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Les objectifs et défis de l’évaluation socio-économique sont comparables, à plusieurs égards, à ceux des études d’impact

L’évaluation socio-économique dans les processus décisionnels

D’INTERVENIR SUFFISAMMENT TOT POUR POUVOIR ECLAIRER LA DECISION PUBLIQUE

3. Pour s’affirmer, l’évaluation socio-économique a besoin d’intervenir suffisamment tôt pour pouvoir éclairer la décision publique

3.1. Les objectifs et défis de l’évaluation socio-économique sont comparables, à plusieurs égards, à ceux des études d’impact

3.1.1. Les obligations d’évaluation préalable des conséquences de projets de textes ont renforcées au cours des dernières années

Le développement des obligations d’évaluation préalable des effets d’un projet de texte fait suite aux constats répétés d’inflation normative77, dans un souci de stabilité du droit et de maîtrise des charges pesant sur les entreprises.

Ainsi :

l’article 8 de la loi organique du 15 avril 200978 a créé une obligation constitutionnelle79 d’étude d’impact pour les projets de loi (PJL), cette étude d'impact visant à « défini[r]

les objectifs poursuivis par le projet de loi, recense[r] les options possibles en dehors de l'intervention de règles de droit nouvelles et expose[r] les motifs du recours à une nouvelle législation ». Plus spécifiquement encore, elle doit « expose[r] avec précision : […]

l'évaluation des conséquences économiques, financières, sociales et environnementales, ainsi

77 Notamment dans les études annuelles du Conseil d’État, en 1991 (« De la sécurité numérique »), en 2006 (« Sécurité juridique et complexité du droit ») et en 2016 (« Simplification et qualité du droit »).

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Annexe I 36

que des coûts et bénéfices financiers attendus des dispositions envisagées pour chaque catégorie d'administrations publiques et de personnes physiques et morales intéressées » ;

entre 2011 et 201580, plusieurs normes ont prévu une évaluation préalable des projets de textes réglementaires concernant les collectivités territoriales, les entreprises, les particuliers, les associations ainsi que les services déconcentrés de l’État.

3.1.2. Les marges de progrès des études d’impact sont étroitement liées à leur place dans le processus décisionnel, renforcée par les mesures de transparence à leur endroit Plusieurs acteurs sont impliqués dans le processus d’évaluation préalable des projets de texte :

le service chargé de l’élaboration du projet lui-même prépare la fiche ou l’étude d’impact, en concertation avec les autres ministères concernés ;

à l’issue d’un processus itératif entre ce service et le secrétariat général du gouvernement (SGG)81, l’étude ou la fiche d’impact est transmis, le cas échéant, au Conseil d’État avec le projet de texte ;

le texte et son étude (ou sa fiche) d’impact sont transmis au Conseil des ministres et au Parlement (pour les PJL) ou publiés (pour les textes réglementaires).

Le risque d’un exercice formel, à l’issue du processus d’élaboration de la norme par les services administratifs (comparable à celui de l’évaluation socio-économique – cf. § 3.2 infra), est réel. Outre les enjeux méthodologiques liés à l’élaboration des études d’impact82, la place de l’étude d’impact dans le processus décisionnel est essentielle à sa prise en considération. Le juge constitutionnel n’a jamais utilisé l’insuffisance d’une étude d’impact pour remettre en cause une loi nouvelle83 mais le Conseil d’État a, pour sa part, souligné des insuffisances à plusieurs reprises.

La publicité donnée à ces travaux d’évaluation préalable a une importance réelle :

les études d’impact sont systématiquement transmises au Parlement ;

depuis le 1er janvier 2014, les « fiches d’impact » des ordonnances, des décrets et des arrêtés sont publiées sur Légifrance ;

78 Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

79 Le quatrième alinéa de l’article 39 de la Constitution prévoit que « les projets de loi ne peuvent être inscrits à l'ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues ».

80 Circulaire du 17 février 2011 relative à la simplification des normes concernant les entreprises et les collectivités territoriales ; circulaire du 17 juillet 2013 relative à la mise en œuvre du gel de la réglementation ; article 8 du décret n° 2015-510 du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration et circulaire du Premier ministre du 12 octobre2015 relative à l’évaluation préalable des normes et qualité du droit.

81 Ou le contrôle général économique et financier (CGEFi), via la mission d’expertise « simplification et évaluation », créée par arrêté du 8 mars 2012 et à laquelle le SGG a confié la supervision du processus concernant certains textes réglementaires.

82 Le Guide de légistique rédigé par le SGG comporte un chapitre sur les études d’impact, qui précise leur contenu (voir annexe IV relative aux enjeux méthodologiques).

83 Le commentaire de la décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015 (relative à la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques) rappelle qu’ « en ce qui concerne l’étude d’impact accompagnant un projet de loi, le Conseil constitutionnel n’a jamais fait droit à un grief tiré de son insuffisance. » La conférence des présidents du Sénat avait d’ailleurs essayé, en juin 2014, de refuser d’inscrire à l’ordre du jour de cette chambre le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, au motif d’une insuffisance, qui a été rejetée par le juge constitutionnel le 1er juillet 2014.

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Annexe I 37

l’enjeu de qualité des études d’impact qui sont soumises au Conseil d’État est d’autant plus important que ses avis sont rendus publics depuis le 19 mars 2016. Ainsi, sur quinze avis du Conseil d’État rendus publics entre le 19 mars et le 27 septembre 2016, sept avis font une référence explicite à l’étude d’impact du gouvernement (tableau 2), dont cinq indiquent qu’elle est apparue, sur certains points, « insuffisante », « lacunaire », voire

« indigente », et qu’il convient de la compléter.

Dans sa dernière étude annuelle (adoptée en juillet 2016), le Conseil d’État prend l’engagement de « relever [son] niveau d’exigence en matière de simplification et de qualité du droit, notamment en ce qui concerne les études d’impact et les dispositifs trop complexes ».

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Annexe I38 Tableau 2 : Analyse des avis du Conseil d’État sur l’importance de l’étude d’impact Projet de loi concerné Référence de l’avisSections consultées Date de la séance Extraits de l’avis Projet de loi renfoant la lutte contre le crime organi, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la produre pénale N° 391004

Assemblée rale (AG), Sections de l’intérieur et des finances,

28/01/2016

L’étude d’impact du projet est apparue, sur certains points, insuffisante : soit que les données permettant d’apprécier l’utilité de la mesure introduite n’aient pas été suffisamment exposées ; soit en raison d’une psentation lacunaire de l’état du droit ; soit encore du fait de l’absence d’éments de droit comparé. A la suite de demandes des rapporteurs, l’étude d’impact a fait l’objet de deux saisines rectificatives, mais il conviendrait encore de la compléter. Projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économiqueN° 391.262

AG, Sections de l’intérieur, des finances, des travaux publics, sociale et de l’administration

24/03/2016

L’étude d’impact du projet transmise par le Gouvernement est apparue, pour beaucoup de dispositions, lacunaire ou insuffisante au regard des prescriptions de la loi organique du 15 avril 2009. Le Conseil d’État souligne en effet que, pour un projet de loi de cette nature, qui regroupe de très nombreuses mesures distinctes les unes des autres,c’est au titre de chaque article ou ensemble d’articles ayant le même objet que s’apprécie le respect des exigences relatives à l’étude d’impact. Projet de loi « Égalité et citoyenne »N° 391255

AG, Sections des travaux publics, de l’intérieur, sociale et de l’administration

31/03/2016

Il appelle cependant l’attention du Gouvernement sur la nécessité de compléter l’étude d’impact, afin qu’il fasse connaître ses intentions à cet égard, ou au moins qu’il indique de manière suffisamment précise, si son choix n’est pas encore arrêté, quelles sont les options susceptibles d’être retenues quant à la définition de cette autori[chargée de la gestion de la réserve citoyenne].[…] Il a cependant ploré que, notamment dans l’étude d’impact, le Gouvernement n’ait fourni aucune estimation sur les effets attendus […], ni fourni d’éléments précis permettant d’apprécier dans quelle mesure […] Projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2016-301 du 14 mars 2016 et n° 2016-351 du 25 mars 2016N° 391.626Section des finances7/06/2016 Comme l’expose l’étude d’impact du projet de loi, qui est apparue suffisante au regard des exigences de la loi organique 2009-403 du 15 avril 2009,[…] Projet de loi de programmation relatif à l'égali réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique 391749 AG, Sections de l’intérieur et sociale28/07/2016Le Conseil d’État observe que le projet est accompagde l’étude d’impact, qu’il estime suffisante, exie par l’article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution dont les lois de programmation ne sont pas dispensées. - 38 -

Annexe I39 Projet de loi concerné Référence de l’avisSections consultées Date de la séance Extraits de l’avis Projet de loi relatif au statut de Paris et à l’aménagement tropolitainN° 391748

AG, Sections de l’intérieur, des finances, des travaux publics et de l’administration

13/07/2016

L’étude d’impact du projet apparaît, sur plusieurs points, insuffisante. Tel est le cas s’agissant des éments relatifs aux économies attendues du regroupement des quatre premiers arrondissements, notamment en matière de dépenses de fonctionnement, d’effectifs et de locaux. Tel est aussi le cas s’agissant : des éléments produits pour justifier qu’ait é écare l’option qui aurait consis à transférer immédiatement au maire de Paris l’ingralité de la comtence en matière de police des édifices menaçant ruine, au lieu de la partager avec le préfet de police dans une matre où un tel partage est exceptionnel ; […]. Projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagneN° 391883

AG, Commission permanente, Sections des travaux public et sociale 8 et 13/09/2016

De façon générale, l’étude d’impact transmise par le Gouvernement est apparue, pour bon nombre de dispositions, lacunaire ou insuffisante au regard des prescriptions de la loi organique du 15 avril 2009, alors qu’une telle étude aurait é particulrement pcieuse pour l’examen d’un projet de loi de la nature de celui-ci, qui regroupe de nombreuses mesures distinctes les unes des autres et pvoit des dispositions nouvelles incitatives dont, en l’absence de toute étude sérieuse, il est bien difficile d’apprécier l’effet réel et la pertinence.[…] [Au sujet du titre II relatif à l’emploi et au dynamisme économique en montagne,] il signale toutefois l’indigence de l’étude d’impact, qui énonce des généralités sans justifier en rien les mesures envisagées. Source : Mission d’après avis mis en ligne sur Légifrance.Nota bene : les éléments surlignés le sont par la mission. - 39 -

Annexe I 40

3.2. L’obligation nouvelle d’évaluation socio-économique est trop souvent

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