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Principes généraux de la Pecking Order Theory

Figure 5 : La structure optimale de financement

1.2 Principes généraux de la Pecking Order Theory

La Pecking Order Theory ou théorie du financement hiérarchique a été développée par Myers (1984) ainsi que par Myers & Majluf (1984). Ces auteurs démontrent que les choix de financement des entreprises suivent un ordre hiérarchique dont le but principal est de maximiser la richesse des actionnaires existants en évitant les coûts liés à l’asymétrie d’information et à la sélection adverse : L'entreprise préfère le financement interne au financement externe et la dette à l'émission d'actions.

L’idée du financement hiérarchique est assez ancienne et nous la retrouvons dans les manuels de finance des années 196024. C’est certainement un des modèles les plus cités et les plus testés en finance d’entreprise, dans des domaines très variés (Ginglinger, 2003). Les innovations majeures de ce modèle sont la prise en compte de l’asymétrie d’information et des desseins parfois différents entre les actionnaires déjà membres de l’entreprise et les nouveaux investisseurs potentiels, le dirigeant agissant toujours dans l’intérêt des actionnaires existants.

En présence d’asymétrie d’information sur les marchés financiers, les actionnaires et les dirigeants (Insiders) détiennent des informations sur les actifs existants et les opportunités de croissance de la firme que les investisseurs externes (Outsiders) n’ont pas. Par conséquent, ces derniers ont une perception réduite de la valeur réelle de la firme et des intentions des actionnaires et/ou du dirigeant, ce qui engendre des coûts additionnels associés à l’information et à sa crédibilité. Ces coûts, appelés coûts d’agence, vont réduire à la fois l’offre et la demande de dettes et d’émission d’actions. En effet, l’offre de financement attribuée à l’entreprise pourra être restreinte à cause d’une perception des risques et/ou de coûts de contrôle trop importants qui pousseront l’investisseur potentiel à demander une prime de risque ou un taux d’intérêt non raisonnable sur les fonds avancés. De plus, la dette externe peut être sujette à un rationnement ou à d’autres contraintes, telles que des garanties, des clauses… Enfin, il existe des coûts de transaction associés à la souscription d’une dette ou

24 La description des comportements présentés dans la théorie du financement hiérarchique pouvait déjà être lue

Taille de l’entreprise et structure financière

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de l’émission d’actions. L’ensemble de ces éléments peut rendre ces deux modes de financement démesurément chers. Le dirigeant peut même parfois se trouver dans une situation telle, qu’il décide de ne pas lancer un projet potentiellement rentable s’il doit être financé par un investissement trop cher et/ou trop risqué (Myers & Majluf, 1984). Les coûts d’agence, ainsi que les coûts de transaction observés lors de l’émission de dettes ou d’actions, permettent donc de justifier la préférence du dirigeant pour le financement interne.

D’autre part, le fait que le dirigeant tente de maximiser la richesse des actionnaires existants, et non celle des nouveaux investisseurs, aura un impact plus ou moins négatif sur toute augmentation de capital. Ce mode de financement ne sera donc utilisé qu’en dernier ressort.

Pour aller plus loin dans la compréhension de ce modèle, nous chercherons d’abord à démontrer pourquoi le financement interne est préféré à l’émission d’actions, puis dans une deuxième étape, nous incorporerons la dette dans ce raisonnement.

1.2.1

Fonds propres versus émission d’actions

Les deux concepts majeurs de la Pecking Order Theory sont le fait que le dirigeant agit toujours dans l’intérêt des actionnaires existants, et l’asymétrie d’information. Selon Myers (1984), l’observation conjointe de ces deux principes nous amène à penser que si les investisseurs estiment correctement la valeur de la firme, les dirigeants refuseront d’émettre de nouvelles actions car certains bénéfices du projet d’investissement devront être partagés avec les nouveaux actionnaires. Par contre, si les investisseurs surévaluent la valeur de la firme, les dirigeants essaieront alors d’émettre de nouvelles actions puisque cela sera profitable aux actionnaires existants. Mise à part le cas d’une croissance récente et rapide de la firme, la nouvelle émission d’actions sera alors perçue comme un signal défavorable par les investisseurs externes. Le prix des actions aura donc tendance à diminuer lors de l’annonce de cette émission d’actions, faisant de cette dernière une méthode extrêmement chère pour obtenir des fonds supplémentaires. Certaines firmes préféreront même ne pas investir dans un projet rentable plutôt que d’émettre des actions sous-évaluées.

Considérons un exemple25 numérique simple, mais révélateur. Une entreprise détient un actif existant (A) et une option d’investissement (I) qui peut être financée par une émission d’actions (E) ou par des liquidités (S). L’investissement est indivisible et ne peut être différé, il doit être entrepris en totalité en t=0. Si les liquidités ne couvrent pas l’investissement (S < I) et que les dirigeants choisissent d’investir, ces derniers doivent attirer de nouveaux actionnaires pour une valeur E, égale à la valeur de l’investissement moins les liquidités disponibles (E = I – S). Il y a deux états de la nature équiprobables en t=1 pour lesquels les valeurs des actifs existants et de l’opportunité d’investissement sont différentes. L’information est la même pour tous en t=-1 (A, I et S), les dirigeants obtiennent des informations leur permettant de réviser leur appréciation de la valeur des actifs et des opportunités de croissance en t=0 alors que les investisseurs la reçoivent en t=1.

Supposons que l’investissement ait une valeur de 200 (I = 200) et que le montant des liquidités de la firme soit nul (S = 0) ; les dirigeants doivent émettre de nouvelles actions pour une valeur E de 200 (E = 200 – 0 = 200) s’ils souhaitent investir. La valeur de l’actif de l’entreprise (a) et la valeur actuelle nette de l’opportunité d’investissement (b) en fonction des états de la nature connus par les dirigeants en t=0 et par les investisseurs en t=1, sont exposées dans le tableau 4 ci-dessous.

Tableau 4 : Valeur de l’entreprise et de l’opportunité d’investissement