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CHAPITRE VI. MICROFINANCE ET CRISE DES IMPAYES DANS LES IMFS AU

Carte 7: Carte de situation de la vallée du fleuve Sénégal

Source : ISRA, 2008.

Dans cette carte, la vallée est représentée par la bande verte située sur le haut.

2.1.1. Population de la Vallée

La population de l’ensemble de la zone est estimée à environ 950 000 en 2011 soit 10% de la population totale du Sénégal (ANSD, 2012). Elle évolue selon le dernier recensement à un rythme de 1,7 à 2 % par an dans cette partie du pays, mais avec de fortes s disparités. La zone de Bakel (haute vallée) a le taux d’accroissement de la population le plus élevé, près de 2,8% par an avec une taille moyenne par ménage de 20 personnes. Cette partie du pays est habitée en majorité par les Soninké, les grands émigrants, dépasse ainsi la moyenne nationale du taux d’accroissement annuel de 2,7 %. On observe aussi que l'évolution est plus rapide en milieu urbain (2,8%) qu'en milieu rural (1,8%). Selon les projections démographiques, la population atteindra environ 1,1 millions en 2015 et 1,5 millions en 2021 (ANSD, op.cit.).

Les principales caractéristiques démographiques sont marquées par une population jeune et légèrement majoritairement féminine, un déséquilibre entre milieux rural et urbain, et entre

169 territoires administratifs. On compte 53% de femmes, contre 51 % au niveau national, mais cette proportion est plus forte en moyenne et haute vallée (Matam et Bakel) en raison de la forte émigration masculine. Les jeunes (de moins 20 ans) représentent 59 % de la population contre un tiers pour la tranche active (20-50 ans). Ce déséquilibre a une forte implication dans les stratégies de prise en charge des besoins de consommation. La grande majorité de la population (71 %) vit en milieu rural contre 29 % en milieu urbain (ISRA, 2008). La ruralité est plus forte dans les départements administratifs de Podor, Matam et Bakel (90 %) qu'à ceux de Dagana et Saint-Louis qui concentrent 80% de la population urbaine zonale avec les villes de Richard-Toll, Saint-Louis et Dagana. L’exode rural est important vers ces grands centres urbains, où sont installées le peu d’industries et des services de prestations de la zone (usines de tomate, sucre, des rizeries semi-industrielles, la majorité des prestataires de services mécanisés, etc.).

Outre quelques étrangers africains et européens, la population de la zone abrite presque tous les groupes ethniques du Sénégal. Cependant, elle est largement dominée par trois principaux groupes ethniques : les Halpulaar (61.3 %) et les Wolof (30.1 %) respectivement dans la moyenne vallée et le delta et les Soninké dans la haute vallée notamment le département de Bakel. Suivent ensuite les Maures (3.5 %) dans la moyenne vallée et le delta.

2.1.2. Productions agricoles

La Vallée du Fleuve Sénégal est une zone agro-écologique à fort potentiel de développement agricole, constitué par une disponibilité importante en eau douce, 240 000 hectares irrigables, des conditions climatiques permettant plusieurs cycles de culture dans l'année et un capital humain important (comme évoqué plus haut, elle abrite 10 % de la population totale du Sénégal).

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2.1.3. Importance et enjeux du riz au Sénégal

La culture du riz est dominante. Aujourd’hui, presque 60% des exploitations agricoles familiales cultivent de l’oignon en contre saison du riz (MAER, 2012) et le riz occupe 83% des superficies cultivées (MAER, ibid.).

Le riz constitue la base de l’alimentation au Sénégal. La consommation en riz a considérablement augmenté depuis les années 2000, du fait de la croissance démographique et de l’urbanisation. La consommation moyenne annuelle est d’environ 1 million de tonnes (ANSD, 2011) de riz blanc. La production local est estimée 300 000 tonnes de riz blanc (MAER, op.cit.). La vallée du fleuve Sénégal fournit, en moyenne, 65% de cette production (MAER, ibid.). Le prix bas sur le marché international était pendant longtemps un prétexte pour les importations de riz. Mais les difficultés dans la commercialisation de la production nationale limitent également la compétitivité du riz local.

Le Sénégal est le deuxième pays importateur de riz en Afrique de l’ouest, derrière le Nigéria. Les importations contribuent à plus de 70% dans la satisfaction des besoins nationaux en riz (ANSD, 2012). Elles occasionnant annuellement des pertes de devises estimées à 150 milliards de FCFA. Dès lors, la relance de la production rizicole nationale devient plus qu’une priorité pour le Sénégal.

Depuis quelques années, la volonté de l’Etat de développer l’autosuffisance en riz a permis de mettre en place d’importants programmes pour développer cette culture, encadrer les producteurs dans la production et les aider à adopter de nouvelles techniques, doter les exploitations de matériels agricoles et de transformation, les sensibiliser normes internationales de qualité…Ainsi, plusieurs projets ont vu le jour avec divers partenaires. On peut citer le PNAR (Programme National d’autosuffisance en riz avec le soutien de l’AFD et du JICA), l’USAID dans la valorisation du riz de la vallée par la transformation, Africa Rice pour l’expérimentation des variétés de Riz Africain (Nerica), de la SAED dans l’aménagement et gestion des canaux d’irrigation et de l’ISRA dans la recherche agricole et le renforcement de capacité des producteurs.

Sur les trois dernières années agricoles, la production ne cesse d’augmenter : 312 000 tonnes en 2009-2010, 336 000 en 2010-2011 et près de 370 000 tonnes en 2011-2012, au moment où la demande du marché sénégalais est estimée à 1 000 000 de tonnes.

171 La mise en valeur est étroitement liée à la disponibilité du crédit de campagne, à la capacité de remboursement des contractants et aux possibilités de commercialisation. Beaucoup estiment que le riz local n’est pas toujours disponible sur le marché des consommateurs, à l’exception de la région du fleuve qui constitue la zone de production. Les niveaux des rendements moyens sont relativement élevés: entre 4 et 5 tonnes par hectare pour le riz, mais avec néanmoins des tendances à la diminution en raison notamment de la part croissante des aménagements privés qui ont des résultats techniques nettement inférieurs à ceux des aménagements SAED52. La taille du parcellaire reste modeste dans les aménagements de type

petits périmètres de la moyenne et haute vallée, ce qui compromet la rentabilité des exploitations agricoles

2.1.4. Les besoins en financement

Une étude menée en 2001 mettait en évidence de gros besoins en matière de financement rural53, en matière d’investissement (aménagements, irrigation, équipements agricoles…), de production (semences, engrais, pesticides etc.) et de crédits de campagne pour la commercialisation des récoltes (coton, arachide, riz, tomate industrielle etc.). Mais bien au- delà du financement, bien d’autres contraintes existent : vétusté du matériel agricole, baisse de la fertilité des terres, faible accès aux intrants de qualité, enclavement de certaines zones de production, absence de magasin de stockage de la production, faible disponibilité foncière…La liste des contraintes est loin d’être exhaustive.

2.1.5. La naissance des organisations paysannes

Sur un plan général le désengagement progressif de la SAED accompagné du transfert de certains aménagements aux populations a conduit à une certaine dynamique d’auto- organisation locale. On assiste ainsi, à une mise en place de certaines formes d’organisation professionnelle: organisation paysannes, associations, GIE, fédérations. Ainsi, ce désengagement s’est traduit par le transfert de la gestion des aménagements hydro-agricoles à des associations d’usagers. Au niveau des grands aménagements, l’organisation de la production repose sur des groupements de producteurs constitués de 10 à 20 exploitants

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La Société Nationale d'Aménagement et d'Exploitation des Terres du Delta du fleuve Sénégal aménage les terres en périmètres irrigués qui seront redistribuées aux paysans

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172 regroupés sur la base d’affinités sociales liés à la SAED par un contrat. Chaque groupement dispose d’un à trois mailles hydrauliques de 10 à 15 ha (O. Cissokho.1991). Par contre, les groupements villageois de production (60 à 250 volontaires) gèrent les PIV. A ce niveau, les superficies sont réparties égalitairement ce qui explique d’ailleurs ce morcellement des parcelles. Les privés sont généralement localisés au niveau des PIP évoluant sous forme de GIE familial. Dans le Delta du Fleuve, la taille moyenne des exploitations agricoles familiales est d’environ 10 ha.

2.1.6. Défense des intérêts de la profession agricole

L’organisation professionnelle agricole repose essentiellement sur le Cadre National de Concertation et de Coopération des ruraux (CNCR). Il s’agit d’une structure incontournable dans l’organisation de la profession agricole et à la défense de ses intérêts. « Le CNCR regroupe les principales fédérations paysannes et de producteurs du Sénégal. Il en organise la concertation et la coopération. A ce titre, il est désormais un partenaire privilégié vis à vis des pouvoirs publics, des organisations internationales et des autres acteurs du développement »54.

La Feprodes fait partie intégrante de cette organisation de défense des intérêts des paysans.

2.2. La Feprodes: un moyen d’accès aux facteurs de production et au financement agricole

Elle est née comme une réponse aux difficultés d’accès aux facteurs de production et au financement de l’agriculture dans la vallée. La Feprodes est née de l’initiative de quelques femmes dans les années 1996 avec pour but de promouvoir les initiatives productives des femmes pour le développement. La création de la coopérative est partie d’un constat : « “L’histoire récente du développement agricole de la vallée a été faite en excluant, quasi-

totalement du processus institutionnel de responsabilisation des acteurs, les femmes55. Ces objectifs sont entre autres ; l’accès à la terre ; la promotion de PME/PMI, assurer une réelle représentation de ses membres et de leurs préoccupations dans les instances de décisions des politiques de développement. Elle a démarré avec une cinquantaine de membres, et chacune cotisait au départ 50 FCFA par semaine, et les réunions avaient lieu dans la cour de l’une d’entre elles. Elle regroupe des groupements de femmes productrices de riz et de légumes.

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MAE (2004)

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173 Pour atteindre les objectifs fixés, la coopérative de la Feprodes a commencé par la mise en place de jardins communautaires sur les berges et la culture du riz dans les parcelles sur les périmètres aménagés, affectés par les conseillers ruraux de la vallée. Les superficies sont faibles rapportées au nombre des membres du groupement, environ 10 ha. L’histoire de la Feprodes est liée à celle de la lutte contre l’exclusion de la femme dans la vallée et notamment à la lutte pour l’accès à la terre à la femme. La première femme, membre d’un conseil rural est issue de la Feprodes. Deux ans après la création de la coopérative Feprodes, l’organisation a mis sur pied une Mutuelle d’Epargne et de crédit en 1999 après plusieurs combats pour le financement des femmes productrices agricoles.

2.2.1. Spécialisation de la Feprodes

Aujourd’hui, elle compte huit guichets de microfinance dans huit circonscriptions différentes (voir carte 8 de la région de Saint-Louis): Ross-Bethio, Richard-Toll, Boundoum, Gaé, Thiagar, Fanaye, Podor, Thillé Boubacar. Ainsi la Mutuelle de crédit de la Feprodes reste fortement ancrée dans la région de Saint-Louis.