• Aucun résultat trouvé

Dans le secteur des transports, l’évaluation socio-économique est souvent assimilée aux seules obligations qui concernent les grands projets

L’évaluation socio-économique dans les processus décisionnels

D’INTERVENIR SUFFISAMMENT TOT POUR POUVOIR ECLAIRER LA DECISION PUBLIQUE

2. En France, l’évaluation socio-économique doit s’articuler avec les démarches préexistantes d’évaluation préalable des projets

2.2. La plupart des secteurs qui investissent disposent déjà de procédures d’évaluation et de décision qui leur sont propres, rarement

2.2.1. Dans le secteur des transports, l’évaluation socio-économique est souvent assimilée aux seules obligations qui concernent les grands projets

d’infrastructure, sans procédure décisionnelle uniforme les concernant

Le secteur des transports constitue l’un des principaux domaines d’application des obligations prévues par l’article 17 de la LPFP et par le décret n° 2013-1211 :

12 des 42 contre-expertises réalisées entre juillet 2013 et novembre 2016 sont dans ce secteur (10 relatives à des projets ferroviaires et 2 relatives à des projets routiers) ;

dans l’inventaire 2016, 115 projets de transport ont été déclarés, soit 20 % de l’ensemble des projets recensés.

2.2.1.1. Les projets d’infrastructures de transports sont encadrés par de nombreuses dispositions qui prévoient leur évaluation jusqu’à la phase d’enquête publique, et qui fondent l’évaluation socio-économique

Dans le secteur des transports, l’obligation d’évaluer les grands projets d’infrastructures sur la base de critères homogènes a été introduite par la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (LOTI) et précisée par un décret (cf. encadré 3). Pour appliquer concrètement ces dispositions, le ministère des transports diffuse à ses services un référentiel, destiné à normer les méthodes et valeurs des porteurs de projets pour réaliser leurs évaluations – la dernière est la note technique du 27 juin 2014 (dite « instruction Royal »).

- 15 -

Annexe I 16

Encadré 3 : Cadre juridique applicable aux évaluations des grands projets de transport L’article 14 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (LOTI) dispose que « les choix relatifs aux infrastructures, équipements et matériels de transport et donnant lieu à financement public, en totalité ou partiellement, sont fondés sur l’efficacité économique et sociale de l’opération. Ils tiennent compte des besoins des usagers, des impératifs de sécurité, des objectifs du plan de la Nation et de la politique d’aménagement du territoire, des nécessités de la défense, de l’évolution prévisible des flux de transport nationaux et internationaux, du coût financier et, plus généralement, des coûts économiques réels et des coûts sociaux. »

La suite de cet article est désormais codifiée aux articles L.1511-2 et suivants du code des transports :

article L. 1511-2 relatif à l’homogénéité des critères d’évaluation : « Les grands projets

d'infrastructures et les grands choix technologiques sont évalués sur la base de critères homogènes intégrant les impacts des effets externes des transports sur, notamment, l'environnement, la sécurité et la santé et permettant des comparaisons à l'intérieur d'un même mode de transport ainsi qu'entre les modes ou les combinaisons de modes de transport » ;

article L. 1511-3 relatif à la publicité des évaluations : « [Ces] évaluations des grands projets d'infrastructures et des grands choix technologiques sont rendues publiques avant l'adoption définitive des projets concernés dans les conditions fixées à l’article 1511-4 » (c’est-à-dire la procédure d’enquête publique) ;

article L. 1511-6 relatif aux bilans ex post (dits « bilans LOTI ») : « Lorsque les opérations

mentionnées à l'article L. 1511-2 sont réalisées avec le concours de financements publics, un bilan des résultats économiques et sociaux est établi au plus tard cinq ans après leur mise en service. Ce bilan est rendu public. »

Ces dispositions sont précisées par le décret n°84-617 du 17 juillet 1984 relatif à l'application de l'article 14 de la loi LOTI (désormais reprises par le décret n° 2014-530 du 22 mai 2014 relatif à certaines dispositions de la partie réglementaire du code des transports) :

articles R. 1511-1 à 3 relatifs au périmètre d’application de l’obligation d’évaluation (les projets considérés comme des « grands projets d’infrastructure de transports » et l’appréciation globale, et non par tranches successives, d’un grand projet) ;

articles R. 1511-4 à 6 relatifs au contenu de l’évaluation (analyse des coûts de construction, les conditions de financement, les motifs pour lesquels le projet a été retenu, l’analyse des incidents du projet sur les autres équipements de transport, l’estimation du taux de rentabilité pour la collectivité, l’évaluation des variantes…) ;

articles R. 1511-7 et 8 sur la responsabilité de l’évaluation ex ante, qui repose sur le maître

d’ouvrage (y compris financièrement), de même que pour le bilan ex post ;

articles R. 1511-8 à 10 relatifs au bilan LOTI, notamment à sa soumission à l’avis du conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et à sa mise à disposition du public.

Source : Mission d’après loi LOTI, code des transports et décrets d’application.

L’exercice d’évaluation socio-économique est clairement inséré dans le processus d’instruction et de décision du projet d’infrastructure, puisqu’il est élaboré entre la phase de débat public et avant l’enquête publique préalable à la déclaration d’utilité publique (DUP – cf. graphique 5).

Graphique 5 : Illustration schématique du processus décisionnel en matière de projets d’infrastructures nouvelles de transport

Source : Mission.

- 16 -

Annexe I 17

Dans le secteur des transports, l’évaluation socio-économique s’ajoute à un nombre important d’autres évaluations préalables, telles que l’évaluation environnementale (qui fait l’objet d’un avis de l’Autorité environnementale36) ou le rapport de la commission d’enquête publique.

2.2.1.2. Les procédures d’élaboration et de décision des projets de transport varient en fonction des types de transport et des enjeux financiers concernés, ce qui rend difficile l’affirmation de l’évaluation socio-économique

Malgré quelques étapes communes à l’ensemble des projets de transport, force est également de souligner :

la diversité des projets de mobilité concernés par ces évaluations, chacun avec ses spécificités, tant méthodologiques que décisionnelles : les projets ferroviaires, les projets interurbains, les projets routiers et autoroutiers, les projets de voies fluviales, les projets portuaires, etc. ;

le poids des décisions au plus haut niveau de l’État pour certains projets dont les enjeux financiers, économiques et sociaux sont particulièrement importants ;

l’absence de processus décisionnel clair des décisions d’investissements publics dans le secteur. Ainsi :

 le rapport thématique de la Cour des comptes sur « la grande vitesse ferroviaire : un modèle porté au-delà de sa pertinence » (23 octobre 2014) dénonçait les « multiples

« petits pas » qui ancrent le projet » (annonce du projet, concertation avec le public, décisions ministérielles, enquête publique, DUP…) et qui confirment la décision de réalisation d’un projet bien avant sa réalisation effective, sachant que la définition du financement de l’infrastructure ne suffit pas à constituer un critère de décision ;

 le rapport d’information sénatorial sur le financement des infrastructures de transport (28 septembre 2016) souligne « des carences en matière de programmation des infrastructures de transport susceptibles d’entraîner de graves problèmes de soutenabilité financière » et déplore, qu’avec la fin des plans quinquennaux, « en dehors des périodes d’élaboration des schémas d’infrastructure et de négociation des contrats de plan État-régions (CPER), il n’existe plus en France, de structure permanente de concertation et de programmation des infrastructures de transport ».

Ce dernier rapport souligne également le biais d’optimisme de nombreuses évaluations socio-économiques réalisées par les maîtres d’ouvrage dans le domaine des infrastructures de transport, reconnaît l’utilité des contre-expertises du CGI, et propose même de les étendre aux projets antérieurs à 2014. Enfin, il demande une sélection accrue des prochains projets ferroviaires, « selon des critères de rentabilité socio-économique très exigeants, même si cela implique de renoncer à des projets déjà lancés. »

36 Conformément aux exigences européennes et nationales, une évaluation des incidences environnementales des projets, plans/programmes et documents d’urbanisme est obligatoire et cette évaluation est soumise pour avis à une autorité compétente – en France, l’autorité environnementale (Ae). L’obligation et le contenu de l’étude d’impact sont précisées par les articles L.122-3 et R. 122-5 du code de l’environnement. Comme en matière socio-économique, l’évaluation environnementale doit être adaptée et proportionnée aux enjeux du projet.

- 17 -

Annexe I 18

2.2.1.3. Les autres investissements dans le secteur des transports, notamment en entretien-renouvellement, ne font pas l’objet d’évaluation socio-économique, ce qui apparaît regrettable à la mission37

L’instruction Royal élargissait son périmètre d’application, au-delà des projets d’infrastructure, aux « projets de service », qui auraient pu couvrir des investissements visant à répondre à un trafic identifié dans un territoire (par exemple via les trains d’équilibre du territoire ou les autocars). Cependant, en dehors du champ réglementaire qui concerne le développement d’infrastructures nouvelles, aucune autre évaluation socio-économique de projets d’investissements dans le secteur des transports n’a été portée à la connaissance de la mission.

Pour autant, nombre de dépenses d’investissement dans le secteur des transports ne sont pas dans le champ réglementaire susmentionné, mais dans celui de l’obligation prévu par la LPFP pour 2012-2017, à commencer par les dépenses d’entretien et de renouvellementdu réseau - ferroviaire notamment, mais également routier. Selon certains interlocuteurs de la mission, une évaluation socio-économique de ces investissements ne serait pas pertinente en ce que :

les dépenses d’entretien-renouvellement ne sont pas, en principe, des dépenses soumises à un arbitrage d’opportunité ;

le calcul socio-économique se concentre sur l’estimation des gains de temps liés aux nouvelles infrastructures et ne pourrait pas mesurer les externalités liées aux dépenses d’entretien (sauf à ce qu’elles modifient les fonctionnalités de l’infrastructure).

Or, selon la mission, une telle évaluation apparaît d’autant plus nécessaire que ces investissements représentent des enjeux financiers très significatifs, tant et si bien qu’ils dépassent certainement les disponibilités financières pour les assurer et qu’ils exigent une priorisation des projets d’entretien et de renouvellement. Une telle évaluation socio-économique ne devrait pas être réduite au calcul de la VAN-SE, mais a minima présenter l’ensemble des projets selon les avantages et inconvénients pour chaque catégorie d’acteurs. La cible serait d’élaborer, dans un premier temps, une méthodologie simplifiée d’évaluation socio-économique et de priorisation de ces investissements38.

Une question similaire – quoique différente – se pose pour les dépenses d’investissement en équipement, notamment en matériel roulant. En première approche, ces acquisitions sont réalisées dans des conditions normales de marché, par un établissement soumis à la concurrence en fonction d’enjeux de rentabilité commerciale et financière. Or le décret exclut explicitement les « investissements réalisés dans des conditions normales de marché, dans le cadre d’activités concurrentielles exercées à titre principal ». Dès lors que ces conditions sont bien vérifiées, il apparaît normal que la rentabilité socio-économique ne soit pas exigée (l’enjeu n’est pas celui de l’utilité de la société, mais de l’intérêt de l’entité qui acquiert le matériel). En revanche, si l’acquisition était réalisée dans des conditions différentes avec un financement de l’État et/ou de ses établissements publics, la question apparaîtrait légitime.

2.2.2. Dans le secteur de la santé, l’évaluation socio-économique s’insère dans le suivi du

Outline

Documents relatifs