous dit Atticus (personnage principal campé par Gre- gory Peck) dès le début du film. Car les Américains du Sud ont l’esprit de famille, comme le laisse suggérer la dernière scène du film où les chaises à bascule de la véranda servent de point de départ à un travel- ling arrière s’immobilisant sur la maison du héros, symbole par excel- lence du nid familial. Le spectateur découvre également l’hospitalité

Le Sud américain selon Hollywood : une Amérique « exoticisée » 

des familles du Sud envers les autres habitants de la région, lorsque Atti- cus invite spontanément à déjeuner un petit voisin affamé.

La pauvreté est d’ailleurs un élément récurrent dans les films sur le Sud, comme l’atteste la scène liminaire où la voix off décrit un Sud

perdu entre nonchalance et indigence. Il faut préciser à ce sujet que le récit se déroule dans les années , au beau milieu de la Grande Dépression américaine, alors que le film sortit sur les écrans au début des années . Ceci constitue une stratégie supplémentaire — pri- sée par les studios — visant à éviter toute critique contemporaine du Sud et de ses mœurs (et donc toute censure sudiste). Le Sud est donc éloigné géographiquement mais aussi historiquement, c’est-à-dire loca- lisé dans un espace-temps étranger à la majorité des spectateurs améri- cains de l’époque.

Car le film échappe à la règle du genre qui veut que le gothique ait vocation à dénoncer implicitement les dysfonctionnements du réel. En effet, le gothique est bel et bien présent dans le film mais de manière

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