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Le second objectif de ce mémoire de maitrise était de reconstruire les étapes et de définir les déterminants du processus de construction d’une prise de décision favorable ou non à la vaccination. Pour cela, j’ai identifié les sources d’informations et les sources d’influences. J’ai distingué trois types de sources d’informations, les sources officielles (les informations qui émanent des autorités de santé publique), les sources populaires, (issues de la télévision, d’Internet, de la famille ou des amis), et enfin les sources issues de professionnels de la santé alternatifs tels que des chiropraticiens, ou bien des naturopathes. Là encore, j’ai pu constater que ces sources variaient selon les profils des participantes.

La quasi-totalité des répondantes favorables à la vaccination se sont informées auprès d’une source officielle et quelques-unes ont effectué un peu de recherche sur Internet. L’information de source officielle pouvait être obtenue dans un CLSC, auprès d’un professionnel de la santé (médecin, infirmière) ou encore via l’information disponible dans le guide Mieux Vivre avec son

enfant de 0 à 2 ans11.

Oui, dans le fond, juste avec les pamphlets qu’ils nous donnent au CLSC, ils sont vraiment très complets, ils nous expliquent le pourquoi du comment là, pis donc, ils nous expliquent les effets que ça peut avoir, etc… oui, je pense dire qu’on est bien informé (Répondante 47, favorable ayant accepté la vaccination).

Par contre, les autres participantes hésitantes face à la vaccination, consultent à la fois des sources officielles, des sources populaires et/ou des sources alternatives. En effet, les informations données par les professionnels de la santé ne suffisent pas toujours à convaincre la mère qui est désireuse d’obtenir un autre avis. Bien que certaines participantes aient confiance dans leur professionnel de la santé, pour d'autres, leur position n’est pas suffisamment nuancée.

Mais à ses premiers vaccins, à ma fille, j’en ai discuté avec l’infirmière. Mais c’est sûr que ils sont un peu endoctrinés j’dirais (rires), dans le sens que pour eux t’sais, si ils le donnent c’est qu’il savent que c’est bon de le donner pis[…], ils sont pas

11 Le guide Mieux vivre avec son enfant de 0 à 2 ans est un document remis gratuitement au début du suivi de

capables de nous donner le pour et le contre, ils vont juste nous donner le pour on dirait. Donc, c’est pour ça que c’est un peu…, pis c’est la même chose aussi au niveau de la pharmacienne là (Répondante 53, hésitante ayant choisi et/ou retardé la

vaccination).

Pour pallier à ce manque de nuances, certaines ont donc eu recours à d’autres sources d’information en consultant Internet ou en questionnant des professionnels de la santé alternative. Dans cet ordre d’idée, une participante est allée assister à une conférence organisée par une chiropraticienne alors que d’autres ont visionné des documentaires trouvés sur Internet.

Parce qu’hier j’ai écouté Silence on vaccine aussi, mais j’ai écouté la première partie et la vie a fait que j’ai pas eu le temps d’aller écouter les 4 autres parties, mais tu sais, j’en ai assez pour … ben premièrement, m’inquiéter et me questionner et donc, en ayant ça dans mon bagage, j’en avais parlé avec mon conjoint de qu’est- ce qu’on fait avec la vaccination pis pour une raison un peu inconnue, on a pas décidé de ne pas faire vacciner, on a juste décidé de reporter chacun des vaccins de 2 mois (Répondante 34, hésitante ayant choisi et/ou retardé la vaccination).

Toutefois, concernant ces informations, les participantes essaient de prendre du recul. L’une d’elle précise, à propos des informations retrouvées sur Internet, qu’il y a aussi un manque de nuances.

[…] faut faire attention par exemple, parce qu’il y a des gens qui écrivent des choses… qui sont plutôt des opinions que des faits là. Pis des deux côtés là, pour le pour et pour le contre, pis c’est vraiment difficile d’aller chercher une bonne information, je dirais (Répondante 55, défavorable ayant refusé la vaccination).

Il est également possible de noter que toutes les mères hésitantes et primipares ont accepté la vaccination selon le calendrier. Lors de la première entrevue, elles mentionnaient qu’elles avaient le désir de s’informer davantage sur la vaccination, toutefois, lors de la deuxième rencontre, elles m’informaient qu’elles avaient manqué de temps et que la vaccination à deux mois est arrivée rapidement.

[…]. Surtout que comme j’avais fait beaucoup de diabète de grossesse, pis que j’avais eu des problèmes de santé, j’ai plus focussé là-dessus, j’ai focussé sur moi, être en forme pour que le bébé soit bien, donc, j’étais pas dans le postnatal. Et puis je m’étais promis de le faire, pis de me documenter, j’avais lu un peu dans le Mieux être, y’a une petite section qui en parle, mais si peu […](rires), c’est qu’il y a tellement de choses à penser, pis un premier, c’est comme tu dis, peut-être qu’au troisième, on s’informe moins, j’pense que peut-être au deuxième, j’vais peut-être plus m’informer au sens où… il y a tellement d’informations qui arrivent en même

temps qu’on dirait qu’on fait juste focusser sur l’immédiat en essayant de faire ton mieux, là (Répondante 54, hésitante ayant accepté la vaccination).

Pour les participantes défavorables à la vaccination, les sources d’informations étaient multiples. Peu d’entre elles utilisaient les sources officielles, elles favorisaient les sources populaires telles qu’Internet ou bien les professionnels de la santé alternatifs. Toutefois, elles évoquaient également des regrets quant au manque de nuance d’un côté comme de l’autre et à la nature très dichotomique des positions. Une participante évoquait même la difficulté de remettre en cause la vaccination.

On dirait qu’on peut pas s’attaquer… t’sais, c’est comme une vache sacrée, qu’on peut pas s’attaquer à la vaccination, on peut pas remettre en question quoi que ce soit sur la vaccination et c’est ça qui est plate là, t’sais, y’a pas moyen d’avoir justement de l’information éclairée pis objective t’sais (Répondante 46, défavorable

ayant refusé la vaccination).

L’information obtenue par les différentes sources ne va pas nécessairement influencer directement la décision. Les entrevues ont permis d’approfondir ce sujet. Les sources d’influences sont diverses; il peut s’agir des professionnels de la santé, de l’entourage, mais aussi des expériences vécues et des émotions. J’ai pu observer certaines similitudes entre les participantes favorables et hésitantes ayant accepté la vaccination. Malgré le manque de nuance reproché aux professionnels de la santé, des participantes mentionnaient que ce sont ces derniers qui ont influencé leur choix. Il peut s’agir du médecin de famille, du pédiatre ou encore de la sage-femme. D’autres mères expliquaient que c’était leur conjoint qui avait eu le plus d’impact sur leur décision, car ce dernier accordait beaucoup d’importance aux vaccins. De plus, pour les participantes hésitantes ce sont des informations trouvées sur les sites gouvernementaux qui ont influencé la décision. Enfin, ce qui distingue les mères ayant accepté la vaccination selon le calendrier, c’est l’importance de la norme.

Et pourquoi avez-vous décidé de faire vacciner votre petite fille? Ben en fait,

c’est ça, plutôt la confiance que mon médecin avait en ces vaccins-là et j’imagine que c’est une personne qui est … ça fait quand même une vingtaine d’années qu’elle est médecin et puisqu’elle est médecin surtout pas nécessairement pédiatre, mais médecin pédiatre donc, elle a beaucoup de suivis avec les petits bébés et puis je pense qu’elle m’a inculqué sa confiance en ça puis j’me dis, ben si c’est préventif ben pourquoi pas (Répondante 27, hésitante ayant accepté la vaccination).

Ok, et est-ce que c’était important pour vous de faire vacciner votre enfant? …

en fait, je dirais que j’me suis plus fait convaincre que d’autre chose, fait qu’important … est-ce que c’est important pour moi, non… mais j’me suis fait convaincre que c’était un bonne chose, fait que je le fait. Et c’est qui, qui vous a

convaincue? […] La sage-femme qui me dit, ah, y’a rien à perdre, t’sais pourquoi

ne pas le donner parce que dans le fond, on a rien à perdre …[…] (Répondante 44,

favorable ayant retardé la vaccination).

Et est-ce que vous souvenez c’était lesquels? J’pense que c’était Santé canada, il

me semble.Ok Santé Canada. Et est-ce que ce que vous avez trouvé que c’était

intéressant? j’me souviens pu vraiment mais si j’ai changé, parce que j’étais très

sceptique là, pour le vaccin, donc, si j’ai changé d’idée, c’est que d’après moi, ça a dû me convaincre (Répondante 39, hésitante ayant accepté la vaccination).

Ok, pis le type d’information qui aurait le plus influencé ta décision, tu sais pas?La santé publique là, le discours officiel, du Québec là, en santé là, le ministère

de la Santé et des Services sociaux… (rires)…, […] (Répondante 41, hésitante ayant

accepté la vaccination).

L’importance de la norme pouvait s’exprimer de la façon suivante :

C’est parce que ça se faisait automatique et puis je me suis pas vraiment posé la question-là. À part sur les nouveaux, mais pas pour ceux qui sont les vaccins dits depuis toujours là, que j’ai moi-même reçus quand j’étais jeune là, ça va de soi là,

(Répondante 28, hésitante ayant accepté la vaccination).

Pour les participantes hésitantes ayant choisi et/ou retardé la vaccination, c’est l’influence des proches, notamment des amies qui retardent la vaccination. Pour quelques-unes, le choix et/ou le retard des vaccins était un compromis avec leur conjoint qui accordait de l’importance à la vaccination. Enfin pour les participantes défavorables ce sont soit les amies, soit les informations trouvées lors de recherches qui sont à l’origine de leur refus.

Je dirais plus ou moins. Ma décision se prend en grosse partie parce que mon conjoint y tient pis je veux le respecter dans ça là. Parce que si c’était de moi, je le sais pas si je ferais vacciner mon enfant là. C’est sûr que je pousserais plus mes recherches avant de prendre la décision. Mais, justement comme je disais, mon conjoint y tient pis j’veux le respecter là-dans là même si moi je doute là. Fait que c’est ça (Répondante 53, hésitante ayant choisi et/ou retardé la vaccination).

[…] Ben tout ça a commencé avec mon amie qui habite à XXX qui a dit qu’elle, elle retardait chacun des vaccins pis que celui du RRO, j’pense qu’elle le donnait à 2 ans ou elle le donnait pas du tout. Pis nous, on a pris notre décision après ça. Fait que

c’est quelqu’un qui nous l’a dit, c’est ce qui a le plus influencé notre décision. Après ça, notre décision était prise pis on lisait pis on regardait ce qui convenait avec notre décision (Répondante 34, hésitante ayant choisi et/ou retardé la vaccination). Ben j’ai commencé à faire des recherches, j’ai pris rendez-vous, pis après ça, j’me suis dit, minutes là t’sais, quand tu t’es lancé dans la maternité, t’as commencé à t’informer pour plein de sujets pis là, pourquoi tu feras pas la même chose t’sais pour la vaccination. Fait que là c’est ça, j’avais commencé à m’informer, j’avais pris le rendez-vous pis c’est comme une semaine plus tard pis là, on s’est dit bon, on va commencer à faire des recherches pis là, on avait pas encore décidé, mais on s’est dit, on va pas aller la faire vacciner parce que t’sais, on avait pas assez fait le tour de toutes les informations pour prendre une décision. Mais on avait pas dit qu’on ferait pas vacciner, c’est juste qu’on s’était dit on va reporter. […] mais on a fini par prendre une décision […] t’sais, c’est ça, c’est à force de lire des choses ici et là … (Répondante 46, défavorable ayant refusé la vaccination).

Peu de participantes affirmaient avoir été influencées par des membres de leur famille d’autant plus que certains d’entre eux n’étaient pas en accord avec la décision des parents.

Et est-ce qu’elle(mère de la participante) vous a fait des remarques parce que vous êtes allée faire vacciner la petite? «Ah, t’es allée la

faire souffrir, t’es allée la rendre malade». J’y ai dit, j’ai pas été la rendre malade pantoute (Répondante 74, hésitante ayant accepté la

vaccination).