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Les ensembles archéologiques Fontenay-le-Marmion la Grande Pièce (Calvados)

Le site de la Grande Pièce à Fontenay-le-Marmion est situé à 20 km au sud de Caen. L’opération d’archéologie préventive, dirigée par Pierre Giraud, du Service archéologie du département du Calvados, de septembre à décembre 2004, s’est attachée à l’étude de deux secteurs distants de 200 m. Le secteur 1 a livré de larges fossés, des fosses et des structures en creux datés du Bronze moyen, ainsi que des structures datées du Bronze final et du Hallstatt ancien. Le secteur 2 est caractérisé par la présence d’une petite nécropole et d’un fossé d’enclos attribués à la fin du Hallstatt final et/ou au début de La Tène ancienne (Giraud et al. 2006). Cet ensemble de plus de 3 500 restes osseux pour une masse globale de 45 kg offre une rare opportunité d’obtenir des informations sur différentes phases d’occupation d’un même espace sur une période de plus de 14 siècles.

Le Bronze moyen

L’opération a permis l’étude d’un habitat de la fin du Bronze moyen et du début du Bronze final. Cette occupation est caractérisée par d’importants fossés, qui ont livré la majorité des ensembles osseux, et par plusieurs unités domestiques comprenant notamment des silos et des structures de combustion (Giraud et al. 2006). L’état de conservation du matériel ostéologique est relativement bon. Cependant, dans certains secteurs, la nature du terrain semble avoir fragilisé la surface osseuse, favorisant la fragmentation des os longs. à cela s’ajoute la pré- sence de cassures fraîches dues aux techniques et aux matériels employés (telle la pelle mécanique) en contexte de sauvetage.

Les espèces domestiques et principalement les bœufs, les caprinés et les porcs dominent cet ensemble (tabl. 10). Le bœuf prédomine très nettement dans la composition de ce lot, que ce soit en nombre ou en poids de restes. La place des autres espèces domestiques (porcs et caprinés) apparaît secondaire avec seule- ment 19 % et 18 % du nombre de restes d’espèces domestiques déterminées. quelques restes de cheval et de chien complètent cette liste d’espèces domes- tiques. La part de la faune sauvage est très faible dans l’approvisionnement carné, avec seulement 2,7 % du nombre de restes déterminés, et comporte deux espèces, le cerf et le lièvre, associées à deux restes d’oiseaux indéterminés. Les restes de bœufs et de caprinés sont essentiellement représentés par les os les plus résistants comme ceux appartenant à la tête, aux membres et aux bas de pattes. à l’inverse, le squelette axial composé d’ossements plus fragiles, telles les

vertèbres et les côtes, apparaît sous-représenté. Plusieurs crânes presque com- plets et une vingtaine de membres non fracturés de bovins ont été mis au jour dans les niveaux de remplissage des fossés. Ces amas d’os se démarquent des rejets alimentaires par leur état de conservation et leur composition. Les restes de porcs présentent une répartition très différente, avec une sous-représentation de l’ensemble des parties du squelette. La forte proportion de parties anato- miques porteuses de morceaux de viande, leur état fragmentaire ainsi que de nombreuses traces de découpe reflètent les pratiques de partage et de prépara- tion des carcasses pour la consommation alimentaire.

Le Hallstatt ancien

Au sud de la première occupation, un ensemble de structures, attribuable à la toute fin de l’âge du Bronze et dont les niveaux de comblement sont datés du Hallstatt ancien, a également livré un petit ensemble de faune. Cette occupa- tion regroupe une plus grande diversité de structures (fossés, fosses, greniers sur poteaux, structures de combustion, carrière d’extraction, etc.). Cependant, les rejets domestiques y sont représentés en quantité moindre (Giraud et al. 2006 ; 2009). Ce lot a livré dans sa globalité 798 restes osseux dont seulement 30 % ont pu être déterminés (tabl. 11). Ce fort taux de restes indéterminés est la conséquence principale de la réalisation de tests de tamisage à 4 et 2 mm dont l’objectif premier était de mettre en évidence le potentiel archéo-ichtyologique. Aucun reste de poisson n’a été mis au jour, seuls quelques restes de microverté- brés et de mammifères indéterminés ont été décomptés.

La liste de faune est relativement variée, avec la présence d’espèces domes- tiques et notamment une forte proportion de restes d’équidés en poids de restes (tabl. 11). Le chien est également documenté avec trois restes (une mandibule, une côte et une vertèbre thoracique). Les espèces sauvages s’illustrent, pour leur part, par un reste de lièvre et deux restes de sanglier. La forte proportion du

Tabl. 10 : Fontenay-le-Marmion la Grande Pièce, dénombrement des restes osseux, ensemble daté du Bronze moyen.

Noms vernaculaires Noms scientifiques NR % NR PR (g) % PR

Bœuf• Bos taurus 663 60,7 27 763 83,5

Porc Sus domesticus 209 19,1 2 449 7,4

Caprinés Caprinae 201 18,5 1 302 4,0

Cheval Equus caballus 13 1,2 1 688 5,0

Chien Canis familiaris 5 0,5 45 0,1

Total mammifères domestiques 1 091 100 33 247 100

Cerf* Cervus elaphus 28 614

Lièvre Lepus europaeus 2 < 1

Total mammifères sauvages 30 614

Oiseau indéterminé Aves sp. 2 < 1

Homme Homo sapiens 3 8

Total des restes déterminés 1 126 45,4 33 869 96,1

Total des restes indéterminés 1 363 54,6 1 429 3,9

TOTAL 2 489 100 35 239 100

• dont trois restes : deux membres antérieurs en connexion et un crâne appartenant à un veau (soit 30 os pour 229 g) * dont 27 fragments de bois indéterminés (386 g) et un bois de massacre (228 g)

Tabl. 11 : Fontenay-le-Marmion la Grande Pièce, dénombrement des restes osseux, ensemble daté du Hallstatt ancien.

Noms vernaculaires Noms scientifiques NR % NR PR (g) % PR

Bœuf Bos taurus 91 43,5 2 549 63,9

Porc Sus domesticus 24 11,5 204 5,1

Caprinés Caprinae 64 30,6 289 7,2

Cheval Equus caballus 27 12,9 938 23,5

Chien Canis familiaris 3 1,5 11 0,3

Total mammifères domestiques 209 100 3 991 100

Lièvre Lepus europaeus 1 < 1

Sanglier Sus scrofa scrofa 2 84

Total mammifères sauvages 3 84

Micromammifère 5 < 1

Total des restes déterminés 217 27,2 4 075 88,7

Total des restes indéterminés 581 72,8 521 11,3

TOTAL 798 100 4 596 100

nombre de restes indéterminés doit être relativisée par l’utilisation du poids de restes : ils ne représentent que 11 % de la masse totale et leur poids moyen s’élève à 1,2 g. Les restes de bœuf dominent cet ensemble, que ce soit en nombre (43,5 % des restes déterminés) ou en poids (64 %). Cependant, les restes de caprinés, pour lesquels la différenciation mouton-chèvre n’a pu être réalisée, sont bien représentés et sont deux fois plus nombreux que ceux des suidés avec respectivement 30 % et 11,5 % des espèces domestiques déterminées. Cet écart ne peut toutefois être attribué uniquement aux effets de la conservation dif- férentielle, étant donné que ces deux espèces possèdent des niveaux de résis- tance équivalents face aux altérations taphonomiques. Cette donnée illustre par conséquent une meilleure représentativité originelle des caprinés au détriment des porcs au sein de cet ensemble (Giraud et al. 2009).

quelles que soient les espèces concernées, les restes osseux recueillis appar- tiennent à l’ensemble des parties du squelette et se présentent comme des restes isolés et dissociés. Ces éléments offrent donc l’image de rejets domestiques, c’est-à-dire de déchets provenant de la préparation, mais aussi de la consom- mation des animaux.

La Tène ancienne

à ces deux premiers ensembles archéologiques s’ajoutent un enclos fossoyé tra- pézoïdal et une nécropole, datés du début de La Tène ancienne, mis au jour dans le secteur 2. Toutefois, le tracé routier ne coupant qu’une portion de l’enclos, son étude n’a été que partielle (Giraud et al. 2006).

Ce petit lot est composé de 485 ossements pour un poids total de près de 5 kg. Ce sont plus de 63 % des restes qui ont pu être déterminés au rang de l’espèce. Les restes de bœuf dominent une nouvelle fois cet ensemble avec plus de 52 % du nombre de restes déterminés pour atteindre plus de 54 % de la masse totale des restes déterminés (tabl. 12). Les restes de porcs sont très peu présents avec seulement quelques os. à l’inverse, les petits ruminants sont très bien représen- tés, particulièrement dans les niveaux de remplissage des fosses. On peut notam- ment mentionner un squelette quasi complet de chèvre ainsi que plusieurs restes appartenant à un capriné infantile.

Cet ensemble daté du tout début de La Tène ancienne est donc composé de deux types distincts de rejets. Le premier s’apparente à un dépôt de type semi-direct composé principalement de rejets d’assiettes. Il résulte d’une accumulation lente de matériel détritique, de type niveau de sol, favorisant le dépôt d’os de petite taille et de faible poids moyen appartenant principalement aux petites espèces domestiques (tabl. 12). Le squelette de chèvre, dont l’âge est estimé entre 16 et 24 mois, ainsi que les ossements du très jeune capriné illustrent quant à eux un rejet de type direct témoignant soit de rejets de cadavres soit de dépôts particu- liers. Il est exclu de les considérer comme des témoins de pratiques de boucherie à vocation exclusivement alimentaire.