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en France : réponses à l’enquête de 

Dans le document Le « local » dans l’histoire du cinéma (Page 140-154)

Valérie Vignaux

(Université de Tours)

Le  novembre , M. Brancher, secrétaire général de la Société nationale d’encouragement à l’agriculture, sollicite Alfred Massé, séna- teur, président de la commission du cinématographe agricole, pour qu’une enquête soit entreprise auprès des usagers de la cinémathèque du ministère de l’Agriculture. La proposition est approuvée et le comité conçoit un formulaire comportant :

[...] une vingtaine de questions visant l’état actuel du cinéma, ses possi- bilités de développement, l’accueil réservé aux films suivant leur nature, leur conception, leur technique, leur métrage, etc. ainsi que la compo- sition des programmes et les conditions d’ordre matériel ou psycholo- gique qui font le succès.

Les Archives nationales conservent aujourd’hui près de deux cents réponses constituant, probablement, un des rares ensembles préservés décrivant l’utilisation du cinéma dans les campagnes dans l’entre-deux- guerres. Si l’ensemble est important, son étude est problématique. En effet, chacune de ces déclarations, tout en délivrant une expérience sin- gulière, ne témoigne que d’elle-même. Agrégée aux autres, selon des cri- tères de rapprochement le plus souvent analogiques, elle disparaît au

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profit d’une description généralisante dont la représentativité peut être interrogée. Dès lors, pour évaluer l’exemplarité locale de ces réponses, je me suis efforcée de les replacer dans leur contexte national d’énoncia- tion. Dans un premier temps, je rappellerai le cadre idéologique et ins- titutionnel qui a présidé à l’instauration du cinéma éducateur. Puis, à partir d’éléments empruntés aux différents acteurs d’alors, je dessinerai les contours d’une émission du cinéma hors des centres urbains. Ainsi entendues en situation, les paroles formulées par les usagers aideront à estimer le rôle social et régional du cinéma éducateur dans l’entre-deux- guerres.

Une politique publique en faveur du cinéma éducateur

Le cinéma éducateur, largement diffusé à travers le pays à partir des années vingt par des services en lien avec l’État, est issu des mesures qui, conjointement aux réformes en faveur de l’instruction, encouragent l’emploi des images dans l’enseignement. Après avoir promulgué les lois instaurant une instruction publique, laïque et obligatoire, les légis- lateurs réglementent les cours d’adulte. L’« éducation populaire » est placée sous la tutelle du ministère de l’Instruction publique, chargé désormais d’organiser un enseignement « postscolaire ». Puis, consta- tant que les enfants issus des classes populaires, obligés d’exercer au plus tôt une activité rémunérée, ne reçoivent qu’une instruction géné- raliste délivrée par l’école primaire, les législateurs réforment l’ensei- gnement professionnel. Trois types d’enseignement : primaire, postsco- laire et professionnel sont désormais confiés aux instituteurs qui offi- cient déjà à travers le pays. Pour les aider dans leurs fonctions, une commission est nommée afin de « rechercher les moyens de faciliter les débuts des conférenciers novices ». Elle propose des sujets, signale les livres utiles pour les préparer, et surtout elle examine les moyens de mettre à leur disposition « des appareils de projections lumineuses et des collections de vues photographiques, pouvant servir à l’ensei- gnement dans les cours d’adultes et les conférences populaires». Les

réformateurs, s’inspirant des méthodes expérimentées par les vulgari-

. Maurice Pellisson, Les Œuvres auxiliaires et complémentaires de l’école en France, Paris, Imprimerie nationale, . Publication de l’office d’informations et d’études (Musée pédagogique), pp. -.

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sateurstout au long du dix-neuvième siècle, valorisent un enseigne-

ment « par l’aspect » comprenant entre autres : l’illustration des livres, l’emploi de tableaux muraux ou de lanterne pour projeter des images fixes. En conséquence, un service des vues est institué en  au sein du Musée pédagogique, un organisme fondé en  sous la tutelle du ministère de l’Instruction publique, pour apporter aux enseignants les moyens techniques ou intellectuels d’une réflexion sur l’exercice de leur métier. Les législateurs, remarquant que les conférenciers les plus aguerris ou les sociétés d’éducation populaire les plus prestigieuses, ont rapidement associé aux vues fixes des images animées, confient à une « commission extraparlementaire », par décret en date du  mars , le soin de « rechercher les meilleurs moyens de généraliser l’utilisation du cinématographe dans les différentes branches de l’enseignement ». Ses conclusions sont publiées en et manifestement, elles contri-

buent à la généralisation du procédé. Le service des vues du Musée pédagogique est complété en  par un service des films. Un décret, en date du  avril , officialise la naissance de la cinémathèque du ministère de l’Agriculture, tandis qu’en  la direction de l’enseigne- ment technique au ministère de l’Instruction publique l’entérine la création d’une cinémathèque centrale de l’enseignement profession- nel. Et en , l’État reconnaît enfin les actions d’éducation par le film, effectuées dès  par le Comité national de défense contre la tuber- culose, en les plaçant sous la tutelle du ministère de l’Hygiène sociale. Quatre cinémathèques ministérielles sont ainsi instituées pour facili- ter l’instruction par le cinéma à travers le territoire national. L’étude accomplie pour appréhender l’œuvre du cinéaste Jean Benoit-Lévy, réa- lisateur attitré des cinémathèques ministérielles, a permis de restituer, outre les modes de production et de distribution des images, les conte- nus diffusés.

. Cf. Bruno Béguet (dir.), La science pour tous, les dossiers du Musée d’Orsay, Paris, R.M.N., .

. Cf. Auguste Bessou Rapport général commission extraparlementaire, chargée d’étu-

dier les moyens de généraliser l’application du cinématographe dans les différentes branches de l’enseignement, Ministère de l’Instruction publique et des beaux-arts, Paris,

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Des cinémathèques publiques

Le Musée pédagogique

La création d’un service des films au Musée pédagogique en  est assortie d’une subvention de   francs destinée à l’achat de copies. Le succès est immédiat et les demandes ne cessent d’affluer. En , d’après G.-Michel Coissac, le service traite parfois plus de «  com- mandes » par jour, soit près de   demandes sur l’année. Pour amé-

liorer la distribution des films, souvent immobilisés dans les transports à travers le pays, des « offices décentralisateurs» sont mis en place dès

. On compte alors  dépôts auxquels s’associent  cinémathèques régionales, transformés en  en «  cinémathèques de décentralisa- tion placée sous le contrôle et l’autorité des recteurs».

Le catalogue du Musée inventorie en  près de  titres classés en fonction de catégories qui recouvrent la majorité des champs du savoir. La classification opérée par le sommaire est représentative d’un état des connaissances mais aussi d’une vision du monde. L’industrie ( titres) par exemple regroupe l’agriculture, les industries diverses, la marine et l’aviation. Tandis que l’Hygiène sociale ( titres) associe l’anatomie, l’hygiène, la puériculture, les sports mais aussi les œuvres d’assistance et d’enseignement. Comme dans la plupart des catalogues des socié- tés distributrices, que cela soit l’Encyclopédie Gaumont ou la Compa- gnie universelle cinématographique, la géographie est le thème le plus représenté avec  titres. La rubrique associe aux films didactiques conçus spécialement pour l’enseignement, les documentaires des opé- rateurs voyageurs et par la suite les sujets de propagande réalisés par

. G.-Michel Coissac, « Le cinéma dans l’enseignement et l’éducation en France », p. - in Le Tout cinéma, , Paris, publications Filma.

. « À l’heure présente, les départements suivants possèdent une cinémathèque éta- blie en principe au chef-lieu : Ain, Alpes-maritimes, Aube, Aude, Aveyron, Charente- Inférieure, Bouches-du-Rhône, Calvados, Côte-d’Or, Finistère, Gard, Gironde, Hautes- Alpes, Haute-Marne, Haut-Rhin, Hérault, Indre-et-Loire, Jura, Loire, Loiret, Lot-et- Garonne, Lozère, Pyrénées-Orientales, Sarthe, Vaucluse, Vosges, Vienne, Yonne. Ces cinémathèques départementales se complètent par un certain nombre de cinéma- thèques régionales : celles du Puy-de-Dôme ; celle de la Haute-Garonne, qui dessert l’Ariège, le Gers, la Haute-Garonne, le Lot, les Hautes-Pyrérénes, le Tarn et le Tarn-et- Garonne ; celle du Nord, qui dessert l’Aisne, les Ardennes, le Nord, le Pas-de-Calais et la somme ; celle de la Meurthe-et-Moselle, qui répand ses bienfaits sur la Meuse et la Meurthe-et-Moselle ». G.-Michel Coissac, « Le cinéma dans l’enseignement et l’éduca- tion en France », art. cit.

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les agences coloniales. La catégorie « Industries diverses » ( titres)

regroupe le plus souvent des films promotionnels diffusés en milieu éducateur parce qu’ils présentent les objets et les gestes de la moder- nité. Catalogue où se côtoient des films de genres et de factures très divers, utiles sans doute pour illustrer les « leçons de choses » des insti- tuteurs primaires mais qui manquent d’intérêt pour un public adulte et rural. La mise en place des cinémathèques des ministères de l’Hygiène sociale, de l’Agriculture ou de la direction de l’Enseignement technique, a été décidée pour amplifier l’action du Musée pédagogique et surtout pour permettre la diffusion et la production de bandes mieux adaptées à l’éducation populaire ou à l’enseignement professionnel.

La cinémathèque du ministère de l’Agriculture

La cinémathèque du ministère de l’Agriculture à sa création en  bénéficie d’une subvention de   francs, très nettement supé- rieure à celle du Musée pédagogique et elle déclare être en possession de  bandes. Le budget qui lui est attribué augmente régulièrement puisqu’en , elle possède pour son fonctionnement une somme de    francs et en , elle déclare un budget de    francs. Alfred Massé, le président de la commission agricole, déclarait en  avoir contribué à l’achat de près de   projecteurs, soit un inves-

tissement de    de francs. À cette date, la cinémathèque men- tionne plus de   usagers, correspondant à environ   prêts sur l’année. Pour la diffusion des copies, l’institution s’appuie sur le réseau mis en place par le Musée pédagogique, auquel s’ajoutent des dépôts auprès des écoles d’agriculture, promues au rang de cinémathèque départementale. Elle sollicite les services des offices du cinéma édu-

cateur et s’associe à la cinémathèque du ministère de l’Hygiène sociale

. Cf. Valérie Vignaux, « L’ambiguïté des regards ou les servitudes du documentaire colonial en Afrique », dans Jacky Evrard et Jacques Kermabon (dir.),Une encyclopédie du court-métrage français, Bruxelles/Pantin, Yellow now/Côté court, .

. Chiffre important lorsqu’on le rapporte à l’estimation faite par Gustave Cauvin, qui comptabilisait pour la même période   salles d’exploitation commerciale.

. « Les huit offices régionaux sont ceux du Nord (le siège étant à Paris), de l’Est (Nancy), de l’Ouest (Rennes), du Centre (Bourges), de l’Est-Central (Lyon), du Sud- Ouest (Bordeaux), du Massif-Central (Clermont-Ferrand) et du Midi (Marseille) », A. Collette, « L’exemple du ministère de l’Agriculture (décentralisation) »,Le Cinéopse

no

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afin que les films agricoles soient diffusés par l’entremise des camions de « propagande mobile » qui circulent à travers le territoire.

En  le catalogue de la cinémathèque inventorie  titres, distin- gués en  rubriques ou « séries ». La catégorie « Animaux et production animale » est la plus représentée ( titres), puis « Végétaux et produc- tion végétale » ( titres), « Industries agricoles » ( titres), « Divers » ( titres) et « Enseignement agricole » ( titres). Aux côtés de films généralistes acquis auprès des sociétés éditrices tels Gaumont, Pathé ou la Compagnie universelle cinématographique, la cinémathèque a confié à Jean Benoit-Lévy par l’intermédiaire de sa société l’Édition française cinématographique, la réalisation de près d’une centaine de sujets. S’il conçoit une quarantaine de courtes bandes centrées sur une technique de culture végétale, destinée vraisemblablement aux enseignements postscolaires, le cinéaste est aussi chargé de la réalisa- tion d’une quinzaine de moyens-métrages de fiction et de trois longs- métrages, produits à des fins d’éducation populaire et conçus pour favoriser la modernisation du pays. En effet, par leur intermédiaire, les populations rurales sont informés des subventions qu’elles peuvent solliciter en faveur de travaux d’adduction d’eau ou d’électrification;

elles sont aussi familiarisées avec les méthodes nouvelles issues des perfectionnements scientifiques, comme l’utilisation des engrais par exemple.

La cinémathèque centrale de l’Enseignement professionnel

La cinémathèque centrale de l’enseignement professionnel, créée en , disposait en  d’un crédit de   francs. Sur cette somme,   francs étaient affectés à l’achat ou à la production de films des- tinés à l’orientation professionnelle. Les   francs restants étaient répartis en subventions pour l’acquisition d’appareils, mis en dépôt dans les offices d’orientation professionnelle. À l’instar de la précé- dente, elle est placée sous l’autorité d’un comité qui « siège en assem- blée générale, en section d’examen des appareils et en section d’exa- men des films ». La section des films est chargée de la mise en œuvre des sujets. Pour aboutir à la réalisation la plus adéquate possible, elle entre en rapports avec les groupements professionnels, les sociétés

. Cf. Valérie Vignaux, « Cinéma, éducation de masse et propagande agricole : les films de Jean Benoit-Lévy pour la cinémathèque du ministère de l’Agriculture »,

Diffusion et réception du cinéma éducateur en zone rurale 

de production, les techniciens et les enseignants. Le comité examine les montages et peut exiger des modifications. Il soumet ensuite ses propositions au secrétariat à l’Enseignement technique qui lui octroie des moyens financiers, remboursant les frais d’exécution et permettant d’acheter des copies. Les films, accompagnés de notices rédigées par le comité, sont prêtés gratuitement aux écoles publiques et aux œuvres postscolaires pour les cours d’adultes ; ils sont parfois empruntés par les industriels pour être montrés aux ouvriers. Pour étendre l’œuvre sur tout le territoire national, des copies ont été réparties entre quinze ciné- mathèques et offices dépositaires.

La cinémathèque centrale de l’enseignement professionnel ne pos- sède qu’un catalogue très restreint. Les  titres inventoriés en 

associent aux  sujets commandités par le comité et exclusivement réalisés par Jean Benoit-Lévy, des documentaires généralistes. Pour ne pas lasser les spectateurs et pour conférer à la représentation une durée conséquente, le programme associe, au film d’enseignement, un docu- mentaire et un court-métrage récréatif. Les sujets commandés par la cinémathèque décrivent majoritairement des métiers qui relèvent de « l’industrie d’art » c’est-à-dire de l’artisanat ou de la petite industrie urbaine, tandis que les sites présentés sont ceux de l’entreprise ou de l’atelier. En accord avec les directives formulées par le comité, les films sont conçus en fonction de deux catégories principales, selon qu’on les destine à l’orientation professionnelle ou à l’enseignement technique. Les films d’orientation s’attachent à convaincre les jeunes gens et leurs parents qu’il est de leur intérêt de poursuivre une formation en milieu scolaire plutôt que d’entrer en apprentissage à l’atelier tandis que les films d’enseignement peuvent être montrés à des jeunes gens en temps scolaire ou à des adultes dans le cadre d’enseignements postscolaires. Les gestes des métiers engendrés par les outils ou par les machines y sont décrits très précisément. Des plans rapprochés appuyés encore par des schémas animés permettent d’expliciter des procédures tech- niques parfois filmées en temps réel.

. Il s’agit essentiellement des offices du cinéma éducateur, présents dans les grandes localités comme Paris, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Lille, Lyon, Marseille, Nancy, Nîmes, Poitiers, Rennes et Saint-Étienne auxquels s’ajoutent trois centres d’orientation professionnelle situés à Nantes, Strasbourg et Toulouse.

. Cf. Valérie Vignaux, « La cinémathèque centrale de l’enseignement professionnel ou une archéologie du film industriel dans l’entre-deux-guerres en France », dansCine- matic means to enconomis ends. Studies in the visual practices of the industrial film,

 Valérie Vignaux

La cinémathèque de l’office national d’hygiène sociale

En  le ministère de l’Hygiène sociale reconnaît les activités du ser- vice de propagande du Comité national de défense contre la tubercu- lose, en les plaçant sous la tutelle de l’office national d’hygiène sociale. L’office national d’hygiène sociale a été institué pour centraliser sous tutelle étatique les sources du financement et fixer les cadres et les modalités de la propagande éducative. Il regroupe les associations qui se préoccupent des fléaux : la Ligue nationale contre l’alcoolisme, la Ligue nationale contre le péril vénérien, le Comité national de l’enfance, le Comité central des Croix-rouges françaises, la Ligue franco-anglo- américaine contre le cancer etc. La cinémathèque est ainsi rattachée aux services de l’État alors que précédemment, elle dépendait d’une œuvre privée. Elle y trouve sans doute des facilités budgétaires, mais elle perd aussi son autonomie et en , lorsque le ministère lui retire son aide, elle est dans l’obligation de réduire ses activités. En , la subvention publique est de   francs au lieu des   francs précédemment alloués. Décision qui marque à la fois la fin d’une diffu-

sion massive des films d’éducation à l’hygiène auprès des populations urbaines et rurales et l’arrêt d’une production ambitieuse ayant conduit à la réalisation de plusieurs longs-métrages.

La cinémathèque en  a un catalogue de  films augmentés à  en . Il est composé des films américains légués par la com-

mission Rockefeller; de titres acquis auprès de Pathé comprenant les

réalisations du Dr Jean Comandon ou des dessins animés d’O’Galop ;

des leçons d’hygiène (écoles primaires, enseignement secondaire et supérieur) établies par les Établissements Gaumont et d’une centaine de titres d’éducation populaire commandés à Jean Benoit-Lévy. Les

. Assemblée générale du Comité national en date du  mars , sous la prési- dence de M. le DrQueuille, ministre de la Santé publique et de l’éducation physique.

Archives du C.N.D.T., cote AS. Institut Pasteur.

. Lucien Viborel, « Éducation populaire et cinématographe : c’est le plus sûr auxi- liaire de l’enseignement de l’hygiène »,La Vie Saine, no, mars  et Lucien Viborel,

« Le cinéma créateur d’impressions distrayantes est, avant tout, un prodigieux agent d’éducation »,Revue internationale du cinéma éducateur, no, mai .

. Cf. Thierry Lefebvre, « Les films diffusés par la mission américaine de prévention contre la tuberculose (Mission Rockefeller, -) »,  no, décembre .

. Cf. Valérie Vignaux, « Jean Benoit-Lévy : l’ignorance est une maladie contagieuse ou le cinéma auxiliaire de la science », dans Thierry Lefebvre, Jacques Malthête, Laurent Mannoni (dir.),Sur les pas de Marey, science(s) et cinéma, Paris, L’Harmattan/Semia, Les

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films réalisés par ce dernier comprennent des documentaires décri- vant les traitements en préventoriums ou en sanatoriums ; des films de statistiques réalisés pour convaincre d’éventuels donateurs ; quelques courtes bandes simples et amusantes mettant en scène des conseils en matière d’hygiène ; des moyens-métrages de fiction encourageant les classes populaires à recourir au crédit pour échapper au taudis et trois longs-métrages de fiction représentant les moyens d’éviter la mortalité infantile ou la contamination syphilitique.

Les séances d’éducation à l’hygiène n’ont pas rebuté les populations. D’après les comptes-rendus d’activités établis pour le Conseil de direc- tion, la diffusion des films ne cesse d’augmenter au cours de la période. À partir de , suite à la coordination des services avec la création de l’office national d’hygiène sociale, les conférences sont dites pluriva- lentes car elles traitent des différents fléaux et cela jusqu’en , année de dissolution de l’organisme. La sollicitation des films est croissante, de  demandes environ au début des années vingt, elle passe à plus de  en . Le public estimé est lui aussi important, de   per- sonnes en , il est estimé à   en . Le directeur de la cinéma- thèque déclare avoir organisé en dix ans d’activité (-) plus d’un million de séances, réunissant plus de  millions de personnes.

Pour faciliter la distribution dans les régions, les cinémathèques ministérielles ont accompagné ou encouragé la création de services au niveau local. Les plus anciens, intitulés « cinéma scolaire » tels Stras- bourg (), Lyon (), Marseille (), Saint-Étienne () et Nancy (), accueillent en dépôt les copies du Musée pédagogique. Puis

voyant leurs activités et leurs collections s’étoffer, puisque gérant en par- ticulier des films issus des autres services de l’État, ils bénéficient pour certains de subventions municipales et se transforment en association

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