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APPORTS ET DES LIMITES DES THÉORIES DE LA FIRME

2. Section 2 L’approche par l’économie fondée sur les compétences et les connaissances : une lecture par la coordination productive

2.2. Les théories de l’économie fondée sur les compétences : l’entreprise un nœud de compétences

2.2.1. Présentation des approches des compétences

Au cours de la décennie 90, on a assisté au sein du courant des sciences économiques et de gestion à une importante réflexion critique à l’encontre des théories des contrats, en particulier par les théories de l’économie fondée sur les compétences. Ces dernières se proposent de traiter de manière renouvelée les questions de nature, des frontières des firmes et de coopération interfirmes.

En se fondant sur l’analyse de Lakatos (1970), Freiling (2010) considère que les théories des compétences reposent sur les postulats suivants :

- Le subjectivisme : les individus (et les organisations) diffèrent dans leur nature, leurs savoirs, leurs aspirations, leurs possibilités; les états ne sont pas stables, mais sujets à des changements permanents ;

- L’incertitude radicale : la connaissance est largement incomplète. Non seulement il existe une connaissance dont les agents ont à peine conscience, qu’ils ne recherchent pas, mais également une connaissance qui est complètement inconnue des décideurs, et même une connaissance concernant des décisions qui n’existent pas encore ;

- L’individualisme méthodologique : les phénomènes d’organisation (comme la culture ou l’apprentissage organisationnel) existent, mais peuvent seulement être expliqués en les reliant aux actions des individus ;

- Le volontarisme modéré: les firmes sont encastrées dans leur marché et leur environnement social, mais pour chaque firme, la discrétion managériale existe et permet de modifier au moins en partie cet environnement en vue de buts propres à la firme ;

- L’homo agens : différent de l’homo oeconomicus, l’individu agit proactivement et cherche en permanence les occasions de se déplacer vers des positions plus favorables, dans le cadre d’un volontarisme managérial modéré ;

- L’effet du temps : quoi qu’il se produise dans le temps, l’ordre chronologique est décisif et chaque décision prise dans le passé a des implications pour la prise de décision postérieure, de sorte que les effets de verrouillage créent un engagement organisationnel, voire une dépendance de sentier.

Les travaux qui se situent dans les approches par les compétences sont très divers et ne constituent pas une théorie unifiée. Elles regroupent de fait un ensemble de propositions et de constructions qui ne sont pas toujours exactement homogènes. Azoulay et Weinstein (2000)

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considèrent que ces approches trouvent ses racines assez loin dans l’histoire des sciences économiques et des sciences de gestion et se sont construites sur des travaux hétéroclites partant des préoccupations diverses dans leurs styles et leurs référents théoriques. Ces travaux combinent, selon Ghozzi (2008), un ensemble de branche comme la « Resource-Based Vue » (Wernerfelt, 1984; Barney, 1986), la «théorie des compétences centrales » (Hamel et Prahalad, 1990), la « théorie des capacités dynamiques » (Teece et al., 1997), la « théorie évolutionniste » (Neslon et Winter, 1982). Dans une étude récente, Coriat et Weinstein (2010) considèrent que les origines des approches par les compétences sont les suivantes : l’approche behaviouriste de la firme (la théorie comportementale), la théorie des ressources et la théorie évolutionniste.

2.2.1.1. L’approche behaviouriste : la firme est une collection politique et collective

En se basant sur les propositions de Simon (1951) concernant la rationalité limitée et l’analyse de Berle et Means sur la divergence des intérêts, Cyert et March (1963) proposent une nouvelle approche dite théorie behaviouriste ou la théorie comportementale de la firme. Cette théorie privilégie la méthode inductive qui s’appuie sur l’observation et sur la description des processus de décision interne aux organisations (Charreaux et Pitol-Belin, 1992). La vision de cette approche s’est constituée en rejetant l’hypothèse de rationalité limitée substantielle et celle de maximisation des comportements. Favreau (2002) souligne que l’approche behaviouriste traite la firme sous deux volets : le volet politique (la firme est une coalition politique) et le volet dynamique (une coalition collective).

Le volet politique (la firme est une coalition politique): l’approche comportementale considère que la rationalité limitée des individus est liée à leurs capacités limitées dans la réception, le stockage et le traitement de l’information et dans la communication. Parallèlement, cette approche construit ses analyses en reprenant l’idée de Berle et Means (1932)selon laquelle la firme est un lieu des conflits de préférence et d’intérêt entre individus et groupes qu’il faut cependant arbitrer pour assurer la survie de l’organisation de chacun de ses membres est poussée à ses extrémités (Coriat et Weinstein, 2010). Plus précisément, l’approche comportementale insiste sur le fait que l’objectif général de la firme ne peut s’exprimer et s’affirmer qu’à travers une série de sous-objectifs. Dans ce cadre, Cyert et Marche ont identifié cinq objectifs: les objectifs de stocks, les objectifs de production, les

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objectifs de vente, les objectifs de part de marché et les objectifs des profits. Charreaux et Pitol-Belin (1992) soulignent que la réalisation de ces objectifs implique une concurrence entre différentes groupes, et par conséquent, un jeu de va-et-vient où les arbitrages ne sont jamais définis et subissent l’influence de pouvoir de groupe et de la structure hiérarchique à l’intérieur de la firme. Dans ce cadre, la firme représente comme une coalition interactive de différents groupes d’individus aux objectifs conflictuels. C’est une coalition politique plutôt qu’un entrepreneur comme le mentionne la théorie néo-classique (Favreau, 2002). Elle se définit ainsi comme lieu de négociations implicites ou ouverts où se distribuent des récompenses monétaires et non monétaires.

L’approche dynamique (la firme est une coalition politique) : étant posé que l’entreprise est dotée d’une structure complexe de gestion des informations, la théorie behaviouriste questionne sur les processus de prise de décision au sein de la firme. Pour répondre à cette question, l’analyse de cette approche accorde une importance aux procédures organisationnelles et aux routines mises en place pour rendre possible le processus de prise de décision. Ce processus s’effectue par des actions découlant de l’expérience acquise et des processus d’essai et erreurs, puis renforcer par la répétition, afin de repérer des comportements qui ont réussi dans le passé et à éviter ceux qui ont échoué (March, 1991) selon les séquences stimulus-réponse. Ces séquences vont naître, par apprentissage, des micro-régularités qui serviront de points d’appui dans les processus de prise dé décision. Il s’agit de choisir entre plusieurs options en utilisant des règles de décision qui permettent de les comparer en fonction de leurs résultats prévus par rapport à des objectifs antérieurs. De telles règles sont désignées par cette approche comme des routines qui relèvent strictement du traitement des informations et qui soulage le processus de décision. Ce courant prétend que le comportement de la firme est en fonction de ses routines qui dépendent des règles et des compétences développées dans l’organisation au cours de son histoire et de ses expériences (Bootz, 2001). La firme utilise ainsi ces routines pour faire face à son environnement, s’y adapter activement, l’éviter, chercher à le comprendre, à le changer ou le maîtriser. Elle apparaît comme un lieu de prise de décision qui dépend des interactions entre individus qui la composent (Favreau, 2002).

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2.2.1.2. Les théories des ressources : la firme comme lieu de création et de gestion des ressources et des compétences

La deuxième composante des approches des compétences est les approches des ressources qui sont à la base des théories servant la réflexion sur le concept davantage concurrentiel (Ghozzi, 2008). A travers une observation minutieuse des firmes britanniques des années 1950, Penrose (1959) a développé une théorie de la croissance des firmes (Sanchez, 2000). Elle questionne sur l’origine de la croissance de la firme. Pour l’auteur, la firme est définie comme un ensemble de ressources à la fois physiques et humaines gérées en vue de produire des biens et des services. Elle attribue à cette organisation interne une capacité à stimuler la croissance au moins équivalente à celle que l’on attribue habituellement aux incitations d’origines externes en termes d’exigences des clients ou de pression concurrentielle (Koeing, 1999). Par conséquent, la firme est plus qu’une unité administrative qui doit résoudre des problèmes et changer ses procédures pour gérer sa croissance. Elle est perçue selon l’analyse penroseinne comme une collection des ressources productives tirant de sa cohésion et de son organisation administrative (Mazaud, 2007). Penrose positionne ainsi le débat dans la sphère de production (Lazaric, 2000).

Une autre contribution majeure qui a profondément influencé l’approche par les compétences est celle du travail de Chandler (1962). L’auteur introduit pour la première fois dans l’analyse de gestion la notion « capacité organisationnelle ». Cette dernière revoie à un ensemble d’éléments physiques et de compétences humaines, à l’aptitude à les créer et à les renouveler ainsi qu’à les intégrer et les coordonner de telle façon que le tout devienne plus que la somme des parties (Chandler, 1992). Les travaux de Chandler ont permis de montrer que l’investissement dans ce type de capacités est perçu comme une clef du succès des compétitives. Dans ce cadre, les entreprises qui ont investi dans ces capacités ont constitué des positions de leadership durable sur le marché alors que celles qui ne les ont pas entreprises ont disparu (Krafft, 2004)

Néanmoins, l’héritage penroseinne et chandlerienne sera prolongé et développé par certains auteurs (Wernerfelt, 1984; Barney, 1991; Conner, 1991) au sein de ce qu’il est convenu d’appeler l’approche sur les ressources. Les premiers apports de cette grille théorique prennent leurs sources dans le fameux article de Wernerfelt (1984). L’auteur considère la firme comme un portefeuille de ressources qui lui est spécifique plutôt qu’un portefeuille de produits. Il privilégie la dimension interne dans l’analyse de la firme, ce qui constitue une

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rupture, comme l’indique Lamraque (2001) avec la conception traditionnelle, inspirée par le modèle S-C-P (structure-Conduite-Performance) proposée par Porter (1985), et fondant l’avantage concurrentiel sur le meilleur positionnement produit/marché. A l’instar de Wernerfelt (1984), Barney (1986) met en lumière ce qui permet à la firme de se distinguer des autres, et il met en place la théorie de l’avantage concurrentiel « soutenable ». Les conclusions de courant des ressources seront réinterprétées et développées par divers travaux afin de donner un contenu plus précis à la notion de compétence qui constitue un apport très important dans la mesure où elle propose de nouveaux outils analytiques susceptibles d’expliquer certaines réflexions qui ont été ignorées dans l’analyse économique standard comme l’explication des écarts de performances des entreprises évoluant au sein d’un même environnement et d’identifier les facteurs qui entretiennent ces différences comme : pourquoi certaines firmes sont-elles durablement plus performantes que d’autres ? Dans ce cadre, deux typologies de compétences ont été proposées dans l’analyse économique:

Les compétences clé, qui ont été introduites, par Prahalad et Hamel (1990). Elles sont définies comme «the collective learning in the organization, especially how to coordinate diverse production skills and intergrate multiple streams of technologies» (Prahalad et Hamel, 1990, p. 82). Ces compétences permettent d’expliquer en quoi la possession de compétences distinctives peut être une source d’avantage concurrentiel significative. Pour que ces ressources apportent un avantage concurrentiel : ils doivent respecter les critères dits « VRIS » : Valorisables, Rares, difficilement Imitables et imparfaitement Substituables pour procurer à la firme un avantage concurrentiel soutenable (Ghozzi, 2008). Cette vision a été, cependant, critiquée par Granstrand et al. (1997) dans une étude empirique sur 400 entreprises. Les auteurs trouvent que le concept des compétences clés est trop restrictif. Ils constatent que la plupart des entreprises étudiées sont des entreprises multi-technologies. Les auteurs constatent que les entreprises qui maîtrisent, souvent, un spectre de compétences bien plus large que ce qu'elles produisent effectivement. Ainsi, les périmètres des compétences touchent un spectre plus large de compétences que ce que donne à voir la firme. Ces firmes auraient tendance à se concentrer sur ce qu’ils nomment les compétences de base ou compétences distribuées. Renou (2004, p. 158-159) fait une remarque du même estimant que : « En raisonnant uniquement en terme de « compétence clés » et en négligeant les « complexités de base », l’approche fondée sur les compétences risque de laisser dans l’ombre une caractéristique fondamentale ses systèmes productifs actuels : leur interdépendance systémique »

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Les capacités dynamiques : elles sont introduites pour la première fois par Teece et Pisano (1994). Ces concepts ont connu une forte actualisation dans la revue littérature (Teece et al., 1997; Teece, 2007). Elles constituent une voie de recherche prometteuse en management stratégique (Altintas, 2012). En effet, Arrègle (2006, p. 245) définit les capacités dynamiques comme des capacités de l’entreprise pour renouveler, augmenter, et adapter ses compétences stratégiques. Son principal objet de recherche concerne la construction et la régénération d’un avantage concurrentiel pour s’y adapter dans des régimes de changement rapide. Elles abordent la question de la création des ressources à partir des processus d’apprentissage et l’accumulation d’actifs organisationnels ou immatériels mis en ouvre dans la firme (Koeing, 1999). Dans ce contexte, la firme est reconnue ainsi comme un système d’offre fondé sur des ressources tangibles et intangibles idiosyncratiques et inimitables qu’il est essentiel de transformer en compétences fonctionnelles et interfonctionnelles pour réaliser des avantages concurrentiels durables suivant la terminologie de Charles-Pauvers et Schieb- Bienfait (2009).

Ces typologies se séparent et content sur certains aspects. Elles divergent sur la nature des ressources. De ce point de vue, l’approche des compétences dynamiques considère que les ressources résultent tout à la fois de stimulations exogènes et de processus endogènes, alors que les partisants des compétences clés mettent l’accent seulement sur la dimension exogène. En revanche, elles partagent l’idée que les firmes sont profondément hétérogènes en raison des ressources qu’elles peuvent mobiliser et qu’ils sont sources dans leurs avantages concurrentiels décisifs.

Pour conclure, les approches des ressources contribueront de manière décisive à déplacer encore le centre de l’analyse en insistant sur la nécessité de prendre en considération le fait que la firme n’est pas un processus d’information mais aussi et tout autant un lieu de déploiement de compétences spécifiques (Coriat et Weinstein, 2010). L’objectif de ces travaux est de montrer que la réalisation des avantages concurrentiels durables et significatifs par les firmes passe par la mobilisation des actifs et des ressources « stratégiques » et en les combinant au service de son offre et de ses clients en faisant appel à des processus organisationnels. Pour atteindre cet objectif, la firme doit proposer une offre distincte de celles des ses concurrents ou identiques mais à un prix inférieur (Arrègle, 2006).

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2.2.1.3. La théorie évolutionniste : la firme comme dépositaire des routines

La troisième composante des approches des compétences est la théorie évolutionniste qui va prolonger cognitivement l’analyse de penrosienne (Lazarik, 2000). Cette théorie se fonde sur les travaux processeurs de Nelson et Winter (1982) dans leur ouvrage « An Evolutionary Theory of Economic Change » en se référant à l’ouvrage Organisations de March et Simion (1963) et en s’appuyant aussi sur une expérience professionnelle de plusieurs années dans le Rand Corporation39 (Lazaric, 2010). L’approche évolutionniste a adopté le postulat proposé par Simon selon laquelle les agents économiques sont dotés d’une rationalité limitée. De même, elle a substitué le principe de maximisation, propre à la théorie néo-classique, par le principe de satisfaction.

Dans le même sens, la théorie évolutionniste adopte l’hypothèse ultra-individualiste qui envisage la firme comme une collection d’individus en interaction et dotés des caractéristiques cognitives qui leurs sont propre (Loufrani-Fedida, 2006) sur laquelle elle questionne sur la cohérence des ces individus au sein de la firme. Sur ce point, l’approche évolutionniste nous enseigne que la résolution de ce problème ne doit pas être faite seulement par les échanges des gestions informationnelles, elle doit être assurée par la création des compétences exprimées par les routines acquises par les agents au cours de leurs interactions (Coriat et Weinstein, 1995). Le terme de routine est défini selon Nelson et Winter comme «If may refer to a repetitive pattern of activity in an entire organization, to an individual skill, or, as an adjective, to the smooth uneventful effectiveness of such an organizational or individual performance» (p. 97). Les routines permettent la structuration et l’intégration de la connaissance spécialisée sans besoin de la communiquer de telle sorte qu’elles rendent possibles des modes sophistiqués de coordination grâce à l’utilisation des modèles existants et éprouvés (Grant, 1996). Perçue sous cet angle, la firme reconnue comme un dépositaire de routines dans lequel les agents puissent en vue de choisir une réponse adéquate à la situation à laquelle la firme est confrontée à son environnement changeant (Sebai, 2006). Dans leurs analyses, Nelson et Winter distinguent des routines individuelles ou savoir faire (skill) de routines organisationnelles. Ces derniers sont le pilier des mémoires individuelles, comme le considèrent Arena et Lazaric (2003), résultent des modèles

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Rand Corporation avait pour vocation d’observer les grands programmes technologiques militaires et civils et était en contact étroit avec la Carnegie School. Grâce à cette expérience que les auteurs ont été amenés à comprendre la nature de l’incertitude technologique radicale, inhérente à toute création.

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d’interactions ; elles constituent des solutions efficaces à des problèmes particuliers. Elles présentent un caractère régulier et prévisible (Nelson et Winter, 1982). Aussi, Lazaric (2000) a qualifié ces routines comme des compétences spécifiques susceptibles de produire de rentes lorsqu’elles sont adaptées à l’environnement dans lequel s’insèrent et sur la base des ces compétences que les deux firmes se distinguent (Coriat et Weinstein, 1995).

Pour ces auteurs, l’ensemble des routines constitue une forme de « mémoire organisationnelle » (Girod, 1995) définie comme la routinisation de l’activité, et par conséquent, un principal « lieu » du savoir organisationnel (Bessy, 2008). Ce savoir est considéré selon Chouaieb (2010) comme les seuls et uniques éléments les plus importants dans tout succès ou échec de l’organisation. Elle constitue « la compétence foncière » selon le paradigme évolutionniste (Cohendet, 1998). De leur côté, Tangut (1996) perçoit la mémoire organisationnelle comme une assurance à la cohérence et à la stabilité de l’organisation puisque chacun dans l’organisation interprétera correctement, c'est-à-dire de façon routinière, les messages de l’environnement et fournira les réponses conformes aux conceptions organisationnelles.

A cet égard, les routines apparaissent comme un instrument efficace de coordination. Nelson et Winter distinguent deux principaux types de routine. Les routines statique sont exécutées mécaniquement et régissent les opérations courantes. Les routines dynamiques cherchent à améliorer les routines simples au cours d’un processus de recherche et débouchent sur de véritables innovations (Bessy, 2008). Ces compétences résultent d’un processus d’apprentissage.

Sur ce sujet, la littérature est riche, fragmentée et largement débattue (Leroy, 1998). Ce concept revêt encore un caractère stratégique dans l’approche par les compétences (Lambert et Ouédraogo, 2006; Tebourbi et Said, 2010). Il a longtemps fait référence au processus d’acquisition des compétences individuelles (Koeing, 2006), c'est-à-dire la façon dont un individu acquiert des connaissances et la manière dont ces connaissances modifient son comportement. Il faudra attendre les travaux de March et Simion (1958) et Cyert et March (1963) pour qu’il soit transposé à l’organisation (Fillol, 2006). Les auteurs introduisent ce concept dans leurs analyses afin d’expliquer la façon dont une organisation, en tant que système de traitement d’information, acquiert, stocke et utilise les informations provenant de l’environnement. Ce concept est prolongé par la théorie évolutionniste, en particulier par Nelson et Winter (1982), afin de comprendre comment se construit les capacités productives

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des firmes. Dans les organisations complexes, les auteurs considèrent que les caractéristiques des capacités organisationnelles sont directement affectées par les caractéristiques des routines individuelles mais les processus d’apprentissage organisationnel ne se résument pas à la somme des apprentissages individuels qui se produisent dans une organisation.

Il est en effet très remarquable que la conception de la nature de la firme par une vision dynamique est essentielle dans l’analyse évolutionniste par l’évolution et le changement des routines de la firme suivant une trajectoire continuée illustrée par le sentier de dépendance. Ce dernier fournit un mécanisme clé de la transformation endogène de la firme au cours du temps dans la mesure où il explique que le répertoire actuel des routines de l’orgnisaton est le produit du répertoire antérieur (Bessy, 2008).

D’une façon générale, la théorie évolutionniste, et en mobilisant ces deux notions conjointes d’apprentissage et de routines, contribue en effet de manière décisive à asseoir l’idée que la firme n’est pas seulement un lieu d’échange informationnel, mais aussi une entité

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