• Aucun résultat trouvé

4. La province de Champassak : entre intégration et transformation

4.1 Situation socio-économique de la province de Champassak

Selon les données recueillies auprès du bureau provincial de la planification et de l’investissement, la pauvreté sur l’ensemble de la province de Champassak a connu un recul significatif entre 2000 et 2015. En 2015, on y retrouvait que 860 ménages, répartis dans 73 villages, en situation de pauvreté jugée extrême.

La province bénéficie de plusieurs investissements directs étrangers. À titre comparatif, dans la décennie 1980, une seule compagnie investissait dans la province (caféiculture). En 2015, c’était 365 projets qui étaient en cours sur le territoire. Les investissements représentent 11 milliards de kips24, ce montant incluant les investissements domestiques. Au total, dix-neuf pays sont impliqués. Parmi les plus importants investisseurs, la Thaïlande et le Vietnam se démarquent, particulièrement dans les domaines agricoles (caféiculture, riziculture et maraîchage) et hydroélectriques. Les priorités d’investissement s’articulent autour du

23 Le portrait présenté dans cette section s’appuie sur les données recueillies lors de l’enquête-terrain, auprès des autorités gouvernementales à l’été 2015.

24 Basé sur un taux de change équivalent à 1 USD$ = 8 155 Kips, le montant représente approximativement 1 322 500 USD$.

79

développement, de la fertilité des sols, les industries, dont l’hydroélectricité et l’exploitation minière. Une mine d’exploitation de bauxite est présente à Paksong. D’une profondeur de 700 mètres, elle permet d’extraire approximativement un million de tonnes de bauxite annuellement. À partir de cette matière, c’est un peu plus de 5 000 tonnes d’aluminium qui sont produites.

L’agriculture représente 27% du PIB national et elle se démarque dans différents secteurs. Au sein de la province de Champassak, l’agriculture joue un grand rôle dans son développement. À titre d’exemple, le riz y domine, avec un peu plus de 50 000 tonnes produites annuellement. L’aire de production rizicole correspond à 113 000 hectares à travers la province. Les autres cultures dominantes sont le café, l’hévéa, le maraîchage et l’élevage de petit bétail. Le caoutchouc et le riz sont principalement exportés vers la Thaïlande et le Vietnam. Une pratique d’agriculture contractuelle a aussi lieu entre la Thaïlande et des agriculteurs de la province. Plusieurs contrats ont été signés à partir de 2005, principalement pour l’agriculture maraîchère. Au total, les contrats concernent quinze variétés de fruits, légumes et céréales dont les bananes, le manioc, les fèves et le maïs.

Plusieurs projets hydroélectriques ont vu le jour dans la province. Certains sont en planification et en cours de réalisation. D’ici 2020, le gouvernement planifie en avoir complété quatorze, ce qui représenterait 900 mégawatts d’énergie. Les districts de Kong, Paksong, Bachiang Chaleunsouk et Pathoumphone comptent de nouveaux barrages, qui ont terminé tôt en 2015. Une enquête de réalisation était en cours en 2015 dans le village de Houy Moud, situé dans le district de Bachiang Chaleunsouk. Lorsque des projets hydroélectriques sont mis en œuvre, les compagnies doivent mener une analyse d’impacts qui permet de déterminer quelles seront les conséquences de la construction d’une telle infrastructure. Le gouvernement n’obtient pas nécessairement tous les résultats de l’enquête. Les compagnies soumettent plutôt un rapport général au ministère des Terres et des Ressources naturelles, situé à Vientiane. Advenant qu’un village doive être déplacé, le gouvernement a convenu avec les compagnies que ce doit être ces dernières qui endossent les coûts relatifs au déplacement. Les projets hydroélectriques permettent aux ménages d’avoir accès à l’électricité. En 2015, 90% des ménages de la province avaient accès à l’électricité. Le gouvernement vise un accès complet pour 2020.

80

La province comptait, en 2015, quelque 750 000 personnes en âge de travailler (population active entre 14 et 60 ans). Sur ce nombre, 410 000 personnes étaient en emploi, ce qui représente 58% de la population active. L’échelle salariale minimale se situe entre 646 000 et 900 000 kips25 par mois. Il n’y a pas d’échelle salariale établie pour le travail quotidien, cependant, le gouvernement évalue le salaire minimum à 30 000 kips26 par jour.

Selon la législation en vigueur, les compagnies étrangères doivent respecter un taux minimum de 90% de main-d’œuvre laotienne. Cette mesure est jugée nécessaire par les autorités puisque les compagnies étrangères feraient venir de la main-d’œuvre de leurs pays d’origine respectifs. Certains investisseurs voient cette mesure comme étant restrictive puisqu’ils ont besoin de main-d’œuvre qualifiée, particulièrement dans le secteur industriel. Dans le domaine de la construction, où les investissements étrangers sont nombreux, il demeure très difficile d’effectuer un contrôle sur la provenance des employés. Certaines compagnies utilisent de fausses listes d’employés afin de recourir aux travailleurs illégaux. Cette pratique se répercute donc sur la disponibilité des emplois pour les Laotiens. Afin de répondre au besoin de main-d’œuvre qualifiée, le gouvernement promeut les « Labour Training Center », des écoles vocationnelles ou de formation, qui permettent l’acquisition de compétences spécifiques, en réponse aux besoins de l’industrie. À cet égard, le gouvernement laotien a établi des cibles concernant la réduction du décrochage scolaire et l’augmentation de la qualification de la population, dans l’idée de répondre aux objectifs du millénaire de l’ONU. Dans cette optique, la province de Champassak vise à augmenter considérablement la scolarité primaire et secondaire de sa population. En 2015, 25% de la population détenait un tel niveau de scolarisation. Le gouvernement provincial souhaite augmenter ce taux à 95%.

Comme les emplois se font rares, certains travailleurs décident de migrer vers la Thaïlande. Les salaires sont connus pour y être intéressants. Toutefois, ce type de pratique est risqué puisque les lois ne sont pas toujours respectées, particulièrement envers la main-d’œuvre étrangère. Aussi, certains s’y déplacent et n’arrivent pas à trouver d’emploi. Les personnes qui désirent aller travailler en Thaïlande doivent payer un certain montant avant de s’y rendre.

25 Cela représente approximativement entre 79 et 110 USD$ par mois (taux de change de juillet 2015) 26 Salaire minimum équivalent à 3,70 USD$ par jour (taux de change de juillet 2015)

81

Le responsable de l’État rencontré dans la province de Champassak s’est avéré plutôt avare de commentaires à l’égard de ce type de migration.

L’étude de cas des districts de Bachiang Chaleunsouk et Pathoumphone nous permet de mieux comprendre les rouages de l’intégration socioéconomique à une échelle plus locale. Ces deux districts, tous deux situés en marge et aux piedmonts des montagnes et du plateau des Bolovens. Bachiang Chaleunsouk se situe davantage en zone montagneuse, alors que Pathoumphone, lui, est situé zone basse et en bordure du fleuve Mékong qui sert de limite entre plusieurs districts de la province.

Dans la partie qui suit, sera présenté un portrait général de chacun des districts à l’étude. Les données et informations qui y sont présentées proviennent principalement des entrevues qui ont été menées lors de l’enquête-terrain, à l’été 2015, auprès des instances gouvernementales. Une liste des personnes interviewées se retrouve en annexe (Annexe 4).