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Bilan de l’activité du Contrôleur général des lieux de privation de liberté en 2016

1. Les relations avec les pouvoirs publics et les autres personnes morales

1.5 Relations internationales

L’année 2016 a été marquée par des événements importants relatifs à la prévention de la torture en France et dans le monde.

Entré en vigueur le 22 juin 2006, le Protocole facultatif se rapportant à la Conven-tion contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (OPCAT) a fêté ses dix ans. Traité original, il établit une relation triangulaire entre les États, le mécanisme national de prévention (MNP) qui exerce un contrôle interne des lieux de privation de liberté, et le Sous-comité pour la prévention de la torture (SPT) qui exerce un contrôle externe. Si ce double niveau de contrôle a pu susciter des hési-tations lors de l’adoption du traité, il est dorénavant présenté comme un modèle parti-culièrement opérationnel : en 2016, 83 pays ont ratifié l’OPCAT, 63 pays ont désigné un mécanisme national de prévention et le SPT a conduit 51 visites à travers le monde.

L’Association pour la prévention de la torture (APT), qui s’est mobilisée depuis 1976 pour qu’un tel traité international soit créé, a souhaité célébrer cet anniversaire. Le CGLPL a contribué à sa campagne OPCAT +10, visant à promouvoir des avancées obtenues à travers le monde par les MNP, au travers de leurs visites préventives ou leur mobilisation pour obtenir des avancées législatives pour garantir le respect des droits des personnes enfermées.

La Contrôleure générale a marqué son engagement en participant au lancement de l’étude « La prévention de la torture : ça marche ! » conduite pendant trois ans par

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vingt chercheurs, portant sur les trente dernières années dans seize pays et analysant les facteurs conduisant à réduire le recours à la torture. Des acteurs internationaux tels que la présidente et le secrétaire général de l’APT, un chercheur reconnu dans le domaine des droits de l’homme, et le secrétaire général du Comité des Nations Unies contre la torture faisaient également partie de l’événement.

Au niveau européen, une réunion annuelle des MNP de la région OSCE a été organisée en partenariat avec l’APT, afin de marquer cet anniversaire particulier.

Elle a donné l’occasion aux MNP anciens ou récemment constitués, de se réunir et d’établir un premier bilan de leurs activités, de partager leurs expériences, et se consulter mutuellement sur les défis restants.

Par ailleurs, le contrôle général s’est impliqué dans un colloque organisé par l’ins-tance nationale de prévention de la torture en Tunisie (INPT), sur les bonnes pratiques et défis liés à la mise en œuvre de l’OPCAT, organisé à la date marquant l’anniversaire de l’adoption de l’OPCAT par l’Assemblée générale des Nations Unies. Ce colloque avait pour objet d’échanger autour des bonnes pratiques, et de formaliser un cadre de collaboration entre MNP.

L’année 2016 a également été marquée par le septième examen périodique de la France par le Comité des Nations Unies contre la torture (CAT). Ce dernier examine tous les quatre ans la mise en œuvre effective de la Convention des Nations Unies contre la torture par les Etats-membres, sur la base d’un dialogue avec l’État, et d’échanges avec les institutions nationales des droits de l’homme et des organisations issues de la société civile. En tant que MNP, le CGLPL est désormais un interlocuteur privilégié du Comité. En conséquence, le contrôle général lui a transmis un rapport établi sur la base du dialogue existant entre la France et le Comité, afin d’apporter son éclairage aux questions soulevées par le Comité dans son domaine de compétence, et de mettre en lumière de nouveaux sujets problématiques au regard de l’application de la Convention contre la torture.

Lors de la cinquante-septième session du Comité, en avril 2016, la Contrôleure géné-rale a été auditionnée conjointement avec la CNCDH par le Comité contre la torture lors d’une session plénière privée. Elle a décidé de mettre en avant les sujets suivants : – l’importance de la surpopulation carcérale et ses conséquences sur les droits

fonda-mentaux des personnes détenues ;

– les incertitudes liées à la prise en charge de la radicalisation islamiste dans les établis-sements pénitentiaires ;

– l’usage des mesures d’isolement et de contention dans les hôpitaux psychiatriques.

Au terme de ce dialogue et de ces échanges, le Comité a salué dans ses observations finales le renforcement des prérogatives du CGLPL par la loi du 26 mai 2014. De plus, il a recommandé à l’État de mettre en œuvre les recommandations du CGLPL ainsi que

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tous les moyens permettant aux personnes privées de liberté de pouvoir adresser leurs requêtes à ses services, sans craindre des représailles.

Enfin, le Comité s’est appuyé sur nombre des constats du CGLPL pour demander à la France d’apporter des améliorations dans ses principaux domaines d’intervention.

Concernant les conditions de détention, la surpopulation carcérale et ses consé-quences, les violences de la part des personnels de surveillance, les difficultés rencontrées pour porter plainte contre ces violences, les facteurs contribuant au risque suicidaire, les problèmes d’accès aux soins psychiatriques pour les personnes détenues, la persistance du recours aux fouilles intégrales de manière trop systématique, sont au cœur des préoc-cupations du Comité.

Le Comité a fait ses siennes les recommandations du contrôle général relatives aux établissements psychiatriques, sujet qui, jusqu’à présent, ne faisait pas partie de son dialogue avec la France. Des conditions matérielles insatisfaisantes, un recours trop fréquent à la mise à l’isolement ainsi qu’aux moyens de contention mécaniques, la varia-bilité des critères conduisant à recourir à de telles pratiques et leur manque de traçabi-lité, ainsi que la méconnaissance par les patients de leurs droits et des voies de recours sont dorénavant cœur de ses préoccupations. Le Comité a en particulier demandé à ce que les recommandations du contrôle général concernant le centre psychothérapique de l’Ain soient mises en œuvre de façon urgente.

Au cours de l’année 2016, le contrôle général s’est investi dans plusieurs actions de formation. Tout d’abord, plusieurs membres de l’équipe de l’APT, qui offre des conseils stratégiques et méthodologiques aux MNP, ont pu prendre part à des visites d’établisse-ments pénitentiaires et d’hôpitaux psychiatriques afin d’observer la méthode de travail de l’institution. Cette participation a été l’occasion d’échanges avec les équipes.

Le CGLPL a également participé à la première université d’été des MNP fran-cophones organisée par l’APT et l’institut des droits de l’homme de Lyon. Destinée uniquement aux MNP francophones, elle s’intitulait « Stratégies et méthodologie de monitoring de la détention par la police » et s’est adressée à une vingtaine de parti-cipants venant de MNP ou d’organisations de défense des droits de l’homme. Des experts français et internationaux faisaient partie des intervenants, et des membres du CGLPL y ont assisté, tandis qu’un contrôleur faisait également partie des formateurs.

En 2017, le CGLPL s’est engagé à accueillir des représentant de MNP ayant pris part à l’université d’été dans ses visites de lieux de privation de liberté.

Sur la question des mineurs privés de liberté, le CGLPL a contribué au lancement du guide pratique « Monitoring des lieux où des enfants sont privés de liberté », dans le cadre du projet Children’s rights behind bars, coordonné par Défense des Enfants International (DEI) Belgique. Au niveau européen, le CGLPL a été invité à partager son expérience lors de la conférence organisée à Bruxelles pour présenter le guide. Au

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niveau national, le guide a été l’objet d’une réunion et d’une table ronde organisées par DEI France dans les locaux du contrôle général, avec des représentants du ministère de la justice (PJJ, administration pénitentiaire, cabinet), du Défenseur des droits, des avocats, des représentants d’associations et d’organisations internationales. Une contrô-leure a par ailleurs participé au cours d’été relatif aux droits de l’enfant et à la justice pénale des mineurs, organisé à l’université de Moncton au Canada par le Défenseur des enfants et de la jeunesse du Nouveau-Brunswick.

Le CGLPL s’est également investi dans le Symposium Jean-Jacques Gautier organisé chaque année par l’APT et concernant une population vulnérable. Cette année, les visites d’établissements psychiatriques étaient le thème du Symposium, qui a réuni quinze repré-sentants de MNP et d’autres organismes investis dans la prévention de la torture, tels que des experts du SPT et du Comité européen pour la prévention de la torture.

Le CGLPL a participé à une action de formation organisée par le Conseil de l’Eu-rope à destination de son homologue kazakhe et a reçu plusieurs délégations.

Au niveau européen, la Contrôleure générale a souhaité rencontrer le Président de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) afin d’échanger sur les sujets de préoccupations du CGLPL et de la Cour. Le CGLPL a parallèlement initié un travail de réflexion sur le suivi de l’exécution des arrêts de la CEDH. Cette réflexion fait notam-ment suite à la Conférence de Bruxelles relative à la mise en œuvre de la Convention européenne des droits de l’homme et à l’exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, qui vise à renforcer l’engagement des États et des institutions nationales ayant une compétence en droits de l’homme dans le processus d’exécution des arrêts de la CEDH. Le CGLPL a dans le cadre de cette réflexion organisé une réunion avec le ministère des affaires étrangères, rencontré la CNCDH et participé à une journée de travail à l’Assemblée nationale, organisée par la délégation française à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe.

Par ailleurs, le CGLPL et la CNCDH ont soumis à la Cour des observations écrites au titre des dispositions de l’article 36 § 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 44 du règlement de la Cour dans le cadre des affaire F.R. contre France (req. n° 12792/15) et trois autres requêtes introduites le 10 mars 2015 et J.M.B. contre France (req. n° 9671/15) et neuf autres requêtes. Cette intervention avait notamment pour objet de soutenir que les conditions matérielles de détention dans les établissements pénitentiaires concernés par les recours sont symptomatiques d’un problème récurrent en France : la surpopulation carcérale, dont les effets délétères emportent un risque de violation de l’article 3 de la Convention.

Le CGLPL a également participé à une recherche conduite par le Ludwig Boltz-mann Institute sur le renforcement et la mise en œuvre du droit européen et la coopéra-tion entre les MNP et les institucoopéra-tions judiciaires, et pour laquelle deux conférences ont été organisées à Vienne.

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L’impact de la prise en charge de la radicalisation islamiste sur les droits fonda-mentaux des personnes détenues est un sujet pour lequel l’expertise du CGLPL est prisée, suite à ses deux rapports sur ce thème. Aussi, plusieurs rencontres ont été orga-nisées autour de ce thème, notamment une table ronde organisée à Londres par le Human Rights Implementation Center et Justice Initiative, à laquelle des représen-tants de MNP, le SPT et des universitaires ont participé, une visite de représenreprésen-tants de Think-Tanks venant du Maghreb et Moyen Orient, ou de représentant institutionnels européens s’intéressant de près à la question.

Enfin, le CGLPL a développé ses liens avec des organisations internationales. Il est notamment intervenu lors de la conférence régionale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) relative à la santé en milieu carcéral, sur le sujet des décès en détention.

Etaient présents des représentants étatiques d’une trentaine de pays, des universitaires, des représentants d’organisations internationales telles que le Comité international de la Croix-Rouge, Dignity, le Comité européen pour la prévention de la torture, Penal Reform International, etc.

Le contrôle général a également participé à une réunion de travail organisée par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Paris sur la question de l’identifi-cation et de la prise en charge des personnes âgées en détention, en présence d’experts internationaux, d’universitaires, de représentants d’administrations pénitentiaires et du Comité pour la prévention de la torture.

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