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Structure de la mythologie indo-européenne

Dans le document Fondements des civilisations de l’Asie (Page 74-77)

Le cheval et les mythes

6.4. Structure de la mythologie indo-européenne

6.4.1. La structure trisfonctionnelle

Après des essais infructueux de comparaison des noms de certains dieux à travers l’univers indo-européen, la découverte fondamentale est faite par Georges Dumézil en 1938 : c’est la trisfonctionnalité du panthéon, commune à tous les peuples de culture indo-européenne.

1 Les descendants de Namazga (non Indo-Européens) sont peut-être les Hourrites, qui arrivent à cette époque au nord de l’Assyrie.

Ce panthéon est partagé entre trois niveaux :

- la première fonction est celle de la souveraineté, de la puissance magico-religieuse et de la pensée ;

- la deuxième fonction est celle de la force physique, musculaire, qui s’exerce dans la guerre, mais pas uniquement ;

- la troisième fonction est plus multiforme : c’est la fécondité, l’agriculture, l’activité de tous les jours.

À cette hiérarchie sont liées des couleurs : le blanc des prêtres, le rouge du guerrier, le noir de l’agriculteur (la terre est noire dans les plaines d’Ukraine et on la nomme « tcherno-ziom »).

On retrouve cette distribution des rôles dans toutes les légendes indo-européennes et nous allons en donner quelques exemples.

En Inde

Les textes sacrés de la religion initiale, le brahmanisme, sont réunis dans les Rig Véda (de –1500 à –900). Ils instituent la hiérarchie suivante :

- au niveau supérieur : Varuna, gardien de l’ordre cosmique ; Mitra, organisateur ;

- au niveau militaire : Indra, stratège ;

Vayu, force brutale, le vent ; - au niveau de la vie courante : les deux jumeaux Nasatya.

À cette hiérarchie correspond le système des castes : les brahmanes, les ksatryas, les vaisyas. Ces derniers ont la signification de clans et se scinderont plus tard en sudras auxquels il faut ajouter les sans-caste et les adivasis (population indienne primitive).

À ces divinités de base se rajoutent des divinités secondaires, dont l’une, le feuAgni, joue un rôle important.

Cette mythologie et la prééminence de ces dieux a été modifiée par de nouveaux textes des Brahmanas (−900 à –600) qui ont promu Brahma, Çiva et Vishnu, constituant de fait une nouvelle religion, l’hindouisme.

En Iran

Les textes sacrés constituent l’Avesta et présentent les dieux de la manière suivante :

- au niveau supérieur : Ahura Mazda; - au niveau militaire : Xsaθra;2

- au niveau vie courante : les deux jumeaux Nanhaiθya.

À partir d’une réforme fondamentale menée par Zarathustra, à une époque mal déterminée entre –1000 et –600, la religion devient monothéiste autour de Ahura-Mazda, symbolisé par le feu. Les autres divinités deviennent des entités abstraites émanant du Dieu unique : les Gathas.

2 Cette notation θ représente le th anglais.

Les tribus indo-européennes 63

Elles sont entourées de six archanges dont la structure reste trisfonctionnelle : - premier niveau : Vohu Manah, la bonne pensée, et Asa, l’ordre ; - deuxième niveau : Xsaθra, la puissance ;

- troisième niveau : Armati, la Terre ; Haurvatat, la santé ; Amorotat, l’immortalité.

En Suède polythéiste (Upsala) On trouve :

- Odhinn, souverain, maître de magie ;

- Thorr, maître du tonnerre, massacreur de géants ;

- Freyr, doué d’un immense phallus, maître de l’abondance et des masses.

En Rome ancienne

Dans les processions, en tête du corps sacerdotal se trouvent les trois flamines maiores attachés à trois dieux fondamentaux :

- Jupiter, dieu souverain ;

- Mars, dieu de la force physique et de la guerre ;

- Quirinus Romulus, un des deux jumeaux fondateurs, trônant dans les fêtes agraires.

En Grèce

La pensée créatrice a si tôt et si puissamment agi que l’héritage y a été travaillé, modifié, dépassé et estompé. Cependant, à Sparte, sur l’agora, il y avait trois autels appelés « Ambulioi », dédiés à Zeus, dieu souverain, à Athéna, déesse de la guerre, et aux Dioscures, équivalents des jumeaux Nasatya.

6.4.2. Mythes fondateurs

La trisfonctionnalité se retrouve dans un certain nombre d’épopées mythiques concernant l’origine de la cité.

À Rome

La légende situe en –753 la fondation de la ville et la séquence des rois mythiques qui se succèdent est la suivante :

- Romulus, fondateur, et Numa Pompilius, organisateur, forment le premier niveau ;

- Tullus Hostilius, conquérant du Latium, est le deuxième niveau ; - Ancus Marcius met de l’ordre dans la vie courante : troisième niveau.

Ensuite les rois sont des Étrusques, probablement historiques, les Tarquins, suivis par la révolution et la République en –509.

En Inde

La description de la lutte entre tribus indo-européennes pour le pouvoir dans le nord de l’Inde est le sujet d’une immense épopée, le Mahabharata

(200 000 vers). Elle raconte comment les cinq frères Pandava(les bons) ont été dépossédés de leur royaume par les Kaurava (les méchants) et relate la lutte des premiers pour récupérer leur bien.

La structure de la famille Pandava est parfaitement trisfonctionnelle : - Yudisthira est le chef organisateur ;

- Arjuna, le stratège, et Bima, la force brute, représentent le deuxième niveau ;

- Nakula et Sahadeva sont les jumeaux préposés aux problèmes pratiques.

Les cinq frères ont en commun la seule femme de l’histoire, Draupati, ce qui symbolise le rôle mineur de la femme dans la culture indo-européenne.

Le point culminant du Mahabharata se situe au moment d’engager la bataille décisive de Kuruksetra. Arjuna hésite à déclencher le massacre, mais son cocher, qui n’est autre que Krishna (un avatar de Vishnu), lui démontre que les bons doivent lutter contre le mal, quel qu’en soit le prix. Ce très célèbre dialogue, le Bhagavat Gita, met en évidence une autre constante des mythes indo-européens : la lutte du Bien contre le Mal. La même idée imprègne l’ensemble de l’Avesta.

En Ossétie du Nord

La barrière du Caucase a arrêté de nombreuses migrations venant du Nord, et le pied du massif est actuellement peuplé d’ethnies d’origine très diverse.

Parmi celles-ci, les Ossètes du nord sont des Indo-Européens provenant sans doute du site de Maïkop et probablement peu métissés. G. Dumézil a étudié leurs mythes de fondation par les géants Nartesdont les combats relèvent des mêmes structures.

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