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Static Trade-Off Theory et Très Petites Entreprises

Figure 5 : La structure optimale de financement

1.1.2 Static Trade-Off Theory et Très Petites Entreprises

Il existe peu d’études traitant du financement des TPE. Nous observerons ici celles relatives aux PME et nous nous concentrerons sur les remarques concernant les plus petites d’entre elles.

En 1991, Ang cherche à mesurer l’effet de la fiscalité sur le financement des petites entreprises et ses conclusions vont à l’encontre de celles de Modigliani & Miller (1963). En effet, l’avantage fiscal lié à l’endettement qui rend la valeur d’une firme endettée supérieure à celle d’une entreprise non endettée, est limité dans ce type d’entreprise. Premièrement, il est important de rappeler que les TPE bénéficient régulièrement de taux d’imposition réduits. A titre d’exemple, les entreprises françaises peuvent bénéficier d'un taux réduit d'impôt sur les sociétés de 15 % sur la partie de leur bénéfice fiscal plafonné à 38 120€, contre un taux de droit commun de 33,33 %. Pour y être éligible, l’entreprise doit réaliser un chiffre d'affaires hors taxe inférieur à 7 630 000€ et doit avoir au moins 75% de son capital social détenu par des personnes physiques ou par des sociétés satisfaisant elles-mêmes à ces conditions. En 2007, plus de 470 000 entreprises françaises bénéficiaient du taux réduit d'impôt sur les sociétés et plus d'une sur trois diminuait son impôt de moitié grâce au taux réduit. De plus, le caractère aléatoire et limité du résultat imposable des TPE ne leur permet pas toujours de profiter de l’économie fiscale. Enfin, les investissements, et donc les gains fiscaux latents à l’endettement, sont également plus variables que dans les grandes firmes (Pettit & Singer, 1985).

La prise en compte du risque de défaillance permet d’établir que le financement d’une entreprise résulte d’un compromis entre l’avantage fiscal induit par la dette et les coûts de faillite qu’elle provoque. Or, Hutchinson & Ray (1986) montrent que cet arbitrage est moins pertinent pour les petites firmes car leur risque de défaillance est très élevé. Une étude de l’INSEE sur 30 000 créations d’entreprises entre 1996 et 1999 montre que le taux de mortalité est inversement corrélé avec le nombre de salariés employés lors de la création ; Alors que 57,7% des firmes qui n’ont aucun salarié au départ disparaissent avant leur cinquième année d’existence, elles ne sont plus que 34,7% à disparaître si le nombre de salariés de départ est au moins égal à 10. Dans un article plus récent, Demoly & Thirion (2001) chiffrent à plus de

54% le taux de mortalité des petites firmes durant leurs cinq premières années. Le caractère aléatoire des économies fiscales et l’importance des coûts de faillite réduisent donc la portée des modèles fiscaux dans l’explication des comportements de financement des TPE.

Nous cherchons ensuite à observer les relations d’agence au sein des petites firmes. Il est tentant de négliger les problèmes d’agence entre actionnaires et dirigeants car une grande majorité des TPE sont des firmes non managériales, c’est à dire à l’actionnariat concentré et/ou familial. En cela, les principaux détenteurs de capitaux sont les principaux dirigeants eux-mêmes, ou sont liés, plus ou moins fortement, à ceux-ci. Par conséquent, les incitations à utiliser la dette pour se prémunir contre ce type d’ennuis sont réduites, voir même anéanties. Les fondements mêmes du modèle de financement par compromis, et notamment l’existence d’un ratio cible de dettes sont donc, à nouveau, remis en cause.

Enfin, Petit & Singer (1985) considèrent l’asymétrie d’information entre dirigeants et créanciers, et les coûts d’agence qu’elle génère, comme les déterminants majeurs des coûts de financement des petites entreprises. C’est la divergence des objectifs entre les deux parties qui est la plus à même de provoquer un coût du crédit supplémentaire. En effet, le prêteur de fonds doit parfois se satisfaire d’une information réduite, contrôlée et/ou filtrée pour analyser son dossier de crédit puisque les TPE ont peu d’obligations concernant la publication d’informations. De plus, le dirigeant d’une TPE possède une liberté totale, à la fois pour fixer le montant et la forme de sa rémunération personnelle, mais aussi dans le cadre des transferts de richesse entre le patrimoine personnel et professionnel, et ce d’autant plus lorsqu’il est actionnaire majoritaire. Ces éléments engendrent des coûts d’agence qui découragent les prêteurs. Ces derniers considèrent les petites entreprises comme des partenaires risqués, et deviennent plus exigeants en termes de taux d’intérêt, de garanties, de clauses … (Observatoire des PME européennes, 2003).

Taille de l’entreprise et structure financière

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La Static Trade-off Theory suggère l’existence d’une structure financière optimale, et d’un niveau optimal de dettes, issu d’un équilibre entre les bénéfices et les coûts d’une unité supplémentaire de dettes. Les avantages de la dette sont les gains d’impôt liés aux intérêts d’emprunt fiscalement déductibles et la diminution des coûts d’agence entre actionnaires et dirigeants. Les inconvénients sont les risques de défaillance ou de faillite associés à un haut niveau de dettes et l’augmentation des coûts d’agence entre dirigeants et prêteurs de fonds.

Or, d’un point de vue théorique, il semble que l’existence d’un niveau optimal de dettes dans le cadre des TPE puisse être remise en cause par l’inexistence ou la faiblesse des avantages liés à l’endettement et par l’importance des inconvénients qu’il engendre. En effet, le caractère aléatoire des économies fiscales et l’inexistence des coûts d’agence entre actionnaires et dirigeants de TPE nous renvoient à la question de l’incitation à l’endettement. De plus, l’importance des coûts de faillite associés à un haut niveau de dettes et la prise en considération des coûts d’agence non négligeables entre dirigeants et préteurs de fonds ne permettent pas d’inciter les TPE à s’endetter. Or, les TPE sont tout de même endettées. Ces arguments réduisent donc la portée théorique de la Static Trade-off Theory dans l’explication des comportements de financement des TPE. Ceci nous amène à nous concentrer sur la seconde théorie majeure portant sur les choix de financement : la Pecking Order Theory.