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CHAPITRE III. : LE PAYSAGE SENEGALAIS DE LA MICROFINANCE

VI. La Nouvelle loi sur la Microfinance

La nouvelle loi21 (Loi N° 2008-47 du 03 septembre 2008 et Décret N°2008-1366 du 28

novembre 2008), a été élaborée pour redresser les faiblesses structurelles du secteur de la microfinance. Elle vise à corriger plusieurs facteurs de dysfonctionnement sur l’ancienne réglementation (loi Parmec):

- Non-respect des dispositions légales;

- Carences dans l’étude des dossiers d’agrément;

- Défaillance du Système d’Information et de Gestion (SIG) reflétée par la faible fiabilité des états financiers de certaines IMFs et les retards de disponibilité des données financières (informations);

- Faiblesse des mécanismes internes et externes de surveillance;

- Les insuffisances dans le suivi des recommandations formulées à l’issue des contrôles; - Multiplication des cas de fraudes et de malversations financières.

En comparaison de la loi Parmec et de la nouvelle loi sur la microfinance, nous synthétisons dans le tableau 6 suivant les principales différences.

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La nouvelle loi sur la microfinance est complétée par des instructions de la Banque Centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest

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Tableau 6: Comparaison de l’ancienne et de la nouvelle loi

Loi PARMEC Nouvelle loi

Champ d’application Limitée aux structures

mutualistes seulement Large: Mutuelles, SA, SARL

Instruction des dossiers d’agrément

Ministère des Finances seul : instruire dossiers et accorder autorisation d’exercice.

Ministère des Finances : supervise seul les IMFs de petites tailles ;

Pour IMFs de grande taille :

supervision conjointe entre Ministère des Finances et BCEAO

Autorités de contrôle Ministère des Finances

seulement

Ministère des Finances : supervise seul les IMFs de petites tailles ;

Pour IMFs de grande taille : contrôle

conjoint entre Ministère des Finances

et BCEAO

Protection des déposants

Faible protection

Nombreux cas de fraude et de malversations financières

Protection renforcée des épargnants,

les IMFs ont l’obligation d’adhérer à une garantie des dépôts

Fiabilité et rapidité dans la transmission de de données financières à la DRS et à BCEAO

Peu de sanctions en cas de retard ; Absence d’exigence légale pour la certification des comptes.

Certification obligatoire des états financiers pour les grandes IMFs ;

Relèvement des pénalités en cas de

retard ;

Adoption et publication d’un nouveau

référentiel comptable. Mécanismes

d’atténuation des chocs au sein des réseaux

Mécanismes Inexistants La loi instaure des mécanismes

Source: A partir des textes de la nouvelle loi sur la microfinance, BCEAO

Les conditions d’accès dans le secteur de la microfinance ont été durcies par la nouvelle loi. Le but est de s’assurer du professionnalisme des institutions qui souhaitent s’investir dans la microfinance. Le dispositif prudentiel est appliqué à toutes les IMFs, ce qui n’était pas le cas de la loi Parmec. Une disposition légale exige aux IMFs de grande taille (dont le portefeuille de crédit est supérieur à 2 milliards de FCFA) à certifier leurs états financiers. Ceci était déjà le cas avant la loi, tous les grands réseaux certifiaient leurs comptes pour répondre aux

63 exigences des bailleurs. En revanche les petites IMFs étaient exemptées de cette contrainte et ce sont elles aujourd’hui qui éprouvent le plus de difficultés dans la transmission de l’information financière fiable.

Une innovation majeure de la nouvelle loi est l’obligation de transmettre mensuellement (Grandes IMFs) ou trimestriellement (Petites IMFs) dix ratios déterminés par deux instructions de la Banque Centrale. Ces ratios renseignent sur la situation financière des IMFs et par extension à celle du secteur. Le non-respect de cette disposition expose l’IMF à des sanctions pécuniaires et administratives.

Toutes ces mesures permettent à la commission bancaire de disposer régulièrement de l’information nécessaire pour la supervision du secteur, et notamment des grands réseaux qui, du fait de leur poids, représentent un risque systémique pour le secteur.

S’il est vrai que la nouvelle loi a introduit des innovations sur le contrôle prudentiel des IMFs, il faut néanmoins relativiser ces changements. En effet, le taux d’usure, fixé à 27% pour les IMFs, est toujours en vigueur, même si une réduction (à 24%) de ce taux est annoncée par la commission bancaire de l’UEMOA.

Les principales implications de cette nouvelle réglementation sont les suivantes :

- La première implication de la nouvelle loi est la disparition des Groupements d’Epargne et de Crédit (GEC) ou leur transformation en une forme de structure autorisée par la loi ;

- Un ratio de capitalisation (fonds propres/actif ≥ 15 %). Ce ratio n’existait pas avec l’ancienne loi ; elle vise un minimum de solvabilité de l’institution au regard de ses engagements. Il se détermine par le rapport entre les fonds propres et l’actif total ;

- Elle limite le risque global porté par l’institution, qui ne peut excéder le double des ressources internes et externes de l’institution. Il est déterminé par le rapport entre les risques portés et les ressources.

- La liquidité des IMFs: La norme de liquidité mesure la capacité des IMFs à faire face à leur passif exigible, d’honorer leurs engagements à court terme avec leurs ressources à court terme. La norme de liquidité est le rapport entre le passif exigible, l’encours des engagements et l’ensemble des valeurs disponibles et réalisables à court terme dont la norme est de 60% pour les institutions ne collectant pas de dépôt, 80% pour les institutions en réseaux et 100% pour les institutions isolées.

64 - Limitation des prises de participations: Ce ratio définit la prise de participation dans des sociétés par les IMFs, la norme de ce ratio est fixée à un maximum de 25% des fonds propres.

- Limitation des prêts aux dirigeants et au personnel ainsi qu’aux personnes liées. Ce ratio a pour but de prévenir le risque de concentration de prêts et engagements en faveur des dirigeants et également de contrôler l’utilisation des crédits par ces derniers, la norme est fixée à un maximum de 10% des fonds propres de l’IMF (10% des dépôts avec l’ancienne loi).

Notons que l’efficacité d’une réglementation prudentielle ne provient pas simplement de l’existence des normes légales, mais de la fiabilité de l’information financière et de la rapidité de sa transmission aux autorités de supervision.