La normalité de la vaccination

Lors des entrevues, toutes les participantes favorables et celles qui étaient hésitantes ayant accepté la vaccination évoquaient qu’il était normal de faire vacciner son enfant. Par contre, parmi celles ayant choisi et/ou retardé la vaccination, une seule a évoqué cette normalité. La normalité de faire vacciner pouvait s’exprimer de différentes manières.

L’inscription de la vaccination dans une continuité, ou la considérer comme «automatique», exprimait la norme de faire vacciner :

Parce que ça a toujours été fait, parce que je le suis moi-même, parce que mes deux autres enfants le sont, parce que ça fait partie de notre réalité je pense (Répondante

28, hésitante ayant accepté la vaccination).

Ben j’te dirais que ça a continué, mes parents ont été vaccinés, mes beaux-parents ont été vaccinés, mon chum… donc ça allait de soi là … j’voulais moi-même faire vacciner mes enfants (Répondante 29, hésitante ayant choisi et/ou retardé la

vaccination).

Pour d’autres, c’est l’importance de suivre les recommandations qui justifie la norme de faire vacciner.

[…]Je suis aux faits quand même de ce qui est recommandé là et c’est peut-être pour moi d’emblée, c’était certain que j’allais faire vacciner selon le calendrier de vaccination qui est recommandée là, c’est parce que je sais que c’est important pour la prévention de certaines maladies qui pourraient avoir des conséquences graves […] (Répondante 32, favorable ayant accepté la vaccination).

Enfin, certaines participantes précisaient qu’elles n’avaient aucune raison valable de refuser la vaccination et par conséquent qu’il était normal de l’accepter.

Mais je l’ai surtout fait parce qu’on m’a dit ben faut le faire. Pis que mes lectures ne me donnaient pas nécessairement de raisons si valables que ça de ne pas le faire.

(Répondante 54, hésitante ayant accepté la vaccination).

La vaccination apparaît pour une participante comme obligatoire, ce qui souligne l’importance de la norme.

Euh… ben moi, je les ai tous donnés là, ceux obligatoires là, (Répondante 50,

hésitante ayant accepté la vaccination).

Aucune participante défavorable n’a évoqué le fait qu’il était normal de se faire vacciner, par contre, elles ont toutes mentionné qu’elles avaient été jugées à un moment ou un autre, car leur enfant n’était pas vacciné. Ainsi, pour certaines le refus des vaccins peut, dans certains cas, être une position difficile à assumer. Une participante expliquait qu’elle avait été jugée par son médecin, car elle avait refusé la vaccination :

ben j’étais allée avec elle au début avant d’aller voir mon pédiatre, pis c’était la première fois que ma fille voyait un médecin parce que c’est ça, ils sont suivis par la sage-femme comme les autres jusqu’à vers 6-7 semaines donc vers 7 mois, 7 ou 8 mois, j’étais allée voir mon médecin de famille avec elle pour faire un suivi pis je lui avais dit que c’était la première fois qu’elle allait voir un médecin fait que la réaction, ça avait été «ben t’as fait pas vacciner!!!» C’était épouvantable t’sais, pis là, elle s’était mise à me dire «mais tu sais que le lien avec l’autisme, c’est complètement démenti» pis là… t’sais, elle me prenait vraiment pour une cruche là, fait que, c’est ça mais après ça, quand je me suis mise un peu à dialoguer avec elle et à y sortir un peu mon raisonnement, ben elle ne savait pu trop quoi dire, fait que j’ai eu l’impression qu’elle n’était pas plus renseignée que ça… mais oui, elle avait vraiment un jugement conservateur là, pis on est pas retourné la voir (Répondante

46, défavorable ayant refusé la vaccination).

Cette expérience souligne l’importance de la norme concernant la vaccination et que les professionnels de la santé ne sont pas confortables avec le choix de refuser la vaccination. De ce fait, il peut parfois être difficile de s’inscrire à contre-courant.

Certaines des participantes défavorables ou bien hésitantes ayant retardé et/ou choisi la vaccination remettaient en question ce caractère normatif en étant critique par rapport aux

parents qui sont favorables. Selon certaines, si la majorité acceptent la vaccination cela révèle un manque d’information et qu’elles agissent par conformité sociale, ce qu’elles déplorent.

Puis euh, pourquoi la majorité des parents, selon vous, accepte la vaccination?

[…]En fait, honnêtement, j’pense qu’il y a des gens qui savent pas très bien , contre quoi ils vaccinent mais qui font simplement confiance à leur médecin, aux recommandations au CLSC et tout ça. Tout le monde n’a pas nécessairement une réflexion critique par rapport à ça (Répondante 33, hésitante ayant choisi et ou

retardé la vaccination)

[…] c’est ça, moi, je pense que mon souhait, ce serait que les gens soient plus informés,… que ce ne soit pas, comment je dirais ça, d’emblée… normal… t’sais, que ce soit comme mettons les cours prénataux… les faites-vous? non… t’sais, c’est pas nécessairement tout le monde qui va le faire tandis que la vaccination, je trouve que c’est trop pris d’emblée comme oui, on le fait, parce que ça doit être une bonne décision. Je trouve que les gens n’ont pas assez la chance de pouvoir se questionner là-dessus et d’avoir assez d’information... ben d’avoir assez d’information, c’est comme je disais, c’est que c’est difficile parce que c’est jamais clair sur ce qu’on peut lire pis ce qu’on peut trouver.[…] Ok, est-ce que vous pensez que si… que les

parents en fait, ou même la population en général, fait trop confiance, enfin, facilement confiance? Euh, oui, je pense que oui, ils ne posent pas assez de

questions pis ils s’informent pas assez (Répondante 43, défavorable ayant refusé la

vaccination)