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Les ressources cynégétiques

La part des restes de mammifères et d’oiseaux sauvages est réduite ; il s’agit d’une tendance générale à l’ensemble des populations de la Gaule (Méniel 1993 ; 2002a) qui est également perceptible à la période gallo-romaine (Lepetz 2009). L’activité cynégétique semble ainsi jouer un rôle minime dans l’alimen- tation à l’âge du Fer. La chasse revêt cependant d’autres finalités telles que la recherche de matière première (fourrure, bois, etc.), la lutte contre les préda- teurs, les espèces nuisibles, etc. Elle semble également avoir joué un rôle social et symbolique, particulièrement fort chez les élites, qui peut notamment être appréhendé à partir de l’étude des trophées (Méniel 2002a).

Les quelques restes d’amphibiens et de micromammifères mis au jour (NR amphi- bien = 66 ; NR micromammifère = 27) ont été exclus des décomptes. Ils pro- viennent des niveaux de remplissage de souterrains et s’apparentent davantage à des espèces intrusives. Toutefois, des ensembles quantitativement importants, mis au jour sur l’île d’Hoëdic, ont été confiés à Salvador Bailon et Anne Tresset pour analyses (en cours) ; ils permettront d’obtenir de précieuses informations sur la biogéographie de cette île à l’âge du Fer.

Les mammifères sauvages

Les espèces sauvages sont très peu représentées avec 1,4 % du NR déterminé. On observe cette tendance pour l’ensemble de la séquence avec des propor- tions d’espèces sauvages qui varient entre 0,8 % et 1,9 % du nombre de restes déterminés selon la période prise en compte. Seuls neuf taxons attribués aux mammifères sauvages ont été identifiés : le cerf, le lièvre, le sanglier, le chevreuil et, dans des proportions moindres, le renard, le loup et les petits carnivores tels que le blaireau, la martre et la fouine. Si la consommation des premiers peut être envisagée, notamment par l’existence de traces sur des parties comestibles, la présence des autres taxons paraît correspondre davantage à la recherche de peau et de fourrure. En effet, même si certaines de ces espèces peuvent être consommées, la chasse de ces animaux (renard, loup, mustélidés) ne semble pas guidée par l’attrait de leur viande. Ceci peut notamment expliquer leur faible représentation au sein des dépotoirs domestiques car ces animaux, acquis prin- cipalement par piégeage, font vraisemblablement l’objet d’un dépeçage sur le lieu même de la prise.

La distribution des restes de mammifères sauvages en fonction des contextes d’habitat est très instructive. De nettes différences apparaissent, quantitative- ment et qualitativement (fig. 44 à 46). Elles sont représentatives de l’environ- nement proche de chacun de ces types d’occupation. Ainsi, les ensembles issus des établissements ruraux et des sites fortifiés de hauteur sont caractérisés par la présence d’espèces accessibles dans les campagnes et les bois environnants (cerf, sanglier, chevreuil et lièvre dont les proportions sont similaires entre ces deux types d’occupation) (fig. 44 et 45), alors que les sites littoraux ouverts, localisés en contexte côtier ou insulaire, se démarquent par la présence de mammifères marins et d’une plus forte proportion de lièvre, espèce qui apprécie notamment

les milieux ouverts (fig. 46). quelques restes de mammifères marins ont égale- ment été mis en évidence sur d’autres sites bretons. Le site de Plouër-sur-Rance (Krausz 1996) a livré quelques fragments de crâne, de vertèbre et d’humérus attribués à un individu dont l’espèce n’a pu être déterminée, alors que des osse- ments attribués à la baleine ont été mis au jour sur les sites d’urville-Nacqueville (communication personnelle Anthony Lefort) et de Mez-Notariou (Le Bihan, Villard 2010).

Les études antérieures réalisées sur les établissements de la Plaine de Caen mentionnent, pour leur part, des listes de mammifères sauvages similaires (Auxiette et al. 2010). La présence de quelques taxons supplémentaires peut cependant être notée. Ainsi, le loup a été identifié à Courseulles-sur-Mer (Yvinec 2011), Fierville-les-Parcs (Jahier et al. 2002) et l’Étoile à Mondeville (Auxiette, Matterne 2009), alors que le castor, le chat et le renard sont attestés sur le site Périphérique Sud à Fleury-sur-Orne (San Juan et al. 1994) et enfin le putois sur le site de l’AR67 à Ifs (Auxiette et al. 2010). Il est intéressant de noter la rareté

44 45 46 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45

Cerf Sanglier Lièvre Renard Chevreuil

NR Sites fortifiés de hauteur

Établissements ruraux bois de cervidés 0 20 40 60 80 100 120

Cerf Sanglier Martre/fouine Blaireau Chevreuil Lièvre NR 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45

Lièvre Phoque gris Cerf Chevreuil Loup

NR Sites littoraux ouverts

Fig. 44 : Occurrence des mammifères sauvages sur les sites fortifiés de hauteur (NR sauvage = 66 soit 0,4 % du NR total).

Fig. 45 : Occurrence des mammifères sauvages sur les établissements ruraux (NR sauvage = 152 soit 0,7 % du NR total).

Fig. 46 : Occurrence des mammifères sauvages sur les sites littoraux ouverts (NR sauvage = 94 soit 1,2 % du NR total).

de certaines espèces comme le lièvre, qui paraît récurrente au sein des ensembles du nord-ouest de la France (Auxiette et al. 2010 ; Baudry 2009b). à l’inverse, les restes de lagomorphe dominent, dans la majorité des cas, les listes d’espèces sau- vages obtenues pour les sites de la Gaule septentrionale (Méniel 1987 ; 1988a ; 2002a).

Les oiseaux

La place des oiseaux sauvages dans l’alimentation est difficile à mettre en évi- dence, tout comme la pratique même de leur chasse. Comme sur la majorité des sites, les restes d’oiseaux sauvages sont rares dans le corpus. Seuls 14 ensembles (sur un total de 35) ont livré quelques restes d’oiseaux sauvages dont la majorité n’ont pu être déterminés au rang de l’espèce (à cause de la fragmentation ou de l’attaque par des radicelles). La pratique du tamisage sur quelques sites du cor- pus a toutefois permis de récolter un ensemble de 92 restes d’oiseaux sauvages déterminés (tabl. 54). Il faut rester prudent sur leur éventuelle implication dans l’alimentation : les traces anthropiques sont extrêmement rares et seuls deux os longs d’alcidés (Port-Blanc à Hoëdic) sont porteurs de traces fines réalisées au couteau. un constat similaire est observable pour la volaille. Seuls 43 restes de gallinacés ont été comptabilisés, deux d’entre eux proviennent des niveaux de la fin du premier âge du Fer de Basly, alors que les autres sont issus de niveaux datés de La Tène finale (dont 28 sur le seul site de Saint-Malo). Ces restes iso- lés et vierges de tout stigmate n’attestent pas une consommation courante des oiseaux domestiques.

Tabl. 54 : Distribution des oiseaux sauvages au sein des ensembles étudiés (en NR).

Oie cendré Canar

d

Pigeon Grive/merle Corneille noir

e

Grand corbeau Bécasse Alcidés Guillemot Cygne Grand Cormoran Mouette rieuse Sterne Courlis cendré Goéland ar

genté

Goéland Hér

on cendré

Rapace indéterminé Oiseau indéterminé

Sites fortifiés de hauteur

Saint Malo LTF 1 5 2 1 1 1 10 23

Paule LTF 1

Sites ruraux

Fontenay-le-Marmion Bronze 2

Saint-Martin-de-Fontenay le Grand Barberie LTM 1

Fleury-sur-Orne les Mézerettes LTF 1

Fleury-sur-Orne ZL7/CD120 LTF 1 1 1 5

Saint-Martin-de-Fontenay le Grand Barberie LTF 4 1

Châteaugiron LTF 1

Touffréville LTF 1

Touffréville fin Ier av. 1 9

Sites littoraux ouverts

Île de Triélen LTM 4 1 5

Locquirec LTF 2

Île aux Moutons LTF 1 1 2 3 13

De nombreuses espèces ne sont représentées que par quelques restes isolés, ce qui est trop restreint pour effectuer une analyse des comportements humains face à ces oiseaux. Il reste donc difficile, voire hasardeux, de souhaiter dis- tinguer les oiseaux consommés de ceux qui proviennent d’individus intrusifs, morts par exemple de façon naturelle, ou bien de ceux qui peuvent faire l’objet d’une chasse sportive ou ludique. Ceci peut être le cas notamment du petit rapace mis au jour sur le site de Touffréville dans les niveaux datés de la fin du

ier siècle avant notre ère. Il n’en est pas moins intéressant de noter la plus grande

richesse taxinomique des sites littoraux ouverts et du site de Saint-Malo (site littoral fortifié de hauteur). Sont présents des oiseaux marins tels que le grand cormoran, le héron cendré, la mouette rieuse, le goéland argenté, le guillemot, la sterne, le courlis cendré de même que des restes d’alcidés dont l’espèce n’a pu être déterminée.