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SECTION III. LE SECTEUR DE L’ARTISANAT

VI. Stratégies de lutte des artisans contre la concurrence

L’artisanat sénégalais est sérieusement concurrencé par les importations de produits étrangers surtout des produits chinois qui coutent beaucoup moins chers. Toutes les catégories d’artisans que nous décrivons sont concernées.

Les tailleurs indépendants et les femmes propriétaire d’atelier sont fortement concurrencés par l’importation d’habits importés de la chine, de la fraude provenant des pays limitrophes et de la friperie. Concernant la friperie, plusieurs articles de presse dénoncent le caractère grandissant de cette concurrence. Dans un article du Groupe WalF Fadjri publié sur le site de hubrural35, on peut lire que lire que plus de 7 000 tonnes de friperie sont importées chaque

année au Sénégal, correspondant à 3-4 milliards de FCFA. Le marché des importations de textiles sont estimées à 200 milliards de FCFA par an. Ce rapport précise que si les industriels textiles sénégalais contrôlaient seulement 50 milliards de ce marché, ils auraient des milliers d’emplois. Selon cet article, chaque sénégalais dépense en moyenne 20 000 FCFA par an en produits textiles. Selon le Président (M. FALL) de la Fédération des Industries Textiles du Sénégal (Fites), la friperie est un facteur d’appauvrissement de l’économie nationale, mais aussi un « réservoir de fraude ». Pour lui «Beaucoup d’importateurs utilisent cette voie pour

faire entrer dans notre pays des articles qui ne sont pas réellement de la friperie. C’est pourquoi d’ailleurs, [ ] on voit dans le marché des produits neufs souvent à des prix extraordinaires. Tout simplement parce que ces produits ont été assimilés à de la friperie »

(Walf Fadjri, journal de presse). Selon cet article, certains importateurs bénéficient de taxes préférentielles au niveau de la douane au nom de la fripe, alors qu’ils importent bien d’autres produits.

Un autre article36 de presse (de Bintou Dembélé) du Journal Le Soleil dénonce cette

concurrence que subit l’industrie textile sénégalaise. Cet article indique qu’un ballot de fripe acheté entre 25 000 et 50 000 FCFA peut rapporter jusqu’à 300% de bénéfice. Les fripes sont vendues à des prix dérisoires par rapport au prêt à porter neuf. L’article donne des exemples : « Moi, par exemple, je vends des costumes et des robes neufs pour tous âges entre 45 000 et

70 000 francs CFA, alors que la friperie se paie entre 500 et 1000 francs CFA », précise M.

Guitèye. Mais aujourd'hui, reconnaît-il, les clients ne se bousculent plus dans sa boutique comme avant. A son avis, ce secteur bien qu'il soit informel, devrait bénéficier d'une

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Article disponible sur le site : www.hubrural.org/IMG/pdf/walf_article_sur_friperie.pdf

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128 règlementation. En attendant que celle-ci soit une réalité, la friperie va sans doute continuer, et pour longtemps encore, de faire le grand bonheur de la population dakaroise].

Les menuisiers sont également concurrencés par les importations de meubles provenant d’Europe. Les prix des produits importés dépendent de la qualité des produits (neuf ou occasion) et du design. Si dans le cas de la friperie, les prix sont moins chers pour les produits importés, ici ce n’est pas forcément le cas. Certains clients préfèrent les meubles importés parce qu’ils sont mieux travaillés et plus raffinés. Par exemple, nos enquêtes auprès de menuisier, ont révélé qu’un lit-double peut être commandé chez un menuisier sénégalais entre 200 000 et 400 000 FCFA contre 500 000 à 800 000 FCFA pour l’import. Un rapport de l’Ong La Kora-PRD37, de « l’étude sur le marché de l’ameublement » révèle que 37% des

meubles vendus au Sénégal proviennent de l’importation.

Les fabricants d’objet d’art connaissent une situation similaire. Les importations de gadgets en provenance de la chine constituent un frein pour leur activité.

Très peu de secteurs sont épargnés par la concurrence de produits importés. Il y a quelques exceptions, comme le sucre, du fait de la compagnie sucrière qui est un quasi-monopole, et la tomate, avec trois sociétés de production, sont plus ou moins protégées ou favorisées par l’Etat.

Pour lutter contre cette concurrence, diverses stratégies sont adoptées.

Le secteur de la couture devient moderne et mise sur le style africain. Les ventes à crédit sont le plus souvent un moyen pour conquérir des clients. Les tailleurs utilisent des tissus en majorité de fibres de coton, alors que les importations sont principalement faites de synthétique. Dans ce type d’activité, il faut sans cesse créer de nouveaux modèles pour être compétitif, il faut innover dans le design tout en limitant les prix, désormais cassés par la fripe. Un vêtement sur mesure n’est évidemment pas la même chose qu’une fripe, et les consommateurs le savent, mais il reste que les budgets les ménages sont prêts à consacrer aux vêtements ont sans aucun doute baissé.

Les menuisiers innovent en travaillant avec les femmes dans le cas des tontines d’équipements. Ils jouent également sur les prix et sur la qualité du bois. Ils misent sur la

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La Kora-Programmes, Ressources, Développement: Etude sur le marché de l’ameublement et des Huisseries au Sénégal

129 qualité : le bois importé est souvent plus fragile, se prêtant peu aux manipulations diverses dans les foyers.

Mais en tout état de cause, la concurrence des produits importés est réelle.