• Aucun résultat trouvé

nde La souveraineté territoriale du statut réel et la dimension publiciste des conflits intercoutumiers.

CHAPITRE I L’ESPRIT D’INDEPENDANCE DE LA COUTUME PORTE A SON FAITE : LE STATUT REEL, PIERRE ANGULAIRE DU TERRITORIALISME DE

Section 2 nde La souveraineté territoriale du statut réel et la dimension publiciste des conflits intercoutumiers.

La classification tripartite des statuts, qui se réduit, à l’examen, à une bipartition inégalitaire entre statuts réels et statuts personnels, trouve son fondement et sa justification dans la conviction de Bertrand d’Argentré que la portée territoriale ou extraterritoriale d’une règle coutumière est intrinsèquement liée au champ de compétence, matériel et géographique, de la puissance publique, ou potestas, qui en est à l’origine. Pareille attitude procède d’une lecture « politique » du phénomène coutumier, au rebours de la lecture privatiste qu’impose le mode de gestion horizontal qui sied, d’ordinaire, au conflit de coutumes291. D’Argentré présume, de la sorte, que ce phénomène et ses

diverses manifestations ne sont que la traduction, en droit privé, des traits distinctifs des entités politiques qui gouvernent les différents détroits qui composent la mosaïque coutumière française. Très loin de nourrir un sentiment indépendantiste vis-à-vis de la Couronne, dont il a été l’un des agents dévoués, le Breton entend, simplement, rappeler ce que son travail de commentateur et de réformateur de coutume lui a révélé, à savoir que les règles de la coutume de Bretagne reflètent les mœurs, les usages et les traditions ancestrales du Duché et que cette singularité serait mise gravement en péril si les coutumes étrangères venaient à pénétrer trop facilement sur le territoire.

Ainsi, la doctrine de d’Argentré tire son essence même de l’exclusivité qu’entend assurer cette potestas au sein du territoire dans lequel s’enferme son autorité et la formule emblématique qui en résume le mieux l’esprit – finitae enim potestatis finita est virtus292 – se décline à plusieurs reprises,

sous différentes formes, dans sa dissertation De statutis realibus et personalibus. Dès lors, dans son système, la destinée d’une règle coutumière ne s’évalue donc qu’en fonction de la souveraineté que prétend exercer cette potestas sur le rapport de droit qui naît sur son territoire : s’il s’agit d’un droit réel immobilier, cette souveraineté se traduit par la compétence indiscutée de la lex rei sitae et, s’il s’agit d’un droit personnel (ou réel mobilier), par la compétence, de la lex domicilii. Les effets des statuts réels et personnels se trouvent donc déterminés par l’allégeance au juge compétent, mais aussi à l’autorité habilitée à en assurer la réalisation par voie d’exécution. Pour user du vocabulaire cher aux statutistes médiévaux, l’ambition de d’Argentré consiste, au fond, à rechercher l’unité des

potestates locales (statuendi, adjudicandi et cogendi) afin de garantir la pleine efficacité des actes et

décisions et une meilleure coordination entre ordres juridiques coutumiers strictement paritaires. Dans la mesure où il n’y a rien à attendre de l’autorité royale, seule vraiment supérieure, qui se garde, et doit se garder, d’empiéter sur ce domaine qui n’est pas le sien, c’est donc à la coutume elle-même, et à elle seule, de se défendre contre les intrusions non consenties : en cela, le statut réel prohibitif, dont divers exemples ont été rapportés plus haut, est le mécanisme d’opposition le plus approprié.

Aussi faut-il voir dans ce statut réel prohibitif une marque naturelle de la souveraineté territoriale, qui réaffirme ses droits exclusifs dès qu’un droit acquis à l’étranger, par le biais du statut du domicile ou de lieu de conclusion du contrat, entend produire ses effets à l’intérieur des frontières où s’exerce la puissance publique du lieu (§ 1.). En l’occurrence, l’intérêt menacé par ce droit étranger, et qui motive cette réaction de l’ordre public du for, est toujours le même, celui que,

291 Bertrand ANCEL, « Conflit de coutumes et théorie des statuts », La coutume dans tous ses états, op. cit., pp. 37-60, spéc.

pp. 46-52.

292 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, op. cit., n°9, p. 604 : « en effet, la force se confine dans les limites du pouvoir »,

assertion qui s’insère dans le cadre d’un paragraphe (§ 9) dans lequel il justifie l’application de la lex rei sitae aux matières réelles et mixtes et, par conséquent, l’application de plusieurs lois locales en cas de morcellement territorial.

déjà, Balde et Dumoulin entrevoyaient derrière le statut prohibitif modo italico : la conservation des biens dans les familles et, partant, de l’ordre social établi et garanti par les autorités du lieu. L’Ecole hollandaise du XVIIe siècle n’oubliera pas, non plus, les leçons de d’Argentré, en reprenant l’idée

qu’un statut territorial peut être, tout à la fois, le principe et le retour au principe. Si la pensée du juriste breton s’inscrit encore dans le contexte d’une province désormais inféodée au Royaume de France, les éléments d’un conflit de souverainetés entre Etats pleinement indépendants sont bien présents dans sa doctrine (§ 2.).

§ 1. Le fondement de la réalité/territorialité chez d’Argentré : le respect de la potestas de l’autorité locale.

L’articulation du principe territorial et de l’exception extraterritoriale dans le système prôné par Bertrand d’Argentré ne nécessitait pas, a priori, que s’établisse ainsi une hiérarchie entre les fondements des deux classes de statuts. Ceux-ci auraient très bien pu se concevoir d’une manière parfaitement différenciée et autonome, chacun ayant son domaine propre d’action.

D’une part, aux statuts personnels revient la fonction de prendre en charge la condition civile de la personne (exception faite des questions immobilières) et les meubles. Comme l’exprime d’Argentré dans son fameux paragraphe 4 sur « l’état des personnes » et dans le reste de sa dissertation, la loi et le juge du domicile sont les plus à mêmes d’assurer cette prise en charge, parce que la coutume du domicile exerce sa puissance souveraine sur son sujet :

4. Sur l’état des personnes également. Mais autre est la justification du droit des personnes, qui englobe aussi le droit des meubles car ceux-ci n’ont pas d’autre condition que la personne elle-même et donc trouvent leur droit au lieu du domicile – dès lors, si on s’enquiert du statut de la personne ou de sa capacité à passer les actes de la vie civile, le pouvoir d’en juger est sans réserve le pouvoir qui juge au domicile ; c’est-à-dire le pouvoir auquel la personne est soumise et qui, là-dessus, peut décider de telle manière que ce qu’il disposera, jugera, ordonnera du droit de la personne vaudra en quelque lieu que celle-ci se transporte, parce que la personne en est affectée…293

Le lien personnel qui s’est noué entre le sujet et le détenteur de la potestas ne s’arrête pas aux frontières du lieu du domicile, mais suit le sujet, partout et en tout lieu qu’il se déplace : pareil argument, tout droit issu de la vénérable personnalité des lois, assure la continuité (et l’unité) de son état civil et de sa condition juridique et favorise la sécurité juridique, y compris au cas où il serait attrait devant une juridiction étrangère. Si le lien est, avant tout personnel, le juge du domicile est, néanmoins, installé dans un seul territoire, ce qui garantit un ancrage à ce territoire et, donc, à la législation qui y a cours. La fixité du domicile présente l’avantage d’empêcher que ne se produisent les hypothèses de conflit mobile294.

D’autre part, aux statuts réels revient la tâche de disposer du régime des immeubles et de soumettre ceux-ci à une seule législation, celle de leur lieu de situation. Leur assiette même les fixe, à perpétuelle demeure, au sol, sans souffrir qu’ils puissent être soustraits du territoire dont ils

293 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°4, pp. 602-603 : voir, supra, note 274, p. 151.

294 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°12, p. 604 : « En effet, les personnes ne sont pas retenues par les

bornes des champs ni par l’enceinte des villes au point qu’elles ne puissent en sortir; elles ont une liberté illimitée de changer d’établissement, elles n’ont d’attache qu’à leur domicile. Ce domicile lui-même ne dure qu’aussi longtemps qu’il leur plait de le conserver. Mais lorsque quelqu’un a fixé son domicile en un certain lieu, tant qu’il ne l’aura pas transporté ailleurs, il ne lui suffira pas de s’en éloigner pour se soustraire aux lois qui y règnent. Il suit de là que la personne une fois affectée d’un état quelconque par la loi ou par le droit de son domicile, y demeure perpétuellement soumise et ne peut plus s’en dégager par de simples changements de résidence ». Voir, également, les § 13 et 49.

forment l’assise, le support des richesses et le support du pouvoir. L’intégrité du statut reconnu aux immeubles en suppose l’unicité de traitement et, donc, l’exclusivisme de la double compétence du droit en vigueur au situs rei. Pour assurer cette continuité, seuls les lex et forum rei sitae doivent se voir habilités à connaître des questions relatives aux immeubles, fussent-elles mélangées d’éléments personnels, comme l’est celle du statut mixte disposant de la capacité réelle295. Le lien invincible

entre l’immeuble et le territoire exige donc la réunion des trois potestates et l’exclusion de tout élément allogène, comme le reconnaît d’Argentré à plusieurs reprises dans sa dissertation :

2. Pour toute disposition touchant les immeubles, le lieu doit être retenu. S’il s’agit des choses du sol, c’est-à- dire des immeubles, appelés aussi d’héritage, et si on a en vue l’acquisition ou l’aliénation de ces choses alors que celles-ci sont situées en des lieux différents, la question de savoir quelle loi doit leur être appliquée est résolue par l’usage de la façon la plus certaine : la loi à suivre, dans chaque lieu, c’est la loi locale. Chaque lieu a ses lois, ses statuts, ses coutumes ; il faut les observer dans l’étendue du territoire et les observer seuls ; les immeubles ne sauraient être régis par une autre loi que la loi du territoire. Il en doit être ainsi dans les contrats, de même dans les testaments, de même dans tous les actes ; rien, quant aux immeubles, ne se peut décider en vertu des volontés privées, ni pareillement se juger contre la loi du lieu où ils sont situés. Dès lors, en effet, que, jadis, les divers peuples, princes, rois, dynastes et autres gens se constituèrent chacun leurs propres droits, lesquels, aujourd’hui, d’aucune manière dans l’intérêt public ne sauraient être changés, quoiqu’on ait ramené tout cela à l’unité [politique par la réunion avec la Couronne de France], il est nécessaire de maintenir ces droits qu’autrefois, on a établi sur les choses et qui sont acquis.296

33. Or, [les obligations légales] n'ont pas plus de force que celle qu'elles reçoivent de la loi, et la loi pas plus que celle qu'elle reçoit du législateur, et le législateur pas plus qu'il n'a de territoire. D'où il résulte que la disposition prise par le statut en matière réelle ne se projette pas plus loin que ne s'éloignent les frontières du territoire…297

Les deux fondements, personnels et réels, auraient très bien pu, disions-nous, cohabiter sans qu’il y ait lieu d’établir une hiérarchie entre eux. D’Argentré aurait pu garder la balance égale entre la souveraineté personnelle et la souveraineté territoriale. Mais il a fait le choix de faire de la réalité le principe et de la personnalité l’exception et, par conséquent, d’instituer un système où la réalité/territorialité est susceptible d’avoir toujours le dernier mot sur l’extraterritorialité que suppose la personnalité. C’est bien le rôle qu’est censé endosser le statut réel prohibitif, moteur d’une territorialité absolue qui refoule aux frontières toute loi étrangère prétendant s’appliquer à l’intérieur de ses limites. Alors qu’en matière pénale, le juriste breton a privilégié la personnalité sur la territorialité, en préconisant de maintenir la compétence du juge du domicile (et, donc sa souveraineté) sur ses ressortissants présents à l’étranger, et ce contre l’esprit même du temps, il bâtit son édifice théorique sur cette même idée de souveraineté, cette fois-ci, dans un sens

295 Sur la capacité réelle, voir, supra, pp. 158-159.

296 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°2, p. 602 : 2. In rebus soli, spectandus est locus ad omnes

dispositiones. Cum de rebus soli, id est immobilibus agitur, qu'ils appellent d’héritage, et diversa diversarum possessionum loca et situs proponuntur, in acquirendis, transferendis, aut afferendis dominiis, et in controversia, est quo iure regantur, certissima usu observatio еst id jus de pluribus spectari quod loci est, et suas cuique loco leges, statuta, et Consuetudines servandae, et qui cuique mores de rebus‚ territorio, et potestatis finibus sint recepti, sic ut de talibus nulla cujusquam potestas sit praeter territorii legem. Sic in contractibus, sic in testamentis, sic in commerciis omnibus, et locis conveniendi constitutum ; ne contra situs legem in immobilibus quidquam decerni possit privato consensu‚ et par est sic judicari. Nam cum olim varii poрuli‚ Principes, Reges, dynastae, gentes aliae sua sibi jura constituerint‚ quae nunc nullo modo salva rep. moueri possint rebus quantumlibet ad unum deductis, necesse еst‚ manere ea jura de rebus quae pridem obtinuere‚ et сопstituta sunt (Traduction Bertrand ANCEL précitée).

297 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°33, p. 611 : 33… Sed quae [legales obligationes] ejusmodi sunt non amplius

virium habent, quam quantum a lege accipiunt lex non amplius quam legislatore, legislator non plus quam quantum territorii habet. Unde fit ut dispositio de realibus a statuto inducta, non amplias excurrat, quam quantum sese terrirorii fines protendunt.

purement territorial. C’est bien l’indice que la primauté du statut réel immobilier doit se rechercher dans les motifs qui l’animent.

L’économie du système argentréen repose, davantage que sur la dichotomie entre statuts réels et statuts personnels, sur la primauté du statut réel, primauté que le statut réel prohibitif, d’intervention exceptionnelle mais radicale et absolue, est chargé de préserver contre les assauts d’une législation extérieure. Comment justifier ce choix qui perturbe, sciemment, l’équilibre supposé entre les différentes classes de statuts ? L’explication réside dans le fait que Bertrand d’Argentré a voulu, en élevant le statut réel au rang de principe insurpassable, assurer la « conservation des biens dans la famille », selon ses propres termes, et préserver l’ordre social qui en découle298. L’irruption de droits étrangers dans un ensemble légué par l’Histoire et par la

tradition aurait un effet dévastateur en créant de l’incertitude et de l’imprévisibilité juridiques : le rattachement à la Couronne, énonce le paragraphe 2, ne saurait constituer une atteinte à l’ordre établi dans le Duché, ni préjudicier aux intérêts des sujets bretons.

Pour se convaincre que telle est bien la motivation du juriste breton, il n’est que de lire la réfutation qu’il entreprend au sujet de ceux qui prétendent que les coutumes disposant de la succession testamentaire et de la quotité disponible sont personnels, ou, encore, l’attaque qu’il lance contre ceux qui, tels Bartole, réputeraient personnelle l’interdiction des libéralités entre époux :

14. Il est faux de prétendre que les statuts qui fixent le mode de disposer et la quotité des legs d'immeubles prononcent sur les personnes ; il y est en effet clairement question des choses, parce qu'il est manifeste qu'aucune coutume de cette sorte ne trouve son application au delà de son territoire, en serait-il autrement ailleurs où la cause de la prohibition des donations conjugales résiderait dans des considérations personnelles, telles que mentionnées aux l. prima et secunda D. de donationibus inter virum et uxorem ; mais à donations différentes, règles différentes, et les causes de prohiber ces libéralités relèvent dans les Coutumes plutôt des choses, du patrimoine familial, de la succession et de la perpétuation des familles qui sont plutôt matières réelles et, au contraire des règles du droit romain, ne touchent pas aux personnes299.

16. C'est pourquoi lorsqu'il est défendu au mari de rien donner ou léguer par testament à son épouse, ou de lui donner les conquêts faits le mariage durant, c'est une ineptie de Bartole de penser que ce statut est personnel et de conclure qu'il portera son effet hors le territoire, ce qui est la marque des statuts personnels, et d'inférer à tort de ce qu'il s'y mélange quelque considération du fait de la personne, que le statut affecte celle-ci alors que cette disposition prohibitive, plutôt que les personnes, concerne les choses, la transmission continue des immeubles dans la famille par voie de succession, et que relative, de manière circonscrite et limitée, à un acte particulier, elle n'affecte pas par là l'état universel de la personne ; dès lors, il est impossible que pareil statut étende son autorité hors du territoire : voyez Bartole, à la loi Cunctos populos, au titre De summa Trinitate du

298 André BONNICHON, « La notion de conflit de souverainetés dans la science des conflits de lois », Revue critique, 1949,

pp. 615-635 et 1950, pp. 12-32, spéc. p. 625 : « La véritable raison mise en avant par d’Argentré pour l’application de la loi de la situation des immeubles, est un principe de conservation sociale : dans une si grande variété de coutumes qu’on ne peut réduire à l’unité, il est juste d’appliquer celle du lieu ; agir autrement serait tout bouleverser ».

299 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°14, p. 605 : 14. … Qui donationibus modum, et legatis immobilium quotam

fingunt, non bene dicuntur de personis statuere, еst enim plane quaestio de rebus ; quod hinc apparet‚ quod nulla talis Consuetudo ultra terrirorii sui fines obtinet, et alibi aliud licet. Finis prohibendarum donationum conjugalium habet perfonales quasdam considerationes, quod lege prima et 2. D. de donar. int. vir. et uxor. indicant, et quia diversi generis donationibus non еaedem leges positae sunt‚ sed Consuetudinariae causae de prohibendis his sumuntur petius a rebus, gentili pecunia, successione et propagatione familiarum, quae reales potius sunt, non ut illae juris Romani a personis sumptae (traduction Bertrand ANCEL précitée).

Code300, où il écrit que chaque fois que le statut ne prohibe pas purement et simplement un acte,

mais le subordonne à l'exigence de certaine solennité, sa disposition ne peut prolonger son effet au-delà de son territoire, ce que l’Arétin répète dans ses Consilia 54 et 73, et moi je prétends que, chaque fois qu'il n'interdit pas simplement, mais pour une raison de fond ou par égard pour le droit réel d'autrui, au-delà des contractants, l'interdiction ne peut s'étendre hors le lieu du statut301.

Dans ce dernier exemple, l’interdiction faite au mari de faire une libéralité à son épouse est qualifiée, explicitement, de « disposition prohibitive », non seulement parce qu’elle restreint la capacité d’agir dans la vie civile de deux personnes, à raison d’une qualité précise (celle d’époux), mais aussi, et surtout, parce qu’elle « concerne les choses, la transmission continue des immeubles dans la famille par voie de succession ». A ce titre, elle est strictement territoriale et, en raison de la défense de l’intégrité des patrimoines familiaux, elle s’applique à chaque immeuble assis à l’intérieur des frontières du lieu, et ce quel que soit son propriétaire, ressortissant local ou étranger. Le mari étranger qui ne serait pas, par ailleurs, confronté à une pareille interdiction, du fait de son statut personnel ou de la situation de ses immeubles, devrait ainsi s’incliner devant l’interdiction qui lui est opposée vigoureusement par la législation du lieu « pour une raison de fond ». Cette conception du statut réel prohibitif rejoint celle que le statut prohibitif, odieux et favorable à la fois, manifestait chez Balde : celui de conserver « la dignité des familles qu’il appartient à l’Etat de maintenir », pour reprendre les termes mêmes du maître italien.

Le statut réel prohibitif se cache ainsi dans les replis du statut réel, catégorie que d’Argentré

Outline

Documents relatifs