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Secret, torture et preuves obscures : l’ombre de l’inquisiteur

Au-delà de sa « polyphonie assourdissante », le discours réforma-teur s’accorde pour ériger l’Inquisition médiévale en contre-modèle repoussoir125. En France, l’analogie entre l’économie de l’ordonnance de 1670 et les pratiques attribuées aux juridictions d’exception du Moyen Âge structure la critique du système judiciaire. La procédure criminelle s’apparente, pour ses détracteurs, à un « héritage barbare » de l’institution ecclésiastique : selon le jurisconsulte Dominique de Bernardi (1751-1824), elle résulte d’un « alliage étrange » entre une

« justice toute spirituelle » avec « la justice humaine, dont la force et la coaction physiques sont les principaux instruments126». Emblématique

122. J. Godechot, « Les influences étrangères sur le droit pénal de la Révolution française », 1988, p. 47.

123. C. Mervaud, « Sur le testament judiciaire de Voltaire : le Prix de la justice et de l’humanité et le Traité des crimes de Pierre-François Muyart de Vouglans », 2011, p. 294.

124. J. P. Brissot de Warville, Théorie des lois criminelles, 1781, t. I, p. 19.

125. E. Tillet, « La place de l’Inquisition dans la doctrine pénale des Lumières », 2004, p. 342.

126. D. de Bernardi, « Discours […] couronné par l’Académie de Châlons-sur-Marne en 1780 », 1782, p. 41.

de la cruauté, de l’iniquité et de la tyrannie qui caractérisent tout l’appareil répressif de la monarchie absolue, la procédure criminelle est conçue comme le legs direct d’une institution médiévale large-ment mythifiée. Selon Brissot, l’Inquisition serait indubitablelarge-ment à l’origine des lois alors en vigueur et s’apparenterait à un « tribunal de sang », imaginé par « fanatisme » et « élevé sur un monceau de corps-morts, sur des bûchers, des échafauds127».

Fruit d’une simplification historique commode et habilement ins-trumentalisée, cette association trouve son fondement dans la condam-nation du serment et de la torture judiciaire, unilatéralement considérés comme abusifs au xviiie siècle. La comparaison est opérée dès 1700 par Claude Fleury (1640-1723), qui réprouve les dispositions de l’or-donnance de 1670, jugées aussi cruelles qu’inéquitables. Fleury juge ainsi urgent de « réformer [la] procédure criminelle tirée de celle de l’Inquisition, [car] elle tend plus à découvrir et punir les coupables qu’à justifier les innocents128». L’analogie est bientôt alimentée par les scan-dales judiciaires qui émaillent les règnes de Louis XV et Louis XVI129. L’abbé Morellet réédite en 1762 l’Abrégé du manuel de l’inquisiteur (1568) de Nicolas Eymerich en marge de l’affaire Calas (1761-1762), et les réquisitoires de Voltaire, qui dénonce les « erreurs judiciaires » d’un appareil répressif inique, multiplient les références à l’Inquisition130.

Dans son traité au titre explicite (Lettres sur la procédure crimi-nelle de France dans lesquelles on montre sa conformité avec celle de l’Inquisition, 1788), l’avocat général Dupaty (1746-1788) condamne également les rigueurs de l’instruction établie par l’ordonnance royale de 1670. Ses dispositions sont plus sévères encore que celles instituées par le pontificat d’Innocent III, selon le magistrat bordelais. Brissot de Warville juge pour sa part que la « procédure inquisitoriale » française n’est qu’un « reste » du « glaive mystérieux de l’Inquisition […] qui avilit l’Europe pendant plusieurs siècles131». Le rapprochement opéré entre la procédure criminelle et le contre-modèle de l’Inquisition au

127. J. P. Brissot de Warville, Lois criminelles, t. II, p. 240-244.

128. Cité par A. Esmein, Histoire de la procédure criminelle en France, 1882, p. 356.

129. Voir M.  Porret, « Voltaire  : justicier des Lumières », 2009, p.  6-28 ; B. Schnapper, « La diffusion en France des nouvelles conceptions pénales dans la dernière décennie de l’Ancien Régime », 1990, p. 411.

130. E. Tillet, « La place de l’Inquisition dans la doctrine pénale des Lumières », 2004, p. 341-342.

131. J. P. Brissot de Warville, Théorie des lois criminelles, 1781, t. I, p. 6.

sein de l’élite éclairée devient un topique du réformisme pénal. Et même si la République de Genève n’a jamais reconnu les compétences de la juridiction ecclésiastique papiste, les publicistes républicains en viennent, à la fin du siècle, à dénoncer dans les mêmes termes les errements de leurs institutions judiciaires, éloignées de la « bonne justice » et proches d’une « Inquisition genevoise132». Dans le discours pamphlétaire, l’ombre de l’Inquisition plane sur le procès pénal : assi-milé à la figure de l’inquisiteur, l’office du juge instructeur disqualifie la légitimité même de l’enquête pénale.

Loin de rendre compte des pratiques judiciaires effectives au xviiie siècle qui modèrent progressivement les rigueurs de la procé-dure inquisitoire, la référence à l’Inquisition constitue un procédé rhétorique qui permet de dénoncer l’incompatibilité de la torture avec les droits naturels des individus. L’analogie est également utilisée pour fustiger la souveraineté du magistrat instructeur dans le procès pénal133. L’argumentaire réformateur condamne ainsi le magistère du juge sur l’enquête : le pouvoir « tyrannique » exercé sur le prévenu est comparé à l’omnipotence de l’inquisiteur134. Il constitue une mani-festation flagrante de l’iniquité du système judiciaire et porte atteinte aux droits de la défense, visée fondamentale du combat réformiste.

En opposition au principe de la transparence qui guide la pensée juridico-politique des Lumières, le secret de l’instruction cristallise les attaques : le « voile épais » qui entoure le processus d’incrimination constitue la manifestation la plus évidente du caractère liberticide de l’édifice judiciaire. Isolé, sans avocat et passif, le prévenu ne fait que subir l’enchaînement du procès, s’insurge Brissot :

La procédure doit-elle être secrète ? L’Inquisition dit oui, la liberté dit non. […] Combien d’innocents ont été les malheureuses victimes de l’ombre mystérieuse qui couvre la procédure criminelle ! Information, interrogatoire, récolement, etc. : tout y est secret135.

132. M. Porret, « Au lendemain de “l’affaire Rousseau” : la “justice pervertie” ou les représentations de la justice patricienne chez quelques publicistes de Genève, 1770-1793 », 1992, p. 144.

133. E. Tillet, « La place de l’Inquisition dans la doctrine pénale des Lumières », 2004, p. 347.

134. C.-M.-J.-B. M. Dupaty, Lettres sur la procédure criminelle de la France, 1788, p. 115.

135. J. P. Brissot de Warville, Théorie des lois criminelles, 1781, t. 2, p. 188.

Outre l’intervention de l’avocat durant l’instruction et l’intro-duction d’une phase de jugement contradictoire, les réformateurs réclament la transparence des investigations judiciaires. Aux arguments de l’équité s’ajoutent ceux de la raison : le secret altère la manifesta-tion de la vérité. En facilitant les « prévaricamanifesta-tions » de la preuve, il augmente les risques d’erreurs judiciaires et favorise l’impunité des criminels, selon l’avocat général Dupaty136. La vérité ne doit donc pas reposer sur la probité supposée du magistrat instructeur, mais elle doit être validée par « la voix toujours équitable du public », selon l’avocat Linguet (1736-1794)  : celle-ci endigue « la corruption des juges » et « rassure le citoyen innocent que la calomnie peut flétrir137».

Avec d’autres, Dupaty prône ainsi la publicité de l’instruction, qui constitue « la garde la plus fidèle de la vérité » et limite l’étendue des pouvoirs du juge :

La vérité peut être altérée de mille manières, soit dans la rédaction des dépositions, soit dans celle des procès-verbaux. Les témoins peuvent être ou trompés, ou trompeurs, séduits par leur crédulité, séducteurs par leur prévarication. Un juge peut par ignorance, par inattention, par affectation même, soit pour favoriser l’accusé ou l’accusateur, ne pas bien saisir les traces d’un délit, ne pas rédiger fidèlement les dépositions d’un témoin. Or le système de notre procédure criminelle, et surtout le secret qui en est la base, comme celle de l’Inquisition, facilite d’autant toutes les espèces de prévarication qu’il en rend la preuve impossible, et par conséquent l’impunité assurée138.

Avec le secret, c’est toute « la rigueur » de la procédure qui est dénoncée comme contraire à la raison139. Pour ses détracteurs, la sévérité outrancière de l’enquête est défavorable à la manifesta-tion de la vérité140. Devant la rudesse des mesures d’investigation, le

136. C.-M.-J.-B. M. Dupaty, Lettres sur la procédure criminelle de la France, 1788, p. 92-93.

137. Cité par E.  Tillet, « La place de l’Inquisition dans la doctrine pénale des Lumières », 2004, p. 345.

138. C.-M.-J.-B. M. Dupaty, Lettres sur la procédure criminelle de la France, 1788, p. 91.

139. M. Pisani, « Beccaria e il processo penale », 1990, p. 118.

140. F. Tricaud, « Le procès de la procédure criminelle à l’âge des Lumières », 1994, p. 162.

prévenu a-t-il d’autres choix que s’accuser lui-même pour échapper à ses tourments, s’interroge Voltaire : « Quel est l’homme que cette procédure n’épouvante pas ? Quel est l’homme juste qui puisse être sûr de n’y pas succomber141? » Le spectre des geôles et des bour-reaux médiévaux est agité pour dénoncer le caractère expressément coercitif de l’enquête, qui biaise l’impartialité de l’incrimination  : fondée sur la douleur physique et morale, la contrainte exercée contre le prévenu force l’aveu142. Après Montesquieu et Beccaria cités en exemple, Marat condamne la barbarie de la torture judiciaire, qui brise l’innocent et endurcit le criminel dans le mensonge. Dans son Plan de législation criminelle (1780) rédigé pour concourir au prix de Berne (1777), le médecin-journaliste originaire de Neuchâtel, grand connaisseur du système carcéral anglais pour ses enquêtes de terrain143, dénonce l’absurdité de toute contrainte physique exercée contre le prévenu : « Oui, la raison se révolte contre cette pratique odieuse, et dans un siècle où l’on se pique de raison, se peut-il qu’elle ne soit pas proscrite144? »

À la violence corporelle de la « question » répond la privation de liberté : la puissance inique du magistrat instructeur se manifeste dans la durée, la brutalité et l’arbitraire supposés des incarcérations préventives. Prônant la création de « prisons de police » distinctes des établissements pénitentiaires, le futur montagnard fustige la généralisa-tion de la détengénéralisa-tion provisoire, qui institue « une présompgénéralisa-tion inver-sée de culpabilité145». « Lieux souterrains, lieux d’une nuit obscure, séjour des morts et tombeaux des vivants146»  : la détention secrète relève d’une « méthode de l’Inquisition » qui « imprime l’horreur » et contraint les innocents à la fuite, selon Voltaire147. Les « cachots affreux » et la « charge des fers » souillent le prévenu de l’infamie pénale en amont de la sanction des juges, comme s’il « était déjà jugé

141. Cité in ibid.

142. M. Pisani, « Beccaria e il processo penale », 1990, p. 114.

143. J.-P.  Allinne, « Jean-Paul Marat ou l’analyse sociale du crime, une voix singulière parmi les projets montagnards de procédure pénale », 2009, p. 16.

144. J.-P. Marat, Plan de législation criminelle, [1780] 1790, p. 132.

145. J.-P.  Allinne, « Jean-Paul Marat ou l’analyse sociale du crime, une voix singulière parmi les projets montagnards de procédure pénale », 2009, p. 16.

146. Voltaire, La Pucelle d’Orléans, cité in E. Tillet, « La place de l’Inquisition dans la doctrine pénale des Lumières », 2004, p. 344.

147. Voltaire, Prix de la justice et de l’humanité, 1777, p. 101.

coupable », souligne le résident de Fernex148. Ignorant les charges portées contre lui, « rempli d’effroi […] et la mémoire égarée par les angoisses », le prévenu n’a aucune chance de faire valoir ses arguments face aux « ruses » du juge lors de l’interrogatoire149.

Selon le lieutenant général de police lyonnais Prost de Royer (1729-1784), l’imposition du serment biaise par ailleurs ses moyens de défense, car le suspect doit choisir entre « le parjure et le sui-cide150». Et si le juge n’obtient malgré tout pas les aveux nécessaires à la condamnation, deux choix s’imposent à lui, d’après Brissot  : faire languir le prévenu en prison « jusqu’à ce qu’il ait rappelé dans sa mémoire le fait pour lequel il est enchaîné », ou le soumettre à la question151. Au terme d’une enquête inéquitable, l’issue du procès serait ainsi jouée d’avance. Toutes les mesures d’instruction sont éva-luées au prisme de leur caractère attentatoire à la liberté individuelle.

En délégitimant les conditions de sa réalisation, la philosophie réfor-matrice attaque la crédibilité même de l’enquête pénale régie par le système inquisitoire.

C’est en effet le processus même d’incrimination qui est remis en cause dans l’assimilation du magistrat instructeur à la figure de l’inquisiteur : toute la construction savante de l’instruction se voit remise en question. Pour les réformistes, l’édifice probatoire clas-sique heurte la raison152. La force probante de l’aveu extorqué sous la torture perd sa crédibilité, et tout l’édifice des preuves légales se voit délégitimé. D’après Dupaty, l’empilement approximatif des

« fragments de preuves » selon une arithmétique défiant le bon sens forge une accusation qui se décline comme une « énigme » obscure, que seuls les docteurs en droit sont à même de déchif-frer153. Le Genevois Julien Dentand dénonce lui aussi les « calculs probatoires » :

148. Voltaire, Commentaire sur Beccaria, cité in F. Tricaud, « Le procès de la procédure criminelle à l’âge des Lumières », 1994, p. 162.

149. Voltaire, Prix de la justice et de l’humanité, 1777, p. 101.

150. Cité dans E. Tillet, « La place de l’Inquisition dans la doctrine pénale des Lumières », 2004, p. 342.

151. J. P. Brissot de Warville, Théorie des lois criminelles, 1781, t. 2, p. 248.

152. J.  D.  Jackson, « Two Methods of Proof in Criminal Procedure », 1988, p.  553 ; A.  Padoa-Schioppa, « Sur la conscience du juge dans le ius commune européen », 1999, p. 120.

153. Cité in ibid., p. 347.

Le mal vient de ce qu’on a voulu faire des preuves avec des tables de probabilités, mesurer, pour ainsi dire, l’innocence à la toise, et diviser en parties aliquotes l’évidence qui, de sa nature, est absolument indi-visible […]. Il est aussi absurde de dire une demi-preuve que de dire une demi-pensée, un demi-raisonnement. La preuve d’un fait n’est pas un objet numérique qui puisse se décomposer154.

Selon la position des philosophes, la vérité ne doit pas émaner des formules de légistes, mais du jugement des sens, qui est tou-jours relatif. Fidèles à l’héritage beccarien, les réformateurs de la fin du xviiie siècle valorisent au plus haut lieu l’empirisme scientifique comme méthode de construction de la vérité. L’établissement des faits doit ainsi reposer sur un processus d’examen et de comparaison méthodique des éléments de preuves – traces, indices et témoignages, dont l’évaluation se fera librement155.

La hiérarchie classique des moyens probatoires est dès lors inté-gralement déconstruite156. « La conviction ne saurait être légale », selon Dentand  : la preuve ne résultera plus d’une accumulation mathématique prétendument objective selon les critères du droit, mais sera « simplement l’effet de la liaison intime et de la nature même des présomptions157». La remise en cause des preuves légales suggère ainsi une transformation capitale dans l’établissement de la vérité judiciaire. Le rejet du système probatoire classique traduit en effet la volonté de considérer que « la vérification du crime doit obéir aux critères généraux de toute vérité158». Toute connais-sance juridique savante est dès lors superflue pour mener à bien l’instruction criminelle. La construction de la vérité judiciaire ne doit plus relever d’un art complexe réservé aux seuls spécialistes du droit savant. À la figure du juge expert de la science juridique doit se substituer celle d’un magistrat doté d’un « cœur de citoyen et d’une âme sensible », selon la formule de Servan, qui sera à même

154. J. Dentand, Essai de jurisprudence criminelle, 1785, t. 2, p. 102.

155. J.  D.  Jackson, « Two Methods of Proof in Criminal Procedure », 1988, p. 552-553.

156. P.  Foriers, « La conception de la preuve dans l’École de droit naturel », 1965, p. 182.

157. J. Dentand, Essai de jurisprudence criminelle, 1785, t. 2, p. 102.

158. M. Foucault, Surveiller et punir, 1975, p. 116.

de confronter des vérités relatives pour établir la culpabilité ou l’innocence de l’accusé159.

La méfiance à l’égard de la magistrature professionnelle évoquée par Beccaria est largement partagée par l’élite des Lumières. Elle trouve sa concrétisation dans l’institution du jury populaire unanimement proposée dans les plans de législation criminelle d’inspiration réfor-miste. Les résultats de l’enquête ne devront plus être appréciés uni-voquement par l’ordre judiciaire, mais sanctionnés par l’« opinion publique160». L’investigation du magistrat instructeur servira ainsi à forger la conviction intime du jury populaire, fondée sur le libre arbitre de la raison humaine (« le simple bon sens »), qui détermine en dernier lieu la culpabilité ou l’innocence du prévenu161. L’issue de l’enquête pénale doit être in fine évaluée par « l’œil du public » et non par les seuls gardiens du droit savant. Le programme beccarien renverse le système probatoire classique au profit de la conviction morale. Le passage de la preuve légale à la preuve libre modifie la logique du processus d’incrimination. L’évolution du système proba-toire dépossède ainsi les légistes de leur emprise sur le procès pénal et érige l’opinion intime comme seul critère de détermination de la culpabilité.

La référence à l’Inquisition condense en définitive tous les griefs attribués par la philosophie des Lumières à l’office du juge instructeur.

L’analogie rhétorique permet de dénoncer la dimension répressive attribuée à la procédure inquisitoire. Le magistrat y est à la fois accu-sateur, enquêteur et juge, confusion fonctionnelle qui atteint l’impar-tialité de l’enquête selon Beccaria162. La distinction des fonctions de poursuite et de jugement constitue ainsi pour le philosophe milanais l’une des conditions sine qua non de la modération du « procès offen-sif163». L’omnipotence et la partialité supposée du juge instructeur

159. J. M. A. Servan, Discours sur l’administration de la justice criminelle, 1767, p.  48. Voir E.  Tillet, « La place de l’Inquisition dans la doctrine pénale des Lumières », 2004, p. 352 ; M. Foucault, Surveiller et punir, 1975, p. 47.

160. A. Padoa-Schioppa, « Sur la conscience du juge dans le ius commune euro-péen », 1999, p. 124.

161. P. Foriers, « La conception de la preuve dans l’École de droit naturel », 1965, p. 170 ; L. Primot, Le Concept d’inquisitoire en procédure pénale, 2010, p. 152.

162. C. Beccaria, Des délits et des peines, 1999, p. 106.

163. E.  Dezza, Lezioni di storia del processo penale, 2013, p.  94 ; M.  Pisani,

« Beccaria e il processo penale », 1990, p. 112-113.

délégitiment l’ensemble du système judiciaire. En dénonçant la sévérité et l’iniquité de la procédure, le réformisme pénal beccarien condamne à la fois les mesures d’instruction et le système probatoire, soit le fondement même de l’enquête pénale.

Si les traités de Beccaria et de ses pairs ont une portée directe sur l’ensemble des réformes pénales amorcées en Europe à la fin du xviiie  siècle, ils trouvent dans la République de Genève un écho tout à fait singulier. La cité-État républicaine place en effet dès les années 1730 « l’humanisation » de procédure criminelle au cœur des contestations politiques, que cristallise notamment l’épineuse question de la codification des droits.

Modérer la procédure à Genève