La partie 3.1 présente la structure du modèle intégré retenue dans cette thèse. Les deux
prin-cipaux compartimentsde ce modèle représentent les phénomènes hydrauliques ethydrologiques
respectivement. Le premier a fait l'objet d'une étude particulière, présentée dans les parties
3.2 et 3.3, car les modèles existants ne remplissent pas toutes les conditions nécessaires dans
notre contexte, à savoir applicabilité en temps réel, adaptabilitéaux outils de l'automatique et
intégration desdébits intermédiaires.
Danscettepartie,nousprécisonslechoixdumodèlehydrologiqueutiliséetdétaillonslastratégie
de couplage avec lemodèlehydrauliquedéveloppé précédemment.
3.4.1 Choix d'un modèle hydrologique
On dit souvent en hydrologie qu'ilexiste autant de modèles quede modélisateurs.Cette
diver-sité vient en partie du fait que l'hydrologie couvre un large éventail de phénomènes complexes
liés au cycle de l'eau sur la partie continentale. Aussi, chaque modèle tente d'appréhender les
phénomènes hydrologiques prédominants pour un objectif donné. Quelques auteurs proposent
des revuesdesdiérents modèles hydrologiquesexistants(Anderson etBurt,1985; Shaw, 1994;
Singh, 1995; Beven, 2000).
Parmi les modèles adaptés à la gestion opérationnelle, il existe des modèles physiques
distri-bués,commeparexemplelemodèleMARINE(Estupina-Borrell etal.,2006).Cetypedemodèle
permet de prendre en compte la variabilité spatiale de la pluie, facteur déterminant lors de la
formation des crues éclair, mais nécessite une mise en ÷uvre complexe et un volume
impor-tant de données à traiter. Ontrouve également desmodèles semi-distribués avec une approche
conceptuelle pour la transformation de la pluie en débit couplée à un module hydraulique de
propagation du débit dansles cours d'eau. Ce dernier peut être obtenu soit par une résolution
numériquedeséquationsdel'hydraulique(parexemplelemodèleMIKE11(Havnøetal.,1995)),
soit paruneapprocheconceptuelle oumétrique(modèlesDBM(data-based mechanistic),Young
(2002);Romanowiczet al. (2006)).
Ces diérents modèles peuvent être utilisés avec des algorithmes d'assimilation de données, et
peuvent donner de bons résultats pour la prévision des crues. Néanmoins, dans le contexte
de gestion des étiages, il restent peu adaptés à la synthèse de contrôleurs pour la commande
automatique desvannes.
Comme nousl'avonspréciséen 2.1.4, nouscherchonsà établirun modèleintégré semi-distribué
adapté à la régulation des cours d'eau. Le modèle hydraulique présenté précédemment a été
construitsouscescontraintes. Enoutre,pourlecontextedegestionopérationnel considéré(crue
ou étiage), on cherche à représenter le débit uniquement à l'exutoire du bassin intermédiaire.
Une approche globalepour lemodulehydrologique paraît doncplus adaptée, notamment par le
faible volume de donnéesà traiter.
Perrin(2000)présenteuneanalysecomparativedesmodèlespluie-débitglobauxexistants.Parmi
ceux-ci,les approchesdetype GR,développéesauCemagref,semblent particulièrement
intéres-santes carelles possèdent un nombre réduit de paramètres (de2 à 5 selon lemodèle). En outre
leur robustesseapu êtreéprouvée surungrand nombrede bassinsversantsfrançais(Mathevet,
2005;LeMoine, 2008;Lerat,2009).Demanièregénérale,lesmodèles GRdistinguenttroistypes
de transferts:laproductionde lapluienette(après interception parles plantesetruissellement
jusqu'aux coursd'eau), les transfertssuperciels (routage) etles transfertsen nappe. La gure
3.34 présente le schémahydrologique général deces modèles.
Production
Nappe
Routage
débits latéraux pour le module hydraulique
E P
ext.
Figure 3.34 Schémagénéral des transferts hydrologiquesdesmodèlesde type GR
Enn,Tangara(2005)proposeuneversionamélioréeavecuneméthoded'assimilationdedonnées
directement intégrée dans la structure du modèle, ce qui a abouti au modèle GR3P à trois
paramètres adapté à laprévisiondescrues.Ce modèle, qui fonctionne aupas detemps horaire,
nous servirade base pour la synthèse d'unmodèle couplé hydrologie-hydraulique. La structure
de ce modèleest présentéesurlagure3.35. Les troisparamètres àcaler sont :
uncoecientmultiplicatif
IGF
représentantlespertesougainsparleséchangesaveclanappe, lalargeurde l'hydrogramme unitaireX
,lacapacitédu réservoir deroutage
R
(enmm).Pour notre approche, nous avons suivi les recommendations de Lerat (2009) en supprimant
l'hydrogrammeunitaire, etnousavonspréféréajouterunparamètre
S
traduisant lacapacitéduréservoirde production (enmm).Cedernierparamètre, présent danslaplupart desmodèles de
type GR, aétéxé àlavaleur de350 mm pour lemodèle GR3P.
3.4.2 Le cas de la nappe
DanslecasdumodèleGR3Pprésentéci-dessus,les échangesaveclanappesont représentéspar
lecoecientmultiplicatif
IGF
.Cecoecient peutêtreinférieurà1lorsqu'unepartiedelapluienette (issue du réservoir de production) est inltrée dans la nappe et ne se retrouve pas sous
forme de débità l'exutoire,ou supérieurà 1dansle casoù lanappe reçoitun débitdes bassins
voisins, débit ensuite injecté dansle cours d'eau principal. Cette fonction d'échange représente
donc ladouble èche entrela nappe etles bassins voisins surla gure3.1 présentée à la n du
chapitre 2.
Par ailleurs, les échangesde la rivièrevers lanappe ne sont pasreprésentés dansnotre modèle,
ce qui correspond à l'hypothèse selon laquelle l'inuence la plus importante de la nappe est sa
ETP Pluie
Interception
percolation
Fonction IGF
d’échange Réservoir de
production 350 mm
Q aval
Modèle GR3P
Réservoir de routage
R
UH(X)
Hydrogramme Unitaire
Figure 3.35 Schémade fonctionnement dumodèle GR3P
réaction à la pluie. Cette hypothèse peutêtre valide dans le cas des crues, mais constitue une
limitation importante en période d'étiage. En eet, lorsque lanappea un niveau bas, larivière
tend à lui fournir un débit potentiellement non négligeable. Les échanges entre la nappe et la
rivièresont soumisàdeseetsde seuilimportants dicilesàprendre encompte danslemodèle
linéaire proposépour lemodulehydraulique.
3.4.3 Découpage spatial du bassin intermédiaire
Le modèleglobal GR3Ptraduitlatransformationdelapluiesurlebassinintermédiaireendébit
à l'exutoire. Pour intégrer cette composanteau module hydraulique qui permet de propager le
débit amont jusqu'à l'aval, nous suivons l'approche développée par Lerat (2009) à partir des
modèlesGR4H pour l'hydrologie etHayami pourl'hydraulique. L'auteur proposeundécoupage
dubassinintermédiairebasésurlacourbedessurfacesdrainéesparlecoursd'eauprincipal.Cette
courbe permet notamment de mettre en évidence deux typesd'apports du bassinvers le cours
d'eau : apports ponctuels correspondant aux surfaces drainées par les auents importants et
apportsuniformémentrépartis(dius)correspondant auxsurfacesnondrainéespar cesauents
(gure 3.36).
Danssestravaux,Lerat(2009)étudie,surungrandnombredebassinsversants,diérentes
con-gurationsderépartitionentreapportsponctuelsetapportsdius.Ilenressortqu'unnombretrop
important d'apports ponctuels ou diuspeutdégrader laqualité des résultats, la conguration
optimaleétantobtenueavecdeuxapportsdiusetdeuxapportsponctuels.Cetteconclusion
tra-duitune tendancemoyenne surun grandnombredebassinsversants. Noustesterons diérentes
congurations dansles applicationsultérieures.
Il est possible d'appliquer un modèle hydrologique sur chaque sous-bassin latéral (relatif à un
apportponctuel ou dius). Cette solution requerraitun jeu de paramètres hydrologiques(
S
,R
et
IGF
)pourchaquesous-bassin,ce quipourraitposerdesproblèmesd'identiabilitéliésàune sur-paramétrisation. Or, les travaux de Lerat (2009) ont également montré que cette solutionn'apportaitpasd'améliorationsignicative, de même qu'utiliserdesdonnées de pluiescalculées
pour chaque sous-bassin.
On supposera donc que tous les sous-bassins ont le même comportement hydrologique (mêmes
paramètres)etquelapluietombeuniformémentsurtoutlebassinintermédiaire.Ledébitissudu
modèlehydrologiqueestalorsrépartientrelesapportsponctuelsetlesapportsdiusenfonction
dessurfacescorrespondantes,puisinjectédanslemodulehydrauliquesousformededébitlatéral
ponctuel ouuniformément réparti, respectivement.
Dans les applications proposées dans les chapitres 4 et 5, la courbe des surfaces drainées sera
calculée à partir d'un modèle numérique de terrain (MNT). La répartition des débits latéraux
sera donc connue à l'avance.
3.4.4 Le modèle intégré
Le couplageproposépermetdemettreen÷uvreunmodèleintégréhydraulique-hydrologie
semi-distribuéetsemi-linéaire.Enoutre,nousproposonsdelinéariserleréservoirderoutagedumodule
Débit amont
Débit aval Débit
latéral ponctuel
Débit latéral
diffus Pluie ETP
Modèle hydrologique
Modèle hydraulique
Surface drainée
Abscisse longitudinale
Affluent principal
Débit amont
Débit aval
Figure 3.36 Principedu découpagespatial dubassinintermédiaire (exempleavec un auent
principal)
hydrologique, ce qui nous permettra de proter des outils classiques de l'automatique linéaire
(voir chapitre 5) à la foissur le module hydraulique etsur une partie du modulehydrologique.
Cette approchereprend l'idée initialement proposée par Young (1974) d'unepartie non linéaire
pour laproduction depluie etune partie linéaire pour letransfert.
On obtient donc une partie non-linéaire (GRK) traduisant la production de la pluie nette et
les échanges avec la nappe, et une partie linéaire (LRK) traduisant le routage sur le bassin
intermédiaire et dans le cours d'eau principal. Même si le routage hydrologique est transféré
danslemodèleLRK, onappelera GRK lemodulehydrologique etLRKlemodulehydraulique.
Le modèle intégré, que l'on appellera TGR, possède nalement 5 paramètres à caler lors de
l'étape d'identication (chapitre 4) : 2 pour le module GRK (
S
etIGF
) et 3 pour le moduleLRK (
τ 0
,K 0
etK R
).La gure 3.37 présente le schéma fonctionnel du modèle TGRpour un unique bassin
intermé-diaire. Le casde plusieurs bassinssuccessifsest présenté surlagure3.38.
ETP Pluie
Interception
percolation
Fonction IGF
d’échange Réservoir de
production
S
Routage bassin
Q amont
Q aval
apport amont
apport latéral
GRK
LRK
Routage rivière
K R
K U K 0 T 0 K P T P
ponctuel
diffus
0
Paramètres à caler : T , K , K , S, IGF Paramètres calculés : T , K , K
0 R
P P U
Modèle TGR
Figure 3.37 Schéma fonctionnel dumodèle TGRpour ununique bassinintermédiaire
LRK
Q 1 Q 2 Q N
Q 0 P , E 1 1 P , E 2 2 P , E N N
LRK (1) LRK (2) LRK (N)
GRK (1) GRK (2) GRK (N)
. . .
. . .
Q am Q lat
Q av
TGR
Q 0 Q 1
Q N−1 Q N
P E N N P E 1 1
Figure 3.38 Schémafonctionnel dumodèle TGRpour