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Chapitre I. Problématique :

1.2. Redéfinitions des sphères publiques

1.2.3. Sphère des publics

Les recherches féministes, « queer » et ethniques, les études critiques sur le racisme et les discriminations s’attachent à produire une redéfinition des catégories d’identité et de culture politique à partir du principe de diversité culturelle et d’une emprise sur la réalité quotidienne. La remise en cause des représentations discriminantes et de l’autorité de la pensée permet une construction des identités publiques et une fédération des personnes et des histoires sous la bannière de nouvelles identités critiques. Selon ces études, les processus sociaux et les identités qui se forment lors de la mise en scène collective du soi dans les médias ont des effets structurants sur la construction des identités et des problèmes publics (Goffman, 1973). Les études féministes ont particulièrement contribué à repenser les termes de la frontière entre privé/public en montrant comment le processus de transcription des enjeux personnels et privés en enjeux collectifs redessine les contours des sphères publiques interconnectées par la voie de socialisations multiples.

L’expression « nouvelles sphères publiques » s’inscrit dans les politiques de la parole et prend racine au terreau des réflexions et des études critiques portant sur les processus d’institutionnalisation du langage à l’ère post-industrielle. Elle marque la transition d’une conception bourgeoise des sphères publiques, conceptualisée sous la forme d’enjeux publics et d’intérêts communs, à une conception alternative post-bourgeoise des sphères publiques fondée sur la liberté de parole, la liberté des médias et la liberté d’association : « free speech, free press, and free assembly » (Fraser in Calhoun, 1992 : 112). L’émergence de « contre-publics », populaires, marginaux, féminins et minoritaires, a donné naissance à des styles de comportements politiques et à des formes de parole qui transcendent le modèle du conflit politique et peuvent permettre une plus grande égalité sociale par l’extension de l’accès à l’information. De la même manière que Calhoun et Foucault, Fraser souligne que cette reconfiguration des sphères publiques n’exclut nullement la perversion du modèle égalitaire et libertaire de la parole par l’intrusion de relations structurelles sous- jacentes de pouvoir (Fraser in Calhoun, 1992 : 120).

Ces inégalités systémiques peuvent être combattues par la mise en œuvre d’une égalité sociale substantive basée sur l’incorporation de savoirs insulaires, familiaux, informels issus de la vie quotidienne.

L’émergence de contre-publics subalternes permet l’apparition de nouvelles catégories de relations « intrapubliques » et « interpubliques » au sein d’espaces de discussion parallèles (Fraser in Calhoun, 1992 : 121). La circulation de discours d’opposition au sein de ces espaces permet aux groupes minoritaires d’acquérir un pouvoir d’influence par le langage et de réduire « l’extension du désavantage » face aux discours majoritaires (Fraser in Calhoun, 1992 : 123). Ces groupes et ces contre-publics font partie d’un public plus large (‘public at a large’). En ce sens, le contre-public politique n’est pas distinct de la société mais constitue un public leader (voir Calhoun, 1992). Les groupes radicaux qui s’opposent au capitalisme financier sont en relation avec les membres de l’organisation comme avec d’autres types de publics, tels les environnementalistes, les féministes, les minorités ethniques, le mouvement ouvrier syndicaliste et les milieux étudiants. Ils forment ainsi des sous-cultures au sein d’une culture globale de la résistance. Le terme « résistance » peut être défini, non comme une logique du conflit politique ou de l’intérêt, mais dans une acception critique, comme une

dynamique de contestation systématique des formes de domination et de violence symboliques présentes dans les discours politiques et institutionnels. Avec la démocratisation des moyens de publication et la diversification des contenus culturels (audio, vidéo, zines, blogs), la résistance n’est plus déterminée par des catégories socioprofessionnelles et elle n’est plus non plus l’apanage d’identités politiques formelles. En effet, les formes militantes de communication ne sont plus la propriété des intellectuels bourgeois, mais peuvent au contraire circuler aussi dans des sphères publiques minoritaires de contestation sociale et faire ainsi l’objet de nombreuses appropriations. Ces nouvelles sphères publiques proposent les structures et les espaces nécessaires à la contestation et à la négociation des identités sociales et des problèmes publics. L’espace de la discussion permet en outre la formation et l’apprentissage de nouvelles capacités collectives (Fraser in Calhoun, 1992 : 126). Les formes de résistance deviennent un moyen de revitaliser le débat public et d’accroître les modes alternatifs de production des savoirs et des expertises communicationnelles.

L’entrelacement des formes privées et publiques au sein des nouvelles configurations, décrites comme des formes spécifiques d’interdépendance entre les personnes (Elias, 1999)35, fait naître des formes de savoir reposant sur les trois composantes de transmission de savoir : diversité culturelle, processus de consensus et ouverture d’accès aux sphères publiques. Ce ne sont pas les intérêts communs, les thématiques larges ou les identités politiques prédéfinies qui fédèrent les participants entre eux mais les connexions sociales qui s’élaborent lors de processus individuels et collectifs de négociation et de reconstruction de sens dans l’espace de la contestation (Fraser in Calhoun, 1992: 126).

La naissance des publics larges (‘at a large’) et des micro-publics redéfinit la notion d’intimité, enjeu historique des recherches critiques féministes. La double dimension de l’intimité l’inscrit dans la logique de la propriété privée et de la consommation propre au domaine économique et dans la sphère de la vie intime et domestique. Elle conduit à des processus d’appropriation et de personnalisation des formes collectives qui illustrent la

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Ces configurations pouvant couvrir plusieurs échelles organisationnelles, depuis le local au global et s’observent par l’analyse des chaînes de relation unissant les personnes qui les composent. Les évolutions dans les relations de pouvoir évoluent en fonction de l’assymétrie des pouvoirs d’influence entre l’individu et le pouvoir étatique centralisé.

rhétorique tensive soulignée par Habermas puisque ces deux dynamiques sont disjointes et suivent des trajectoires antagonistes (‘domestic’ vs ‘economic’). L’une va dans le sens de l’extension et de l’addition, en vue d’un ajout qualitatif de valeur, alors que l’autre procède par réduction et soustraction, dans un souci de rentabilité des formes de production. Les formes participatives de communication intègrent simultanément cette contradiction inhérente du soi dans le processus de publicisation de l’identité privée. Selon Fraser, la dichotomie du privé/public doit prendre davantage en compte l’analyse des formes hybrides d’organisation telles que la démocratie directe ou l’auto-détermination comme systèmes de savoir légitime et la multiplicité des publics au sein d’une sphère des publics (‘sphere of publics’). La quête d’autonomie des militants de la CLAC intègre cette double dimension puisqu’elle se déroule dans des structures médiatiques contrôlées par le pouvoir. Cependant cette configuration lui permet également d’entrer en conversation avec des publics diversifiés.

Les recherches féministes post-coloniales ont démontré que les mouvements de femmes en Inde s’étaient formés dans la mouvance de cette résurgence de la dissidence afin de permettre une meilleure compréhension des enjeux environnementaux à partir de points de vue humains délocalisés. A partir d’une étude des médiations entre actions locales et visions globales, Di Chiro (1997) apporte un éclairage sur la manière dont les femmes militantes établissent, par le jeu de sociabilités et d’échanges discursifs interpersonnels, de nouveaux espaces de collaboration dans les réseaux web locaux en dialogue permanent avec la science. L’étude met en évidence le lien entre la santé des femmes et la santé environnementale, comme deux entités interconnectées et interdépendantes. L'analyse porte sur l’observation comparée de personnes issues de l’immigration aux faibles revenus aux États-Unis et en Inde et croise les savoirs et théories consacrés à la justice sociale et environnementale avec les catégories sociales de genre, de race et d’ethnie, de manière à montrer la construction de communautés mixtes d’expertise autour des enjeux environnementaux (gestion et déplacement des déchets nucléaires, risques que représentent les industries pétrochimiques, usage de pesticides et extraction de ressources comme l’uranium par exemple).

Les groupes locaux américains revendiquent une clarification des enjeux environnementaux et une meilleure attention portée aux inégalités sociales de classe et de genre, dans la mouvance des revendications de l’EJM (Environmental Justice Movement), un réseau d’organisations locales et régionales, tandis que les groupes locaux indiens se concertent sur des enjeux de justice sociale relatifs à l’exploitation coloniale et néocoloniale des terres, des ressources et des vies humaines. En Inde, la jonction entre les questions environnementales et les femmes est déterminée par des conditions historiques et culturelles36. Le phénomène NIMBY (Not In My Back Yard) favorise l’intégration des savoirs locaux et globaux; par exemple, la destruction de l’habitat touche autant les locaux que les environnementalistes et les responsables de l’environnement. Par ailleurs, Di Chiro souligne que la préoccupation de la santé et du bien-être des habitants est commune à différentes échelles de lieux et d’espaces, qu’il s’agisse de l’Inde ou des États-Unis. Les réseaux locaux d’organisation et les alliances sur internet permettent de développer des stratégies communes, des ponts et des liens entre les différentes formes d’expertises fondateurs d’une translocalité des pratiques (1997 : 207).

Cette stratégie de construction d’un réseau translocal permet de lier des espaces historiquement et géographiquement éloignés et de maintenir des points de contact et d’échanges entre des espaces, des processus et des personnes hétérogènes. Des « zones de contact » (Pratt, 1992)37 maintiennent des relations entre des populations très disparates : populations déplacées, militants associatifs ou ONG… Ces zones de contact où l’expansion néocolonialiste se concentre connaissent également de nombreux conflits interethniques. C’est ainsi que des femmes originaires de tous pays partagent leur expérience de l’environnement et de l’injustice sociale38. De cette manière, elles construisent un espace d’échange de discours, de stratégies et de pratiques de l’environnement au féminin.

36 Traditionnellement, la responsabilité de la santé est entre les mains des femmes en raison de la division

sexuelle du travail (Di Chiro, 1997).

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Le CCAEJ (Center for Community Action and Environmental Justice), fondé par Penny Newman, est l'une de ces zones de contact. Ce centre communautaire a pour but de susciter l’attention de l’opinion du public et des professionnels sur des enjeux sociaux comme l’écologie politique de la gestion des déchets et le recyclage, en développant des alliances avec la communauté d’immigrants asiatiques de Los Angeles, sensibles à la notion de racisme environnemental (Di Chiro, 1997).

38 Comme ce fut le cas lors de la Women's Conference à Beijin ou à Bengadore, dans le sud de l’Inde, en

1991, lorsque des étudiantes et des militantes ont pu comparer leurs pratiques féministes, sur le plan politique ou intellectuel, à l’échelle transnationale.

Collier et Ong (2005) s’intéressent à l’étude des modes particuliers d’assemblage et aux phénomènes de territorialisation dans les modèles transnationaux globaux qui articulent des formes spatiales non-isomorphiques et des unités d’analyse standard. Ces nouvelles formes témoignent d’un changement des pratiques sociales, culturelles et économiques face à la globalisation des échanges de communication. Cette approche anthropologique place l’humain au cœur du processus de production de savoir en s’inspirant des travaux de philosophes ayant pensé la question des situations historiques (Arendt, 1983; Foucault 1999; Polanyi 1983), des travaux de Giddens sur le déplacement et la réappropriation des formes de l’expertise (Beck et al., 1994; Giddens, 1994) et des œuvres de Weber et de Giddens portant sur les relations humaines à l’ère du capitalisme moderne (Giddens, 2001 ; Weber, 2004). Collier et Ong définissent les assemblages globaux comme des phénomènes de décontextualisation et de recontextualisation qui se produisent à travers diverses situations sociales et culturelles et différentes sphères de vie (Ong et Collier, 2005 : 11). Les réseaux transnationaux permettent aux groupes de mieux se percevoir et se situer par rapport aux autres groupes en reliant leurs pratiques locales à des enjeux globaux, afin d’élaborer collectivement une cartographie du dessous des effets néfastes de la globalisation environnementale. De cette manière, les savoirs produits et transformés par les femmes militantes dessinent une carte de la solidarité globale numérique qui permet de repenser les territoires de l’expertise environnementale et ses définitions (Di Chiro, 1997: 226).

Dans le cas de la CLAC, il s’agit de définir ce que recouvre le terme « anticapitalisme » afin de mieux comprendre l’alternative sociale et économique proposée par les militants et les tactiques alternatives de communication. De la perception de la différence à travers l’échange et la socialisation provient un enrichissement de sens et une compréhension de pensées et de visions du monde étrangères les unes aux autres. A l’image du terme « féminisme » dont la définition a fait l’objet d’importantes évolutions et de multiples représentations depuis la fin de la première guerre mondiale et fédéré les femmes entre elles en étant l’objet d’appropriations multiples, l’anticapitalisme est une notion en perpétuelle redéfinition. La mise en œuvre d’une textualité critique ne vise pas seulement à subvertir les symboles et les représentations mais à provoquer un changement structurel et

social en s’attaquant aux politiques éducatives et pédagogiques dans le processus de transmission du savoir39. Les médias autorisent les groupes à se réinventer eux-mêmes et à poser les cadres collectifs de leurs échanges langagiers.

La formation des identités des organisations par des médiations de coopération et des luttes locales fournit l’articulation nécessaire à l’élaboration d’un mouvement identitaire non déterminé par les frontières traditionnelles des territoires géopolitiques du pouvoir. La connexion entre l’identité des groupes et les organisations et mouvements locaux ou supra locaux permet l’émergence de textes alternatifs sous la surface des textes traditionnels ancrés dans des modes d’action et des genres communicationnels dépassés. La réintégration des groupes minoritaires dans les sphères publiques d’influence témoigne de l’autonomie communicationnelle et politique des groupes pour accéder à la visibilité médiatique. A l’ère des nouveaux médias, la problématique du privé/public est réactivée par l’analyse des régimes de transformation de la visibilité et l’étude des relations de pouvoir. Les nouveaux régimes de visibilité se fondent sur une déterritorialisation et une reterritorialisation des relations de pouvoir car les échanges médiatés se font sans situation de coprésence (Thompson et al., 2000).

L’étude des formes de visibilité médiatisées révèle des pratiques changeantes liées à la gestion de l’identité et de l’intimité. La transition des contenus informatifs se fait par le biais de medium techniques (le téléphone ou les plates-formes numériques) et conversationnels (le partage d’information) dont le sujet est le point de jonction. Ces échanges médiatés produisent des effets sur le destinataire sans nécessaire relation de réciprocité, situation que Thompson qualifie « d’intimité non réciproque à distance » soit « des genres particuliers de rapports interpersonnels, de liens sociaux et d’intimité » (Thompson et al., 2000 : 192).

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Le sentiment de connexion des publics féministes n’est pas fondé sur la dynamique des ententes et des traités de guerre mais sur la coalition pacifique prônant la paix et la justice dans le monde. Dans un contexte fortement connoté par des discours de conquête, on observe alors une inversion et un détournement de la logique guerrière dans les discours lors du Rassemblement Universel pour la paix fondé par des alliances transnationales de femmes en 1936. La thématique de la violence a ainsi rassemblé des femmes issues de cultures différentes et fait naître une conscience de genre et un engagement politique spécifique.

Cette nouvelle donne permet à des personnes d’accéder à des contenus « non locaux » qui feront l’objet d’une autoformation réflexive (Thompson et al., 2000 : 194). Les scandales politiques illustrent bien le caractère incontrôlable de ces nouveaux modes de visibilité où la frontière entre privé et public n’est plus très clairement définie. On distingue ici la définition du terme 'public' au sens d'affaires d'État de sa définition au sens de visible :

Ce qui est public [...] est ce qui est visible ou observable, ce qui est accompli devant des spectateurs, ce que tous (ou un grand nombre de gens) peuvent voir et entendre. Est privé, par contraste, ce qui est retiré de la vue, ce qui se dit ou se fait dans l'intimité, en secret ou au sein d'un cercle limité de personnes. Dans ce sens, la dichotomie public-privé fait écho au contraste entre le public et l'intimité, la franchise et le secret, la visibilité et l'invisibilité (Thompson et al., 2000 : 195).

Par ailleurs, le renouveau des techniques d’impression lié aux nouveaux médias (McLuhan, 1972) a généré des formes de publicité caractérisée par « la simultanéité déspatialisée » (Thompson, 1995; 2005; Thompson et al., 2000). Cette forme d’intimité médiatisée, une « causerie du coin du feu »40, transforme les relations sociales et l’identité sociale des personnalités publiques avec leurs audiences et fait apparaître les personnalités publiques comme des individus ordinaires. Le mode confessionnel, autrement qualifié de « off », est privilégié. Ces évolutions sont à double tranchant car la surexposition du soi sans situation de coprésence physique peut créer des dérives et pervertir la relation de confiance entre les participants à la conversation. Une illustration de ce phénomène est la fascination de certains médias populaires pour la vie sexuelle (adultère ou homosexualité) des personnalités politiques. Ces phénomènes de publicisation à outrance de l’intimité engagent la nécessité d’une réflexion sur le genre médiatique et la culture journalistique car ils provoquent une confusion des genres du politique et du divertissement, ce qui distingue le dévoilement de faits cachés considérés comme faisant partie du domaine public de faits privés anecdotiques réside finalement dans les perceptions. La notion d’intimité varie ainsi en fonction des personnes et des contextes.

Les sites de réseaux sociaux (Social Network Sites, SNS) ont accéléré la dynamique d’extension du soi et de l’intimité car les publics médiatés sont liés par des formes d’intimité

40 Terme utilisé par Roosevelt pour désigner ses échanges avec l’opinion publique lors de la présentation de

son programme diffusé dans une série de discussions radiophoniques, une stratégie de communication en rupture avec les traditions médiatiques des hommes politiques de l’époque.

médiatisée en libre circulation dans les médias qui n’ont pas le statut de formes publiques officielles. C’est pourquoi l’idée de public dépendant du privé se substitue à l’idée de public comme étant lié à l’État (Couldry et al., 2007; Lunt et Livingstone, 1992; 2005; 2009). La définition des publics par les analystes des réseaux sociaux se rapproche ainsi de celle des audiences liées par des textes-médias partagés : « a group bonded by a shared text whether that is a worldview or a performance » (Livingstone, 2005 citée par Boyd, 2007 : 7). Les différentes significations du terme « public » (en tant que destinataire, en tant que contenu visible ou en tant que type d’espace) sont entremêlées dans la pratique des SNS : « Les SNS permettent aux publics de se rassembler. En même temps, en offrant des espaces où la parole prend place, ils constituent aussi eux-mêmes des publics. Les sites eux-mêmes distinguent également le public du privé, le public signifie qu’un profil est visible à tous et le privé qu’il ne l’est que pour les amis » (Boyd, 2007: 8). Boyd ajoute qu’ « un public est à la fois un espace où les gens se retrouvent, interagissent et sont vus, et une communauté imaginée de personnes qui partagent des pratiques, des identités et des compréhensions culturelles similaires » (Boyd, 2008 : 21). Les sites de réseaux sociaux sont des médias conversationnels et hybrides : ils s’articulent autour des profils individuels des participants, des listes d’amis ou d’abonnés et des commentaires postés par les détenteurs de profils et leurs amis. Ils engendrent des formes de conversation semi-privées dans des espaces accessibles publiquement ou seulement aux « amis » sur requête au détenteur du profil. La conceptualisation des publics pour un énonciateur donné est variable car les audiences imaginées dépendent du contexte de l’énonciation.

La définition du terme « public » dans les SNS permet de mieux comprendre les relations entre les sphères publiques militantes et les sphères publiques plus larges, elle rend en outre pertinente l’articulation de la dichotomie public/privé et des régimes de visibilité du fait de la capacité des publics interconnectés à accéder à davantage de contenus privés-