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La fille est exclue par le statut, du moins au lieu du statut Encore soulevée par la plupart des statuts en Italie, la question de la fille mariée exclue de la succession paternelle par le statut porte au

CHAPITRE I L’ESPRIT D’INDEPENDANCE DE LA COUTUME PORTE A SON FAITE : LE STATUT REEL, PIERRE ANGULAIRE DU TERRITORIALISME DE

Section 1 ère La territorialité des statuts locaux : la domination du statut réel.

26. La fille est exclue par le statut, du moins au lieu du statut Encore soulevée par la plupart des statuts en Italie, la question de la fille mariée exclue de la succession paternelle par le statut porte au

mêmes hésitations. On se demande donc si, en vertu de nos lois, article 226 ci-après, il y a lieu de l'exclure ainsi des biens situés en Poitou où la coutume est différente et je sais que, là dessus, certains ici font mention des statuts réels et des statuts personnels et qu'ils veulent y voir un statut personnel de sorte qu'exclue en Bretagne, la fille le soit en tout lieu, en ce sens ; Francisco de RAMPONI, ancien jurisconsulte et Giovanni CALDERINI cons. 34, tit. de testam. JASON cons. 80, lib. 3, BARTOLE, d. l. cunctos populos, sequutinum 33. Mais cette opinion est évidemment fausse et tirée de fausses prémisses, comme nous l'avons déjà démontré, en effet ce statut n'est pas personnel et le serait-il, il n'affecte pas l'état universel de la personne. C'est pourquoi BALDE la critique, d.l. cunctos

populos, nu. 19 (= 89), et tient qu'exclue de cette manière par le statut local, la fille n'est pas exclue des biens situés là où le statut est différent…

27. Exclusion convenue exclut partout. DU MOULIN professa de même in casu cons. 55282, que la fille n'est pas exclue des biens situés en un autre lieu par la seule force du statut, parce qu'en vérité, celui-ci est réel et se renferme en son territoire ; cependant, par la force d'une simple renonciation faite au père dans le contrat de mariage, elle peut être exclue pour le tout parce qu'alors l'exclusion est

280 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°33, p. 611 : « Ce qui est prévu par convention ou pacte entre le

contractants n'est arrêté par aucune borne et suit la personne en quelque lieu que la personne aille et se transporte » (Quod conventione, aut pacto inter contrahentes convenit, nullis metis includitur, sed personam aeternum sequitur quocunque deferatur persona).

281 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°2, p. 602 : voir, infra, p. 162, et note 296.

282 En vérité, il s'agit de la fameuse consultation LIII de 1525 donnée dans l'affaire du don mutuel des époux de Ganay,

fondée sur le contrat et la convention personnelle, la renonciation serait-elle pure et simple et non expressément étendue à n'importe quels biens… Mais… il joint à bien d'autres échos… cet avis dont je pense qu'il faut le suivre : si, du moins, la renonciation concerne les biens, où qu'ils soient situés et si les statuts des lieux de situation ne s'y opposent pas.

28. La simple convention exclut seulement au lieu. Car une renonciation pure et simple s'entend selon l'usage du lieu, c'est-à-dire seulement des biens situés sous la coutume du lieu, et pas autrement que ce que la coutume du lieu autorise, en vertu de ce que nous disons plus loin…283

En partant du principe que ce statut est un statut réel, en s’autorisant de Balde, qui y voyait un statut prohibitif favorable et odieux dont les effets extraterritoriaux pouvaient être neutralisés par la disposition contraire d’un lieu, d’Argentré en conclut que son effet territorial laisse hors de sa portée les biens situés ailleurs, qui ne sont pas concernés par une disposition purement interne. Il s’intéresse, ensuite, au cas où l’exclusion n’est pas le fait du statut lui-même, mais de la renonciation volontaire, à laquelle la fille dotée s’est engagée, envers la succession de son père. Une telle manifestation de volonté peut-elle, contrairement au statut, s’étendre aux biens situés en un autre lieu ? Le jurisconsulte breton, à cette occasion, distingue :

1° Soit, conformément à ce qu’estimait Dumoulin, la renonciation est stipulée, expressément, s’étendre à tous les biens, où qu’ils soient situés, et, alors, la loi du contrat doit produire ses effets partout : la fille dotée est exclue pour le tout, puisqu’elle en a voulu qu’il en aille ainsi.

2° Soit, d’après d’Argentré seul, la renonciation est pure et simple, sans précision d’aucune sorte et il faut en déduire qu’elle n’a été envisagée que « selon l’usage du lieu » : la fille dotée n’est exclue de la succession que pour les seuls « biens situés sous la coutume du lieu »284.

Dans ce règlement, la restriction portée par le statut prohibitif s’insère sous la forme traditionnelle d’une clause de réserve générale tacitement consentie par les parties : « si les statuts des lieux de situation ne s'y opposent pas ». Si l’une des coutumes, où la convention est amenée à déployer ses effets, interdit pour tout ou partie pareille convention, l’acte n’aura aucun effet sur les biens situés qui sont situés dans son détroit, ou, si l’interdiction est partielle, n’aura d’effet que dans les limites qui sont prévues par la lex rei sitae285. Le statut prohibitif, chargé de défendre l’ordre

283 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°26-28, p. 608 : 26. Filia statuto excluditur loco dumtaxat statuti. Illa

quaestio de filia maritata, statuto a paterna hereditate exclusa, in eandem dubitatiotenem saepe adducitur, et de eo pleraque extant in Italia statuta. Quaesitum igitur, an sic exclusa ex nostro statuto art. 225 infra hoc titulo, a bonis quoque Pictavensibus, ubi diversa est Consuetudo, exclusa videretur ; et scio a quibusdam huc quoque statutorum realium et personalium mentionem illatam, ita ut qui personale esse volebant, undequaque excluderent eam, quae in Britannia exclusa esset ; in his fuere Francisc. de Rampon. vetus jurisconsultus, et Calder. Cons. 34 tit. de testam. Jas. Cons. 80. lib. III, Bart. d.l. Cunctos populos sequuti, num 33. Sed ea sententia perspicue falsa est, et a falsis assumptis, quod nos ante demonstravimus ; nec enim personale est, et, si esset, universalem statum personae non afficit. Quare et Bald. eam reprehendit d. l. Cunctos poulos. nu. 19 et tenet hoc modo a statuto locali exclusam, non excludi ab alio a bonis sibi sitis, ubi diversum sit statutum…

27. Exclusio contractu ubicumque excludit. Consuluit idem Molin. in casu. Cons. 55 ubi quidem statuti non excludi filiam in alio loco, cum ipsum reale vere sit, et suo territorio clausum : sed tamen vi renunciationis simplicis in contractu matrimonii factae patri, excludi posse, quia hoc casu exclusio fundatur in contractu et personali conventione, etiamsi renunciatio simpliciter concepta fit, non expresso a quibuscumque bonis. Sed et alia pleraque famigerata colligit… quam sententiam admitto hic quoque sequendam, si modo renunciatio contineat de bonis ubicumque sitis, et statuta locorum non repugnent.

28. Simplex conventio excludit dumtaxat a loco. Nam renunciatio simplex secundum loci lores facta intelligi deberet, id est, de bonis dumtaxat sub ea Consuetudine locis sitis, nec aliter quam loci Consuetudo inducit, per ea quae inf. dicemus... (Traduction Bertrand ANCEL précitée).

284 Comparer avec Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°37, p. 616.

285 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°45, pp. 618-619, donne un exemple du fonctionnement de ce

mécanisme prohibitif (nous soulignons) : « … celui du douaire en Anjou dont nous ne pensons pas qu’il doive être exclu par l’acceptation de la donation en Bretagne, parce qu’il est vrai de dire qu’en Anjou, la donation ne découle pas de celle qui prend source en Bretagne, serait-elle alimentée par le même mariage. Pas davantage l’acquisition du douaire en Bretagne n’est cause d’exclusion de la donation en Anjou, parce que la disposition du statut angevin ne peut faire entrer dans les masse et compte des biens ceux de Bretagne, auxquels le statut angevin ne peut être réputé avoir jamais

foncier du lieu de situation, étend ainsi ses exigences aussi bien à ses ressortissants qu’aux étrangers, qui, parties à un acte, devront se soumettre au régime de la loi du lieu de situation pour les biens qui s’y trouvent.

C. Le statut mixte disposant sur la capacité spéciale à disposer.

Conformément au principe érigé par le paragraphe 2 par d’Argentré et qui s’applique sans restriction aucune à tous les cas impliquant un immeuble286, la coutume disposant de la capacité

spéciale d’un mineur à effectuer des actes de disposition sur son patrimoine immobilier est entièrement soumise à la loi réelle, par l’intermédiation du statut mixte. Bien que la coutume qui fixe l’âge de la majorité et la capacité générale du sujet à accomplir tous les actes de la vie civile, soit parfaitement personnelle, il n’en va pas de même de la coutume qui interdit au mineur d’aliéner ses biens : la présomption de réalité joue à pleine. Ainsi, la majorité spéciale instituée pour autoriser une opération d’aliénation ou de transfert des droits réels qui porte sur un immeuble rentre dans l’orbite de celui-ci :

8. Examen et présentation des statuts réels… Bref, pour que les statuts soient personnels, il faut qu’ils disposent simplement de l’état de la personne, hors de tout mélange de choses immobilières et abstraction faite de toute matière réelle. Car, en effet, si tu disposes qu’est mineur celui qui est né il y a moins de vingt ans, le statut est personnel ; et si tu disposes que le mineur ne peut aliéner son immeuble dans le ressort du statut, celui-ci est mélangé de réel et de personnel287.

De même que Dumoulin, dans ses Conclusiones, professait que l’incapacité testamentaire active du mineur procédait d’un statut réel, qui avait en vue le sort et la protection des biens immobiliers, d’Argentré, qui le rejoint sur ce point, interprète la coutume sur la capacité ou l’incapacité comme une disposition strictement territoriale, qui étend ainsi son empire sur toutes les personnes protégées, sujettes de la coutume ou étrangères, qui y sont propriétaires de biens. La solution présente tous les mérites de la simplicité apparente : le territorialisme de d’Argentré fait ainsi l’économie d’une réflexion sur la conformité ou non avec un droit commun qui ne rentre jamais en considération dans sa doctrine (contrairement à Charles Dumoulin, plus attentif à la nature personnelle d’un tel statut) et se dispense ainsi de toute référence à un quelconque caractère odieux ou favorable. Le statut n’en demeure pas moins prohibitif, avec l’effet absolu qui lui est attaché.

Toutefois, il faut, à la vérité, que la théorie de d’Argentré se heurte, d’elle-même, aux limites qu’implique cette catégorie des statuts mixtes et qu’elle enferre le juriste breton dans une pensé. Pas plus ne doit être considérée l’unité du patrimoine, dès lors que la division des territoires sépare les lois de chacun d’eux qu’on ne saurait accumuler, puisque, par leurs statuts, elles varient au point que la disposition d’un lieu anéantirait celle d’un autre lieu. Et l’acceptation du douaire en Bretagne ne peut entamer la donation de biens angevins, parce que ce sont là des choses différentes. C’est qu’en matière de donation, l’excédent se retranche de celles qui doivent être réduites à la quotité, selon ce que dit Balde, l. si arrogator. C’est pourquoi, lorsqu’on donne le tiers de l’ensemble des biens qu’on possède en tout lieu, le donataire prendra le tiers, mais pas le tiers partout et en tout lieu car, si, en un lieu quelconque, la donation n’est permise que du quart, il est sûr qu’il n’y recevra pas le tiers en son entier, en raison du plafond fixé par le statut prohibitif, mais qu’ailleurs, il pourra compléter à concurrence de ce qui y est permis » (traduction Bertrand ANCEL précitée).Comparer eod. loc., n°42, in fine, p. 617.

286 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, eod. loc., n°2, p. 602 : voir, infra, p. 162 et note 296.

287 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, op. cit., n°8, p. 604 : Realium consideratio‚ et decriptio. Denique ut personalia sunt,

puta de personarum statu agi oportet, citra rerum immobilium mixturam, et abstracte ab omni materia reali. Nam si ita statuas : Minor еst quod intra viginti annos natus еst, personale est : si ita : Minor ne immobile alienet, quod intra statuti territorium sit ; mixtum sit de rе et реrsonа.

contradiction dont il ne parvient pas à se sortir. Le principe du paragraphe 8 est, en effet, démenti par les paragraphes 46 in fine et suivants :

46. …Il y a quelque temps, un personnage de l’aristocratie avait son domicile au Mans où, en dépit de la disposition expresse de la coutume, il est admis par interprétation qu’on reste mineur jusqu’à vingt-cinq ans. Cette personne désirait se défaire de quelques-uns des grands domaines qu’elle possédait en Bretagne : la coutume de Bretagne rend majeur dès vingt ans – mais cette solution est mal acceptée par les tribunaux étrangers. Certaines personnes étaient prêtes à acheter, pourvu que cela se fasse de manière licite et sans fraude. Je leur dis que, là-dessus, il fallait suivre l’opinion des anciens.288

Et d’Argentré de poursuivre son raisonnement en rappelant qu’en matière de « capacité de la personne considérée abstraitement et de son état universel, … la personne est façonnée par le statut de son domicile » (n°48). Il en déduit que c’est au lieu du domicile qu’il convient de se référer pour déterminer la capacité spéciale d’un sujet à s’engager dans des actes de dispositions – et, par exemple, à contracter – à propos de ses immeubles, en s’appuyant sur une consultation qu’il eut à donner par le passé :

49. C’est le domicile au temps du contrat qui est retenu. De quoi il ressort que, si le parisien veut contracter sur les immeubles qu’il a en Bretagne, il lui faut attendre vingt cinq ans parce qu’ainsi le veut la coutume de Paris, par laquelle sa capacité se règle, même si la Bretagne déclare ses habitants majeurs à vingt ans289.

Le contrat porte sur des immeubles situés dans le détroit de la coutume de Bretagne et, néanmoins, d’Argentré lui applique un statut personnel parisien, en faisant fi de toute considération pour l’objet du contrat, qui appelait à l’application du statut réel du lieu de situation à la question de la capacité du contractant290. Davantage encore que les contradictions de l’auteur, c’est plus

encore les limites et les ambiguïtés du statut mixte qui se font sentir par cet exemple. Dumoulin n’était pas exempt d’hésitations sur cette question de la capacité ou de l’incapacité, mais la règle qu’il avait posée à propos de l’interdiction faite à un mineur de passer un testament avait, pour elle, d’être claire et dûment justifiée, sans doute en concordance avec la pratique de l’époque. D’Argentré suit volontiers, sur ce point, le juriste parisien, mais ses contradictions soulignent bien la difficulté qu’il y a à interpréter les actes juridiques sous un angle purement statutiste.

288 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, op. cit., n°46, p. 619 : Nuper de optimatibus quidam in Cenomanis domicilium habebat ;

quo loco etsi contra expressam statuti dispolitionem, interpretatione minores faciunt usque ad annum vigesimumquintum. Sed is cum magnas possessiones haberet in Britannia, cupiebat ex his quisdam distrahere : Britannicum statutum majores ab anno vigesimo facit, etsi aegrè contra externos arbitres ea dispositio sustinererur. Erant qui vellent contrahere, si sine fraude sua licuisset. Dixi veterum extare ea de re sententias (traduction Bertrand ANCEL précitée).

289 Bertrand D’ARGENTRE, Commentarii, op. cit., n°49, p. 619 : 49. Domicilium quod fuit tempore contractus inspicitur.

Ех quo evenit, ut si civis Parisiensis de bonis quae in Britannia habet, contrahat, necesse habeat, annum xxv. aetatis expectare , quia tale est Parisiorum statutum a quo personae habilitas sреctanda еst, etiamsi Britannia incolas suos faciat majores ab anno vigesimo (traduction Bertrand ANCEL précitée).

290 L’incongruité a été relevée depuis longtemps, et par les meilleurs auteurs. Armand LAINE, Introduction, op. cit., t. I, pp.

330-332, faisant l’exégèse des Commentarii, pointe, à ce sujet, une contradiction entre le principe et le cas particulier qui est ici exposé. Eduard-Maurits MEIJERS, « L’histoire des principes fondamentaux », op. cit., p. 641, note 1, donne tort à Lainé, considérant que le présent statut ne concerne pas l’âge de la majorité et appartient à la catégorie des statuts mixtes. L’examen des textes conduit, cependant, à approuver le jugement porté par Lainé, puisque le présent exemple porte sur une question de majorité spéciale (la capacité réelle), dont d’Argentré aligne, en l’espèce, le régime sur celui de la majorité générale, et ce en contradiction avec ce que lui-même dit à propos de la capacité réelle au paragraphe 8. Voir, également, Bertrand ANCEL, Les conflits de qualification à l’épreuve de la donation entre époux, Thèse Paris II, 1977, p. 48.

Section 2nde. La souveraineté territoriale du statut réel et la dimension publiciste des

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