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Les relations entre l’entreprise réseau et ses sous-traitants: évolution dynamique et complexe

B. Les conditions de la réussite des équipes de travail semi-autonome

2. Section 2 Le partenariat interorganisationnel: émergence des nouvelles formes de coordination

2.2. Les relations entre l’entreprise réseau et ses sous-traitants: évolution dynamique et complexe

Dés le début des années 1980, la sous-traitance occupe une place très importante dans les relations interentreprises sous l’effet des changements affectant le système productif. Le nouveau contexte économique et financière impose aux sous-traitants d’acquérir des compétences techniques, organisationnelles et financières très importantes (Mazaud, 2007 et 2006; Renou, 2004; Baudry, 2003). Pendant cette période, les sous-traitants se voient assignés un rôle de plus en plus important qui va jusqu’à la conception des produits et la coordination

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des activités de réseau (Gorgeu et Mathieu, 2005). Ces changements émergent de nouvelles configurations organisationnelles avec les donneurs d’ordres et leurs partenaires qui vont aboutir à une véritable révolution en matière des relations interorganisationnelles (Frigant, 2005).

Dans cette sous-section, nous présentons dans une première étape l’évolution de définition du concept de sous-traitance. Dans une seconde étape, nous proposons une grille de lecture des principaux changements de nature de la relation entre l’entreprise réseau et les sous-traitantes.

2.2.1. Définition du sous-traitant

La définition de la sous-traitance a connu une évolution importante dans la revue littérature durant les deux dernières décennies.

Une première définition de la sous-traitance a été établi par le Conseil Economique et Social le 21 mars 1973 qui définit cette nouvelle forme de relation interorganisationnelle comme « l’opération par laquelle une entreprise confie à une autre le soin d’exécuter pour elle et selon un cahier des charges préétabli une partie des actes de production ou de services dont elle conserve la responsabilité économique finale»12

. Altersohn (1992) considère que cette définition est très extensive, mais elle ignore le cas de plus en plus fréquent où le donneur d’ordres confie au sous-traitant par une délégation de production la totalité des tâches à effectuer. En outre, les spécifications ne font pas toujours l’objet d’un véritable cahier de charges. Dans ce sens, le document de l’Association Française de Normalisation (A.F.N.O.R) en novembre 1987 propose une définition plus complète dans la mesure où elle s’efforce de saisir dans son ensemble l’acte de production dont chaque séquence, de la conception à la maintenance du produit, peut être sous-traitée (Altersohn, 1992): « Les usages professionnels permettent de considérer comme activité de sous-traitance toutes les opérations concernant, pour un cycle de production déterminé, l’une ou plusieurs des opérations de conception, d’élaboration, de fabrication, de mise en œuvre ou de maintenance du produit, dont une entreprise dite donneur d’ordres, confie la réalisation à une entreprise dite sous-traitante ou preneuse d’ordres, tenue de se conformer exactement aux divers ou spécification techniques que ce donneur d’ordres arrête en dernier ressort. Ces spécifications techniques (….) peuvent tenir compte des avis ou propositions formulés par les sous-traitants (….), dés lors

12Altersohn (1992, p. 26)

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que le donneur d’ordre assume seule la responsabilité de la conception finale du produit » (Quivaux, 1992, p. 3). A partir de cette définition, l’AFNOR distingue deux formes différentes de sous-traitance :

La sous-traitance de capacité : « la sous-traitance est dite de capacité dés que l’entreprise donneuse d’ordres, équipée elle-même pour exécuter un produit, a recours à une autre entreprise soit occasionnellement, ,en raison d’une pointe momentanée dans sa production ou d’un incident technique, soit de façon plus ou moins habituelle parce que, désireuse de conserver une capacité propre dans une fabrication déterminée, elle entend utiliser des capacités de production disponibles à l’extérieur» (Quivaux, 1992, p. 3);

La sous-traitance de spécialité : « la sous-traitance est dite de spécialité dés lors que l’entreprise donneuse d’ordres décide de faire appel à un spécialiste disposant des équipements et de la compétence adaptés à ses besoins, parce qu’elle ne peut ou ne souhaite pas, pour des raisons relevant de sa stratégie propre » (Quivaux, 1992, p. 3).

La forte tendance vers les sous-traitances industrielles s’est accompagnée par une mutation profonde des modes de coordinations relationnelles avec l’entreprise réseau sous l’effet de l’accroissement de leurs capacités et l’élargissement de leurs périmètres d’activités (Duhautois et Perraudin, 2010).

2.2.2. L’évolution des différentes configurations des rôles des sous-traitants

Depuis la moitié des années 1980, le rôle de la sous-traitance et la nature des relations avec le donneur d’ordres ont connu de fortes mutations : le sous-traitant est passé d’un simple exécutant à un sous-traitant de statut mondial. Au cours de ces paragraphes, nous considérons que le statut du sous-traitant est passé par trois étapes: sous-traitance fordienne, sous-traitance partenaire et sous-traitance en chaîne.

2.2.2.1. La sous-traitance fordienne

Dans la mesure où la grande firme fordienne fabrique elle-même le produit considéré, elle devient un conteneur des ressources, des compétences et des connaissances qui doivent être mobilisées pour réaliser la production en interne. Elle n’aucunement besoin d’une aide extérieure pour réaliser la conception de la pièce sous-traitée, avec toutes spécifications techniques. Dans ces conditions, Billaudot et Julien (2003) notent que le degré du pouvoir du sous-traitant fordienne sur la conception du produit est presque nul. Le prix unitaire est le seul

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critère pris en compte pour retenir un sous-traitant; la qualité du produit n’est pas prise en compte. Dans une telle situation, Leborgne et Lipietz (1992) considèrent que la relation entre les donneurs d’ordres et les sous-traitants est une relation brève et rigide, elle repose essentiellement sur une logique marchande, au sein de laquelle le donneur d’ordres conserve la maîtrise totale de la conception du produit et transmet hiérarchiquement au sous-traitant, le minium d’informations nécessaires. Cette dépendance totale du sous-traitant a été qualifiée selon Baudry (1993) par la coordination autoritaire.

2.2.2.2. Le partenariat comme une nouvelle forme organisationnelle entre les ST et l’entreprise réseau

Cependant, la globalisation des marchés, l’intensification de la concurrence et la diffusion de nouvelles technologies techniques de gestion de la production, ne pouvaient pas rester sans influencer les relations entre les donneurs d’ordres et les sous-traitants (Rejeb et Ghorbel, 2004). Ainsi, la mise en œuvre des nouvelles pratiques organisationnelles reconnues qui leur permettront d’interagir, d’innover et de se développer en partenariat est une nécessité incontournable pour mieux répondre à ces nouveaux besoins (D’Amours et al., 1999). Ceci exige une interaction beaucoup plus étroite entre l’amont et l’aval des activités comme le mentionne Altersohn (1992). Par conséquent, le travail à façon, sous sa forme la plus traditionnelle, tend à diminuer au profit des relations plus complexes où le sous-traitant intervient davantage dans le processus de production jusqu'à participer à la conception du produit (Guerririe, 1996).

A l’image des changements, Billaudot et Genthon (2002) proposent une troisième forme de sous-traitance qui s’appelle la sous-traitance d’intelligence ou la sous-traitance partenariale. Cette dernière se définit comme une relation où « la conversation donne lieu à une activité menée en coopération par le producteur et l’utilisateur » (p. 71). Selon Renou (2004), la sous-traitance de partenariat est une forme qui combine les deux formes standards : la sous-traitance de capacité et la sous-traitance spécialisée. Dans la même perspective, l’auteur montre que la sous-traitance partenariale se caractérise par des éléments différents de celle de la sous-traitance standard. Le passage entre ces deux types de sous-traitance nécessite la réduction des nombres des sous-traitants en constituant un panel de sous-traitant du premier rang, en améliorant les qualités des produits, en allongeant la durée de l’engagement, en renouvelant la mode de livraison et, en impliquant les sous-traitants dans la conception de sous-ensemble.

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2.2.2.3. Le phénomène de la sous-traitance en chaîne

D’après son enquête sur l’industrie française, Paulin (1998) trouve que les dernières années ont été marquées par l’apparition d’une nouvelle forme de sous-traitance, la sous- traitance en chaîne, ou bien la sous-traitance de premier rang. L’auteur souligne que l’entreprise était obligée de minimiser le maximum ses coûts et en même temps augmenter la qualité finale des produits. Ceci nécessite une organisation très efficace au niveau interne et externe sur toutes les pièces composantes des produits (Maoti, 2001). Par conséquent, certaines entreprises industrielles ont renouvelé la stratégie de partenariat avec leurs sous- traitants en réduisant leurs nombres et en même temps ont créé un panel de ces derniers les plus compétitives qui s’appellent des sous-traitants de premier rang (Gorgeu et Mathieu, 2005). Ainsi, l’entreprise ne traite qu’avec le sous-traitant de premier rang, à charger pour ce dernier de confier à des sous-traitants de 2ème rang voire de 3ème rang, la partie du produit qu’il juge en dehors de sa compétence (Paulin, 1998). L’étude effectuée par Kechidi (2008) sur la firme Airbus montre que le nombre des sous-traitants d’Airbus est passé de 700 à environ 120 dans le début des années 1990.

Certains auteurs qualifient ce type de sous-traitant par « le sous-traitant de classe mondiale ». Ce dernier détient, selon D’Amours et al. (1999), un ensemble des compétences afin de réaliser ses fonctions: assister au développement du produit de ses clients, livrer des produits sans défaut, avoir un système de production qui livre des produits au bon moment et des connaissances qui sont utiles au client pour réduire son délai de livraison, créer et maintenir des relations avec tous les membres de la chaîne logistique, apprendre et s’adapter rapidement pour répondre aux besoins changeants de ses clients et finalement, obtenir un retour sur l’investissement qui contribue au succès des membres de la chaîne logistique. Cette proposition a été confirmée dans la thèse de Mazaud (2007) qui a constaté que la plupart des sous-traitants de premier rang de l’entreprise Airbus sont les plus importants au niveau mondial (leurs chiffres d’affaires sont supérieurs à 100 million d’euros). L’auteur a considère que ces sous-traitances sont sélectionnées selon un critère principal de coût nuancé par l’importance des compétences. Ces critères doivent être complétés par d’autres critères mais avec moins d’importance : la technologie, la capacité technique et productive, le prix, la capacité à améliorer le produit en continu, la qualité, l’aptitude à accepter les conditions imposées par Airbus et, la capacité de maîtrise d’œuvre (c’est-à-dire la capacité de manager leur propre supply chain). Par conséquent, les entreprises ont une grande

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tendance de réduire le niveau hiérarchique interne, en contre partie la hiérarchie externe a nettement augmenté via le classement des relations des sous-traitants (Fréry, 1997).

Toujours dans le même constat, celle des mutations profondes des modes des coordinations interorganisationnelles, la nouvelle littérature perçoit les prestataires des services logistiques (PSL) comme une composante majeure au service de l’entreprise réseau. Ce dernier a connu des évolutions importantes sous la pression des donneurs d’ordres et la rivalité concurrentielle liée à l'émergence d'un nouveau modèle d'organisation industrielle. Ceci sera l’objet des paragraphes suivants.

2.3. Les liens entre les prestataires des services logistiques et l’entreprise réseau :

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